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II. Le kisspeptine : du gène à la fonction

II.3. b. Etudes in vivo d’ injection de kisspeptine

Parallèlement aux études d’inactivation du système kisspeptine/Kiss1r, de nombreuses

équipes ont essayé de comprendre le rôle de kp sur l’axe HHG dans le déclenchement de la

puberté et durant la vie reproductive adulte, en utilisant des approches pharmacologiques

d’injections périphériques ou intracerebroventiculaires (i.c.v) de kp chez différentes espèces.

Chez l’adulte, des études par injection périphérique de kp montrent la capacité de ce

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et l’homme (Matsui et al., 2004; Dhillo et al., 2005; Messager et al., 2005; Dhillo et al.,

2007). La présence du Kiss1r dans 55% des neurones à GnRH chez la souris (Messager et al.,

2005) ainsi que de l’activation des neurones à GnRH montrée par l’expression de la protéine

c-FOS (facteur de transcription dont l’expression est généralement déclenchée suite à un

signal activateur) suite à l’injection périphérique de kp suggère un rôle directe de kp sur les

neurones à GnRH (Matsui et al., 2004). Cependant, les injections périphériques de kp ne

permettent pas de discerner un effet central sur les neurones à GnRH d’un effet direct de kp

sur les cellules hypophysaires. Des injections périphériques ou centrales de kp chez le rat et la

souris en présence ou en absence d’antagonistes du GnRH démontrent que le signal kp passe

par les neurones à GnRH (Gottsch et al., 2004; Irwig et al., 2004; Matsui et al., 2004;

Thompson et al., 2004). Par ailleurs, une plus forte concentration de LH et de testostérone est

détectée lorsque le kp est injecté au sein de l’APO (région où les neurones à GnRH sont

localisés) comparée à d’autres régions confortant ainsi un effet direct de kp sur les neurones à

GnRH (Patterson et al., 2006).

Afin de montrer que l’action stimulatrice de kp sur les niveaux de LH et de FSH passe

par les neurones à GnRH, Messager et ses collaborateurs vont utiliser comme modèle la

brebis. En effet, la taille ainsi que la bonne connaissance de la physiologie et de la

neuroanatomie de cette espèce, rendent possible des prélèvements directs et sériés du liquide

céphalorachidien (Messager et al., 2005). Ainsi, une injection i.c.v de kp chez des brebis

entraine l’élévation de la concentration de GnRH dosée dans le liquide céphalorachidien

(Messager et al., 2005).

Toutesces études démontrent un rôle majeur de kp dans la physiologie adulte de l’axe

HHG par un mécanisme d’action central sur la sécrétion du GnRH.

Au cours du développement post-natal, le système GnRH va subir différentes phases

d’activation et d’inactivation qui permettent la maturation de l’axe HHG (pour revue (Ojeda

et al., 1980; Terasawa & Fernandez, 2001)). La puberté est une période de réactivation du

système GnRH après une longue période d’inactivité (pour revue (Ojeda et al., 1980)) qui se

caractérise par une augmentation de la sécrétion de GnRH (pour revue (Terasawa &

Fernandez, 2001)). Le retard pubertaire observé chez les souris déficientes pour le système

kp/Kiss1r suggère un rôle de kp dans la réactivation des neurones à GnRH (pour revue

(Colledge, 2009)). Ainsi, des équipes étudient le rôle de kp dans le déclenchement de la

puberté en pratiquant des injections de kp en période juvénile chez le rat (Matsui et al., 2004;

Navarro et al., 2004a; Navarro et al., 2004b; Navarro et al., 2005a; Navarro et al., 2005b;

Introduction bibliographique Distribution neuroanatomique de kisspeptine

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Castellano et al., 2006b), la souris (Han et al., 2005) et le singe (Shahab et al., 2005). Une

injection de kp périphérique ou i.c.v. qu’elle soit unique ou répétée va entrainer une

augmentation des niveaux de LH et de FSH chez des rats, des souris et des singes juvéniles

mais également chez des rats pubères. Navarro et ses collaborateurs démontrent un

avancement de l’ouverture vaginale et du poids de l’utérus, caractères morphologiques de

l’entrée en puberté, ainsi qu’une augmentation du taux d’œstradiol chez des rates ayant reçues

une administration chronique i.c.v de kp en période juvénile (Navarro et al., 2004b). De plus,

l’augmentation de LH et de FSH par injection i.c.v de kp chez des rats et des singes juvéniles

ainsi que des rats pubères est bloquée par l’utilisation d’un antagoniste du GnRH (Navarro et

al., 2004b; Navarro et al., 2005a; Navarro et al., 2005b; Shahab et al., 2005). Une de ces

études va montrer que l’injection de kisspeptine i.c.v n’entraine aucun changement dans

l’expression du gène du GnRH chez des rats mâles pubères suggérant ainsi un rôle activateur

de kp préférentiellement sur la sécrétion du GnRH et non sur son expression (Navarro et al.,

2005b) comme observé précédemment chez la brebis adulte (Messager et al., 2005). Une

étude récente, chez des brebis juste avant la puberté, montre que l’action stimulatrice de kp

dans la réactivation du système GnRH est essentielle mais pas suffisante pour déclencher la

puberté chez cette espèce (Redmond et al., 2011). En effet, des injections répétées en i.v. chez

des brebis pré-pubères entrainent des pics pré-ovulatoire de LH et des ovulations mais ne sont

pas suffisantes pour observer une phase lutéale complète et des cycles réguliers (Redmond et

al., 2011) Ainsi, toutes ces études montrent un rôle de kp dans l’activation de la sécrétion de

LH par l’intermédiaire de l’activation de la sécrétion de GnRH au cours du développement

pubertaire. En revanche, elles ne permettent pas de dater le moment précis où le système kp

va agir sur la réactivation de la sécrétion de GnRH au cours du développement post-natal.

Le rôle de kisspeptine sur le système hypothalamo-hypophysaire au cours des périodes

de développement post-natal précédant la puberté va être décortiqué plus précisément chez le

rat par l’étude de Castellano et al, 2006 : des rats en périodes néonatale, infantile et en période

juvénile reçoivent des injections intrapéritonéales (i.p.) de kp (Castellano et al., 2006b). Une

augmentation des niveaux plasmatiques de LH est observée suite à une injection i.p. de kp

quel que soit l’âge étudié. Toutefois, cette augmentation significative n’est observée qu’en

période infantile. Il est intéressant de noter qu’il existe une différence sexuelle, en faveur des

femelles, dans la sécrétion de LH suite à une même stimulation par du kp (Castellano et al.,

2006b). Une autre partie intéressante de cette étude est l’intérêt porté aux changements de

sensibilité de la réponse LH à différentes concentrations de kp injectées en i.c.v en fonction de

deux périodes de maturation post-natale : la période infantile et juvénile/pubertaire chez des

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mâles. Les résultats obtenus montrent que toutes les doses de kp stimulent la sécrétion de LH

quel que soit l’âge mais que la réponse est plus importante pour de faible concentration de kp

en période juvénile et pubertaire qu’en période infantile (Castellano et al., 2006b). Ainsi, cette

étude suggère l’existence d’une différence sexuelle dans la réponse au kp et d’une différence

dans la sensibilité de cette réponse en fonction de la période de développement post-natal

étudiée. Ce dernier point est en relation avec les données d’une autre équipe montrant que

seule l’injection i.c.v de kp à forte dose entraine un relargage de LH chez les souris mâles

pré-pubères contrairement aux adultes (Han et al., 2005).

Pour conclure sur les injections de kp in vivo, ces différentes études suggèrent un rôle

de kp dans la mise en place et le fonctionnement adulte de l’axe HHG. Ces études suggèrent

une action centrale de kp sur les neurones à GnRH, sans préciser les mécanismes d’actions

impliqués. Elles ne permettent pas non plus d’écarter un rôle potentiel de kp directement sur

l’hypophyse lors d’injections périphériques.