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Examen physique :

LISTE DES FIGURES :

31 b. Germes isolés :

C- Examen physique :

L’examen physique est capital, il permet de décrire et de grader la sévérité de la lésion en fonction des 3 composantes qui ont pu participer à son installation [73, 74] : la neuropathie périphérique (sensitive, motrice et autonome),l’artériopathie et l’infection. Nous avons rassemblé dans la figure 22 les principaux mécanismes responsables de la survenu d’une ulcération du pied.

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1)-Description de la lésion :

L’examen physique permet de :

- déterminer les caractéristiques de la plaie : son type, sa taille, sa profondeur et sa localisation.

- rechercher l’existence d’une exposition osseuse ;

- définir si la plaie est neuropathique, ischémique, ou neuro-ischémique (tableau 26)

- rechercher des signes d’infection.

a)-Recherche de signes de neuropathie et d’artériopathie :

Bien que la littérature ait identifié un bon nombre de facteurs de risque d’ulcération et d’amputation, les lésions du pieds sont pour la plupart ischémiques dans 10%, neuropathique ou neuro-ischémique dans 90% des cas [75-77].Nos résultats vont dans le même sens que la littérature. En effet,55,55% de nos sujets avaient un pied neuro-ischémique, 25,92%neuropathique et 9.26% ischémique. Chez la majorité des patients, la neuropathie périphérique, l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) ou les deux jouent un rôle central, raison pour laquelle les ulcérations du pied diabétique (UPD) sont fréquemment classées comme suit : (tableau 26)

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Tableau 26: Caractéristiques typiques des ulcérations du pied diabétiqueselon leur étiologie[78]

*La neuropathie périphérique: (motrice, sensitivomotrice et autonome):

La neuropathie est présente chez 80% des patients porteurs d’ulcération et multiplie par 7 le risque de survenue d’une lésion en comparaison avec les patients sans neuropathie [79].

La neuropathie motrice peut être à l’origine de déformations du pied (pieds creux, orteils en griffe ou en marteau (Figure 23 A) qui sont responsables de d’hyperkératose sur des zones inhabituelles d’hyperappui (tête métatarsienne moyenne sur un avant-pied rond (figure 23B), pulpe des orteils en griffe au niveau plantaire et des articulations interphalangiennes au niveau dorsal. Dans notre étude, 9(16.7%) cas avaient des déformations à type d’orteils en griffe, ce pourcentage est nettement inférieur à celui retrouvé chez les diabétique au CHU Avicenne de Rabat qui était de 82.4%[17].

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Deux complications majeures sont à rechercher :

 Le mal perforant plantaire (MPP) (Figure 24) :

12(22.2%)de nos patients avaient un MPP. La figure 25 résume les étapes de sa formation.

 Pied de Charcot :

Dans notre étude, 9.3% des sujets présentaient pied de Charcot aiguës, celle du CHU de Sétif 7.5%[80].

Le pied de Charcot est défini comme étant une ostéo-arthropathie nerveuse rare, progressive et indolore d’une ou de plusieurs articulations due à une lésion neurologique sous-jacente. Il conduit à des microtraumatismes, à l’effondrement de l’arche plantaire et une instabilité ostéoarticulaire.

Schématiquement, l’ostéo-arthropathie nerveuse (NOAD) évolue en 2phases : -La phase aigüe : correspond à une destruction osseuse et articulaire avec apparition de luxations et de micro-fractures (Figure 26).Cliniquement, le pied présente des signes inflammatoires locaux, il est rouge, chaud, œdémateux et déformé [81].

-La phase chronique : survient quelques mois plus tard, associant reconstruction osseuse anarchique et consolidation avec des séquelles anatomiques parfois majeures (effondrement de l’arche plantaire, raccourcissement antéropostérieur, déformations anarchiques) pouvant aboutir au classique « pied cubique » (Figure 27) et au « pied en tampon buvard » avec convexité de l’arche plantaire [81, 82].

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Figures 23:A- orteils en marteau B-Callosité au niveau d’une zone

(image du service)d’hyperappui (image du service)

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*L’artériopathie :

L’artériopathie est une composante du pied diabétique, moins fréquente que la neuropathie sensitivomotrice . Elle contribue néanmoins à majorer le risque d’ulcération du pied et à aggraver le pronostic en terme d’amputations [83]. L’artériopathie est le plus souvent associée à un degré variable à la neuropathie (pied neuro-ischémique), la fréquence des lésions ischémiques isolées étant faible et varie de 10 à 20 % selon les études [42, 75-77] .

L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) du diabétique, évolue à bas bruit et est souvent asymptomatique. Sa présence est la principale cause du retard de cicatrisation des plaies du pied diabétique. Cliniquement, elle se traduit par une peau du pied froide, fine et sèche, parcheminée (Figure 28), une dépilation du pied et de la jambe, une dystrophie unguéale, la cyanose en déclivité contrastant avec la pâleur à l’élévation du membre, une augmentation du temps de recoloration cutanée et la disparition des pouls distaux.

Toutefois, en présence d’une neuropathie associée, le pied peut être chaud à la palpation.

Le patients ne présentant pas de neuropathie sévère, ont des douleurs en cas d’ischémie critique.

L’absence de pouls permet d’affirmer l’artériopathie, mais leur présence en distale ne permet pas de l’éliminer. La présence d’une gangrène ou d’un ulcère ischémique confirme l’artériopathie.

En cas d’artérite, toute plaie, même minime risque de ne pas cicatriser. Elle peut engendrer la constitution d’une gangrène [84] soit sèche avec évolution vers la momification, ou humide en cas de surinfection associée (figures 29 et 30).

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Figure 28: Pieds ischémiques avec nécrose sèche distale du gros orteil droit(images du service)

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Figure30: Gangrènes humides de l’avant-pied entouréesd’un halo inflammatoire

(images du service)

b)-Recherche de signes d’infection :

Dans notre étude,49 (90.7%) patients avaient une infection.

L’infection aggrave les plaies par son risque d’extension profonde qui peut conduire à l’amputation, parfois engager le pronostic vital du malade [85].

Le diagnostic est clinique et non microbiologique [86]. Il est basé sur la présence d’au moins 2 signes d’inflammation (érythème, douleur ou sensibilité, chaleur ou infiltration) et/ou la présence de secrétions purulentes. La présence de sécrétions non purulentes, d’un tissu friable ou granuleux, d’une odeur fétide et/ou d’une rougeur des bords de l’ulcération doivent eux aussi faire évoquer une infection.

Les signes systémiques de l’infection incluent : une température > 38◦ ou <36◦, une fréquence cardiaque < 90/min, une fréquence respiratoire > 20/min, et/ou une PaCO2 < 32 mmHg [42].

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Mais ces signes habituels de l’infection peuvent être atténués chez le diabétique notamment en cas de neuropathie et d’ischémie.

Le consensus international sur le pied diabétique a classé la sévérité de l’infection du pied diabétique en quatre grades (Figures 32,33 et 34).

L’infection se manifeste cliniquement selon différentes formes :[87] La dermo-hypodermite bactérienne (DHB)

La dermo-hypodermite nécrosante bactérienne (DHBN)

La dermo-hypodermite nécrosante bactérienne-fasciite nécrosante (DHBNFN)

La gangrène humide

Les collections purulentes (abcès ou phlegmon)

L’atteinte ostéoarticulaire sous-jacente doit être évoquée devant la résistance au traitement ou la récidive de l’infection d’une ulcération, surtout en regard d’une proéminence osseuse, une évolution défavorable ou traînante malgré une prise en charge optimale et un apport artériel satisfaisant [84].Un contact osseux rugueux [42, 88],la mobilité anormale d’un orteil et l’aspect érythémateux d’un orteil en saucisse est également en faveur de l’ostéite [89] (Figure 31).

Nous avons noté 34 (63%) cas d’ostéite, pourcentage largement supérieur à ce qui est retrouvé aux CHU d’Ouran (42.39%)[29], Marrakech (32,2%)[90] et de Yopougnon (21%)[91].

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Figure 31: Aspect« en saucisse » du 2ème orteil droit (image du service)

Figure 32:A-Grade 1 (absence d’infection) B- Infection Grade 2 [6]

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Figure 33 : Infection Grade 3(images du service)

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2)-Classification de la lésion du pied:

La classification de la plaie a plusieurs objectifs : Documenter et garder la sévérité de la lésion

Evaluer le pronostic (délai de cicatrisation, risque d’amputation)

Permettre d’élaborer une prise en charge standardisée et adaptée à chaque type de plaie.

Faciliter l’évaluation thérapeutique et la communication entre différentes équipes prenant en charge ces patients [42]

Il existe des classifications différentes par leurs objectifs [92] et il n’existe pas de consensus quant à l’utilisation de l’une ou de l’autre.[93, 94] :

La classifications de l’Université de Texas (classification UT) validée [95, 96] est facile à utiliser. Elle comporte 4 grades relatifs à la profondeur de la plaie et 4 stades selon la présence ou non de l’infection et/ou de l’artériopathie. Elle permet une meilleure description de l’infection et de l’ischémie [78, 96, 97] et permet de prévoir l’issu de l’ulcération du pied diabétique en terme d’amputations. (Tableau 1)

Nos patients classés 0C et 0D 1B ont un pourcentage d’amputation plus élevé par rapport à cette classification.

En revanche, ceux faisant partie des catégories 1D, 2B, 2D, 3B et 3D présentaient des pourcentages d’amputations concordants avec nos résultats. Un patient de la catégorie 3C et présentant une indication à l’amputation est décédé par état de choc septique alors qu’un autre classé 1C a refusé de se faire amputer (Tableau 27).

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Tableau 27: comparaison entre les résultats de notre étude et ceux de la classification de l’UT en terme d’amputation.

* pourcentages rapportés par l’étude de l’Université de Texas **Pourcentages relevés dans notre étude

La classification du consensus International sur le pied diabétique (IWGDF) portant l’acronyme PEDIS(Perfusion Extension-taille,Profondeur,Infection,Sensibilité) (Annexe 2), et celle de

l’IWGDF-IDSA (relative à la partie infectieuse),validées par des études prospectives

[43], caractérisent mieux l’infection et offrent une gradation de sa sévérité. Dans notre série, selon la classification de la IWGDF-IDSA, parmi les 54 patients hospitalisés pour pied diabétique 5(9.3%) ne présentaient pas d’infection, 23 (42.6%)avaient une infection sévère, 21 (38.8%) modérée et 5 (9.3%) faible (Tableau2).

Selon cette classification, l’amputation intéresserait 3% des formes légèrement infectées, 46% des formes modérées et 70% des formes sévères [98]. En effet, dans notre étude, le pourcentage d’amputation augmentait avec la sévérité de la lésion : le pourcentage d’amputation des lésions à infection faible était de 4.4%, modérée de 37.8%,et sévère de 51.1%.

A noter qu’aucune classification n’a tenu compte de la présence du pied de Charcot.

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D-Paraclinique :

1-Bactériologie :

Les prélèvements bactériologiques ne sont faits qu’à partir du Grade 2 de la classification du consensus international du pied diabétique [20, 35, 43, 86] . De ce fait, dans notre série, 5 (9.3%) patients présentant des lésions ischémiques seules n’ont pas bénéficié d’un prélèvement bactériologique. Chez les 49 (90.7%) autres, il y avait une infection du pied et37 (68.5%)d’entre eux ont réalisé différents prélèvements(pus superficiel et profond, biopsies osseuses et prélèvements tissulaires) (Figure 35 A et B).

Le recueil des prélèvements par curetage-écouvillonnage superficiel du fond de l’ulcère, à l’aide d’une curette ou d’un scalpel stérile [99, 100] permet mieux d’identifier les agents pathogènes en réduisant de risque de contamination par la flore aérobie colonisante [35, 99].

Dans notre série, de même que chez certains auteurs avons obtenu une bonne corrélation entre les résultats des prélèvements superficiels et profonds [101].

Dans nos résultats d’étude, aussi bien dans les prélèvements superficiels que profonds, le Staphylococcus aureus sensible à la méticilline (SASM)est majoritaire.

Nos résultats concordent avec la majorité des études qui ont rapporté une prédominance de staphylocoques avec 34% en service de réanimation de l’HMIMV (dont 72% méticilline sensible)[102], 57 %au CHU d’Auvergne[103], 17,28% au CHU Sétif [104] et54,8% au CHU Marrakech [90].

L’étude de LIPSKY [35] a noté nette prédominance de Cocci gram positif (71,6%) par rapport aux Bacilles gram négatif (38,4%). Cette même tendance a été retrouvée dans notre série.

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Le plus souvent, les infections superficielles sont monomicrobiennes (staphylocoque doré, streptocoque…) et les infections profondes sont polymicrobiennes (germes Gram positif, Gram négatif et anaérobies) [32]. Des corrélations entre les types de plaies et les germes identifiés ont été décrites [87]. (Tableau 28)

Tableau 28: Corrélation clinico-biologique entre les types de plaies et les germes identifiés [87]

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2-Examens de biologie d’urgence :

Aucun examen n’est suffisamment sensible et spécifique pour porter le diagnostic d’infection ou de colonisation d’une plaie du pied chez le diabétique.

Dans un contexte d’urgence, la recherche d’une infection systémique se fait par la NFS et la CRP. Chez 34 (63%) patients de notre série, une hyperleucocytose a été retrouvée et la médiane de CRP était de75 mg/l [72]. En effet, l’hyperleucocytose >12 000/mm3 et la leucopénie <4000 mmm3 entrent dans la définition même d’une infection sévère de Grade 4 [6, 35, 43]. Ces paramètres peuvent faire défaut même en cas d’atteinte sévère [105, 106].

Aussi, le dosage de la glycémie et la recherche d’une DAC doivent être systématique [72]. Dans notre série, la moyenne de la glycémie à l’admission était de 2,82±1,59 g/l contre33.3 % retrouvée dans l’étude du CHU Yopougnon [91] et 20 (37%) de nos sujets étaient en DAC.

L’évolution du taux de CRP serait un bon indice de jugement de l’efficacité du traitement [107].

La procalcitonine, n’est pas d’utilisation courante dans notre service en terme de prise en charge du pied diabétique du fait de son coût élevé. Néanmoins, son dosage serait utile pour le diagnostic de l’infection. Deux études prospectives [108, 109] ont démontré que le taux de procalcitonine est un meilleur indicateur de l’infection que le taux de globules blancs ou de CRP. La combinaison de la procalcitonine et la CRP permet de distinguer les ulcères non infectés des ulcères à infections légères ou modérées [108].

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3-Imagerie :

L’imagerie permet de délimiter les atteintes profondes des tissus mou, les tissus collectés et la détection de l’atteinte osseuse.

Aux urgences, les deux examens morphologiques demandés sont la radiographie simple du pied et l’échodoppler des membres inférieurs. L’IRM n’est pas un examen d’urgence [72].

a)-Radiographie standard du pied :

Dans notre série, la radiographie du pied a été systématiquement réalisée. Elle a révélé que 34 (63%) sujets avaient une ostéite à la radiographie du pied.

Il s’agit d’un examen morphologique souvent suffisant et nécessaire à tout sujet se présentant pour la première fois avec un pied diabétique ou ayant un MPP.

La sensibilité de la radiographie est de 60 % et sa spécificité de 65 %. Elle permet à la fois de rechercher des déformations ou destructions osseuses (exemple pied de Charcot(Figure 36)) , la présence de gaz au sein des tissus mous (témoignant de la présence de germes anaérobies), l’identification des corps étrangers radio-opaques et la recherche d’une fracture sous-jacente [72]. Aussi, des calcifications artérielles peuvent également être présentent témoignant de l’atteinte vasculaire (figure 37).

Elle fournit des informations relativement fiables en cas d’ostéomyélite établie tels la présence de lacunes (disparition de la trame osseuse en coup de gomme), réactions périostées et destruction articulaire.

Une radiographie normale devant une suspicion d’ostéite doit être refaite au bout de 10 jours car les signes d’ostéite sont souvent retardés et les signes de fissure ou de fracture discrets. Cependant la distinction entre les lésions destructrices de la neuro-arthropathie de Charcot à la phase aiguë reste difficile.

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Figure 36: destruction osseuse à la radiographie du pied chez un partient

présentant un pied de Charcot chronique (image du service)

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Figure 38: Radiographie objectivant la présence de gaz au niveau du tissu mou témoignant de la

présence de germes anaérobies (images du service)

b)-Le bilan vasculaire :

Dans notre étude, l’angioscanner et l’échodoppler n’ont été indiqué que chez 5(9,3%) patients pour suspicion d’ischémie critique.

La mesure de l’IPS (Index de Pression Systolique), la mesure de la pression systolique du gros orteil (PSGO) et la mesure transcutanée de la pression en oxygène (TCPO2), sont des examens simples à réaliser permettant d’évaluer la sévérité de l’ischémie (Figures 39 et 40)[110].Dans notre pratique quotidienne, l’indisponibilité de ces examens limite l’évaluation précise des lésions vasculaires.

L’échodoppler des membres inférieurs n’est demandé en urgence qu’en cas d’ischémie critique. Il doit viser la recherche d’une lésion vasculaire curable [72].

L’Angioscanner peut être une alternative à l’artériographie pour évaluer les lésions distales et calcifiées [112, 113].

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