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4.3. Modélisation des mix en transition

4.3.1. Etude bibliographique

La modélisation de la transition recherchée ici vise à évaluer une trajectoire optimale d’évolution du mix électrique sous différentes contraintes, de manière à satisfaire la demande et une cible de réduction des émissions GES. Cela revient à déterminer de manière prospective l’évolution du mix. Des modèles de prospective ont été mentionnés dans la littérature. Il faut donc évaluer s’ils peuvent être utilisés dans notre cas.

Les modèles de prospective ont été développés sur l’énergie et sa gestion, notamment afin de respecter les cibles envisagées pour limiter le changement climatique. Ils se basent tous sur des réflexions et modélisations économiques. Ils diffèrent selon trois orientations : descendante « top-down » ou ascendantes « bottom-up », simulation ou optimisation, équilibre général ou équilibre partiel .

La Figure 4.2 présente les différents types de modèles concernant l’énergie, avec pour chaque famille de modèles, un exemple de modèle appliqué dans la littérature. Les modèles sont classés selon deux de leurs caractéristiques principales : simulation ou optimisation (axe vertical) et les notions d’économie équilibre général ou équilibre partiel (axe horizontal). La simulation cherche à répondre à des questionnements de type « et si ?», donc évaluer des options prédéfinies . L’optimisation va rechercher une solution optimale à toutes les contraintes parmi toutes les trajectoires possibles . L’équilibre général en économie considère les ressources dans une économie de marché où la concurrence est parfaite .

78 L’équilibre partiel, lui, ne considère que les échanges pour un seul bien, et ne prend pas en compte ce qui se passe avec les autres biens

Les modèles permettant de faire des simulations sont les modèles de type GREEN et Edmonds Reilly (Figure 4.2). Le modèle EPPA (Emissions Prediction and Policy Analysis), de type GREEN, a été créé par le MIT afin de donner une représentation dynamique récursive et multi-secteurs de l’économie globale. Il utilise donc l’équilibre général. Il a par exemple été appliqué pour évaluer les politiques énergétiques au Brésil et au Mexique . Le modèle LEAP (Long-range Energy Alternatives Planning System), de type Edmonds Reilly, a été développé par le Swedish Stockholm Environmental Experiment Institute et l’U.S. Research Center in Boston. C’est un modèle flexible qui permet d’établir différents scénarios en fonction de l’utilisation de l’énergie. Il a par exemple été appliqué au cas de la demande en énergie et ses émissions GES pour le transport dans la ville de Pékin . Les résultats montrent que l’approche par simulations successives n’est pas adaptée à la recherche d’un scénario optimal sous différentes contraintes. Elle ne correspond donc pas aux types de modèles recherchés pour modéliser la transition.

Une approche par optimisation semble donc plus pertinente dans le cadre des objectifs poursuivis dans le cadre de nos travaux : il existe trois types de modèles d’optimisation permettant de générer des scénarios : MARKAL, Global 2100 et DICE. Les modèles de type MARKAL vont représenter le système énergétique d’une région spécifique et évaluer la dynamique énergétique sur plusieurs périodes et avec un grand panel de technologies possibles . Ce modèle a par exemple été utilisé pour analyser la production d’électricité à une échelle régionale adaptée à la région de Saskatchewan au Canada . Le modèle MESSAGE (Model for Energy Supply Strategy Alternatives and their General Environmental Figure 4 2 : Classement des types modèles utilisés en prospective énergétique, avec un exemple pour chaque cas, suivant la distinction simulation/optimisation et équilibre partiel/général (adapté de Nicolas, 2016 ).

79 Impacts), aussi du type MARKAL est souvent utilisé pour l’électricité et l’énergie. Il a été par exemple utilisé pour l’étude de l’intégration de l’éolien et du solaire au système électrique . Les modèles de type Global 2100 vont intégrer des éléments macro-économiques, et donc de l'équilibre général, comme le modèle MARKAL MACRO . Il a été récemment utilisé pour estimer la réduction du coût du carbone en Inde pour la période 2005-2045. Enfin les modèles de type DICE, développés à partir de 1992, vont utiliser les dynamiques et impacts des émissions sur l’économie, ainsi que les coûts des politiques énergétiques pour les réduire . Un de ses dérivés, le modèle MIND, permet d’optimiser les systèmes industriels : il a été mis en œuvre par exemple pour le cas du stockage de matériel en industrie . Il existe donc une grande variété de modèles d’optimisation qui pourraient modéliser les cas de transition. Or, le cadre de la typologie n’intègre pas d’aspect économique alors que les modèles présentés ici utilisent ce type de données pour optimiser. De plus, leur niveau de granularité concernant les technologies utilisées est trop fin par rapport à celui de la typologie, c’est pourquoi les modèles déjà existants peu adaptés à la modélisation souhaitée ont été exclus du champ de l’étude.

Les modèles appliquant l’équilibre partiel ou général sont déjà utilisés pour la détermination de données d’inventaire marginales, par exemple par Ekvall et Weidema, 2004 ou Frischknecht et Stucki . Or, comme souligné dans le Chapitre 1, l’utilisation de ces méthodes ne répond pas au besoin de données génériques .

Plusieurs études proposent des modèles basés sur une formulation d’optimisation multi- objectif avec une contrainte de limitation des impacts environnementaux (principalement les émissions de CO2 mais aussi d’autres GES) . Hashim et al., 2005 , proposent par

exemple un modèle d’optimisation pour la gestion d’un système énergétique global sous contrainte vis-à-vis des émissions de type GES. Le problème d’optimisation résultant met en jeu une formulation mixte linéaire MILP (Mixed Integer Linear Programming), c’est-à-dire prenant en compte des variables continues et discrètes. Le cas d’application est celui de l’optimisation du mix électrique en Ontario (Canada) afin de satisfaire une cible de réduction des émissions de CO2 tout en maintenant et augmentant la production d’électricité. La

démarche suivie par ces auteurs fait intervenir trois fonctions objectifs différentes : un critère économique basé sur la minimisation des coûts de production de l’électricité, un critère environnemental basé sur la minimisation des émissions de CO2 issues de la production

d’électricité et enfin un dernier combinant ces deux critères.

Ainsi, une modélisation par optimisation sur plusieurs périodes, de manière à suivre l’évolution du mix au cours du temps, avec pour objectif la réduction des émissions GES, répondrait aux caractéristiques souhaitées.

Notons ici que la méthode modélisant la transition qui sera proposée dans la suite n’a pas pour objectif de produire un outil original de prospective, car il se fonde sur les hypothèses de la typologie. Il ne permet de réaliser des scénarios que dans le cadre des inventaires génériques électricité pour ACV conséquentielle.