• Aucun résultat trouvé

2 Etat de l’art des méthodes flash

2.6 L’estimateur de la méthode flash 1D avec pertes

2.6.3 Extension du modèle

L’expression analytique du modèle (Eq.2.9) est bien adaptée à des données simulées. Face à des données réelles, un modèle de ce type peut présenter des biais car il suppose notamment deux choses :

1. L’instant initial du modèle correspond parfaitement à l’instant initial de l’expérience. Or cela n’est bien sur pas le cas puisque l’excitation réelle n’est pas impulsionnelle11 et une

synchronisation précise entre l’excitation thermique et les appareils de mesure est difficile à réaliser.

2. Les observables sont calculés à partir des mesures de température en leur retranchant la valeur de la température initiale qui est mal connue. Même si celle-ci est calculée en moyennant un grand nombre de mesures, il peut être utile de laisser à l’algorithme la possibilité d’ajuster cette valeur.

On enrichit ainsi le modèle avec l’instant initial t0et la correction C sur la température initiale :

T(z,t)= C + 2Tlim X k=1 ukZk(z) u2 k+ H2+ 2He−τz u2 k(t−t0) (2.11)

Il est intéressant d’utiliser maintenant la méthode MAP (§2.6 p28) pour pouvoir intégrer de l’information a priori. On peut par exemple spécifier à la méthode MAP que les paramètres t0 et C ont les valeurs a priori et les écarts-types a priori suivants :

e

t0 = 0 s ± σtprior0 = 0, 1 s

e

C = 0 °C ± σCprior = 10 σm = 0, 02 °C

Les mesures sont réalisées par thermographie infrarouge. Le bruit de mesure σm vaut 0, 002 °C et l’énergie injectée au matériau est telle que Tlim vaut 0, 04 °C.

Comme le montre le tableau (Tab.2.2), les effets de t0 et C sur στz sont sensibles. Dans le cas d’un matériau isolant en face avant, στz augmente de 20 % en ajoutant le paramètre t0, et de 80 % en ajoutant C et t0. En face arrière, c’est l’ajout du paramètre t0 qui dégrade fortement l’estimation de τz puisque son écart-type augmente de 240 %. L’augmentation de l’écart-type est systématique et vaut pour tous les paramètres. En ajoutant des degrés de liberté au modèle, on augmente la variance mais on améliore les résidus.

Dans le cas de la méthode flash face-arrière, le fait d’intégrer le paramètre t0 augmente considérablement στz ce qui signifie que t0 et τz sont deux paramètres assez liés puisque si leurs sensibilités étaient indépendantes, ajouter t0 n’aurait pas modifié στz. En face arrière, on constate aussi qu’il est difficile d’estimer t0. Son écart-type théorique (0, 27 s et 0, 32 s suivant la situation) est 3 fois supérieur à l’écart-type a priori σt0. Cela signifie qu’en intégrant l’informa-tion a priori dans la méthode MAP, l’écart-type de tous les paramètres et notamment τz devrait diminuer significativement. Cela est effectivement le cas comme le montrent les valeurs entre pa-renthèses du tableau. On divise ainsi par plus de 2 l’écart-type de τz et par 10 l’écart-type de t0.

Param- Ecart-type Ajout de t0 Ajout de C et t0

ètres initial

Matériau isolant (Face avant)

τz 2, 72 % 3, 37 % (3, 37) 4, 86 % (4, 85) [biais = 0, 28 %] Tlim 1, 57 % 2, 16 % (2, 16) 2, 83 % (2, 82) [biais = 7, 12 %] H 16, 8 % 25, 0 % (25, 0) 91, 5 % (91, 0) [biais = 0, 15 %] t0 0, 0014 s (0, 0014) 0, 0014 s (0, 0014) [biais = 0, 000 s]

C 0, 0016 °C (0, 0016) [biais = 0, 0001 °C]

Matériau isolant (Face arrière)

τz 2, 28 % 7, 17 % (3, 27) 7, 56 % (3, 52) [biais = 1, 97 %] Tlim 3, 44 % 5, 86 % (3, 81) 6, 60 % (3, 81) [biais = 19, 8 %] H 55, 0 % 89, 7 % (60, 2) 91, 9 % (62, 8) [biais = 1, 51 %] t0 0, 27 s (0, 094) 0, 32 s (0, 096) [biais = 0, 091 s]

C 0, 00045 °C (0, 00039) [biais = 0, 0001 °C]

Matériau conducteur (Face avant) τz 2, 72 % 3, 11 % (3, 11) 6, 06 % (5, 99) Tlim 0, 83 % 0, 83 % (0, 83) 8, 22 % (8, 08) H 2, 06 % 2, 88 % (2, 88) 17, 0 % (16, 7) t0 0, 0040 s (0, 0040) 0, 0086 s (0, 0085)

C 0, 0034 °C (0, 0033)

Matériau conducteur (Face arrière) τz 2, 98 % 7, 32 % (6, 74) 7, 56 % (6, 79) Tlim 8, 58 % 0, 96 % (0, 95) 3, 96 % (3, 67) H 4, 57 % 8, 65 % (8, 06) 9, 27 % (9, 07) t0 0, 047 s (0, 043) 0, 061 s (0, 052)

C 0, 0015 °C (0, 0015)

Tableau 2.2Ecarts-types théoriques de la méthode flash avec le modèle étendu dans lequel on a ajouté l’erreur de synchronisation t0seule dans un premier temps, puis l’erreur d’offset C. Les valeurs entre parenthèses correspondent aux valeurs obtenues avec la méthode MAP qui prend en compte l’information a priori. Toutes les valeurs du tableau ont été calculées à partir de l’expression (Eq.1.55 p31). Les valeurs entre crochets correspondent à l’écart-type du biais, calculé avec l’expression (Eq.1.63 p34).

Dans certains cas, le gain apporté par la méthode MAP est minime et la méthode MLE pourrait être utilisé. En effet, l’écart-type de t0 est très inférieur à l’écart-type a priori : les observables fournissent tellement d’information que l’information a priori sur t0 et C n’a pas d’effet significatif.

On pourrait également corriger l’éventuelle dérive temporelle des appareils de mesure en ajoutant un terme supplémentaire. Cela est présenté dans le cadre de la méthode flash 3D (§5.4.5 p139).

On vient de voir que la méthode MAP permet de réduire l’incertitude sur les estimations. Cependant, en contrepartie, elle introduit un biais (§2.7.4 p33) :

Ehβˆi− ˙β =hXT W X+ Qi−1Q

| {z }

B

(β − ˙β)e 6= 0 (2.12)

Contrairement au calcul de la matrice de variance-covariance cov( ˙β|Y) qui ne nécessite pas la connaissance de ˙β, le biais ne peut pas être évalué sans connaître ce vecteur. On peut toutefois calculer la matrice B définie dans l’expression ci-dessus. Dans le cas de la méthode flash face avant appliquée au matériau isolant avec le modèle étendu (ajout de t0 et C), on a par exemple :

Ehβˆi− ˙β = E [ ˆτz] − ˙τz E [Tlim] − ˙Tlim E [H] − ˙H E [t0] − ˙t0 E [C] − ˙C = 0 0 0 −0, 0001 0, 0028 0 0 0 −0, 0016 0, 1777 0 0 0 −0, 0001 0, 0029 0 0 0 0, 0002 −0, 0003 0 0 0 0, 0000 0, 0066 (β − ˙β)e (2.13)

On constate tout d’abord qu’un biais existe pour tous les paramètres. Comme aucune informa-tion a priori concernant les paramètres τz, Tlim et H n’est fournie, celle-ci ne peut pas biaiser l’estimation. Aussi, il n’est pas étonnant que les 3 premières colonnes de B soient nulles. Quant aux 2 dernières colonnes de B, elles correspondent respectivement aux paramètres t0 et C. Le biais est donc la combinaison linéaire des écarts entre te0 et ˙t0 ainsi que de Ce et ˙C. Si on ne s’intéresse au biais sur τz uniquement (la première ligne de B), on obtient après normalisation par τez, σprior

τz et σpriorC (les écarts-types a priori sur τz et C) : E [ ˆτz] − ˙τz e τz = −0, 0003τez− ˙τz στpriorz + 0, 0028C − ˙e C σCprior (2.14)

Ainsi, si l’écart entre la valeur a priori τez de τz et la valeur exacte ˙τz vaut σprior

τz , le biais engendré est ici de 0, 03 %. Concernant le paramètre C, le biais engendré par un écart d’un écart-type est de 0, 3 %.

On peut également calculer un écart-type du biais sur chaque paramètre à partir de l’ex-pression (Eq.1.63 p34) : cov  Ehβˆi− ˙β  =hXTW X+ Qi−1QhXT W X+ Qi−1

Cette expression considère que la valeurβ, qui est spécifiée par l’utilisateur, est une variablee aléatoire. L’expression suppose qu’en moyenne, l’utilisateur ne se trompe pas, donc Ehβei= ˙β. Elle suppose de plus que l’écart β − ˙β suit une loi normale caractérisée par une matrice dee

variance-covariance égale à celle qui caractérise la densité a priori de ˙β, c’est à dire p( ˙β). En prenant la racine carré des coefficients diagonaux, on obtient un écart-type qui caractérise le biais de chaque paramètre. Il s’agit des valeurs entre crochets dans le tableau (Tab.2.2). Le biais dont il est question, est le biais généré par l’écart entre les valeurs a priori et les valeurs exactes et non du biais résultant d’une erreur de modèle. Ce dernier peut être plus important.

Les écarts-types des biais concernant les paramètres t0 et C pour le matériau isolant sont relativement faibles et notamment pour une méthode flash face-avant. Par exemple, l’écart-type a posteriori de t0 vaut 0, 0014 s alors que l’écart-type a priori vaut 0, 1 s. Il y a donc un facteur d’environ 100 entre les deux, ce qui signifie que l’information relative au paramètre t0 fournie par les observables est conséquente. Si l’expérience ne fournissait aucune information sur t0, l’écart-type a posteriori serait égal à l’écart-type a priori (voir exemple §5.3.1 p62). Plus la quantité d’information sur t0 est importante, moins l’estimation aura tendance à dépendre de la valeur a priori.

Quant au biais de Tlim, on constate qu’il est relativement important. Ce dernier n’est pas du à une erreur entre Telim et ˙Tlim puisque l’écart-type a priori σTpriorlim est infini, mais comme le suggère l’expression (Eq.2.13), le biais sur Tlim est avant tout du à l’écart Ce et ˙C.

Remarque :

On évoquait dans le chapitre précédent (§5.2.1 p55) qu’il n’est pas rare de devoir estimer des paramètres a priori nuls. Le modèle ci-dessus est typiquement un cas où la définition classique des coefficients de sensibilité réduite pose problème.