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1. Caractéristiques sociologiques des corpus

2.7. Evolution de la relation médecin-patient

De manière assez générale, les médecins rapportent une évolution de la relation médecin-patient dans le temps « non, non, ça a beaucoup changé » (MGP4). Cette évolution est perçue aussi bien positivement « c’est pas plus mal d’ailleurs qu’il y ait eu une évolution. Je trouve ça très

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qu’avant » (MGE8).

2.7.2. Evolution sociétale

Le déclin de la relation paternaliste

Le long des interviews, on assiste au déclin de la relation paternaliste « je constate cette différence

entre il y a une 30aine d’années où les gens prenaient ça, allez hop, ils ne vous posaient pas de question ou exceptionnellement » (MGP2).

Ce déclin est accentué par le parcours de santé des patients entre différentes références médicales « avant je prenais en charge tout, maintenant […] je dis au malade d’aller voir [le

spécialiste] » (MGP10). Aujourd’hui, les autorités médicales poussent les généralistes vers une prise en charge de leurs patients chroniques qui multiplie les acteurs médicaux « vous l’avez envoyé

chez le diabéto, chez le cardio, chez ceci, cela » (MGP10). Cette affluence d’acteurs amène vers un partage de la responsabilité médicale « c’est une façon de se cacher aussi, de s’écarter de la

responsabilité, de se diluer les responsabilités » (MGP10). L’information des patients par les médias

Aujourd’hui, l’accès à l’information médicale est devenu simple et déconnecté du médecin. Les patients se documentent aussi bien grâce à une recherche active « Bon avec internet, ils

apprennent des choses, ils entendent des choses, ils lisent des choses » (MGP2), « elle va

regarder sur internet, elle va se documenter » (MGP10), qu’une réception passive « elle avait

vu à la télé que ça [la vaccination antigrippale] tuait les gens » (MGE4). Les droits des patients

Les droits des patients ont aussi été l’objet d’une importante progression ces dernières décennies « c’est notre société actuelle qui… tout leur est dû » (MGE5). Cette évolution semble influer sur les réclamations des patients « il y a des gens qui sont très bons pour ça et qui estiment que :

je cotise, je paie, j’ai droit » (MGP1), « L’exemple que je vois tout le temps, c’est la mère de

famille qui arrive avec 4 gamins qui dit : faut regarder celui-là, il a le nez qui coule. Celui-là il a toussé une fois cette nuit. Le 3ème il a rien mais regardez-le quand même. Le 4ème et bah

allez-y va, regardez-le aussi. Et puis on vous tend la carte vitale : j’ai la CMU, faites-vous payer. Ça c’est quotidien » (MGP4). Ainsi, les médecins en viennent à craindre les progressions futures « si en 2017, on a le tiers payant généralisé, ça sera le pompon ! » (MGE5).

La judiciarisation de la médecine

Les interviewés révèlent également craindre la judiciarisation de la médecine « maintenant la

médecine, le patient est roi, il peut vous changer d’un clic […]. Pour un oui, ou pour un non, maintenant les gens portent plainte » (MGE10).

2.7.3. Une attitude consumériste

60 droit à la santé « il y a trop de demandes. Enfin : j’ai droit à ceci, je veux ceci et je veux, il

faut cela […]. Les demandes en veux-tu en voilà ; de tout et de n’importe quoi » (MGE5), « ils consomment de la consultation médicale, comme on consomme au supermarché » (MGE8). Cette attitude consumériste s’étend jusqu’au médecin lui-même « il y a des gens qui vous

prennent pour un citron. Ils vous pressent, ils vous pressent jusqu’à ce qu’il y ait plus de jus » (MGP1).

2.7.4. Un défaut de respect dans la relation médecin-patient

Il semble que la combinaison de l’autonomisation du patient au sein d’une société de consommation conduise vers un certain manque de considération envers le praticien « On va voir le prestataire

de service, c’est l’équivalent. Qui va faire l’ordonnance » (MGP4). Et les médecins généralistes font péniblement face à des patients qui leur paraissent de plus en plus exigeants « ça a beaucoup

changé la relation médecin-patient. Les patients qui pensent avoir des droits et plus de devoirs. Ça, ça a changé. Ça change tout » (MGP4).

2.7.5. Une dimension mercantile

Par ailleurs, les années d’exercice pèsent en faveur du médecin en raison d’un aspect commercial du métier « Ben, au début on sait jamais. Le patient il va partir. On a peur de ça, on a peur de

manquer. Quand on a plus de 20 ans de métier, on voit bien que les patients ils ne manqueront pas. Et puis il y a des jours où il y en a plus que ce qui faudrait. Il y a un rapport de force aussi qui s’inverse » (MGP4). En effet, en début d’exercice, les médecins redoutent de perdre leur patientèle « à 30 ans, on pense que tout est permis, qu’on est là pour

se faire une clientèle » (MGP1). Cette problématique s’efface avec les années « Quand on débute […] on se dit il faut croûter, enfin je veux dire financièrement il faut assurer un avenir et un devenir. Et donc on est plus conciliant avec le patient. On va accepter du patient des choses qu’on n’accepte plus arrivé à un certain âge […]. On n’a plus cette épée de Damoclès qui fait qu’il faut rembourser le cabinet, rembourser ceci, rembourser cela » (MGP9). En étant dégagé de ces contraintes financières, le médecin est plus libre de s’exprimer et de pratiquer comme il l’entend.

Synthèse :

 La progression des droits des patients et leur accès direct à l’information médicale ont changé la face de la relation médecin-patient et rendent les patients plus exigeants ;  Le médecin est parfois plus un prestataire de service qu’une autorité médicale ;  Les médecins soumis à des contraintes financières sont plus acceptants.

2.8. Conditions d’exercice