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Evolution et répartition géographique

1. 1 Statut phylogénétique

1.2 Evolution et répartition géographique

Le cheval domestique est le résultat d’une longue histoire évolutive. L’évolution des Equidés a

débuté il y a plus de 55 millions d’années en Amérique et en Eurasie. Le plus ancien

périssodactyle sensu stricto est Hyracotherium, de la base de l’Eocène d’Europe et d’Amérique du Nord (-53 M.A.) (Fig.1). Hyracotherium mesurait entre 25 et 50 cm au garrot et pesait 5 à

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10 kilos. Il se nourrissait de feuillages, de graines et de fruits et était doté de membres graciles avec des pieds à coussinets comportant 4 doigts aux antérieurs et 3 aux postérieurs. Le genre

Equus est apparu au Pléistocène (-3.5 M.A.) sur le continent nord-américain, puis a migré en Asie, en Europe, en Afrique du Nord et en Amérique du Sud (McFadden 1992, cité par Waring 2003). Il a disparu du continent américain à la fin du Pléistocène (~ 10 000 ans), mais a survécu

et s’est diversifié en Asie, en Europe et en Afrique, donnant ainsi naissance aux chevaux, ânes et zèbres actuels.

Figure 1 : Arbre évolutif des équidés depuis 55 millions d’année. Les premiers représentants

de la famille avaient trois doigts et mangeaient des arbustes (browsers), alors que les équidés

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36 Aujourd’hui, les populations d’équidés sauvages sont en nette régression : sur les espèces

sauvages, 5 sont en danger d’extinction (source: UICN). Aujourd’hui éteintà l’état naturel, le cheval de Przewalski n’a survécu en tant qu’espèce uniquement grâce à la reproduction en captivité. Des projets de conservation et réintroduction de cette espèce sont en place depuis une

dizaine d’années, en Mongolie notamment.

Les chevaux domestiques ont été introduits par l’homme sur l’ensemble des continents. Il existe par ailleurs, à différents endroits du monde, des populations de chevaux issus du marronnage,

i.e. des chevaux d’origine domestique retournés à l’état sauvage (e.g. mustangs de l’Ouest

américain, brumbies australiens) ou vivant en semi-liberté (e.g. chevaux de race Camargue dans le sud de la France, Pottoks du pays basque). D’autres populations domestiques sont gérées de

manière naturaliste telle que les Konik polonais, race jugée proche génétiquement des chevaux tarpans, espèce éteinte qui vivaient à l’état sauvage en Europe de l’est. L’étude de ces populations a permis d’appréhender les caractéristiques générales de l’espèce.

1. 3 Caractéristiques de l’espèce en milieu naturel

1.3.1 Budget temps et régime alimentaire

La répartition des activités chez le cheval se concentre principalement sur l’alimentation : sur

β4 heures, les chevaux passent entre 15 et 16 heures à s’alimenter, soit 60% à 80% de leur temps. La qualité et la quantité de nourriture disponible ainsi que les besoins énergétiques des individus (gestation, lactation, etc.) peuvent influencer le temps consacré à cette activité.

L’alimentation, quasi continue, est toutefois interrompue par des périodes de repos ou

d’activités liées à d’autres types de comportement (comportement de maintenance, sociaux ou

de reproduction). Ainsi, les individus passent entre 5 à 6 heures à se reposer, 2 à 3 heures à se

déplacer et β à γ heures à surveiller l’environnement (i.e. immobile, le cheval balaye son encolure et sa tête afin de « scanner son environnement ») (Boyd 1988; Waring 2003). Par

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ailleurs, cette répartition temporelle des activités varie selon l’environnement, la saison, l’âge

et le sexe de l’animal (Boyd et Keiper 2005).

En milieu naturel, le cheval vit essentiellement dans des zones où l’alimentation est pauvre en énergie mais variée (steppes, forêts, déserts) et se nourrit alors principalement d’aliments riches

en fibres (herbe, feuilles, glands, graines, plantes aquatiques, …) (Slade et al. 1970; Crane et al. 1997). Son estomac monogastrique lui permet une digestion rapide : l’estomac se vide au

bout de 2 à 3 heures (Martin-Rosset 1990), impliquant ainsi des prises alimentaires fréquentes (51 bouchées à la minutes) (Waring 2003). Son mode d’alimentation crée des zones de pelouse

très rases broutées intensément, et des zones de refus, où l’herbe est plus haute. En effet, par le

moyen de processus attentionnels, le cheval est capable d’identifier et discriminer les ressources dont il a besoin de celles qu’il doit éviter (association des caractéristique de l’aliment avec ses

conséquences post-ingestion) (Cairns et al. 2002).

1.3.2 Domaine vital et déplacements

Le domaine vital correspond à une aire géographique sur laquelle un individu évolue afin de répondre à ces besoins vitaux (i.e. nourriture, eau, abris, partenaires sexuels) et dont la taille varie notamment selon la disponibilité en ressources. Chez le cheval, cet espace peut aller

jusqu’à γ00 km2 dans certaines régions arides des Etats-Unis. Les frontières de cet espace ne

sont par ailleurs pas défendues, il ne s’agit donc pas d’un territoire. En effet, il est possible d’observer plusieurs groupes familiaux se retrouver autour de ressources limitées (e.g.de l’eau) ou pour faire face à des prédateurs (Boyd et Keiper 2005).

Le cheval est une espèce très mobile (il est possible que des individus parcourent jusqu’à 16 km en une journée pour atteindre une ressource éloignée, comme un point d’eau par exemple)

(Feist 1971). La locomotion représente environ 3 à 13 % de leur budget temps (e.g. chevaux Camargue : 5.5 à 12.7 %, Duncan 1980; chevaux Konik : 3.5 %, Kownacki et al. 1978; chevaux

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de Przewalski : 8.5 à 14.1 %, Boyd 1988) et correspond essentiellement à des déplacements lents. Ainsi, le pas exploratoire constitue l’allure prédominante puisqu’il est associé à l’alimentation et facilite la recherche de nourriture (1 pas toutes les 12 secondes en moyenne, Waring, 2003). Les allures plus vives comme le trot et le galop sont beaucoup plus ponctuelles (e.g. 0.29 % du budget-temps, Duncan, 1980) et principalement observées lors d’un événement stressant ou pendant les séquences de jeu (McDonnell et Poulin 2002).

1.3.3 Structure et organisation sociale

Le cheval est une espèce sociale où les individus s’organisent principalement autour d’un groupe familial ou harems constitué d’un ou deux (le plus souvent) étalons reproducteurs, de une à cinq juments ainsi que leurs progénitures de l’année en cours et de l’année précédente

(Feist et McCullough 1976; Klingel 1982; Feh 2005; Fureix et al. 2012a). Généralement, les

harems sont formés d’une dizaine d’individus, même si ce chiffre peut varier d’un groupe à l’autre (de β à β0 chevaux) (Waring 2003). A l’âge de β ans en moyenne, les jeunes mâles et

jeunes femelles quittent le groupe familial (Rutberg et Keiper 1993; Monard et Duncan 1996; Boyd et Keiper 2005). Les femelles, rejoignent un harem déjà existant ou un mâle célibataire pour former un nouveau groupe familial, tandis que les jeunes mâles rejoignent un groupe de

mâles célibataires composés d’étalons sexuellement matures, mais non reproducteurs (de β-15

étalons). Il s’agit soit de jeunes (γ-5 ans) qui n’ont pas encore créé de famille, soit de vieux

étalons en fin de vie reproductive (Boyd 1988). Une autre forme moins courantes de groupe, quoique peu stable et temporaire, formé de sub-adultes mixtes non reproducteurs et mâles solitaires peut exister par ailleurs (Waring 2003).

L’organisation sociale d’un groupe repose sur l’établissement d’une hiérarchie de dominance

permettant de réduire les tensions entre individus. Les animaux dominants ont accès en priorité à une ressource donnée quand elle est restreinte. Le statut hiérarchique de chaque membre du

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groupe étant connu, les épisodes agressifs sont peu fréquents et la plupart du temps des signaux subtils (e.g. oreilles plaquées en arrière) suffisent pour éviter les conflits (Rutberg et Greenberg 1990; Heitor et al. 2006). Le rang de dominance peut être influencé par différents facteurs dont les principaux sont l’âge (Tyler 1972; Feist et McCullough 1976; Wells et Goldschmidt-Rothschild 1979; Houpt et Keiper 1982), l’ancienneté dans le groupe (Tyler 1972; Monard et Duncan 1996) et pour les jeunes le rang de dominance de la mère (Feh 1999).

Des affinités particulières entre certains membres du groupe s’établissent. Un individu a en

général entre un et trois partenaires préférés (Feh 2005) à côté desquels il est plus souvent observé (proximité spatiale) et avec lesquels il effectue plus de toilettage mutuel et autres contacts socio-positifs (Feh et de Mazierès 1993; Boyd et Keiper 2005; Feh 2005). La force de

ces liens peut cependant être affectée par des changements affectant l’individu tels que le statut

reproducteur, le stade de maturation, la santé, ou encore l’expérience.

1.3.4 Communication

La socialité implique l’établissement d’une communication entre les différents membres du

groupe. Chez le cheval, la communication est multimodale : impliquant à la fois les canaux acoustique (Kiley 1972; Lemasson et al. 2009; Briefer 2012; Maigrot et al. 2017), olfactif (Rubenstein et Hack 1992; Saslow 2002), tactile (Feh et de Mazierès 1993; Fureix et al. 2012a), et visuel (Waring 2003). Le « langage corporel » fait partie intégrante de la communication chez le cheval, basé sur des postures où chaque partie du corps : port de tête, d’encolure, naseaux, position des oreilles, etc., est porteuse d’informations sur l’émetteur et plus particulièrement sur son état émotionnel (intensité et valence). Par exemple, lorsqu’un cheval hennit, c’est-à-dire en cas de séparation sociale, son museau est légèrement élevé, sa bouche ouverte, ses naseaux dilatés et ses oreilles pointées vers l’avant. En revanche, lors de la production d’un nicker, souvent associée à une anticipation alimentaire, la bouche est fermée,

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les naseaux relâchés, et les oreilles mobiles (Stevenson 1975). Les signaux visuels, plus subtiles, impliquent particulièrement des variations de la position des oreilles, des mouvements de bouche, de naseaux ou globalement de la tête qui permettent de transmettre des messages allant de la menace à l’intention de contacts positifs. Par ailleurs, une certaine graduation

apparait dans l’émission de ces signauxet le passage d’une posture à une autre est progressif

(Fig.2) (Waring 2003).

Figure 2 : Expression d’alarme (à gauche) et de plaisir sensuel (à droite) (d’après Waring,

2003).