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II. Le kisspeptine : du gène à la fonction

II.3. c. Etudes in vitro

La capacité de kp à stimuler la sécrétion de GnRH a également été étudiée dans des

modèles d’explants hypothalamiques de rongeurs adultes (Thompson et al., 2004; Nazian,

2006) et pendant le développement post-natal (Castellano et al., 2006b; Nazian, 2006).

L’équipe de Castellano a élargi son champ d’étude par une approche pharmacologique visant

à étudier les voies de signalisation impliquées dans la sécrétion de GnRH après stimulation

par le kisspeptine sur des explants hypothalamiques issus de rat juvénile. Ainsi, suite à une

stimulation par le kp, le neurone à GnRH fait intervenir la voie des protéines Gαq entrainant

ainsi la libération de calcium du réticulum endoplasmique et l’activation de la protéine kinase

A, puis, dans un second temps, ils observent l’activation de la voie MAP kinase et le

recrutement des ERK1/2 (Castellano et al., 2006b). Ces résultats ayant été obtenus sur des

explants hypothalamiques contenant l’aire pré-optique et l’éminence médiane, il est donc

difficile de distinguer le site d’action précis de kp : les corps cellulaires ou les terminaisons

des neurones à GnRH ? Afin de répondre à cette question, des études ont été réalisées sur des

explants d’aire pré-optique ou d’éminence médiane.

- Action sur les corps cellulaire à GnRH : Deux groupes de recherche comparent

l’excitabilité des neurones à GnRH, après stimulation par le kp, sur des explants d’aire

pré-optique prélevés à l’âge adulte chez le rat (Dumalska et al., 2008) et la souris (Han et al.,

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2005; Ducret et al., 2010) et chez des souris en période juvénile (Han et al., 2005). Ils

montrent ainsi que l’activité électrophysiologique des neurones à GnRH est augmentée par le

kp que ce soit à l’âge adulte (Han et al., 2005; Dumalska et al., 2008; Ducret et al., 2010) ou

pendant la période juvénile (Han et al., 2005). De plus, le pourcentage de neurones à GnRH

capable de répondre électrophysiologiquement au kp augmente au cours du développement

(Han et al., 2005). En accord avec les résultats précédents, Nazian et ses collaborateurs

montrent non seulement que des explants hypothalamiques sont capables de sécréter du kp

dans le milieu mais également que cette sécrétion est plus importante sur des explants

d’hypothalami provenant de rats mâles adultes comparés à ceux obtenus chez des rats en

période infantile (Nazian, 2006). Une action stimulatrice de kp sur l’activité

électrophysiologique et calcique des neurones à GnRH ainsi que sur la sécrétion de GnRH,

plus particulièrement sur l’amplitude des pulses, a également été observée sur des neurones à

GnRH issus de placodes olfactives embryonnaires murines (Constantin et al., 2009a;

Constantin et al., 2009b). Tous ces résultats suggèrent donc un rôle précoce de kp sur

l’activité et la sécrétion des neurones à GnRH qui seraient déjà capables de répondre au kp au

cours du développement embryonnaire. Il est intéressant de noter que, suite à une stimulation

par le kp, la réponse électrophysiologique des neurones à GnRH chez l’adulte est différente en

fonction du sexe : la stimulation par le kp provoque une dépolarisation de la membrane plus

importante chez les mâles que chez les femelles. Cette dépolarisation sera suivie d’une

réponse électrophysiologique pour toutes les cellules testées provenant d’explants issus de

femelle contrairement aux mâles (Han et al., 2005). Une étude utilisant des lignées

immortalisées de neurones à GnRH, les GT1-7 et les GN-11 montre que l’ajout de kp dans le

milieu de culture engendre une augmentation de l’expression de l’ARN messager du GnRH et

fait intervenir comme l’ont démontré Castellano et Constantin la voie de signalisation des

MAP kinases (Novaira et al., 2009). Pour finir sur l’action de kp sur les neurones à GnRH in

vitro, un pré-traitement à l’aide d’un antagoniste de Kiss1r inhibe l’action stimulatrice du

kisspeptine sur l’activité électrophysiologique des neurones à GnRH sur des tranches d’aire

pré-optique en culture issues de souris mâle adulte (Roseweir et al., 2009).

- Action sur les terminaisons des neurones à GnRH : Une étude utilisant des explants

d’hypothalamus médio-basal de souris (comprenant l’éminence médiane, le noyau arqué et le

noyau ventromédian) montre que le kp est capable de stimuler directement les terminaisons

nerveuses des neurones à GnRH, sans passer par le corps cellulaire du neurone, au niveau de

l’éminence médiane provoquant ainsi la sécrétion de GnRH (d'Anglemont de Tassigny et al.,

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2008). Ces résultats sont en accord avec une observation faite in vivo sur des singes en

période pubertaire et montrant une sécrétion pulsatile de kp en corrélation avec la sécrétion

pulsatile de GnRH dans la tige infundibulaire (Keen et al., 2008). Tous ces résultats suggèrent

que le kp serait sécrété dans l’éminence médiane de manière pulsatile et pourrait ainsi réguler

la sécrétion de GnRH au niveau des terminaisons des neurones à GnRH.

- Action sur l’hypophyse : Le Kiss1r est exprimé dans les cellules de la pars tuberalis,

une sous-division de l’adénohypophyse, et plus particulièrement dans les cellules

immunomarquées à l’aide d’un anticorps anti-LHβ (d'Anglemont de Tassigny et al., 2008).

Des études sur des cultures de cellules adénohypophysaires montrent également la présence

de l’ARN messager Kiss1r dans les cellules gonadotropes chez le rat (Gutierrez-Pascual et al.,

2007; Richard et al., 2008) et la brebis (Smith et al., 2008b). Toutes ces études suggèrent que

le kp pourrait avoir un rôle direct sur les cellules adénohypophysaires. La majorité des études

par injection périphérique de kp (cf. p.27 paragraphe II.3.b.) ont essayé de discriminer un

effet potentiel de kp sur les cellules gonadotropes en utilisant des modèles de cultures de

cellules ou d’explants hypophysaires provenant de rats pubères ou adultes supplémentés à des

doses similaires de kp (kp-54 ou kp-10) (Matsui et al., 2004; Thompson et al., 2004; Navarro

et al., 2005a; Navarro et al., 2005b). Sur des cultures de cellules hypophysaires dérivées de

rat adulte, aucun effet de kp sur la sécrétion dans le milieu de culture de l’une ou l’autre des

hormones gonadotropes quel que soit le sexe de l’animal n’a été observé (Matsui et al., 2004;

Thompson et al., 2004). En revanche, sur des cultures hypophysaires ovines, porcines et

bovines, d’autres études ont montré un effet stimulateur de kp sur la sécrétion de LH des

cellules hypophysaires en culture (Kadokawa et al., 2008; Smith et al., 2008b; Suzuki et al.,

2008). Néanmoins, l’une de ces études montre que l’injection périphérique de kp n’a pas

d’effet sur la sécrétion de LH chez des brebis HPD (dont l’hypothalamus a été déconnecté de

l’hypophyse) (Smith et al., 2008b). Un effet stimulateur de kp a été détecté sur la sécrétion

des hormones somatotropes (GH, hormone de croissance) et lactotropes (PRL, prolactine) in

vivo chez le rat, la vache et le porc (Gutierrez-Pascual et al., 2007; Kadokawa et al., 2008).

Sur des cultures de cellules hypophysaires dérivées de rats mâles pré-pubères, un effet

stimulateur de l’ajout de kp dans le milieu de culture a été observé sur la sécrétion de LH mais

pas sur la sécrétion de FSH (Navarro et al., 2005a; Navarro et al., 2005b). Une étude plus

récente confirme un effet stimulateur de kp sur la sécrétion de LH sur des cultures

d’adénohypophyse de rats mâles pré-pubères (Gutierrez-Pascual et al., 2007).

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En résumé de cette deuxième partie d’introduction, le kp est un peptide issu de la

transcription du gène Kiss-1. Tout d’abord découvert pour son rôle anti-métastatique, il a par

la suite été montré comme étant un acteur majeur de l’axe

hypothalamo-hypophysio-gonadique. Le kp agit comme un stimulateur de la fonction de reproduction en amont des

neurones à GnRH, plus particulièrement sur la sécrétion de cette neurohormone, et

semble jouer un rôle aussi bien dans la mise en place de cette fonction que dans sa

régulation à l’âge adulte. De plus, un rôle potentiel de kisspeptine est suggéré sur

l’hypophyse, plus particulièrement, une action stimulatrice sur les cellules somatotropes et

lactotropes chez l’adulte et sur les cellules gonadotropes uniquement au cours du

développement péri-pubertaire.

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Figur

e 5: Localisation des corps cellulair

es kiss-1

et kisspeptine immunoréactifs chez les

r

o

ngeurs.

AP0,

aire préoptique; CO, chiasm

a optique; CA, commissure an

térieure, ; RP3V

, région rost

ral périventriculaire du 3

ème

ventricule; ME,

éminence médiane;

ARC, noyau arqué; MB, corps

mamillaires; MeA, amygdale médiane; 3V

, 3

ème

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