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5. Perspectives : du modèle structural au modèle thermodynamique

5.3. Description thermodynamique de la réduction / oxydation des argiles

5.3.2. Etude de Favre et al. (2006)

Cette partie présente les travaux de Favre et al. [293] sur les propriétés redox du fer structural (FeStr) contenu dans les smectites et l’impact des changements de l’état redox de Festr sur la CEC de l’argile. Les équations d’oxydoréduction du FeStr de [63] sont reprises par Favre pour calculer son potentiel redox formel d‘électrode (Eh). Il s’agit des équations décrites dans le chapitre 3, équa-tion (3.4.1-1) à équaéqua-tion (3.4.1-18).

L’équation de Nernst devrait permettre de calculer la force électromotrice de la réaction de ré-duction de l’argile (réaction de demi-pile (3.4.1-6)) à l’équilibre et à 25°C:

(5.3.2-1)

où {Ox} et {Rd} représentent respectivement les activités totales des formes oxydée et réduite. Une première approximation est réalisée en posant que l’activité totale d’une espèce est donnée par sa concentration. Ce qui simplifie l’équation (5.3.2-1) :

(5.3.2-2)

Dans cette expression, le potentiel standard est alors noté E0 au lieu de E0 (selon la convention de Clark, [294]). Cette équation est ensuite appliquée à la réaction (3.4.1-6) en supposant que l’activité des phases solide est égale à 1, et la relation suivante est donnée:

(5.3.2-3) avec : (5.3.2-4) ou encore : (5.3.2-5)

Dans l’article de Favre et al. [294], les calculs qui mènent à l’équation (5.3.2-3) ne sont pas dé-taillés. Une petite ambigüité nait du fait que l’on puisse confondre la constante K donnée par l’équation (5.3.2-3) avec la constante de réaction de l’équation (3.4.1-6). Pour plus de clarté, le détail

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des calculs est donné ici, en partant de l’expression de la constante réactionnelle de l’équation (3.4.1-6) (que nous notons K1 pour ne pas la confondre avec la constante K de l’équation) :

(5.3.2-6)

Les approximations suivantes sont alors formulées [293]:

(5.3.2-7)

(5.3.2-8)

(5.3.2-9)

Les activités des phases solides sont ainsi supposées égales à 1 (5.3.2-7). L’eau étant le solvant, son activité est aussi posée comme égale à 1 (5.3.2-8) et les activités des phases en solution sont supposées égales aux concentrations en première approximation (5.3.2-9). La constante réaction-nelle devient alors :

(5.3.2-10)

Les calculs suivant mènent ensuite à l’expression (5.3.2-3) :

d’où les équations (5.3.2-3) et (5.3.2-4). Les équations (3.4.1-9) et (3.4.1-10) donnent les ex-pressions de p et ni en fonction de m, mrel et K0. En remplaçant les exex-pressions de p et ni dans l’équation (5.3.2-4) on obtient alors :

(5.3.2-11)

Cette expression, combinée à l’équation (5.3.2-3) amène enfin à l’expression du potentiel redox du FeStr en fonction du taux de réduction mrel de celui-ci, de la concentration en Na+ (en mol L-1 à 25°C) et du pH:

(5.3.2-12)

Dans l’article en question [293], l’argile prise comme exemple est la smectite provenant de Washington (USA) SWa-1. La valeur de K0 caractéristique de cette argile est prise égale à 4,73 [63]. La valeur du potentiel standard de réduction est lui pris égal à 0,7 V, valeur provenant des calculs CFT

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[64]. L’évolution du potentiel en fonction du pH peut ainsi être déterminée, pour l’échantillon SWa-1 à différents taux de réduction [SWa-190] :

Figure 33 : Exemple de relation Eh-pH ob nu s par l’équation (5.3.2-12) avec un potentiel standard arbitrairement fixé à 0.7V [64], pNa=3 et va-leur croissantes de mrel : 0.02, 0.2, 0.3, 0.4, 0.5, 0.7 et 1.

La relation Eh-pH est linéaire, avec une pente qui décroit avec l’augmentation de la valeur de mrel. Le taux de décroissance de la pente est de plus grand pour les faibles valeurs de mrel. C’est en accord avec la prédiction théorique qui dit que d’avantage d’OH- sont relâchés par les structures au fur et à mesure que le taux de réduction augmente, diminuant, par la même, la variation de la charge de feuillet, donnant ainsi une plus basse stœchiométrie proton-électron pour les basses valeurs de mrel [63]. Néanmoins, considérer une valeur E0 constante sur tout le domaine de réduction mène à une contradiction, car dans certains domaines de pH, Eh sera plus grand pour les valeurs grandes de mrel. Un exemple est donné avec le cas représenté sur la figure 33, les droites Eh-pH se coupent au point pH = 3 (i.e. pH pNa), ce qui n’a aucun sens physique. L’explication mathématique est la sui-vante : (5.3.2-13)

Ce qui explique ainsi pourquoi, pour un pNa donné, les droites Eh-pH vont toute se croiser à un même point de coordonnée (pH=pNa ; Eh=E0 - 0.059pNa). Selon Favre et. al (2006), la condition pour exclure cette intersection est de poser que E0 doit décroître quand mrel augmente, ce qui est en ac-cord avec la prédiction théorique voulant qu’une augmentation de l’énergie réductrice de l’agent réducteur est nécessaire pour augmenter le taux de réduction de l’argile [46, 63], et avec les obser-vations expérimentales [37]. A partir de l’équation (5.3.2-12), les auteurs proposent la condition minimale sur E0 suivante [293] :

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(5.3.2-14)

où E0,mrel est la condition minimale, E0,ref est la valeur du potentiel standard de réduction valeur provenant des calculs CFT de Amonette (0.7V, [64]). La plus large décroissance de E0 pour SWa-1 est obtenue avec pNa = 4 et pH = 3 (qui sont les conditions limites). Celle-ci est représentée sur la figure 34, sur tout le domaine de réduction (mrel variant de 0 à 1) avec une valeur E0Ref fixée à 0,7 V :

Figure 34 : Chute de la valeur E0,mrel sur tout le domaine de réduction, à pNa=4, pH=3, E0= 0.7 à mrel=0, al ulé par l’équation (5.3.2-14) (rouge) l’équation (5.3.2-15) (bleu).

On observe alors une chute de 0,05 V de la condition minimale E0 entre mrel =0 et mrel =1. Cette diminution est plus rapide pour les basses valeurs de mrel, puis se stabilise au fur et à mesure que mrel augmente. Cette allure des courbes contredit alors le modèle structural sur lequel est basé leur équation [63] dans lequel E0 est supposé constant pour des taux de réduction bas, puis décroissant à des taux supérieurs. La manière dont à été construite l’équation (5.3.2-14) reste relativement incer-taine. En effet, si on la réinjecte dans l’équation (5.3.2-12) (en remplaçant E0 par E0,mrel), on obtient l’équation (5.3.2-15) où le potentiel ne dépend plus du pH et du taux de réduction mais seulement du pNa. L’objectif annoncé de la correction est d’éliminer le point d’intersection des droites Eh-pH, en s’affranchissant de la dépendance de l’ordonnée à l’origine (i.e. la valeur de Eh à pH=0) avec le taux de réduction, pour exclure l’intersection de courbes. Une expression de E0 qui permettrait ainsi d’éliminer simplement cette dépendance serait plutôt de la forme la suivante:

(5.3.2-15)

C’est en fait l’équation (5.3.2-14) sans la dépendance avec le pH. En prenant les mêmes para-mètres que les auteurs (pNa = 4 et E0Ref = 0,7 V), on retrouve bien sûr la même allure, mais la chute

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observée entre mrel =0 et mrel 1 n’est plus ici de 0,05 V mais de quasiment 0,2 V (figure 34). Réinjec-tée dans l’équation (5.3.2-12), cela donne la relation suivante :

(5.3.2-16)

L’évolution du potentiel en fonction du pH est donnée sur la figure suivante, à différents taux de réduction, pour l’échantillon SWa-1:

Figure 35 : Exemple de relation Eh-pH obtenues par l (5.3.2-16), avec un potentiel standard E0,ref de 0,7 V, pNa=3 et valeurs croissantes de mrel : 0,02, 0,2, 0,3, 0,4, 0,5, 0,7 et 1.

En dépit de ces modifications, ce modèle ne parvient pas à reproduire l’allure des données expé-rimentales obtenus par électrochimie sur SWa-1 native ([37], pH 7,5, pNa = 1) de manière conve-nable (figure 36).

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Figure 36 : Comparaison des équations (5.3.2-15) et (5.3.2-16) avec les données expérimentales et le modèle développé par Gorski [37]. EH me-suré expérimentalement à pH 7,5 et pNa = 1 sur SWa-1 (cercle rouge), calculé s lon l’équation (2.5.3-2) (tiré rouge) al ulé s lon l’équation (5.3.2-16) avec un E0,ref de 0 V.

Ces résultats non satisfaisants s’expliquent pour plusieurs raisons. La première, est le choix d’une valeur arbitrairement fixe pour E0,ref de 0,7 V, valeur calculée par CFT ([64]) et qui est à consi-dérer avec une certaine circonspection (Cf. section 2.3.5). L’utilité et la manière dont est construite l’équation est peu claire, car la valeur du E0 dépend aussi du pNa et du pH, et sa combinaison avec l’équation globale résulte en un Eh qui ne dépend plus que du pNa. De plus, la comparaison de la chute de E0 en fonction du niveau de réduction est faible, 50 mV au total, avec une chute significative sur le début du domaine pour atteindre un plateau. Or, l’allure des données expérimentales suggère une allure similaire, mais marquée par une chute bien plus significative du E0 sur le domaine de ré-duction (environ -600 mV, figure 16 dans la section 2.5.3). Enfin, les approximations formulées au préalable des calculs expliquent aussi le manque de validité du modèle. Les activités des Fe2+ et Fe3+ structuraux sont considérées comme égales à 1 au départ comme dans le modèle de White & Yee, or l’influence du rapport de leur activité est réintégrée dans les développements ultérieurs de l’équation à travers le paramètre mrel (mrel= Fe2+/(Fe2++Fe3+)). En outre, poser les activités des grou-pements OH et des cations échangeables comme égale à 1 revient, pour un niveau de réduction donné, à négliger les influences relatives de l’état d’hydroxylation et du niveau global de charge de l’argile sur ses propriétés redox. Ces deux influences sont, en fait, en partie prises en comptes dans le paramètre K0 qui est réintégré par la suite dans l’équation. En outre, les équations pour déterminer le K0 d’un échantillons relient sa valeur à la charge initiale de l’argile, ainsi qu’à sa teneur en fer total [63].

5.3.3. Proposition d’une nouvelle description thermodynamique des

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