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Explication des institutions des filières et de leur mode de fonctionnemen17

1 CONTEXTE DE L’ETUDE, PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE

1.3 A PPROCHE METHODOLOGIQUE

1.3.1 Explication des institutions des filières et de leur mode de fonctionnemen17

Une première étape a permis d’identifier les différents agents de la filière et la nature des différents flux physiques. Les agents ont alors été regroupés en catégories homogènes et significatives du point de vue de l’analyse économique et/ou technique et socio-économique. L’identification de la nature des flux physiques et des agents impliqués conduit à une analyse fonctionnelle de la filière, formalisée sous la forme d’un tableau (cf. annexe 2) faisant correspondre :

les principales fonctions aux différents stades de la filière ;

les agents conduisant ces fonctions et les acteurs indirects nécessaires à la réalisation de ces fonctions ;

les produits de la filière concernée : c’est-à-dire le produit principal de la filière sous les diverses formes en lesquelles il est progressivement transformé.

Une quantification physique relative des flux est également réalisée. Dès le début du repérage des flux, il faut prêter attention non seulement à la nature mais aussi aux quantités physiques (ainsi que les valeurs monétaires qu’ils représentent). De la sorte, ces éléments permettent d’orienter les investigations ultérieures de manière à privilégier les sous-filières et les agents ayant les plus grands poids relatifs (Fabre, 1994 ; Bourgeois et Herrera, 1998 ; Faivre Dupaigre, 2007). Face à la diversité des produits issus de la transformation du manioc, les produits retenus pour être analysés ont été le manioc frais, le macabo, le bâton de manioc et le foufou de manioc. Les raisons de ces choix sont que plus de 80% de la population urbaine consomme au moins l'un des quatre produits du manioc (BDPA, 2007) : le fufu (89% de ménages), le bâton (84%), le manioc frais (80%) et le gari (74%). Les feuilles de manioc sont aussi très recherchées (48%).

Pour chaque niveau de transaction identifié, il est possible de caractériser les différentes composantes du réseau de communication (forme d’organisation et de coordination) et les déterminants du réseau. (Galtier, 2002b)

Le réseau de communication se définit par :

le nombre d’acheteurs et de vendeurs potentiels pour le niveau de transaction considéré (degré de concentration aux stades amont et aval de la transaction)

l’architecture de connexions reliant les uns aux autres ces acheteurs et ces vendeurs potentiels. Cette architecture de canaux de communication peut elle-même se caractériser par :

- les règles qui cadrent le choix des partenaires commerciaux (exclusivité, fidélisation, groupe ethnique…).

- le degré de confidentialité des transactions (qui dépend lui-même souvent du lieu où se déroulent les transactions). Il est en effet possible que tout ou partie de l’information communiquée dans une transaction soit observable par des tiers. Ceci accroît alors la vitesse et l’amplitude de la diffusion d’information au sein du marché.

- l’intervention d’intermédiaires dans la réalisation de la transaction. Celle-ci permet en effet de démultiplier les contacts entre acheteurs et vendeurs. Cette démultiplication des connexions dépend elle-même du nombre d’intermédiaires employés par un acteur ou du nombre d’acteurs pour lesquels travaille un intermédiaire et du réseau de relations dont dispose l’intermédiaire (son capital social).

Les déterminants se définissent par le clivage entre les différents paramètres de l’échange et les règles servant à cadrer la négociation de chacun de ces paramètres. Pour caractériser les déterminants de la filière, les variables suivantes sont prises en compte :

les paramètres de la négociation (nature du produit, quantité, prix, délai de livraison, délai de paiement et lieu de livraison).

les règles des négociations concernant chacun de ces paramètres. Ces règles se rangent dans deux catégories :

- les règles portant sur le déroulement des transactions. En effet, pour chacun des six paramètres des transactions, il peut exister des règles précisant si ces paramètres sont négociables par les acteurs ou fixés par ailleurs (par la coutume, etc.). En outre, lorsqu’un paramètre est négociable des règles cadrent sa négociation en précisant qui est habilité à faire la première proposition, à faire des contre-propositions ou encore à accepter/refuser les propositions émises.

- les règles régissant le degré d’autonomie des intermédiaires. En effet, s’il n’est pas autorisé par son donneur d’ordre à modifier les propositions d’achat émises par celui-ci, ces propositions seront non négociables au moment de la transaction entre l’intermédiaire et le vendeur potentiel.

1.3.2 Identification des stratégies anti-risques des agents des

filières manioc et macabo

Les stratégies anti-risques des acteurs qui découlent de l’organisation des filières manioc et macabo seront analysées de manière croisée entre les enquêtes quantitatives de l’analyse sur la formation des prix et les enquêtes qualitatives sur les stratégies des agents face aux principales contraintes qu’ils rencontrent dans leurs activités, dont les problèmes de circulation d’information au sein des filières.

1.3.2.1 Analyse de la formation des prix au sein des filières

Selon Morvan (1985), la filière est un espace des relations d’échange donc c’est un ensemble de marchés. Cette description peut alors s’appuyer sur une analyse de la formation des prix au sein des filières.

1.3.2.1.1 Etablissement des produits et des charges de chaque agent

La reconstitution des produits et des consommations intermédiaires pour chaque agent de la filière permet de calculer les valeurs ajoutées brutes pour chaque agent. Il convient pour chaque agent de la filière d’estimer :

consommations intermédiaires : constituées par l’ensemble des consommations intermédiaires nécessaire à la production ou à la commercialisation d’un kilogramme de produit,

produit : constitué par les flux du bien livré sur le marché de commercialisation en aval,

valeur ajoutée brute : calculée par différence entre les valeurs des deux éléments précédents.

Les prix et les coûts sont ainsi identifiés, tandis que la valeur ajoutée pour chaque agent et la répartition entre les agents de la valeur ajoutée globale en sont déduites. On obtient ainsi des indications sur les rapports de force des différents acteurs sur les prix au sein de la filière.

1.3.2.1.2 Intérêt de l’analyse de la formation des prix

Cette analyse permet d’établir des comparaisons sur :

• Le total des coûts par rapport au total des marges nettes générées dans chaque circuit ;

• Le total des coûts et des marges d’un circuit par rapport à ceux des autres circuits ;

• La part des coûts et des marges pour chaque agent par rapport aux autres agents dans un même circuit ;

• La part des coûts et des marges de chaque agent d’un circuit par rapport à celles des autres circuits.

Ces comparaisons aident à l’interprétation en matière de pouvoir économique des différents agents, si l’on suppose que ceux qui correspondent aux coûts les plus faibles et aux marges les plus importantes sont ceux qui ont la plus grande influence sur le fonctionnement économique de la filière et sur les modalités de transaction. Cela sera confronté aux informations recueillies sur les relations entre les acteurs étudiées au cours de l’analyse organisationnelle. (Bourgeois et Herrera, 1998).

L’influence des agents sur la détermination du niveau de prix est liée à leur situation dans le circuit. L’analyse stratégique de la formation des prix dans la filière permet de caractériser la concurrence, d’analyser le niveau d’information des différents agents sur les prix, et de connaître les enjeux (situation financière et niveau de risque dans la transaction). Ainsi, dans les filières agricoles où l’offre est souvent très atomisée, les acheteurs sont en position d’oligopsone et connaissent mieux les prix que les agriculteurs ; par ailleurs les acheteurs connaissent généralement la situation financière des agriculteurs. Ceux-ci sont donc souvent dominés dans les marchés (Griffon, 1994).

1.3.2.2 Etude des stratégies socio-économiques des agents

Cette analyse qualitative est réalisée afin d’identifier les limites des différents acteurs à leurs activités ainsi que les stratégies et les logiques qu’ils adoptent pour les atténuer.

L’identification des limites perçues par les différents types d’agents se fait au cours des enquêtes en demandant aux agents d’identifier et de hiérarchiser les principales causes d’incertitude sur leurs activités. Les résultats ont été analysés par la méthode des scores. Une fois connu les limites auprès de l’agent, il a été identifié la ou les logique(s) et la ou les stratégie(s) dominante(s) à chaque catégorie d’agent (Temple et Dury, 2003). Ainsi, on cherche à analyser leur rationalité : pourquoi font-ils ce qu’ils font ? Les comportements des agents résultent de leurs objectifs de revenus ainsi que de leur accès aux ressources nécessaires pour conduire leurs activités (capital, main d’œuvre, information).

Pour les producteurs, différentes logiques sont identifiables telles que la priorité aux revenus, la priorité à l’autosuffisance, la diversification et la minimisation des risques, ou la maximisation de la rentabilité de l’investissement. Pour comprendre les

stratégies anti-risques mises en place par les producteurs, on s’est intéressé à leurs moyens de connaissance des filières et les éléments qui guident leurs prises de décision sur le court et moyen terme. Ainsi, les asymétries d’information que les producteurs ont avec l’aval pourront être identifiées. Mais d’autres facteurs que l’information peuvent être limitants pour l’activité des agriculteurs et sont source d’incertitude, ce sont essentiellement le travail et le capital. C’est pourquoi on s’intéressera également aux systèmes organisationnels mis en place par les producteurs pour réduire ce type de risque.

Pour les intermédiaires, les objectifs peuvent être les suivants : obtention régulière de trésorerie pour consommation et finalités sociales ; épargne pour réinvestissement, pour l’investissement dans d’autres activités et pour les besoins futurs du ménage. L’objectif d’obtention de revenus réguliers est important à prendre en compte car il explique souvent un grand nombre de stratégies anti-risques. En effet, ils doivent faire face à des coûts nombreux : transport, accès à un emplacement de vente, taxes, etc. De plus, ils opèrent dans un contexte de forte incertitude sur l’état futur de la production, l’état futur de la demande et les politiques de l’État (importations, taxes, …). Ce contexte peut provoquer des fluctuations de revenus susceptibles de mettre en péril le maintien de leur activité, c’est pourquoi les intermédiaires prennent un certain nombre de stratégies anti-risque en rapport avec le choix des produits, le choix des quantités, les prix à l’achat et à la vente, et les lieux d’achat et de vente (ex : diversification des activités ; choix de produits à l’approvisionnement et à l’écoulement garanti ; limitation du fonds de roulement et du capital investi ; stockage ou transformation des produits ; participation à des organisations ; …) (Moustier et Leplaideur, 1999).