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CHAPITRE 4 : ANALYSE DES DONNEES HYDROMETRIQUES

3. ANALYSE ET INTERPRETATION DES RESULTATS

3.4.2. Etude du déphasage Q-S lors des crues à Port Miou

3.4.2.1. Exemples de déphasages sur les chroniques et applications

Les sources de Port Miou et du Bestouan montrent lors de leurs crues des déphasages entre l'augmentation du débit (ou de la vitesse pour le Bestouan) et la diminution de leur salinité.

Quatre crues sont figurées à titre d'exemple en novembre et décembre 2005 pour la source de Port Miou (Figure 4-50A) et septembre 2005 pour le Bestouan (Figure 4-50B).

Figure 4-50 : Exemples de décalages temporels entre l'augmentation du débit ou de la vitesse d'écoulement et la chute de la salinité : A) A Port Miou pour deux crues en novembre-décembre 2005 ; B) Au Bestouan pour deux crues en septembre 2005

On peut remarquer que ce déphasage était déjà visible sur les anciens enregistrements du SRPM effectués au cours de l'automne 1973. A l'époque un système de capteurs permettait d'enregistrer l'évolution de la conductivité spécifique de l'eau à Port Miou en amont du barrage à différentes hauteurs d'eaux. Le dispositif était complété par une mesure de vitesse dans une section réduite de la galerie à 36 m² (CHAPITRE 3 :2.2.2.1).

Les données de l'époque ont été numérisées et la conductivité traduite en salinité. Le graphique repris dans la Figure 4-51 montre bien un décalage entre l'augmentation des vitesses dans la galerie et la chute de la salinité de la source.

Le calcul du volume d'eau saumâtre expulsé au cours de ce déphasage n'a pu être appliqué que sur les données récentes de Port Miou. Les mesures de vitesses sur les chroniques anciennes de Port Miou, ainsi que sur celles récentes du Bestouan ne sont pas suffisamment représentatives du débit des sources et apporteraient une part d'erreur trop importante.

Figure 4-51 : Décalages temporels entre l'augmentation des vitesses d'écoulement (mesure dans une section réduite) et la chute de la salinité de la source de Port Miou observés lors des crues d'octobre 1973 (données SRPM, date en mois/jour/an)

3.4.2.2. Résultats et interprétations

Les résultats des calculs des volumes d'eau saumâtre expulsés par la source de Port Miou pour les données récentes sont rassemblés dans le Tableau 4-16. Ce volume est exprimé selon une portion de galerie le long de laquelle aucun changement de la salinité n'est opéré. Rappelons que deux mécanismes peuvent être à l'origine des variations de la salinité au cours d'une crue : la dilution par apport d'eau douce en aval de la zone de mélange ou la diminution de l'apport d'eau de mer au mélange. La recherche des volumes d'eau saumâtre expulsés ne permet pas de répondre à cette interrogation qui sera étudiée à l'aide des méthodes des hystérésis Qmer-Ct (3.4.3).

Pour calculer la portion de galerie en question, ou la distance en mètres depuis le barrage avant que la salinité du mélange soit modifiée, trois sections de galeries sont proposées d'après les observations spéléonautiques (CHAPITRE 3 :1.3.2) : une section minimum de 150 m², une maximum de 400 m² et une moyenne de 200 m².

Pour indication la partie horizontale de la galerie de Port Miou comprise entre le barrage et le début du puits vertical terminal représente un volume d'eau moyen de 300 000 m3, si l'on tient compte d'une distance de 1500 m et d'une section moyenne de 200 m².

Entre le début de la montée du débit et la première chute de la salinité

Distance, depuis le barrage, d'une portion de galerie non affectée par des variations de salinité pour une

section de galerie de : Crue

Début de la crue

1ère chute de

salinité Temps (h)

Débit moyen

(m3/s)

Volume d'eau

saumâtre débité (m3) 150 m² 200 m² 400 m² Remarques

1 10/9/05 20:00 11/9/05 16:00 20 1,705 122 760 818 614 307

2 18/9/05 21:00 19/9/05 17:00 20 1,763 126 936 846 635 317 Débit moyen estimé

3 25/9/05 22:00 29/9/05 19:00 93 1,125 376 650 2511 1883 942

5 4/11/05 23:00 6/11/05 16:00 41 1,304 192 470 1283 962 481 Hydrogramme peu marqué

6b 15/11/05 8:00 15/11/05 18:00 10 1,741 62 676 418 313 157

7 2/12/05 17:00 3/12/05 7:00 14 1,571 79 178 528 396 198

8 27/1/06 14:00 28/1/06 13:00 23 6,715 556 002 3707 2780 1390 Chute de la salinité prise après un petit pic

9 21/3/06 2:00 23/3/06 19:00 65 1,703 398 502 2657 1993 996 Hydrogramme peu marqué

12a 14/9/06 6:00 15/9/06 8:00 26 1,298 121 493 810 607 304

13 25/9/06 0:00 25/9/06 16:00 16 1,632 94 003 627 470 235

14 19/10/06 9:00 21/10/06 8:00 47 1,18 199 656 1331 998 499 Hydrogramme peu marqué

Tableau 4-16 : Résultats des calculs des volumes d'eau saumâtre expulsés par la source de Port Miou durant le déphasage temporel entre la montée du débit en crue et la chute de la salinité pour 11 crues observées au cours de l'étude. La portion de galerie non affectée par des variations de sa salinité est estimée en distance pour trois sections de

galeries considérées

Les résultats montrent que le temps de déphasage varie selon les crues de moins d'une journée (10 h crues n°6b) à plus de quatre jours (93 h pour la crue n°3). Les débits moyens entre le début de la crue et la première chute de salinité évoluent entre 1,125 et 6,715 m3/s. Si l'on met à part la crue importante du mois de janvier 2006 l'amplitude de variation des débits moyens est seulement de 640 L/s.

La crue de la mi-novembre 2005 (crue n° 6b) affiche le plus faible volume d'eau saumâtre expulsé de 62 676 m3. Le volume maximum est obtenu pour celle de janvier 2006 (crue n°8) avec 556 000 m3. Le facteur multiplicatif entre ces deux volumes est trop significatif (x8) pour suggérer qu'il y ait un volume moyen constant expulsé par la source.

Les distances obtenues à l'aide de ces volumes sont par conséquent très variables. Pour une section moyenne de 200 m² elles varient de 300 à 2800 m.

Par ailleurs, l'évolution de ces volumes au cours du temps ne semble pas répondre à une logique reproductible (Figure 4-52A). Chaque crue donne lieu à l'obtention d'un volume différent. Aucune relation évidente n'apparaît ni entre le temps de déphasage et le débit moyen au cours de ce déphasage pour chaque crue (Figure 4-52B), ni entre le volume d'eau saumâtre expulsé et ce même débit moyen pour les différentes crues observées (Figure 4-52C).

Figure 4-52 : A) Evolution du volume d'eau saumâtre expulsé au cours des différentes crues de la source.

B) Temps de déphasage en fonction du débit moyen au cours de chaque déphasage observés pendant les crues. C) Volume d'eau saumâtre expulsé en fonction du débit moyen au cours de chaque déphasage observés pendant les crues

Pour chaque crue on peut considérer qu'une portion de la galerie n'est soumise à aucun échange avec la roche calcaire environnante (apport d'eau douce ou diminution d'eau de mer) et cela sur une distance définie par le volume expulsé. Au cours de ces 11 crues les distances obtenues se situent la plupart (sauf pour la crue de janvier) avant le puits terminal à 1600 m du barrage. Autrement dit, nous ne

pouvons pas considérer la galerie horizontale de Port Miou comme étanche à tout phénomène d'intrusion d'eau de mer ou d'eau douce.

Comment interpréter les volumes d'eau saumâtre (à salinité constante) expulsés par la source de Port Miou ?

Le mécanisme à l’origine des chutes de la salinité de la source peut être expliqué de deux manières : - des apports supplémentaires d’eau douce dans la galerie lors des crues ;

- une diminution de l’entrée d’eau de mer dans la galerie.

Nous montrons par la suite, que l’analyse des hystérésis Qmer-Ct indique que les crues étudiées à la source de Port Miou ne témoignent pas d’un phénomène de diminution de l’entrée d’eau de mer.

Dans ce cas, les volumes d’eau saumâtre expulsés indiquent que les apports d’eau douce s'effectuent majoritairement au niveau de la galerie horizontale. Les conditions de localisation de ces apports ne sont pas clairement établies, mais il est probable qu'ils soient la conséquence de phénomènes hydrauliques locaux. Par exemple la présence de galeries secondaires à différentes distances du barrage se mettant en charge lors de certaines crues peut expliquer les différences obtenues dans les calculs de volume.

Ce résultat montre clairement que le comportement de la source de Port Miou, au cours des cycles hydrologiques étudiés, est très particulier. Il n’est pas du tout comparable à celui du système de l’Almyros d’Héraklion, où le volume d’eau saumâtre expulsé par la source y est constant au cours des crues et où les chutes de salinité indiquent qu’une diminution de l’entrée d’eau de mer s’opère au cours de ces crues.