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3.4 Recherche de l’émission centimétrique émise par les gerbes

3.4.1 Expériences sur faisceau

Les expériences AWA INCOBREMS et SLAC T471 ont mis en évidence un signal isotrope aux fréquences GHz, en coïncidence temporelle avec le passage d’une gerbe articificiellement créée par l’association d’un faisceau d’électrons et de cibles matérielles. Un flux a été déduit des signaux antennes et sert de référence comparative aux expériences faisceau MAYBE (Microwave Air Yield Beam Experiment) et AYME (Air Microwave Yield). Leur objectif est de déterminer le rendement de l’émission GHz isotrope associée aux gerbes électromagnétiques. Le bremss-trahlung moléculaire a été suggéré par Gorhamet al.comme explication théorique aux résultats expérimentaux de l’expérience SLAC T471.

AWA INCOBREMS et SLAC T471

Gorhamet al.réalisèrent deux expériences sur faisceau [127] dans le but de détecter l’émission de bremsstrahlung moléculaire (MBR pour Molecular Bremsstralhung Radiation), isotrope, non polarisée et à spectre continu, à la différence des rayonnements Cerenkov et géosynchrotron, anisotropes et polarisés, et de la lumière de fluorescence en spectre de raies. Cette émission

proviendrait de la décélération des électrons du plasma généré par le passage des électrons et positrons de la gerbe atmosphérique. Ce processus est expliqué plus en détail en section 5.3.3 du chapitre 5. Le principe des expériences est illustré sur la figure 3.18.

La première expérience, INCOBREMS (Incoherent Bremsstrahlung System) s’est déroulée à AWA (Argonne Wakefield Accelerator) en 2003. Un faisceau d’électrons de 12 MeV envoyés par paquets de 7 nC (soit 4×1010 électrons), de 40 ps et d’énergie totale 5×1017 eV, est dirigé vers une cible de tungstène puis entre dans une cage de Faraday anéchoïque. L’épaisseur de tungstène traversée est de 2 ou 5 mm (X0 = 3.5 mm dans le tungstène), permettant au faisceau de produire une gerbe électromagnétique. Dans la cage de Faraday anéchoïque sont installées des antennes sensibles dans la bande C (3.4-4.2 GHz), Ku (10.7-11.8 GHz), et Ka (20.2-21.2 GHz).

Figure3.18 –Schéma de principe des expériences AWA INCOBREMS (gauche) et SLAC T471 (droite).

Les résultats ne furent pas concluants par manque d’isolation électromagnétique, ce qui amena Gorhamet al.a réaliser l’année suivante (2004) une expérience similaire au SLAC (Stan-ford Linear Accelerator Center). Le faisceau est cette fois constitué de paquets de 2×107électrons de 28.5 GeV, soit de 6×1017 eV d’énergie totale. Il est dirigé vers des cibles d’aluminium, re-présentant de 0 à 14 longueurs de radiation, et entre dans la cage de Faraday anéchoïque dans laquelle sont disposées des antennes log-périodiques orientées relativement au faisceau et sen-sibles dans la bande 1-8 GHz. La figure 3.19 montre la puissance moyenne par unité de surface reçue par l’antenne polarisée selon l’axe du faisceau à gauche et par l’antenne polarisée per-pendiculairement au faisceau à droite, dans une configuration où la gerbe artificielle atteint son maximum de développement. Le signal de gauche est environ 100 fois plus intense que celui de droite, et se composerait de deux signaux à décroissance exponentielle superposés. Le plus long des deux signaux de la figure de gauche serait identique au signal de la figure de droite, ce qui indiquerait qu’il ne soit pas polarisé et donc potentiellement dû au rayonnement de bremsstrah-lung. La polarisation du plus court signal serait un signe en faveur d’une origine Cerenkov. Les résultats ont permis d’estimer le flux de rayonnement non polarisé àI0 = 4×1016W.m2.Hz1 pour une gerbe de 3.36×1017 eV à son maximum de développement, vue sur 0.65 m et détectée à 0.5 m. La répétition de l’expérience avec variation du nombre de cibles d’aluminium utilisées n’a pas permis d’établir le type de relation entre le nombre de particules et l’intensité du flux (non représenté).

MAYBE

L’expérience MAYBE s’est déroulée à l’accélérateur Van der Graaff du Laboratoire National d’Argonne (Illinois). Son principe est analogue à celui de SLAC T471, mais le faisceau utilisé est constitué de paquets d’électrons de 3 MeV, énergie largement inférieure à l’énergie seuil nécessaire à la production de rayonnement Cerenkov dans l’air (21 MeV). Les paquets sont composés de 1010 à 1013 électrons, et durent 1 µs. Les électrons entrent dans une chambre anéchoïque mesurant 1 m3, et tapissée de cônes en mousses de 30 dB d’atténuation au delà de

Figure 3.19 – Flux moyen (sur 100 tirs) détecté dans la chambre anéchoique à 0.4 m du faisceau qui recréé artificiellement une gerbe de 6×1017eV au maximum de son développement, en fonction du temps relatif à l’entrée du faisceau dans la chambre, par l’antenne orientée dans sa direction (gauche) et par l’antenne orientée perpendiculairement (droite). Le faisceau parcourt la chambre en 3.3 ns. Les lignes rouges discontinues labellisées ∆I représentent le flux minimum détectable pour 1 tir d’électrons et pour 100 tirs (s’il se répète 100 fois, on peut statistiquement présumer que le signal n’est pas une fluctuation de bruit thermique s’il dépasse 1010W.m2). Les lignes roses discontinues représentent le bremsstrahlung moléculaire prédit selon deux hypothèses théoriques amenant ou non à une suppression du flux.

1 GHz et en incidence normale. Les antennes utilisées sont des LNBf bandes C et Ku, et log-périodique Rohde & Schwarz HL050 (0.85-26.5 GHz). L’analyse a été réalisée pour les données des antennes bande-C et log-périodique. Après soustraction du bruit calculé à partir de la partie initiale des enregistrements, la puissance du signal est représentée en fonction de l’intensité du faisceau entrant, pour les deux antennes et pour deux polarisations relatives à la direction du faisceau. La figure 3.20 montre que la relation entre l’intensité du faisceau et l’intensité du signal engendré est linéaire. D’après [129], le flux inféré d’après les résultats de MAYBE pour une gerbe de 3.36×1017 eV à son maximum de développement, vue sur 0.65 m et détectée à 0.5 m, serait significativement inférieur au fluxI0 = 4×1016W.m2.Hz1 détecté au SLAC.

AMY

AMY [130] est une expérience réalisée au BTF (Beam Test Facility) à Frascati (Italie). Des gerbes électromagnétiques sont créées artificiellement par un faisceau (LINAC) constitué de paquets de 1010 électrons ou positrons de 25 à 750 MeV (au delà du seuil Cerenkov), pénétrant jusqu’à 6 plaques d’aluminium d’épaisseurs variables dont le total mesure 45 cm (voir figure 3.21 de gauche). L’énergie déposée par la gerbe électromagnétique qui entre ensuite dans une chambre anéchoïque dépend de l’énergie des électrons du faisceau et du nombre de plaques utilisées, et atteint un maximum pour 1.2 longueurs de radiations (X0 ∼7.5 cm d’aluminium). La chambre anéchoïque est composée de cuivre afin de réduire les radiations extérieures de 40 dB à 1 GHz et de plus de 85 dB au delà de 4 GHz. L’intérieur de la chambre est recouvert de cônes en mousse (voir figure 3.21 de droite) permettant d’atténuer la réflexion des ondes radio de 30 dB à 1 GHz et de 50 dB pour les fréquences supérieures à 6 GHz. AMY dispose de deux types d’antenne : deux antennes log-periodiques Rohde & Schwarz HL050 (0.85-26.5 GHz), et deux cornets guides d’onde RFspin DRH20 (1.7-20 GHz). Elles peuvent se placer dans la chambre en différentes

BeamoIntensityo(a.u.) 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 (mW) measured P 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7×10-3 CrossoPolarization CooPolarization BeamoIntensityo(a.u.) 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 (mW) measured P 15 20 25 30 35 40 45 50 55×10-6 CrossoPolarization CooPolarization

Figure3.20 – Puissance mesurée en polarisation perpendiculaire au faisceau (cross polarization) et en polarisation parallèle au faisceau (co polarization) par les antennes bande-C (gauche) et log-périodique (droite) en fonction de l’énergie du faisceau [128].

positions, et de façon à ce que leur polarisation soit parallèle ou perpendiculaire au faisceau entrant. Les signaux sont amplifiés d’environ 26 dB en sortie d’antenne par des amplificateurs minicircuit (800 MHz-21 GHz). Il sont ensuite numérisés à 40 GS/s (giga samples per second) par un oscilloscope Lecroy et analysés en fréquence quasi simultanément.

Figure 3.21 – Gauche : installation d’AMY, le volume de cuivre constitue la chambre anéchoïque. Droite : intérieur de la chambre anéchoïque, où sont installées une antenne Rohde & Schwarz HL050 (gauche) et une antenne RFspin DRH20 (haut).

Quelle que soit l’antenne utilisée, un signal transitoire n’apparaît que pour la configuration de polarisation parallèle au faisceau tandis qu’un autre apparaît que la polarisation soit parallèle ou perpendiculaire. Le premier signal est alors supposé être d’origine Cerenkov alors que le second qui ne serait pas polarisé pourrait être dû au phénomène de bremsstrahlung moléculaire. Après étalonnage et conversion en puissance (P = (V2Vbkg2 )/50Ω, avec Vbkg la tension due au bruit de fond estimée à partir de la partie des enregistrements antérieure au passage du faisceau), l’intensité du second signal s’est trouvé être compatible avec le signal observé par Gorham, si on suppose une relation quadratique avec le nombre d’électrons du faisceau (ce qui revient à une relation quadratique avec l’énergie de la gerbe, voir figure 3.22 de gauche). Une analyse spectrale (figure 3.22 de droite) montre cependant une forte contribution du signal aux fréquences LINAC, qui correspondent aux intervalles de temps entre les micro-bunchs du faisceau. En effet, les électrons du faisceau sont envoyés plusieurs fois par seconde par paquets

Figure 3.22 – Gauche : puissance du signal en fonction du nombre d’électrons parbunch normalisé à 109 particules. Droite : densité spectrale de puissance pour le signal (en noir) et pour le bruit (en bleu) obtenue après moyennage de nombreux enregistrements. L’unité fréquentielle de la densité spectrale n’est pas indiquée [130].

de 3 ou 10 ns appelésbunchs. Chaque bunch est constitué de micro-bunchs de largeur 0.14 ps, séparés de 0.3501 ns, soit 2856 MHz (voir figure 3.23). Après retrait de cette fréquence et de ses harmoniques, le signal total se trouve réduit d’un facteur 102 au minimum. Ces résultats sont pour le moment préliminaires (communication privée).

Δtb=1.5 3 or 10 ns fL=2856 MHz ΔtL 0.35 ns Δtmb14 ps LINAC frequency FWHM of microbunch FWHM of bunch

bunch repetition rate few Hz

Figure3.23 –FWHM (Full Width at Half Maximumou largeur à mi-hauteur) et fréquences des bunchs et micro-bunchs constituant le faisceau d’électrons/positrons.