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CHAPITRE II: Zone d'étude et Méthodologie

II. MATERIELS ET METHODES

II.5. Extractions séquentielles

Les éléments traces sont généralement associés sous différentes formes dans diverses composantes sédimentaires. La nature de telles associations est communément appelé « spéciation ». Dans la littérature différentes techniques de spéciation sont proposées : la mesure directe par EXAFS (Manceau et al., 1992 et 1996 ; Calmano et al., 2001), la séparation physique (Shuman, 1979 ; Ducaroir et Lamy, 1995), l’extraction séquentielle (McLaren et Crawford, 1973a ; Tessier et al., 1979 ; Chang et al., 1984 ; Shuman, 1985 ; Miller et al., 1986 ; Leleyter et Probst, 1999a ; Dollar et al., 2001 ; Hernandez et al., 2003). Les deux premières méthodes s’appliquent généralement pour des échantillons fortement concentrés en éléments traces et présentent des limites de détection relativement élevées (Gomez et Desenfants, 1989 ; Juillot, 1998). Pour ce qui concerne l’extraction séquentielle, généralement, les différents protocoles proposés dans la littérature, dont l’un des plus célèbres est celui de Tessier et al. (1979), n’ont pas été calibrés pour s’assurer de la sélectivité et de l’efficacité de chaque étape d’extraction, de la répétabilité et de la reproductibilité de la méthode. A notre connaissance aujourd’hui seule la méthode d’extraction séquentielle mise au point par Leleyter et Probst (1999a) souligne l’efficacité et la sélectivité de chaque étape, mais aussi la répétabilité (<6%) et la reproductibilité de la méthode. Cette méthode d’extraction séquentielle a donc été appliquée à nos échantillons pour évaluer la distribution des PHE dans les différentes phases sédimentaires des cours d’eau de la Gascogne.

Le principe de cette méthode est basé sur une extraction en sept étapes successives caractérisées par un gradient décroissant de pH : la fraction soluble à l’eau, la fraction échangeable, la fraction acido-soluble, la fraction réduction des oxydes de Mn, la fraction réduction des oxydes de Fe amorphes, la fraction réduction des oxydes de Fe cristallins, et la fraction oxydable. Dans chaque savillex sont placés environ 1g de sédiment auquel on ajoute un réactif adapté à chaque étape, puis l’ensemble est soumis à agitation constante pendant un certain temps (voir Annexe I pour les différents réactifs utilisés, le pH et le temps nécessaires pour chaque étape). A chaque phase la solution est filtrée à l’aide d’un filtre de porosité 0,45 µm, pour séparer le lessivât du résidu qui est rincé deux fois avec 10 ml d’eau déionisée UHP. Le lessivât est destiné à l’ICP-MS pour analyse tandis que le résidu est séché à 40°C pour éviter d’une part, la dilution du solvant suivant et d’autre part, tout développement bactériologique. Il est déconseillé de sécher l’échantillon au delà de 40°C car des risques de transformation du réseau des minéraux argileux pourrait survenir (Rapin et al., 1986). Le résidu séché subit un nouvel ajout de réactif de la phase suivante, et ainsi de suite jusqu’au

terme de la dernière étape où le résidu final est séché et subi une attaque biacide. La phase soluble à l’eau permet d’extraire les colloïdes de taille inférieure à 0,45 µm qui pourraient influencer la quantité de cations désorbés par l’étape échangeable. Généralement, la proportion d’éléments lessivés par cette étape est négligeable sauf en cas de présence d’évaporite.

La phase échangeable a pour but d’extraire les cations adsorbés sur les sites à charge permanente, notamment sur les minéraux argileux. Ces derniers font l’objet de nombreuses substitutions à l’intérieur de leur réseau du fait de leur structure en feuillet. Ces réactions occasionnent généralement un déficit de charge positive à la surface de ces minéraux où des cations vont ensuite se fixer pour combler et neutraliser ces sites à charge permanente. Le réactif utilisé pour extraire ces cations adsorbés, principalement des complexes de sphère externe, est le nitrate de magnésium qui a la particularité d’être bon échangeur sans apport d’anion complexant. En effet les cations qui forment des complexes de sphère interne sont difficilement désorbables et sont par conséquent considérés comme résiduels. Les réactions de la phase échangeable se déroulent à pH 5 car à ce pH acide on est certain de désorber les cations échangeables sans dissoudre d’autres fractions de l’échantillon, mais également de réduire considérablement d’éventuelles réadsorptions des éléments lessivés.

L’acido-soluble est la phase qui contribue à la dissolution des carbonates généralement reconnus pour leur affinité avec certains PHE tels que le cadmium (voir paragraphe plus haut). Le réactif le plus couramment utilisé pour cette réaction est un mélange d’acétate de sodium et d’acide acétique, à pH 4,5. Selon Leleyter et Probst (1999) cette étape est sélective car n’engendre pas la destruction des autres phases d’adsorption.

Les phases réductibles conduisent à la mise en solution des PHE associés aux minéraux réductibles des sédiments (notamment les oxydes de fer et de manganèse). La réduction de l’oxyde de manganèse s’est faite à l’aide de chlorure d’hydroxylammonium, tandis que celle des oxydes de fer a été possible grâce à un mélange d’acide oxalique et d’oxalate d’ammonium pour les formes cristallines, et un autre mélange (acide oxalique + d’oxalate d’ammonium + acide ascorbique) pour les formes amorphes.

La phase oxydable est caractérisée par une réaction d’oxydoréduction qui permet de libérer les PHE associés aux composés oxydables notamment la matière organique qui est reconnue pour son pouvoir complexant à l’égard des polluants métalliques (paragraphe précédent). Les réactifs utilisés pour cette étape sont l’eau oxygénée pour la destruction de la matière organique, l’acide nitrique qui permet d’éviter une reprécipitation des hydroxydes

métalliques, et enfin l’acétate d’ammonium pour empêcher l’adsorption des métaux extraits sur les sédiments oxydés. Selon Leleyter (1998), ces réactifs sont efficaces à 76% sur des feuilles entières et à 78% sur de l’humus. Cependant, elle considère cette étape efficace pour des études comme la notre, car malgré la destruction partielle de la matière organique, les liaisons retenant les métaux sont les premières à être détruites.

La minéralisation de la fraction résiduelle permet de libérer les éléments fortement liés au réseau et ceux ayant pénétrés à l’intérieur du réseau qui est généralement insensible aux agressions chimiques lors des sept étapes décrites ci-dessus. Nous avons utilisé l’attaque biacide décrite plus haut pour cette solubilisation du résidu. La somme des éléments extraits au cours des 6 premières étapes constitue la fraction non-résiduelle.