L’´etude du rapport R a permis d’obtenir un r´esultat qui contraint un mod`ele de nou-velle physique au-del`a du Mod`ele Standard. Ce r´esultat est la premi`ere mise en œuvre de la m´ethode de comparaison d’horloges avec des particules et pose le r´esultat le plus contraignant sur le couplage du champ cosmique axial avec un nucl´eon libre.
Ce r´esultat a ´et´e obtenu avec cinq jours de donn´ees seulement et dans des configurations magn´etiques particuli`erement mauvaises. La perspective naturelle est de refaire une mesure avec plus de statistique et dans la meilleure configuration possible. Pour cela, il suffira de r´e-analyser les donn´ees d´edi´ees `a la mesure du moment ´electrique dipolaire du neutron. En cumulant les deux ann´ees de prises de donn´ees, une limite comp´etitive avec les meilleures limites sur le neutron li´e est envisageable.
4. Conclusion
Dans cette derni`ere partie j’ai regroup´e un certain nombre de mesures qui visent `a mieux cerner le rˆole que peuvent jouer les magn´etom`etres c´esium dans la phase II du projet de mesure du moment ´electrique dipolaire du neutron. L’ensemble de ces mesures ont ´et´e prises avant que les principales sources d’inhomog´en´eit´es du champ magn´etique aient ´et´e retir´ees. Ce qui permet de dire que les conclusions pr´esent´ees ici sont pessimistes. En particulier, on observe un d´ecalage reproductible et syst´ematique entre la configura-tion pour laquelle le gradient vertical est mesur´e comme nul par les neutrons et le couple neutron-mercure d’une part, et par les magn´etom`etres c´esium d’autre part. C’est la prin-cipale limitation `a l’utilisation des magn´etom`etres c´esium. Elle devrait ˆetre r´eduite en rapprochant les magn´etom`etres de la chambre de pr´ecession, ce qui sera le cas dans la phase II puisque la taille des magn´etom`etres c´esium va ˆetre de typiquement 5 cm contre 20 actuellement.
En contrepartie, on a pu v´erifier la lin´earit´e entre le gradient r´eel et le gradient me-sur´e par les magn´etom`etres c´esium. Cette lin´earit´e nous permet d’avoir confiance dans l’utilisation des magn´etom`etres c´esium pour v´erifier l’´evolution des gradients du champ magn´etique. Ce contrˆole des gradients dans le temps est `a la base de notre limite sur le cou-plage violant la sym´etrie de Lorentz. En effet, le niveau de sensibilit´e des magn´etom`etres c´esium permet de contrˆoler la variation de gradients `a un niveau qui n’est pas accessible au rapport R. C’est donc un grand pas en avant pour la mesure du moment ´electrique dipolaire du neutron. La limite ici est la difficult´e `a utiliser les magn´etom`etres c´esium pour contrˆoler la variation du champ magn´etique li´ee `a des sources ”internes”, c’est-`a-dire `
a l’int´erieur du volume incluant les magn´etom`etres et la chambre de pr´ecession. En effet, pour ce type de sources, les variations observ´ees par les magn´etom`etres c´esium seront minimis´ees par rapport `a la variation r´eelle.
Enfin, la mise en vis-`a-vis de la courbe du moment ´electrique dipolaire mesur´e en fonc-tion de R et de celle des gradients verticaux mesur´es en foncfonc-tion de R est tr`es prometteuse. Elle offrira de nouveaux moyens de contrˆole des erreurs syst´ematiques li´ees `a l’asym´etrie des d´ecalages ∆ quand le champ magn´etique principal est renvers´e.
En associant ces r´esultats aux diff´erentes cartographies du champ magn´etique, le cron-trˆole du champ magn´etique pour la phase II sera tr`es am´elior´e et les magn´etom`etres c´esium occuperont une place centrale dans ce contrˆole.
Conclusion
Le spectrom`etre RAL/Sussex/ILL se trouve au centre de cette th`ese. Il est l’aboutis-sement de longues ann´ees de d´eveloppements et reste `a la pointe des syst`emes en ´etat de prendre des donn´ees. D´elaiss´e par ses concepteurs `a cause du manque de statistique disponible `a l’ILL, nous avons fait le choix de l’utiliser aupr`es de la nouvelle source de PSI, offrant une statistique sup´erieure par deux ordres de grandeur.
J’ai eu la chance pendant ces trois ann´ees d’ˆetre `a Grenoble, au plus pr`es du spec-trom`etre. Cela m’a permis d’ˆetre associ´ee aux tr`es nombreux tests de tous les nouveaux d´eveloppements techniques et d’avoir une vue d’ensemble du spectrom`etre tel qu’il ´etait et tel qu’il sera afin de me faire une id´ee du chemin parcouru par notre collaboration.
Au d´ebut de cette th`ese, nous ´etions dans la situation d´elicate qui consiste `a utiliser un syst`eme que nous n’avions pas con¸cu. La premi`ere ´etape qu’il a fallu franchir a ´et´e donc de s’approprier le syst`eme et d’en comprendre toutes les subtilit´es.
D`es lors, nous avons utilis´e le spectrom`etre comme un banc de tests grandeur nature pour tous les nouveaux d´eveloppements de notre collaboration en profitant quotidienne-ment de la ligne r´eserv´ee de neutrons ultra froids o`u le spectrom`etre est install´e, `a l’ILL. Cela a ´et´e une grande chance pour nous, tous les d´eveloppements ont pu aller plus vite.
En particulier, cette th`ese avait pour objectif l’optimisation des performances du co-magn´etom`etre mercure tant du point de vue de sa fiabilit´e que du point de vue de la pr´ecision de la mesure du champ magn´etique. L’augmentation de la pr´ecision a ´et´e ´etudi´ee via une mod´elisation de la chambre de polarisation dont les conclusions pr´evoient un gain d’un facteur 2-3 par rapport au syst`eme existant. Une nouvelle g´eom´etrie de la chambre de pr´epolarisation issue de cette simulation sera d’ailleurs test´ee dans les mois `a venir.
Par la suite, les premi`eres mesures physiques ont ´et´e prises. En particulier, ont ´et´e pr´esent´ees dans ce document les ´etudes de corr´elation des mesures du champ magn´etique par nos trois syst`emes de spins en pr´ecession : les neutrons, les atomes de mercure et les atomes de c´esium. Cette ´etude a permis de mettre en vis-`a-vis la magn´etom´etrie externe et la co-magn´etom´etrie pour la premi`ere fois. En particulier, on peut retenir la lin´earit´e observ´ee entre le gradient mesur´e par les magn´etom`etres c´esium et le gradient moyen qui valide l’utilisation de la magn´etom´etrie externe pour le contrˆole de la variation des gradients.
Enfin, en d´ecembre dernier, juste avant le d´em´enagement du spectrom`etre vers le PSI, les premi`eres donn´ees de la mesure du moment ´electrique dipolaire du neutron ont ´et´e prises par notre collaboration. Ces donn´ees, analys´ees dans ce document montrent une pr´ecision en accord avec nos attentes. Elles initient aussi le d´ebut de la phase II o`u l’essentiel du travail va ˆetre d´edi´e `a l’analyse et au contrˆole des erreurs syst´ematiques apr`es quatre ans d´evolus majoritairement au d´eveloppement.
En parall`ele `a nos efforts pour pr´eparer la phase II, notre collaboration s’est ouverte `
a la recherche de nouvelle physique. Le type d’appareillage que nous avons `a notre dispo-sition peut en effet ˆetre utilis´e pour contraindre des ph´enom`enes exotiques. Nous avons ainsi contraint l’oscillation des neutrons en neutrons-miroirs, l’amplitude d’une ´eventuelle cinqui`eme force de longue port´ee ainsi que l’amplitude d’un hypoth´etique champ cosmique axial. J’ai ´et´e associ´ee `a l’obtention de ces contraintes `a diff´erents niveaux, en particulier, la derni`ere fait l’objet d’un chapitre dans cette th`ese. Elle constitue un test de l’invariance de Lorentz `a des ´echelles cosmologiques.
Je voudrais enfin conclure ce document sur la notion de sym´etrie. Introduire une sy-m´etrie nous permet de simplifier nos mod´elisations de l’univers, et souvent, de limiter les hypoth`eses initiales : on s’imagine un monde simple. Pourtant on observe la violation de beaucoup de ces sym´etries et nos mod´elisations s’enrichissent de m´ecanismes de brisure, de nouveaux param`etres, de nouveaux couplages. De nouvelles motivations pour de nou-velles exp´eriences. Cette th`ese est ma mince contribution au test de la sym´etrie CP et de l’invariance de Lorentz.
1. Les ´equations de Bloch de la r´esonnance
magn´etique pour les spins 1/2
La m´ecanique quantique des syst`emes ouverts [85] modifie l’´equation d’´evolution de l’op´erateur densit´e bρ 5.2 qui s’appelle alors l’´equation de Lindblad :
dbρ dt = 1 i¯h h b H, bρi +X k b Lkρ(0)bb L†k− 12nρ(0), bb L†kLbko (1.1)
Dans cette expression, bH est l’hamiltonien d’interaction du syst`eme ferm´e avec le milieu ext´erieur et bLksont les op´erateurs de Lindblad (ou encore Lindbladiens) qui vont modifier l’´evolution du syst`eme par ”dissipation” : une partie de l’´energie et/ou de la coh´erence ´etant dissip´ee du syst`eme vers l’ext´erieur.
Appliquons cette ´equation 1.1 `a notre cas, la pr´ecession d’un spin dans un champ magn´etique, en incluant les effets de d´epolarisation. En d´efinissant l’axe z afin que le champ magn´etique soit selon cet axe, l’hamiltonien est :
b
H = −¯hω20bσz (1.2)
o`u ω0= ~µ. ~B est la pulsation de Larmor et bσz est la matrice de Pauli.
Il y a par ailleurs trois types de processus que l’on va introduire sous la forme d’op´e-rateurs de Lindblad :
– bL1 d´ecrit la relaxation de l’´etat |1i vers l’´etat |0i avec ´emission de l’´energie corres-pondante. b L1 =p Γ1σ+=p Γ1 0 1 0 0 (1.3) – bL2 d´ecrit la relaxation de l’´etat |0i vers l’´etat |1i avec absorption de l’´energie
cor-respondante. b L2 =p Γ2σ−=p Γ2 0 0 1 0 (1.4) – bL3 d´ecrit un processus de pure d´ephasage qui ne transfert aucune ´energie entre le
spin et son environnement. b L3=p Γ3σz=p Γ1 1 0 0 −1 (1.5) L’´equation de Lindbad 1.1 devient alors :
∂ ∂t ρ00 ρ01 ρ10 ρ11 = iω0 0 ρ01 −ρ10 0 + Γ1 ρ11 −1/2ρ01 −1/2ρ10 −ρ11 + Γ2 −ρ00 −1/2ρ01 −1/2ρ10 ρ00 + Γ3 0 −2ρ01 −2ρ10 0 (1.6)
Les quatre solutions se calculent analytiquement :
ρ00(t) = ρeq00+ (ρ00(0) − ρeq00)e−t/T1 ρ01(t) = ρ01(0)e(iω0−1/T2)t
ρ10(t) = ρ10(0)e(−iω0−1/T2)t
ρ11(t) = ρeq11+ (ρ11(0) − ρeq11)e−t/T1 (1.7) dans lesquelles on retrouve les populations d’´equilibre des deux ´etats ρeq00et ρeq11qui satisfont Γ1ρeq11= Γ2ρeq00 et les temps de relaxation T1 et T2 :
1/T1 = Γ1+ Γ2
1/T2 = 2Γ3+(Γ1+ Γ2)
2 (1.8)
On peut remarquer qu’en l’absence de ph´enom`ene de d´epolarisation pure, on s’attend `
a ce que T2 = 2T1. Au contraire, d`es lors que les processus de d´ephasage pure dominent, T2 va devenir beaucoup plus court que T1.
Remarques
Le syst`eme d’´equations 1.7 contient les mˆemes informations que les ´equations de Bloch mais sous une forme diff´erente. Pour revenir `a la forme commune des ´equations de Bloch, il faut en premier lieu introduire le vecteur de Bloch ~α et red´efinir la matrice densit´e comme :
b ρ = 1
2(b1 + ~α.~bσ) (1.9)
dans cette d´efinition le vecteur ~bσ a pour trois composantes les trois op´erateurs de Pauli et b
1 est l’op´erateur identit´e. Les ´etats propres de cet op´erateur bρ sont alors (1 ± |~α|)/2 qui ne sont physiques que si 0 ≤ |~α| ≤ 1. Ce qui conduit `a une repr´esentation de la matrice densit´e sous la forme d’une sph`ere de Bloch dans laquelle une densit´e de probabilit´e peut ˆetre repr´esent´ee par un vecteur ~α. Le centre de la sph`ere (~α = ~0) correspond `a une matrice densit´e compl`etement d´esordonn´ee bρ = 1/2b1. La surface de la sph`ere (|~α = 1|) correspond `
a un ´etat pur avec diff´erentes orientations du spin. La direction du vecteur ~α correspond `
a la direction du spin que l’on s’attend `a mesurer.
Une fois la matrice densit´e exprim´ee sous la forme 1.9, on peut refaire le mˆeme raison-nement que plus haut qui nous donne comme syst`eme `a la place de 1.6 :
dαx dt = −ω0αy −αTx 2 dαy dt = ω0αx− αTy 2 dαz dt = −αz− α eq z T1 (1.10)
dans lequel on retrouve αeqz , la polarisation d’´equilibre. Ces ´equations mettent mieux en ´evidence la pr´ecession libre autour de l’axe z et la relaxation vers l’´etat d’´equilibre.
De ces ´equations, on peut directement ´ecrire les ´equations de Bloch qui correspondent `
2. La fonction de l’ajustement du temps de
relaxation
Dans le cas de l’´etude de la mesure du temps de relaxation dans le noir de la polari-sation, il est possible de r´esoudre le syst`eme 2.27. En effet, dans ce cas, en annulant tous les processus impliquant le pompage optique et les d´epolarisations radiatives (ayant lieu uniquement en pr´esence de la lumi`ere de pompage), le syst`eme se simplifie :
dN− g dt = −Ng−2TR1 + Ng+2TR1 + Ne+3τ2 + Ne−3τ1 + Γ0/2 dNg+ dt = −N+ g 2TR1 + N− g 2TR1 + N− e 3τ2 + N+ e 3τ1 + Γ0/2 dN− e dt = −Ne−3τ1 − Ne−3τ2 dNe+ dt = −Ne+3τ2 − Ne+3τ1 (2.1)
On remarque que les ´etats excit´es ne sont alors plus re-peupl´es et que leur population d´ecroˆıt tr`es vite (τ ≈ 1 · 10−7 s). On peut donc ´ecrire que Ne+= Ne−= 0 ce qui simplifie encore le syst`eme pr´ec´edent :
dN− g dt = −Ng−2TR1 + Ng+2TR1 + Γ0/2 dNg+ dt = −N+ g 2TR1 + N− g 2TR1 + Γ0/2 (2.2) En introduisant n = N+ g − N−
g on se ram`ene `a une seule et unique ´equation : dn
dt = − n
TR (2.3)
Pour introduire p = n/(Ng++ Ng−) = n/N , la polarisation de la vapeur, il faut tenir compte des deux termes de la d´eriv´ee : dpdt = N1 dndt−Np dNdt = N1 dndt−pt. On peut alors ´ecrire :
dp
dt = − p TR −p
t. (2.4)
Cette ´equation a pour solution :
p(t) = Pmaxe
(t0−t)/TRt0
t (2.5)
o`u TR est le temps de relaxation de la polarisation, Pmax est la polarisation initiale et t0 est introduit pour ´eviter la divergence math´ematique en t = 0 en posant p(t0) = Pmax. On peut interpr´eter t0 comme le d´ebut de la p´eriode pendant laquelle on effectue le pompage optique donc t0 = Tpol. D’autre part, le temps t de l’expression 2.5 n’est autre que le temps pendant lequel la d´epolarisation a lieu, autrement dit, Tnuit si l’origine des temps est Tpol mais en mettant l’origine du temps au d´ebut du pompage optique, on doit remplacer t par Tnuit+ Tpol.
Ceci nous conduit `a l’expression suivante :
p(Tnuit+ Tpol) = Pmaxe(Tpol−(Tnuit+Tpol))/TR Tpol (Tnuit+ Tpol) = Pmaxe−Tnuit/TR Tpol
(Tnuit+ Tpol). (2.6)
Cette expression a deux param`etres libres, Pmax et TR, qu’il est possible d’ajuster. Remarque
On suppose que p(Tpol) = Pmax quel que soit Tpol. Exp´erimentalement ceci est v´erifi´e sur une certaine gamme de temps. On observe en particulier cela sur la figure 2.7 sous la forme d’un plateau de la valeur de la polarisation.