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Axe 1 : Session parallèle A Interdisciplinarité Modérateurs : Juliette MICHEL et Régis KEERLE

2. Ethnographier la rue en tant que « guiri »

Parallèlement, le terrain dans les bars et rues, ainsi que lors d'un marché de nuit de biffins met au jour une autre posture dissonante pour l'anthropologue. L'anthropologue doit négocier avec son statut de femme, blanche et « guiri », nom donné aux touristes en Espagne et revêtant un ensemble de significations qui lui assigne une classe sociale supposée élevée (Monnet, 2001) qui s'articule avec une forme d'exotisation. Le point de vue situé (Haraway, 2007 [1988]) donné par cette position sociale peut alors être productif ce que permet de démontrer l'analyse de de l'articulation des rapports intersectionnels de classe, de genre, et de racialisation entre l'anthropologue et les gens du quartier. L'extériorité aux relations locale permet ainsi de transcender des rapports de classes, de même que le rapport de séduction hétéronormé qui prélude à toutes ses interactions et qu'il s'agit de désamorcer pour approfondir la relation et ainsi poursuivre l'ethnographie. Ces deux postures créent des formes de dissonances différentes, qui donnent toutes deux lieux à des compensations très variées de la part de l'anthropologue. La compensation commune aux deux pour l'anthropologue est néanmoins la visée à long terme de la poursuite de son recueil de données et de son ethnographie, qui une fois revenue du terrain lui permettra de produire son analyse. Au quotidien cependant, elles sont très différentes à vivre. Cependant on peut analyser qu'elles sont les deux facettes d'une même situation, celle d'une anthropologue extérieure au tissu local des relations sociales, ayant des caractéristiques telles que blanche, potentiellement riche ; les différent∙e∙s acteurs∙trices peuvent ainsi lui assigner une place à partir de projections et d'exotisation.

72 Références bibliographiques :

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urbanisme, Université Paris Est

HARAWAY D. (2007 [1988]), "Situated Knowledges: The Science Question in Feminism and the Privilege of Partial Perspective ", Feminist Studies, Vol. 14, n° 3 (Autumn, 1988), pp. 575-599

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Paris, Ed. La Découverte

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Une recherche engagée pour la Justice Climatique

Claire PHILIPPE Doctorante en Géographie UMR CNRS 6590 ESO-Le Mans, Le Mans Université claire.philippe.etu@univ-lemans.fr

15 364 scientifiques issus de 184 pays signent L'alerte des scientifiques du monde à

l'humanité: un deuxième avis publié le 13 novembre 2017 dans la revue Biosciences.

C’est la deuxième fois en 25ans qu’un large collectif de scientifiques lance l’alerte: « Un

changement radical dans notre gestion de la Terre et de la vie terrestre s’avère nécessaire pour éviter des souffrances humaines à grande échelle ». Cette alerte dresse un bilan alarmant

des évolutions d’émission de gaz à effets de serre et d’extinction de la biodiversité depuis l’appel de 1992, liste une série de pistes d’orientations et appelle les scientifiques et les citoyens à « faire pression » sur les gouvernements et à s’organiser. Un appel à s’engager donc... issu de chercheurs de multiples disciplines. L’une des définitions du Larousse du mot engagement est le « fait de prendre parti sur les problèmes

politiques ou sociaux par son action et ses discours ». Appeler à un changement radical de

notre société n’est pas – ou n’est plus – « prendre parti ». C’est énoncer un fait largement reconnu, y compris par beaucoup de gouvernements et d’acteurs économiques. Mais les « changements radicaux » peuvent être de différentes nature. La géo-ingénierie, la financiarisation de la nature et de l’ensemble du vivant constituent aussi des changements radicaux. Ce débat est crucial maintenant. Les chercheur.euses en sciences humaines et sociales ont un rôle important à jouer pour mettre en avant des solutions humaines et sociales. Comment et avec qui pouvons-nous y contribuer plus efficacement en tant que jeunes chercheur.es? Avec qui?

Cette communication donnera des éléments de stratégie du mouvement pour la justice climatique ainsi que deux exemples issus de ma thèse avec les mouvements citoyens pour la justice climatique en France et au Sénégal. L’engagement est au cœur de ma démarche qui se rapproche de l’ethnographie militante en œuvrant « depuis, par et pour » le mouvement pour la justice climatique (Russel, 2015). Depuis 2015, année de la COP (Conférence des Parties) de Paris, le mouvement pour la justice climatique a investi physiquement un nouvel espace, les banques, pour exiger le désinvestissement des énergies fossiles et le financement des transitions. Je vous présenterai ensuite le cas de la lutte contre l’exploitation du zircon en Casamance au Sénégal en insistant sur le rôle du comité scientifique qui soutient le comité de lutte.

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1. Investir les banques pour désinvestir des énergies fossiles. Quand le mouvement