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5.4.1

Introduction

Les mesures de r´esonance paramagn´etique ´electronique entreprises en fin de chapitre pr´ec´edent ont r´ev´el´e un nouveau signal, not´e arbitrairement TX, dans nos monocristaux HOYA irradi´es avec

des ´electrons de 1 MeV. Il est la signature d’un d´efaut intrins`eque en site silicium, dans un ´etat excit´e de spin S=1 de dur´ee de vie longue. Parmi les candidats potentiels, nous avons privil´egi´e l’hypoth`ese d’un auto-interstitiel tel que CspSi[100], Sisp[110]ou encore (Sisp)2.

Puisque le recours `a des techniques plus r´esolutives et compl´ementaires `a la r´esonance parama- gn´etique ´electronique classique en onde continue comme la RPE puls´ee, l’ENDOR ou l’ODMR, n’a pu ˆetre envisag´e dans le temps imparti pour la r´ealisation de cette th`ese, nous proposons d’´etudier la cin´etique de recuit du d´efaut associ´e au centre TX. Une telle exp´erience devrait nous permettre

d’expliciter sa nature ou, pour le moins, de statuer sur la proposition d’un interstitiel isol´e selon la temp´erature `a laquelle le signal RPE disparaˆıt. Une hi´erarchie de la stabilit´e des d´efauts dans SiC a, en effet, ´et´e propos´ee par diff´erents auteurs [120, 238, 241, 268] de sorte que disparaissent succes- sivement les interstitiels, les di-interstitiels de carbone, les monolacunes de silicium, les bilacunes carbone-silicium puis les monolacunes de carbone.

5.4.2

etails exp´erimentaux

Les recuits isochrones du monocristal H1e980k300K2F sont r´ealis´es dans un four tubulaire en quartz sous flux d’argon. Le protocole exp´erimental retenu est similaire `a celui de l’exp´erience pr´ec´edente (Fig. 5.5).

Entre chaque recuit, l’´echantillon est analys´e en RPE au moyen du spectrom`etre BRUKER ESP 300e du LSI. Les spectres de l’azote neutre, de TX et de T1 sont enregistr´es aux temp´era-

tures respectives de 30, 100 et 300 K. L’illumination est assur´ee par un laser NdYVO3doubl´e en fr´equence `a 530 nm. L’´eclairement du monocristal est fix´e `a 1 W.cm−2tout au long de l’exp´erience.

5.4.3

esultats

Nous reportons, en Fig. 5.8, les rapports d’intensit´e I(T)/I0 associ´es aux signaux T1, TX et `a

celui de l’azote neutre pour lesquels I(T) repr´esente l’intensit´e mesur´ee apr`es recuit isochrone `a la temp´erature T et I0, celle d´etermin´ee dans l’´echantillon brut de croissance pour N0 et imm´ediate- ment apr`es l’irradiation pour les centres T1 et TX.

Nous constatons que le recuit de TX proc`ede en deux ´etapes. Tandis qu’un premier stade

s’´etendant entre 100 et 250˚C environ implique la diminution de 35 % de son intensit´e, le second entraˆıne la disparition compl`ete de son signal d`es 350 ˚C. La Fig. 5.8a nous enseigne que cette

cin´etique de recuit est qualitativement comparable avec celle de T1. Conform´ement `a ce que nous avons observ´e dans le cas d’une irradiation avec des protons de 12 MeV (Fig. 5.7), la concentration en monolacunes de silicium s’abaisse tout d’abord de 30 % autour de 200 ˚C, puis `a nouveau de 15 % vers 350 ˚C. La restauration de l’azote neutre est, quant `a elle, parfaitement corr´el´ee avec la disparition du signal T1 (Fig. 5.8b). En effet, 30 % puis 40 % de la concentration initiale en

porteurs libres est recouvr´ee apr`es un recuit `a 250 et 350˚C. Il semble donc que TX ne joue aucun

rˆole dans la compensation de notre ´echantillon de 3C-SiC. D’autre part, un ajustement des points exp´erimentaux par une courbe sigmo¨ıde trac´ee sur la base d’une cin´etique de recuit d’ordre I (Eq. 1.15) permet d’estimer `a (1,37 ± 0,15) eV l’´energie d’activation du processus impliquant la disparition de ce centre RPE r´ev´el´e sous illumination.

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 0 50 100 150 200 250 300 350 Température de recuit (°C) I( T) /I0 TX T1 TX N0 (b) (a)

Fig. 5.8 – Evolution des rapports d’intensit´e I(T)/I0 associ´es aux signaux T1 (cercles verts) et

TX (cercles noirs), acquis `a 300 et 100 K, ainsi qu’`a N0 (cercles bleus), enregistr´e `a 30 K, avec la

temp´erature de recuit. La courbe sigmo¨ıde trac´ee en rouge, sur la base de l’Eq. 1.15, repr´esente le meilleur ajustement des points exp´erimentaux.

5.4.4

Discussion

Au cours de cette exp´erience, nous avons distinctement observ´e la correspondance entre les ´

etapes de recuit du signal TX avec celles du centre T1en-dessous de 350˚C. Aussi est-il d´esormais

acquis dans le 3C-SiC dop´e n [120] que les deux premiers stades de recuit de la monolacune de silicium sont la cons´equence, pour le premier, de la recombinaison des paires de Frenkel proches et pour le second, de la recombinaison des paires de Frenkel `a large s´eparation limit´ee par la diffusion des interstitiels. La corr´elation entre nos r´esultats exp´erimentaux et ceux des simulations th´eoriques [116, 120] permet donc, `a priori, de prioriser l’hypoth`ese du mod`ele Sisp[110] pour une attribution

au centre TX. Pour tenter de le confirmer, discutons plus avant des m´ecanismes impliqu´es dans la

recombinaison des paires de Frenkel induites par une irradiation ´electronique `a 1 MeV.

Si l’´energie d’irradiation conditionne le nombre d’atomes de carbone et de silicium d´eplac´es hors de leur site cristallin, elle d´etermine ´egalement la distance moyenne des paires lacune-interstitiel. Comme il a ´et´e montr´e par Bardeleben et al. dans le 6H-SiC [132], une irradiation avec des ´electrons de faible ´energie (environ 100 keV) implique la cr´eation de paires de Frenkel dans le sous-r´eseau carbone. A plus haute ´energie (environ 300 keV), les lacunes et les interstitiels de carbone sont

suffisamment distants pour ne plus interagir mutuellement tandis que les atomes de silicium, du fait de leur plus forte masse, forment toujours des paires de Frenkel. C’est seulement dans la gamme du MeV, nous concernant ici directement que les lacunes et les interstitiels de silicium sont s´epar´es spatialement. S’ils sont suffisamment distants, ces d´efauts doivent n´ecessairement se rapprocher pour pouvoir se recombiner. Aussi, les diff´erentes ´etudes entreprises en liaisons fortes SCC-DFTB [115] et en DFT-LDA [116] pr´edisent une meilleure mobilit´e des interstitiels par rapport aux d´efauts monolacunaires. Si les interstitiels de carbone tels que CspSi[100] (Fig. 5.4)

diffusent `a basse temp´erature [116] et participent tr`es vraisemblablement au premier stade de recuit du SiC entre 150 et 300 K [253, 254, 269, 270], les interstitiels de silicium migrent quant `a eux plus difficilement et requi`erent donc une temp´erature plus ´elev´ee pour activer leur diffusion. La barri`ere de migration de Sisp[110] est ainsi estim´ee `a 1,4 eV ce qui correspond tout `a fait `a

l’´energie d’activation du m´ecanisme limitant responsable de la disparition du centre TX.

Le d´eplacement de cet d’interstitiel de silicium fait intervenir un processus de kick-out [116], c’est-`a-dire qu’un des atomes de silicium du dumbbell saute vers le site Si adjacent et d´eplace l’atome de silicium dans la direction [110] correspondante pour former un nouvel interstitiel (Fig. 5.9). Aussi, lors de sa diffusion, Sisp[110] est susceptible d’ˆetre capt´e par le champ d’at-

traction d’une lacune pour former une paire de Frenkel. Cette derni`ere devrait alors se recombiner spontan´ement car l’´energie d’activation attribu´ee `a ce m´ecanisme est nettement inf´erieure `a la barri`ere de migration de l’interstitiel isol´e [120]. L’hypoth`ese du d´efaut Sisp[110]permet donc d’ex-

pliquer, d’une part, le second stade de recuit des monolacunes de silicium limit´ee par la diffusion des interstitiels et d’autre part, la disparition de ces derniers `a partir de 350 ˚C. Sisp[110], diffu-

sant dans le r´eseau cristallin, est effectivement susceptible d’ˆetre impliqu´e dans d’autres processus r´eactionnels aboutissant rapidement `a sa disparition compl`ete dans le mat´eriau.

Discutons, `a pr´esent, du premier stade de recuit du centre TXdont on suppose qu’il correspond

`

a la recombinaison des paires de Frenkel proches impliquant Sisp[110]. Dans ce cas, les simulations

entreprises dans le sous-r´eseau silicium [255] aboutissent `a des barri`eres de recombinaison comprises entre 0,24 et 1,6 eV, d’autant plus importantes que la distance entre la lacune et l’interstitiel est grande. Les hauteurs des barri`eres de recombinaison des paires de Frenkel proches sont donc tr`es dispers´ees selon que la distance entre la lacune et son interstitiel est plus ou moins grande. Ceci peut justifier le fait que la premi`ere ´etape de recuit du centre TX, parfaitement corr´el´ee

de surcroˆıt avec celle de la monolacune de silicium, s’´etende dans une gamme de temp´erature relativement importante. Au final, nous constatons donc que le mod`ele Sisp[110] peut expliquer,

de fa¸con convaincante, la cin´etique globale de recuit du centre TX.

L’hypoth`ese du d´efaut CspSi[100] peut ˆetre, quant `a elle, raisonnablement exclue. L’´energie

de migration de cet interstitiel ´etant tr`es faible (Tab. 1.9), l’annihilation des paires de Frenkel

VC− CspSi[100]est essentiellement conditionn´ee par leur ´energie de recombinaison. Les calculs ab

initio SCC-DFTB (Self-Consistent-Charge Density-Functional Tight-Binding) r´ealis´es par Rauls

[115] associent une ´energie comprise entre 0,15 et 0,34 eV `a la recombinaison d’un interstitiel avec une lacune situ´ee en second voisin tandis qu’elle atteint 0,98 eV pour une lacune plus ´eloign´ee [255]. L’´energie augmente ainsi `a mesure que le d´efaut monolacunaire est davantage distant de son interstitiel. Le mod`ele de CspSi[100] ne peut donc expliquer l’existence des deux stades de recuit

bien distincts du centre TX ainsi que la disparition rapide de ce dernier `a 350˚C.

Si

C

Au final, le centre RPE TX d´etect´e sous ´eclairement serait donc imputable `a un ´etat excit´e de

l’interstitiel isol´e Sisp[110]. Puisque l’´etat de charge neutre de ce d´efaut pr´evaut dans les mat´eriaux

dop´es n ou compens´es [116] (Fig. 4.29), nous proposons qu’il puisse d’agir de l’´etat de charge une fois positif de spin S=1.

5.4.5

Conclusion

Nous avons constat´e que la cin´etique de recuit du d´efaut associ´e `a TX proc`ede en deux ´etapes

`

a 150 et 350 ˚C correspondant aux deux premiers stades de recuit de la monolacune de silicium dont la th´eorie pr´evoit qu’ils soient imputables `a la recombinaison des paires de Frenkel. Nous avons alors prioris´e l’hypoth`ese de l’interstitiel isol´e Si+sp[110] pour une attribution `a ce nouveau signal RPE d´etect´e dans des monocristaux irradi´es avec des ´electrons de 1 MeV.

Pour confirmer cette proposition, il est n´ecessaire d’employer d’autres techniques exp´erimen- tales davantage r´esolutives que la RPE ou encore de proc´eder au calcul des tenseurs d’interaction hyperfines ou de la structure ´electronique des interstitiels de silicium dans le 3C-SiC.