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EXTENSION EXTRAPROSTATIQUE (FOCALE VS NON FOCALE [ÉTABLIE])

Dans le document Algorithme - Cancer de la prostate (Page 70-75)

DONNÉES PROBANTES ET DISCUSSION

EXTENSION EXTRAPROSTATIQUE (FOCALE VS NON FOCALE [ÉTABLIE])

L’extension extraprostatique doit être précisée comme étant focale ou non focale.

La prostate n’a pas de capsule bien définie. Ayala et coll. ont indiqué que la capsule de la prostate était composée de faisceaux de tissus fibromusculaires constituant un élément indissociable du stroma prostatique [131]. La surface extérieure du tissu fibromusculaire fusionne avec le tissu conjonctif périprostatique, créant un mélange avec le tissu adipeux dans certaines

prostate [132]. Les auteurs en ont conclu que la capsule de la prostate n’existe pas. À défaut d’une norme commune, divers termes comme envahissement capsulaire, pénétration capsulaire et perforation capsulaire ont été utilisés dans la littérature. Le terme extension extraprostatique, maintenant utilisé pour décrire ces situations, désigne la présence d’une composante tumorale s’étendant au-delà de la prostate [81, 133-135].

La présence d’une extension extraprostatique est reconnue comme facteur de mauvais pronostic en ce qui a trait à la progression et à la survie à la maladie [83, 135-141]. McNeal et coll. ont observé, sur 100  pièces de prostatectomie radicale, que l’extension extraprostatique

à l’envahissement des vésicules séminales et à un score de Gleason élevé [83]. Ohori et coll. ont constaté que l’extension extraprostatique était liée à la progression de la tumeur dans une analyse multivariée portant sur 478 patients [133]. Epstein et coll. (n = 721 avec une PR) ont rapporté que l’extension extraprostatique est une variable importante pour la prédiction de la progression du cancer, particulièrement pour les cancers de la prostate avec un score de Gleason de 5 à 7 [137]. La présence d’une extension extraprostatique a été incluse dans le TNM sous la classification pT3a [142].

L’extension extraprostatique est définie en pathologie selon les critères résumés dans le tableau suivant.

Critères pour le constat d’une extension extraprostatique (pT3a)

Envahissement du tissu adipeux périprostatique, avec ou sans réponse desmoplastique stromale

Envahissement de l’espace périneural des grands faisceaux vasculaires (face postérolatérale de la prostate, à environ 5 h et 7 h dans les sections transversales) Présence de cancer dans la prostate antérieure au-delà du confinement normal de la composante glandulaire prostatique native

Envahissement du tissu mou au pourtour des vésicules séminales

Adapté de [89].

Une composante carcinomateuse dans le tissu adipeux, au niveau du tissu conjonctif lâche, au niveau ou au-delà du tissu adipeux, même sans contact direct entre les cellules tumorales et les adipocytes, indique une extension extraprostatique. On constate également la présence d’une extension extraprostatique en cas d’infiltration périneurale des bouquets

vasculo-nerveux (aux angles postéro-latéraux du corps supérieur et de la base), même si le tissu adipeux périprostatique n’est pas atteint. On peut déterminer qu’il y a extension extraprostatique quand la tumeur s’étend au-delà des limites glandulaires normales de la prostate dans certains endroits pauvres en graisse comme les régions antérieure ou apicale de la prostate

souvent ardue dans les sections (coupes perpendiculaires) de la marge apicale (distale). On peut parfois observer un nodule tumoral protubérant distinct, lequel est associé à une réaction desmoplasique stromale [59]. Il est utile de consigner l’emplacement précis et le nombre de sites (blocs)

extraprostatique comme étant focale ou non focale. Les critères de distinction pour une extension extraprostatique focale versus non focale ne font pas consensus. Le tableau suivant résume les principaux critères de classification utilisés.

Sous-classification des cancers de la prostate avec une extension extraprostatique (pT3a)

Critères Caractéristiques

Critères de Wheeler et coll. [135] Extension extraprostatique focale contre non focale

Focale : tumeur contenue < 1 champ de vision à fort grossissement maximal et ≤ 2 sections séparées Non focale : envahissement plus vaste

Critères d’Epstein et coll. [136] Extension extraprostatique focale contre établie Focale : quelques glandes néoplasiques hors de la prostate

Établie : envahissement plus vaste

Critères de Sung et coll. [143] Distance radiale de l’extension extraprostatique (< 0,75 mm vs ≥ 0,75 mm) Wheeler et coll. ont classifié l’envahissement de la prostate en cinq groupes

selon la présence d’un cancer confiné (L0, L1 et L2) ou non (L3, L3F, L3E) à la prostate [135]. Selon les critères de Wheeler, l’extension extraprostatique focale signale la présence de quelques glandes néoplasiques au-delà de la prostate ou un foyer tumoral au-delà de la prostate mesurant moins d’un champ microscopique à fort grossissement (400X) dans pas plus de deux sections séparées (L3F) tandis qu’une extension extraprostatique non focale signifie une atteinte plus importante (L3E). Il a été observé que la survie sans progression à 5  ans est significativement plus longue en présence d’une

extension extraprostatique focale en comparaison avec une extension non focale (L3F = 73 % contre L3E = 42 %, p = 0,0001).

Le groupe d’Epstein et coll. propose une classification selon que l’extension extraprostatique est focale ou établie [136]. L’extension extraprostatique focale est définie quantitativement comme limitée à quelques glandes néoplasiques alors que l’extension extraprostatique établie fait référence à une atteinte tumorale plus prononcée [136]. Il a été observé dans une série de 196 patients ayant eu une prostatectomie radicale que les patients dont la maladie présentait une extension extraprostatique focale avaient une survie

extraprostatique établie (82 % contre 65 %; valeur p non disponible).

L’équipe de Sung et coll. a voulu déterminer quel était la meilleure méthode pour définir la sous-classification pT3a [143]. Un total de huit méthodes ont été analysées pour évaluer laquelle ou lesquelles étaient significatives chez 83 patients atteints d’un cancer de la prostate de stade pT3a. Il a été observé que la distance radiale de la tumeur extraprostatique mesurée avec un micromètre oculaire était associée à une récidive biochimique (HR = 2,8 [IC 95 % : 1,12-7,39], p  =  0,02). La survie sans récidive biochimique (APS) a été significativement plus élevée à 2  ans et à 4  ans chez les patients présentant une maladie extraprostatique d’une distance radiale < 0,75 mm en comparaison avec une distance radiale ≥ 0,75 mm (2 ans : < 0,75 mm = 62 % contre ≥ 0,75 mm = 35 %;

4 ans : < 0,75 mm = 35 % contre ≥ 0,75 mm = 18 %; p = 0,02). Par ailleurs, aucune corrélation avec la récidive biochimique (APS) n’a été observée en utilisant les critères d’Epstein, les critères de Wheeler, le nombre de glandes néoplasiques reconnues, la localisation unilatérale ou bilatérale, la circonférence du composant tumoral extraprostatique, la topographie unifocale ou multifocale ainsi que le volume du composant tumoral extraprostatique.

Une majorité des délégués ont recommandé de rapporter l’extension extraprostatique comme étant focale ou non focale (établie), à l’occasion d’une rencontre consensuelle de l’International Society of Urological Pathology (ISUP) en 2011 [142]. Par contre, aucun consensus n’a été obtenu concernant la méthodologie à utiliser pour évaluer l’extension extraprostatique.

L’utilisation du système de Gleason est recommandée pour tout prélèvement prostatique avec présence d’adénocarcinome, à l’exception de ceux présentant une réponse au traitement, généralement avec l’utilisation d’un traitement antiandrogène [144, 145]. Le score de Gleason est un paramètre important des nomogrammes, tels que les nomogrammes de Kattan et les tableaux de Partin, qui guident le choix d’un traitement. Les lecteurs peuvent se reporter aux recommandations d’une conférence de consensus sur l’utilisation actuelle du système de Gleason [146-148]. Pour établir le score de Gleason, on additionne le patron (pattern) primaire (patron prédominant en termes d’atteinte quantitative/

de surface) et le patron secondaire (patron de deuxième prédominance). En l’absence de patron de Gleason secondaire, on double le patron primaire pour obtenir le score de Gleason. Les patrons primaire et secondaire doivent être mentionnés en plus du score de Gleason (p. ex. : 7 [3 + 4] ou 7 [4 + 3]).

Un score de Gleason doit être attribué pour chaque prélèvement positif (récipient, c.-à-d. site biopsique), y inclus chaque cylindre positif reconnaissable (non fragmenté) individuellement s’il y a plus d’un cylindre par contenant. Deux cylindres au maximum devraient être disposés par contenant, pour des raisons techniques.

Dans le cas du prélèvement d’une biopsie à l’aiguille présentant un patron secondaire mineur (<  5  % de la tumeur) de malignité plus élevée, on consigne également ce dernier résultat. Par exemple, on doit consigner

3 à > 95 % et un patron 4 à < 5 %. Par ailleurs, il n’est pas nécessaire de le faire si le patron secondaire mineur (< 5 %) est de malignité moins élevée.

Par exemple, on doit consigner un score de Gleason 8 (4 + 4) pour un prélèvement comprenant un patron 4 à > 95 % et un patron 3 à < 5 %.

Dans le cas du prélèvement d’une biopsie à l’aiguille présentant plus de deux patrons où ni le patron primaire ni le patron secondaire n’est plus élevé, on doit retenir le patron prédominant (en termes d’atteinte quantitative/de surface) et le patron de malignité le plus élevé pour établir le score de Gleason. Par exemple, un patron 3 à 70-75 %, un patron 4 à 20-25 % et un patron 5 à < 5 % donnent un score de Gleason 8 (3 + 5). Cette méthode a été validée par une étude clinique majeure [8].

Des règles similaires s’appliquent aux prélèvements de résection transurétrale et d’énucléation.

La présence d’un patron tertiaire de Gleason est relativement fréquente dans les spécimens de prostatectomie radicale. On doit consigner au rapport la présence d’un patron tertiaire 5. Par exemple, en présence d’un patron primaire 3, d’un patron secondaire 4 et d’un patron 5 à < 5 %, on doit consigner un score de Gleason 7 (3 + 4) avec présence d’un patron tertiaire 5.

Pour les spécimens de prostatectomie radicale, on doit attribuer un score de Gleason au nodule prédominant (index tumor), s’il y a lieu. En présence de plus d’une tumeur distincte clairement décelées, on peut établir et consigner le score de Gleason de chacune ou, à tout le moins, établir et consigner le

exemple, en présence d’une tumeur volumineuse de score 4 (2 + 2) dans la zone de transition et d’une tumeur distincte plus petite de score 8 (4 + 4) dans la zone périphérique, on doit consigner les deux résultats ou, sinon, inscrire le résultat le plus élevé et non la moyenne des deux résultats [59].

La mention du score de Gleason concernant une marge chirurgicale positive demeure pour l’instant à la discrétion du pathologiste [149]. Le niveau de preuve disponible est encore insuffisant pour conclure à la valeur pronostique, notamment en termes de récidive biochimique et du score de Gleason au niveau d’une marge chirurgicale positive.

Quelques études ont discuté de la valeur du score de Gleason pour évaluer le risque de récidive biochimique. Toutes ont conclu que l’obtention d’un score de Gleason élevé au niveau d’une marge chirurgicale positive augmente le risque de récidive biochimique [92, 150-152]. Savdie et coll. ont évalué les facteurs prédictifs d’une récidive biochimique détectée par le score de Gleason au niveau d’une marge chirurgicale positive chez 285  patients ayant eu une prostatectomie radicale [152]. Ils ont rapporté, après un suivi médian de 82 mois, que l’obtention d’un patron de Gleason ≥ 4 au niveau d’une marge chirurgicale positive augmente de manière significative le risque de récidive biochimique en comparaison avec un patron de Gleason 3 ou moins (HR = 2,80 [IC 95 % : 1,82-4,32, p < 0,001). Cao et coll. ont évalué la valeur pronostique du score de Gleason à la marge en relation avec la récidive biochimique chez 336 patients [151]. Les auteurs ont rapporté, après un suivi médian de 41 mois, que les patients dont

chirurgicale positive avaient un risque accru de récidive biochimique (p = 0,05).

Brimo et coll. ont confirmé ces résultats (n  =  108; suivi médian de 6  ans, p = 0,007) [150]. Ils ont observé que les patients dont la tumeur présentait un score de Gleason de 4 + 3 ou plus avaient une plus forte probabilité de récidive biochimique comparativement à ceux dont la maladie présentait un score de Gleason 3 + 3 ou 3 + 4 au niveau d’une marge chirurgicale positive. Chuang et coll. ont observé que l’obtention d’un score de Gleason 7 en comparaison avec un score de Gleason 6 à la marge chirurgicale semblait augmenter la possibilité d’avoir une récidive biochimique (n = 135; p = 0,05) [92]. Toutefois, les auteurs concluent qu’il n’est pas démontré que la valeur pronostique du score de Gleason obtenue au niveau d’une marge chirurgicale positive est un facteur pronostique supplémentaire comparativement au score de Gleason de la tumeur dans sa globalité.

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