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Chapitre V : Recouvrement de faisceaux d’électrons : influence sur le

3. Influence du recouvrement spatial

3.3 Explication possible

Au vu de l’analyse ci-dessus il est plus probable que ce soit une déflexion des électrons dans la cible qui est à l’origine des observations de notre expérience. Une telle déflexion peut se

 

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produire à l’intérieur de la cible. En regardant la précision de synchronisation (~1 ps), il est raisonnable de considérer que les deux impulsions laser n’atteignent pas la cible exactement au même moment. Ainsi, la première impulsion accélère une grande partie des électrons, suivant l’axe laser, qui se propagent ensuite dans la cible quelques centaines de femtosecondes avant l’arrivée de l’impulsion suivante. Au passage de ces électrons dans la cible une sorte de canal ionisé avec des champs magnétiques et de forts gradients de résistivité est créé (Gremillet, 2001). Lorsque le second faisceau laser atteint la cible, il est possible que les électrons accélérés par cette seconde impulsion ressentent ce canal et soient partiellement piégés pas celui-ci. De ce fait, lorsque x=-50 μm les électrons accélérés par le second laser, avec un retard de quelques centaines de femtosecondes, pourraient se reconnecter au canal créé par les premiers électrons. Ils pourraient de cette manière se propager à travers la cible dans le canal et déboucher en face arrière dans la gaine d’électrons créée par la première impulsion.

Dans ce mécanisme, les premiers électrons qui débouchent sur la face arrière amorcent l’accélération des protons avec une divergence habituellement observée, qui dépend du profil de la gaine d’électrons (Brambrink and Roth, 2006). Un peu plus tard, les électrons piégés dans le canal atteignent la face arrière et continuent d’accélérer les protons à partir du front en expansion. Cette réaccélération peut donc se voir comme celle qui s’établirait sur une cible plus épaisse, mais présentant une face arrière convexe et un préplasma important. En effet, lorsque les seconds électrons atteignent la face arrière de la cible, celle-ci s’est déjà détendue dans le vide. Cependant, ce simple schéma ne permet pas d’expliquer la faible divergence des protons du second faisceau.

Comme nous avons pu le voir dans la Figure 68, cette seconde accélération se fait à partir d’une gaine d’électrons bien plus plate en raison de la faible divergence du second faisceau de protons. Afin de permettre l’accélération suivant une faible divergence il est nécessaire que ces seconds électrons débouchent dans une zone peu courbée de la gaine d’électrons. De plus, la divergence de ces derniers, permettant cette seconde accélération, doit nécessairement être plus faible que celle des premiers électrons accélérés pour créer une gaine aplatie. Il n’y a aucune raison d’attribuer cette faible divergence au mécanisme d’accélération permettant de générer ces seconds électrons. Cependant, cette faible divergence est cohérente avec l’idée d’un piégeage de certains électrons dans le canal. En effet, les électrons piégés doivent changer de trajectoire pour suivre celle du canal. De ce fait, ces électrons piégés se retrouvent à suivre tous plus ou moins la même direction pour ensuite aboutir en face arrière dans une zone assez localisée.

Dans chacun des cas x=0 μm et x=-50 μm les électrons accélérés contribuent à l’accélération des protons dans une gaine commune ce qui permet d’augmenter la densité électronique en face arrière et, très certainement, également le temps d’accélération. Même si la position de reconnexion des trajectoires des électrons est différente dans ces deux cas il semblerait néanmoins qu’elle existe à cause de la présence de ce faisceau de protons de faible divergence. Dans le cas où x=0 μm on voit que l’augmentation de l’énergie des protons est plus importante que le cas x=-50 μm. Or ceci peut simplement s’expliquer par le fait que dans ce cas une reconnexion n’est pas nécessaire pour permettre une superposition des électrons en face arrière. La densité électronique est donc plus importante.

3.4. Résultats des premières simulations.

Afin d’expliquer les résultats expérimentaux, des simulations 2D non collisionnelles avec le code particulaire CALDER, qui résout l’ensemble des équations Maxwell-Vlasov et l’équation relativiste du mouvement (Lefebvre et al., 2003), ont été effectuées par Laurent Gremillet au CEA. Une cible à 100 nc de 15 μm d’épaisseur et précédée d’un préplasma sur la face avant, simulé avec

le code DUED, a été utilisée pour la simulation. Le profil simulé du préplasma présent sur la face avant de la cible a été tronqué à une densité d’environ 0,26 nc de manière à réduire la longueur

totale de celui-ci à 20 μm, ce qui permet de limiter le temps de calcul. La cible et le préplasma sont uniquement constitués d’atome d’or et d’électrons. Une fine couche de protons (une maille) a été ajoutée sur la face arrière de la cible. La température initiale des ions est de 0,01 keV et celle des

 

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électrons est de 0,1 keV. La cible est irradiée en incidence oblique ±36˚ par des impulsions ayant un profil spatial et temporel Gaussien de dimension respective de 8 μm et de 560 fs FWHM. L’intensité maximale pour chacune des impulsions est de 2,2.1019 W.cm-2 (a0=4). La boite de

simulation avait quant à elle une longueur de maille de dimension Δx=Δy=0,08c/ω0≈14 nm et

chacune des mailles comprenait 25 particules de chaque espèce (atome d’Au et électrons). Le pas temporel était de 0,05ω0≈0,025 fs.

En réalisant ces simulations avec les paramètres énoncés ci-dessus, nous avons obtenu une énergie de coupure des protons de 28 MeV dans le cas où une seule impulsion laser était focalisée sur la face avant de la cible. Lorsque les deux impulsions laser étaient focalisées sur la cible, l’énergie maximale atteinte par le faisceau de protons était de 37 MeV dans le cas d’une superposition en face avant et de 28 MeV pour la superposition en face arrière (cf. Figure 69). On voit donc que non seulement l’énergie des faisceaux est très largement surestimée dans chacun des cas, mais aussi que la tendance observée dans nos expériences n’est pas du tout reproduite par les simulations.

  Figure 69 : Espace des phases du facteur relativiste γ des protons pour un pas de temps ω0t=1700 et simulé avec le

code CALDER pour différentes conditions d’interaction.

La surestimation de l’énergie de coupure vient en partie du caractère 2D de la simulation qui omet donc un axe de dilution des électrons, ce qui conduit à surestimer la densité électronique. De plus, l’épaisseur de cible a été divisée par 2 dans la simulation ce qui amplifie cette surestimation de la densité électronique en face arrière, et donc l’énergie de coupure. Si on s’intéresse à la répartition des électrons chauds (100 keV) dans la cible au cours du temps (cf. Figure 70), on peut s’apercevoir que les électrons ne sont pas accélérés selon l’axe du laser, mais selon l’axe normal à la face de la cible. Même si l’on ne s’attend pas à voir la totalité des électrons être accélérée selon l’axe laser, on s’attend cependant à ce qu’une fraction importante de ces derniers parte selon cet axe, comme cela a pu être observé au cours des expériences (cf. Figure 66). On voit donc de cette manière que la simulation ne reproduit pas en premier lieu le mécanisme d’accélération des électrons, ce qui peut expliquer le désaccord avec les résultats de nos expériences.

 

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  Figure 70 : Simulation avec CALDER de l’évolution de la densité des électrons ayant une énergie supérieure à 100

keV en fonction du temps, dans le cas où un et deux faisceaux laser étaient focalisés sur la face avant de la cible.

Si l’on s’attache aux mécanismes d’accélération des électrons (cf. Chapitre I), on s’aperçoit que ceux accélérés selon l’axe du laser proviennent des zones de basse densité plasma. Il est donc fort probable que le fait d’avoir tronqué le profil du préplasma à une densité d’environ 0,26 nc ait

conduit à supprimer l’accélération des électrons selon l’axe laser. De nouvelles simulations sont ainsi en cours pour retrouver tout d’abords l’axe d’injection des électrons. Dans ces simulations la longueur de préplasma est étendue jusqu’à 30 μm avant la face de la cible et le profil est tronqué à environ 0,05 nc. Le profil du préplasma est donc ajusté pour rendre compte au mieux dans les

simulations et permettre un temps de calcul raisonnable. Ce profil est tout de même simulé avec le code DUED, mais en ajustant le niveau d’intensité de l’ASE pour obtenir la longueur de préplasma désirée.

 

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