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On a vu au chapitre pr´ec´edent que la seule quantit´e mesurable li´ee au spin des neutrons est la polarisation `a la fin du temps de pr´ecession. La m´ethode la plus efficace pour que cette polarisation d´epende de la fr´equence de pr´ecession est de faire subir aux neutrons la m´ethode de Ramsey des champs oscillants altern´es [28].

Le principe de cette technique consiste `a ajouter un champ ~B1en rotation `a la pulsation ω dans le plan perpendiculaire au champ principal, lui-mˆeme demeurant statique. Afin d’utiliser une terminologie plus adapt´ee aux neutrons, la magn´etisation ~M utilis´ee dans les ´equations de Bloch (Eqt. 5.6) va ˆetre remplac´ee par la polarisation ~P = ~M /γ. De plus, l’´ecriture des ´equations de Bloch en pr´esence d’un champ tournant est plus ais´ee dans le r´ef´erentiel en rotation avec le champ tournant. On va donc effectuer un changement de r´ef´erentiel du r´ef´erentiel statique (x,y,z) vers le r´ef´erentiel tournant (x’,y’,z’=z) orient´e de mani`ere `a ce que ~B1soit en permanence align´e selon l’axe x’. Le changement de r´ef´erentiel s’´ecrit d ~P dt ! rot = d ~P dt ! lab − ~ω × ~P = ~P × ( ~ωL+ ~ω) (5.9) Dans cette expression, ~ω est la vitesse angulaire du syst`eme (x’,y’,z’) autour de l’axe z=z’ et ωL est la pulsation de Larmor des spins dans le champ total ~B = ~B0+ ~B1≈ ~B0.

Ce changement de r´ef´erentiel nous permet de r´e´ecrire les ´equations de Bloch dans le r´ef´erentiel en rotation avec ~B1 :

dPx′ dt = Pyδω −T21Px dPy′ dt = −Px′δω +PzRT21Py dPz′ dt = −Py′RT11(Pz− P0) (5.10)

Dans cette expression, δω = ω − ωL est l’´ecart `a la r´esonance de la pulsation du champ oscillant ~B1 par rapport `a la pulsation de Larmor ωL = γB0 et ΩR = γB1 est la pul-sation de Rabi. Si δω = 0, c’est-`a-dire si on est `a la r´esonance, les premiers termes du membre de droite de 5.10 s’annulent, c’est comme si le champ principal lui-mˆeme ´etait nul. Au contraire, on observe une pr´ecession de Rabi autour du champ B1, statique dans ce r´ef´erentiel.

On peut r´esoudre ce syst`eme d’´equations coupl´ees en annulant les derniers termes de d´epolarisation. Sous ces hypoth`eses la r´esolution est analytique et l’´evolution de la polarisation selon les trois axes du r´ef´erentiel en rotation est :

Px(t) = δωΩRef f (− cos(Ωef ft)) Py(t) = Ref f sin (Ωef ft) Pz(t) = Pz(t) = δω 2+ Ω2 Rcos (Ωef ft) Ω2 ef f = 1 − 2Ω 2 R δω2+ Ω2 R sin2  Ωef ft 2  (5.11) o`u l’on a introduit Ωef f =q δω2+ Ω2

R, la pulsation effective dans le champ effectif ~Bef f =

~ ω− ~ωL

γ + ~B1 que voit le spin dans le r´ef´erentiel tournant.

Les ´equations 5.11 mettent en ´evidence une r´esonance dans le cas o`u `a la fois ΩRtR= π/2 et δω = 0 :

Px(tR) = 0 Py(tR) = 1

Pz(tR) = Pz(t) = 0 (5.12)

c’est ce que l’on appelle un basculement de spin de π/2. On peut de la mˆeme fa¸con inverser le spin selon l’axe z pour ΩRt = π et δω = 0.

On a maintenant tous les outils n´ecessaires pour comprendre la m´ethode de Ramsey des champs oscillants altern´es. Elle se fait en cinq ´etapes que l’on va d´etailler.

1. La premi`ere ´etape consiste `a pr´eparer nos spins de mani`ere `a ce qu’ils soient tous ”up” dans le champ magn´etique principal lui-mˆeme orient´e selon l’axe z = z. On a donc comme condition initiale

Px(0) = 0 Py(0) = 0

2. La deuxi`eme ´etape consiste `a faire un basculement de spin de π/2. Pour cela, on applique pendant un temps τ un champ magn´etique ~B1 oscillant `a la pulsation ω. On impose (pour simplifier les calculs) la condition ΩRτ = π/2 mais on se laisse la possibilit´e de ne pas ˆetre `a la r´esonance en fr´equence : δω 6= 0. Ces hypoth`eses refl`etent assez bien la r´ealit´e puisque la condition ΩRτ = π/2 est ais´ee `a r´ealiser alors que la condition δω = 0 d´epend de ωL que l’on cherche justement `a mesurer. De plus, dans la pratique, τ = 2 s ainsi les premiers termes du membre de droite de l’expression 5.10 qui sont une int´egration du d´ephasage (δω ≈ 0) ∗ τ peuvent ˆetre n´eglig´es. Sous ces approximations on peut calculer la polarisation au temps τ :

Px(τ ) = 0 Py(τ ) = 1

Pz(τ ) = Pz(τ ) = 0 (5.14)

Durant cette deuxi`eme ´etape, les spins subissent une oscillation de Rabi.

3. La troisi`eme phase, dite de pr´ecession libre, dure typiquement T = 100 s pendant lesquelles seul le champ principal est pr´esent. De ce fait, les termes centraux de l’´equation 5.10 sont nuls. On va observer deux ph´enom`enes : d’une part, on va int´egrer le d´ephasage δω ∗ T sur un temps assez long pour qu’il soit significatif et d’autre part, `a cause de la d´epolarisation transverse, la polarisation va diminuer. A la fin de la pr´ecession libre la polarisation s’´ecrit :

Px(τ + T ) = e−T /T2sin (δωT ) Py(τ + T ) = e−T /T2cos (δωT )

Pz(τ + T ) = Pz(τ + T ) = 0 (5.15)

4. La quatri`eme ´etape consiste en un second basculement de spin, qui v´erifie les mˆemes conditions que le premier mais avec des conditions initiales diff´erentes. A la suite de ce basculement, la polarisation vaut :

Px(τ + T + τ ) = e−T /T2sin (δωT ) Py(τ + T + τ ) = 0

Pz(τ + T + τ ) = Pz(τ + T + τ ) = −e−T /T2cos (δωT ) (5.16) 5. La cinqui`eme et derni`ere ´etape consiste en l’analyse de la polarisation selon la

direc-tion z = z.

On comprend donc que la m´ethode des champs oscillants altern´es de Ramsey permet en mesurant la polarisation du gaz de neutrons selon z de d´eterminer la quantit´e δω = ω −ωL

qui, connaissant la pulsation ω du champ oscillant appliqu´e nous donne directement une mesure de fL= ωL/(2π), la fr´equence de Larmor des neutrons.

Il est int´eressant de faire deux remarques au sujet de Pz(τ +T +τ ), la polarisation selon l’axe z `a la fin du processus de Ramsey. Tout d’abord, comme l’essentiel des d´ephasages int´egr´es le sont durant la pr´ecession libre, plus celle-ci est longue, plus le d´ephasage sera important. On a donc tout int´erˆet `a faire en sorte que T soit aussi long que possible. Bien entendu, on va ˆetre limit´e par T2 puisque si T ≫ T2 la polarisation tend vers z´ero. La

seconde remarque est que cette expression, qui n´eglige l’effet de δω pendant les phases 2 et 4, n’est valable qu’au premier ordre (ou pour des valeurs de δω r´eellement faibles).

La formule exacte, valable pour toutes les valeurs de δω a ´et´e ´etablie dans [54] par exemple, mais elle n’inclut pas la d´epolarisation :

Pz(τ +T +τ ) = 1− 8Ω2 Rsin2Ωef fτ 2  h Ωef f cosΩef fτ 2  cos T δω2 

− δω sin T δω2 sinΩef fτ

2 i24 ef f (5.17) (Rad/s) ω δ -6 -4 -2 0 2 4 Pz -1 -0.5 0 0.5 1 (Rad/s) ω δ -6 -4 -2 0 2 4 Pz -1 -0.5 0 0.5 1

Fig.5.5 – Courbes de r´esonnance de Ramsey optimis´ee (ΩRτ = π/2) pour T = 10 s `a gauche et T = 100 s `a droite. On y reconnaˆıt le terme dominant cos(δωT ) de l’´equation 5.16 modul´e par les effets de plus basse

fr´equence (similaires pour les deux courbes).

(Rad/s) ω δ -0.6 -0.4 -0.2 0 0.2 0.4 Pz -1 -0.5 0 0.5 1

Fig.5.6 – D´etail de la courbe de r´esonance de Ramsey optimis´ee (ΩRτ = π/2) pour T = 100 s (Fig. 5.5, `a droite). On y reconnaˆıt le terme dominant cos(δωT ) de l’´equation 5.16 mais la modulation due aux effets de plus

basse fr´equence est n´egligeable autour de la frange centrale (δω ≈ 0).

Les figures 5.5 et 5.6 illustrent cette ´equation 5.17. En comparant les figures 5.5 on constate l’effet du temps de pr´ecession libre. Plus il est grand, plus l’effet du d´ephasage δωT (oscillations rapides) est important et plus la sensibilit´e de la polarisation `a la fr´equence de pr´ecession est grande. La figure 5.6, quant `a elle, met en ´evidence le fait que d`es lors que T ≫ τ, la courbe de Ramsey autour de δω ≈ 0 est tr`es proche de celle d’un cosinus, ce qui valide l’expression 5.16. On peut aussi la valider par un d´eveloppement limit´e au premier ordre en δω de l’´equation 5.17.