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Etude 2 : Génération d’un plasma par l’ensemble des électrons Compton

Chapitre 2 Modèle des cinétiques reactionnelles 0D

2.4 Résultats du cas théorique

2.4.2 Etude 2 : Génération d’un plasma par l’ensemble des électrons Compton

Dans cette seconde étude, la population d'électrons considérée est composée non seulement des électrons Compton non-relativistes, mais aussi des électrons secondaires de faible énergie générés par les électrons Compton relativistes. Afin de simuler cette situation plus réaliste, le modèle cinétique décrit dans la partie 2.2 implique maintenant tous les termes sources spécifiques relatifs à la densité et la densité d’énergie moyenne des électrons. En plus des termes sources 𝑆𝐶<(𝑡) et 𝑊𝐶<(𝑡), les termes sources 𝑆(𝑡) et 𝑊(𝑡), exprimés à l’aide des équations 2-43 et 2-44 sont pris en compte dans les équations 2-10 et 2-11. Les caractéristiques du faisceau d’électrons Compton relativiste déduites de celles du faisceau X sont rappelées dans le tableau 2-2.

La Figure 2-10 montre l'évolution temporelle de la densité et de l'énergie moyenne des électrons secondaires résultant des interactions entre le flash de rayonnement X et l’air sec. A titre de comparaison, les courbes en traits discontinus montrent l'évolution temporelle de la densité et de l'énergie moyenne des électrons déjà tracées sur la Figure 2-8 lorsque seuls les électrons Compton non relativistes sont impliqués. Les courbes en lignes continues correspondent aux résultats obtenus en considérant l’ensemble des électrons Compton.

Il apparaît clairement que la densité électronique du gaz faiblement ionisé est environ dix fois plus élevée lorsque les électrons secondaires générés par le faisceau d'électrons Compton relativistes sont pris en compte. Cependant, l'énergie moyenne des électrons est beaucoup moins affectée par le passage du faisceau d'électrons relativiste et reste inférieure à celle obtenue dans le cas de la première étude. Ces résultats peuvent être expliqués par la comparaison entre les sections efficaces d'ionisation simple et Compton déjà vues dans le Chapitre 1 et retracées sur la figure 2-11 par commodité de lecture. L'énorme différence d'efficacité entre l’ionisation Compton par impact photonique et l’ionisation par impact électronique montre, que pour des faisceaux de particules couvrant la même gamme d'énergie

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cinétique, les électrons sont beaucoup plus efficaces que les photons pour générer des électrons secondaires.

Figure 2-10 : Evolution temporelle de la densité et de l’énergie moyenne des électrons (traits continus : étude 2 et traits discontinus : étude 1)

Figure 2-11 : Comparaison des sections efficaces d’ionisation simple et Compton pour la molécule N2 en fonction de l’énergie cinétique de la particule incidente

Cependant, l'énergie moyenne des électrons secondaires correspond au rapport entre la densité d'énergie moyenne et la densité électronique. Si cette énergie moyenne est comparable entre les deux cas d’étude (voir les courbes en bleue sur la figure 2-10), cela veut simplement dire que la densité d'énergie moyenne, bien que plus élevée pour les électrons secondaires

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créés par impacts électroniques, est distribuée sur une plus grande concentration d'électrons. Toutefois, l’énergie moyenne des électrons reste supérieure au premier cas d’étude jusqu’à 75 ns favorisant un peu plus les processus d’ionisation. Mais surtout, et contrairement à la première étude, l’influence des termes sources sur la création d’électrons dans le plasma reste voisine de 40% jusqu’à environ 50 ns. Ces deux phénomènes conduisent à une augmentation

significative de la population d’électrons dans le plasma qui atteint un maximum de 1,2 1013 cm-3 autour de 65 ns. En effet, la concentration d'électrons secondaires continue à

croître jusqu'à environ 65 ns, car la population des électrons éjectés provenant des collisions ionisantes entre le faisceau d’électrons Compton relativistes et les molécules du gaz compense en grande partie les pertes des électrons résultant des processus d’attachement et de recombinaison électronique (voir Figure 2-12). Au-delà de 65 ns, et conformément à la diminution de l'énergie moyenne des électrons, la recombinaison des électrons avec les ions O4+ consomme la majeure partie de la population des électrons secondaires (voir Figure 2-12). En effet, comme le montre la Figure 2-13, au-delà de 65 ns, en plus d’être l’ion majoritaire, la densité de l’ion O4+ est aussi supérieure à celle des électrons. Dans nos conditions de simulation, les ions O4+ sont principalement créés par des réactions de transferts de charges des ions O2+ et N2O2+ à travers les réactions O2+ + O2 + O2 → O4+ + O2 et N2O2+ + O2 → O4+ + N2. 20 40 60 80 100 120 140 160 -100 -80 -60 -40 -20 0 20 40 60 80 100

e+O+4O2+2O

e+O+42O2 SC<(t)+S(t) e+O22e+O+2 e+N22e+N+2 e+O2+MO-2+M Densité (10 13 cm -3 )

Poids des réact

ions %

Temps (ns)

e+O2O-+O

-1.2 -1.0 -0.8 -0.6 -0.4 -0.2 0.0 0.2 0.4 0.6 0.8 1.0 1.2 a aaaaa a a a

Figure 2-12 : Evolution temporelle de la densité électronique (axe de droite) et des poids de réactions exprimés en pourcentage de la variation totale de la densité (axe de gauche)

Les densités les plus élevées des principales espèces chargées présentes dans le gaz ionisé vont de 1012 à plus de 1013 cm-3 (voir Figure 2-13 et Figure 2-14). Seules les espèces

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neutres atomiques O et N atteignent des densités plus élevées, en particulier les atomes d’oxygène qui dépassent 1014 cm-3 (Figure 2-15). En effet, ces espèces atomiques sont principalement créées par les réactions de dissociation des molécules (e + O2 → e + O + O et e + N2 → e + N + N) dont les seuils d’énergie de dissociation sont inférieurs aux seuils d’ionisation. De plus, comme l’énergie cinétique nécessaire pour dissocier O2 est de 5.08 eV, tandis que l’énergie cinétique nécessaire pour dissocier N2 est de 9.756 eV, la densité de l’oxygène atomique est supérieure à celle de l’azote atomique.

Figure 2-13 : Evolution temporelle de la densité électrons et des principaux ions positifs

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Figure 2-15 : Evolution temporelle de la densité des prinicpales espèces neutres et métastables

Pour résumer, dans les conditions de simulations présentées, le flash de rayonnement X génère à son maximum d'intensité, un plasma hors-équilibre d’une durée d’environ 200 ns formé par des électrons d'énergie moyenne de moins de 2 eV et principalement composé des espèces chargées e-, O3-, NO+ et O4+ dont les densités vont de 1012 à 1013 cm-3. Après les 100 ns de durée du flash de photons X, (c’est-à-dire autour de 200 ns), la population d’électrons secondaire est thermalisée. Les charges résiduelles sont principalement réparties entre les électrons, les ions positifs O4+ et NO+ et les ions négatifs O4-, O3- et O2-. La concentration la plus élevée à la fin de la simulation est celle de l’atome d’oxygène qui présage la formation d’ozone au bout de quelques microsecondes.

2.5 Conclusion

Afin d’étudier la formation, la recombinaison et la relaxation du plasma d’air hors- équilibre généré par le rayonnement X, un modèle de cinétiques réactionnelles 0D a été utilisé avec en particulier la mise en place d’un formalisme permettant de prendre en compte, dans la création du plasma, les effets des électrons secondaires issus des interactions avec le rayonnement X et les électrons Compton relativistes. Le modèle est défini par le couplage des équations d’évolution des densités des espèces composant le plasma avec l’équation de

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conservation de la densité d’énergie moyenne des électrons, la température des espèces lourdes étant supposée constante et égale à la température du gaz.

Le modèle a été appliqué à un cas test théorique avec des conditions de simulation proches de l’expérience de façon à faire ressortir un exemple de profil d’énergie moyenne des électrons du plasma et l’ordre de grandeur de la densité électronique attendus pour l’expérience. Ainsi, un flash de rayonnement X dont l’énergie moyenne est constante et égale à 1 MeV, irradie l’air sec (supposé composé de 80% de N2 et 20% d’O2) durant 100 ns. Deux populations d’électrons Compton (relativistes et non relativistes) sont directement générées par les X et initient ensuite les avalanches électroniques responsables de la création du plasma. L’effet des photons et des électrons Compton générés sur la formation du plasma est directement pris en compte dans le modèle par l’ajout de termes sources spécifiques dans les équations d’évolutions de la densité et de la densité d’énergie moyenne des électrons. Cette démarche est une alternative originale qui permet d’éviter les simulations Monte Carlo, qui en plus d’être coûteuses en temps de calcul, nécessitent de connaître les sections efficaces différentielles en énergie et en angle de tous les processus impliqués dans la création puis l’évolution du plasma. Le calcul des termes sources est effectué à partir des sections efficaces différentielles en énergie des processus photoniques Compton et d’ionisation par impacts électroniques, en supposant que les fonctions de distribution en énergie des photons X et des électrons Compton relativistes sont connues. La formation, la recombinaison et la relaxation du plasma sont ensuite étudiées à l’aide du modèle durant 200 ns, après avoir sélectionnées 26 espèces influentes interagissant suivant 164 réactions.

Les résultats de ce cas théorique ont montré que c’est le faisceau d’électrons Compton relativistes créé par le flash de rayonnement X qui est principalement responsable de la formation du plasma hors-équilibre. En effet, les électrons Compton non-relativistes participent à moins de 10% dans la création des électrons du plasma. Dans nos conditions de simulations, un plasma hors-équilibre avec une faible énergie moyenne (inférieure à 2 eV) et une concentration d’espèces chargées comprise entre 1012 et 1013 cm-3 est formé quelques nanosecondes après le maximum de l’intensité du flash de rayonnement X. 200 ns après l'application du flash, les électrons sont thermalisés et leur concentration est inférieure à 1012 cm-3. Ils laissent derrière eux un milieu faiblement ionisé composé d’espèces ionisées positives et négatives et de radicaux atomiques dont les temps caractéristiques de recombinaison sont beaucoup plus longs. La concentration d’oxygène atomique atteint

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1014 cm-3 présageant la formation d’ozone. La connaissance d’un profil d’évolution de l’énergie moyenne des électrons dans des conditions de simulation proches de l’expérience sera d’une aide précieuse pour simuler les conditions réelles plus complexes qui seront détaillés dans le chapitre 4.

Le modèle cinétique et l’ensemble des résultats du chapitre 2 ont été publiés dans la revue internationale « Physics of Plasmas » [11] puis présentés lors d’une conférence internationale [12].

Avant de s’intéresser à l’application du modèle à l’expérience, le chapitre suivant est consacré à la description des mesures effectuées pour restituer la densité électronique du plasma d’air hors-équilibre, dans les conditions expérimentales d’irradiation de l’air par le rayonnement X.

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discharge excited XeCl lasers », J. Appl. Phys., vol. 79, no 9, p. 6775‑6784, mai 1996. [3] W. H. Press, S. A. Teukolsky, W. T. Vetterling, et B. P. Flannery, « Numerical Recipes

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[10] J. A. Léger, Modélisation des interactions électrons/matière par la méthode de Monte

Carlo appliquée aux matériaux composites polymérisés sous rayonnements ionisants.

Thèse de doctorat en physique de l'Université dePau, 2005 (2005PAUU3015).

[11] M. Maulois, M. Ribière, O. Eichwald, M. Yousfi, et B. Azaïs, « Chemical kinetics and relaxation of non-equilibrium air plasma generated by energetic photon and electron beams », Phys. Plasmas 1994-Present, vol. 23, no 4, p. 43501, avr. 2016.

[12] M. Maulois, M. Ribière, O. Eichwald, M. Yousfi, et B. Azaïs, « Kinetic modelling of non-equilibrium air plasma generated by energetic photon and electron beam», Poster présenté à la 43ème édition de ICOPS (Banff du 19 au 23 Juin 2016).

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