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3. MARQUAGE MORPHEMATIQUE DES FORMES FORTES D’IMPERATIF : ETUDE DIACHRONIQUE

3.3 ETAT DU SYSTEME DANS LE DERNIER TIERS DE LA DIACHRONIE

Le mouvement général de sigmatisation graphique semble bien s’achever en moyen français. En 1550, Meigret écrit en effet :

Les Imperatifs de toutes le’ côjugezôs, n’ont qe <le temps> q’on appelle prezent : leqel la premiere conjugezon forme comunement du prezent indicatif : e come tous imperatifs nayet ao singulier qe la secôd’e tierse <personnes>, la seconde n’et differente de çelle du prezent indicatif, sinon q’ell’otte s : de sorte qe nou’dizons, eyme, pour eymes (...)

Il faot toutefoes exçepter aller, qi fet vas, e va : e qât ao’ deu’ tierses, il les emprunte du futur optatif, ou du prezent subjonctif : parqoe il fet vas, voeze, allons, allez, voezet.273

La parenté sémiologique de l’impératif et de l’indicatif est ainsi sentie comme une quasi-étymologie, alors qu’elle est plutôt selon nous de nature synaptique. Les grammairiens de l’époque n’excluent pas la troisième personne du paradigme de l’impératif, d’où le recours à des formes que nous considérons comme exclusivement subjonctives (voise, voisent). Ce qui nous paraît ici plus riche d’enseignement, c’est ce qui concerne les graphies positives de l’époque et la norme grammaticale : d’une part en effet, si l’on suit Meigret, les graphies -es, si fréquentes au XVe siècle, n’existent plus ou sont proscrites ; nous avons toutefois rencontré quelques graphies conservatrices en prose au XVIe siècle :

273

Meigret, 1550, p. 94 et 95. L’orthographe de Meigret est partiellement phonétique. Nous la reproduisons aussi fidèlement que possible.

Deffence 284 Uses donques hardiment de l’infinitif pour le nom, comme l’aller, le chanter, le vivre, le mourir.

Editions de 1557, 62, 73 et 84 à 97 : Usez

Dialogues 57, Avant-propos, au Lecteur : Ne dedaignes pourtant de regarder ce qui est caché sous la modeste couverture d’un tiltre philosophique : non que je te veulle attirer à lire et embrasser mes euvres (car peu je me soucie de quel visage ilz soient recueillis du vulgaire) mais je desire te faire congnoistre quelle affection me meut à tant travailler pour le bien public, sans espoir d’autre recompense, que de celle, laquelle le souverain Dieu a promise et revelée à châcun de nous.

En ce qui concerne la Deffence et Illustration de la langue francoyse, on voit que la tendance des éditions postérieures à 1549 a été d’interpréter cette forme comme forme faible plutôt que comme forme forte sigmatisée.

D’autre part, va peut à son tour subir la sigmatisation. Meigret toutefois n’indique aucune règle de distribution entre les formes va et vas, et, curieusement, dans la présentation qu’il donne du paradigme, il ne retient plus que la forme sigmatisée. Toutes ces intuitions seront approfondies un siècle plus tard, avec ébauche de codification. C’est justement à la lumière des Remarques de Vaugelas (1647) que nous nous proposons de prendre en compte le système de marquage désinentiel de l’impératif fort au XVIIe siècle, en insistant sur ses évolutions. L’une de ces Remarques s’intitule précisément « S’il faut mettre une s, en la seconde personne du singulier de l’impératif. »274

. Nous y ferons systématiquement référence pour mettre en perspective les données observées dans notre propre corpus.

En diachronie du moyen français au français classique, la principale évolution concernant les finales vocaliques est l’augmentation en fréquence des finales -e, alors que les autres (-a, -y, -ay, -oy, etc.) ne connaissent pas de progression sur la période.

Cette finale -e change d’ailleurs de statut phonologique, puisqu’elle perd au XVIIe siècle sa valeur phonétique lorsque sa prononciation n’est plus rendue nécessaire par le contexte syntactique ou métrique :

L’Astrée 42, Que si le ressouvenir de ce qui s’est passé entre nous (que je desire toutesfois estre effacé) m’a encor laissé quelque pouvoir, va t’en desloyal, et garde toy bien de te faire jamais voir à moy que je ne te le commande.

Le Cid 1637, 26*275, Don Gomès à Elvire : Va l’en entretenir mais dans cet entretien / Cache mon sentiment et descouvre le sien, / Je veux qu’à mon retour nous en parlions ensemble

La poésie en particulier conserve (et conservera, au moins jusqu’à Aragon) la prononciation du -e final entouré, dans la chaîne phonique, d’une seule consonne de part et d’autre (cas de cache ici). En prose comme en poésie, la voyelle Ŕe est prononcée pour éviter la succession de trois consonnes, exclue

274

Vaugelas, 1647, p. 189 à 192.

275L’astérisque (*) devant la citation d’une occurrence indique que nous avons eu recours à une autre édition du texte, qui respecte absolument l’orthographe d’époque. Voir sur ce point notre introduction générale.

phonologiquement par la langue : découvre le sien, garde toy. Dans tous ces cas, -e n’a plus tout à fait l’articulation labiale qu’il avait encore en moyen français276. L’évolution du système fournit donc à la finale

-e, dont nous avons évoqué le statut partiellement morphématique, la personnalité sémiologique idoine : apte

à marquer l’impératif fort dans certains cas seulement, -e n’est plus réalisé comme phonème positif que dans certains cas seulement.

Un autre phénomène syntactique à portée morphématique concerne à cette époque les finales -e, et, plus généralement, toutes les finales vocaliques d’impératif fort. Ce phénomène, sans doute ancien, est relevé par Vaugelas à travers sa conséquence orthographique. Vaugelas nuance ainsi le jugement de Meigret un siècle plus tôt en décelant une règle dans la distribution -e/-es :

En e, comme aime, ouvre, et ainsi de tous les autres de la mesme terminaison, qui de leur nature n’ont jamais d’s, mais en empruntent seulement pour mettre devant les deux particules adverbes en, et y, comme font tous les imperatifs qui finissent par une voyelle. 277

La liberté de commutation entre finales -e et -es, caractéristique des graphies d’impératifs forts en moyen français, se trouve donc abolie, si l’on suit Vaugelas, et remplacée par une règle grammaticale stricte de distribution. Les impératifs forts sache(s), veuille(s), dont la base avait été empruntée au subjonctif, sont eux aussi soumis à cette règle au XVIIe siècle ; le mouvement grammatical de désigmatisation, amorcé en moyen français avec la forme vueille, et qu’attestent encore les différentes éditions de La Deffence et

Illustration de la langue francoyse :

Deffence 314 Pour conclure ce propos, saiches, Lecteur, que celuy sera veritablement le poëte que je cherche en nostre langue, qui me fera indigner, apayser, ejouyr, douloir, aymer, hayr, admirer, etonner, bref, qui tiendra la bride de mes affections, me tournant ça et la à son plaisir.

Editions de 1549 (originale), 57, 62, 80 : saiches Edition de 61 : sçaiches

Autres éditions (69, etc.) : sçache

est en effet achevé au siècle suivant :

Introduction, 31* Sus donc, ô mon cœur, ne veuïlle plus estre infidelle, ingrat, et desloyal à ce grand bienfacteur.

L’Astrée 53, réponse de Céladon à Lycidas : Ne t’enquiers plus de ce que je fais, mais sçache que je continue tousjours en ma peine ordinaire.

Version 1660 de Mélite 616, Eraste à Cliton : Mais après ce message / Sçache avec tant d’adresse ébransler son courage, / Que tu viennes à bout de sa fidelité.

O. Soutet rapproche cette évolution des formes fortes d’impératif d’origine subjonctive de celle des formes faibles qui perdront, par « soustraction de formant », leur /j/ prédésinentiel278. Nous sommes tout à

fait d’accord pour apparier ces deux faits diachroniques qui dessinent la personnalité autonome des paradigmes impératifs d’origine subjonctive. C’est pourquoi nous proposons de parler de « soustraction de morphème », la « soustraction » apparaissant en l’occurrence comme l’opération diachronique la plus simple qu’ait trouvée la langue pour restituer à l’impératif l’autonomie de tout son paradigme.

La forme aies semble résister davantage à ce mouvement, au moins au début du siècle :

Histoire comique de Francion 6, Valentin, je suis ton amy, luy dit il, n’ayes aucune crainte : Je feray en sorte que tu jouyras des plaisirs que tu desires le plus.

Dans cet exemple, l’on ne peut exclure la réalisation de la liaison avec aucune, ce qui justifierait la présence graphique de l’s. Cette plus grande résistance diachronique de la forme a(i/y)es à la désigmatisation graphique manifeste peut-être aussi que sa base est toujours sentie par les usagers de l’écrit comme solidaire de celle de sois, forme qui se maintiendra sigmatisée jusqu’en français contemporain.

D’une façon générale (hors le cas de ayes), les formes fortes en -e s’affirment donc graphiquement comme impératifs. Elles obéissent cependant à la règle syntactique générale de sigmatisation graphique en contexte de liaison. Cette règle s’applique à toutes les finales vocaliques. Vaugelas en précise la portée à propos de va :

En a, il n’y a que va, ce me semble, qui s’escrit et se prononce va, devant toutes les voyelles, excepté en deux particules, à sçavoir en, adverbe relatif, et y ; car devant en, adverbe, il prend un t, comme va-t-en, et c’est le seul imperatif de quelque terminaison qu’il soit, qui prenne un t, aprés luy. Remarquez que je dis devant la particule en, adverbe relatif, parce que lors qu’en est prepositition, on n’y ajoute rien ; Par exemple on dit, va en Italie, va en Hierusalem, et non pas va-t-en, etc. Et devant y, il prend une s, comme va-s-y. Mais il faut noter que cette s, n’est pas de sa nature, et qu’elle n’est adjointe seulement pour oster la cacophonie, comme nous avons accoustumé de nous servir du t, en orthographiant et prononçant a-t-il, pour a il, et comme nous nous en servons encore à va t-en.279

L’analogie entre les marques t (clitique) dans va-t-en et s (désinentielle) dans va-s-y, abstraction faite de l’évident parallélisme de surface, peut nous sembler étonnante aujourd’hui. En fait, l’intuition de Vaugelas est plus profonde qu’il n’y paraît, car elle nous conduit implicitement à reconnaître ce qui est commun aux deux signes, s et t. Malgré leur différence de nature, ils s’inscrivent tous deux dans un paradigme, va-t-en, allez-vous-en, allons-nous-en, d’une part, va-s-y, allez-y, allons-y d’autre part. Loin d’être simplement euphonique, comme semble le suggérer Vaugelas, leur réalisation phonétique, /t/ ou /z/, correspond chaque fois à l’unique marque morphématique du rang personnel 2 dans l’ensemble du syntagme. Ce marquage n’est donc pas univoque en discours. Il n’est d’ailleurs généralement pas réalisé, et

277 op. cit., p. 189. 278 Soutet, 1997, p. 120. 279 Vaugelas, 1647, p. 189.

l’intention de Vaugelas est précisément de consacrer l’orthographe la plus concrète, la plus phonétique, celle qui reconnaît, dans le cas de l’impératif fort, la subtilité sémiologique du morphème de rang personnel.

Morphème « clignotant »280, n’apparaissant que dans certains contextes syntactiques, -s, réalisé phonétiquement en /z/, s’est toutefois étendu en diachronie à toutes les finales initialement vocaliques d’impératif fort, ce qui donne beaucoup de cohérence sémiologique à l’ensemble du paradigme.

La nuance, que nous avons reconnue depuis les origines, entre les finales vocaliques et les finales consonantiques, n’a plus de consistance phonétique effective au XVIIe siècle : le groupe des graphies finales consonantiques s’est en effet réduit à celui de -n, qui n’est plus prononcé derrière la voyelle nasale à cette époque. Vaugelas évoque en même temps la reconnaissance graphique de la sigmatisation de ces deux types de finales, devant lesquelles les locuteurs de l’époque hésitent. Hormis les finales -e et -a (va), il distingue deux groupes, selon l’importance de cette hésitation. Dans un premier groupe, la sigmatisation serait reconnue par tous :

Tout le monde est d’accord que <...> l’on met tousjours <une s> en ceux <i. e., les impératifs> qui terminent en aus, eus, ous, ans, ens, ats, ers, eurs, ets, ors, et ours, où l’s, neantmoins bien souvent ne se prononce pas, tellement qu’à les oüyr prononcer, on ne peut pas discerner s’ils ont une s, ou non. En aus, comme vaus, prevaus, etc. vaus autant que ton pere, car icy l’s, est de sa nature, et non pas adjointe, prevaus toy, non prevau toy.

En eus, comme meus, esmeus, veus, où l’s, est encore essentielle, et non pas estrangere, tout de mesme qu’aux autres qui suivent, où il y a une s, esmeus à pitié, veus ce que tu peus, et non pas, esmeu à pitié, ny veu ce que tu peux.

En ous, comme resous, resous un peu la question, resous toy, et non pas resou un peu, ny resou toy.

En ans, comme respans, et non pas, respan, respans de l’eau, respans-y de l’eau. En ens, comme prens, rends, vends, et non pas pren, rend, vend.

En ats, comme bats, abbats, et non pas ba, et abba. En ers, comme fers, perds, et non fer, per. En eurs, comme meurs, et non pas meur.

En ets, comme mets, permets, et comment le pourroit-on dire autrement ? En ors, comme dors, sors, et non pas dor, sor.

En ours, comme cours, secours, recours, non cour, secour, etc.281

Notre corpus confirme très généralement cette évolution pour les finales que cite Vaugelas. Nous avons retenu dans cet ensemble, à titre d’illustration, les formes attends et prends, qui comptent parmi les plus fréquentes de nos relevés. L’orthographe de la grande majorité de ces formes va en effet dans le sens des observations de Vaugelas :

L’Astrée 61, Regarde, Tyrcis, regarde idolatre des morts, et ennemy des vivants, quelle est la perfection de mon amitié, et apprens quelques-fois, apprens à aimer les personnes qui vivent, et non pas celles qui

280

Catach, 1980, p. 242, définit les liaisons en général comme des phonèmes « clignotants », possibles ou obligatoires selon les contextes.

sont mortes, qu’il faut laisser en repos après le dernier adieu, et non pas en troubler les cendres bien-heureuses par des larmes inutiles, et prens gardes si tu continues, de n’attirer sur toy la vengeance de ta cruauté, et de ton injustice.

Mélite 607, Eraste à Cliton : Cours viste chez Philandre, et dy luy que Melite / A dedans ce papier sa passion descrite, / Dy luy que sa pudeur ne sçauroit plus cacher / Un feu qui la consomme, et qu’elle tient si cher : / Mais prens garde sur tout à bien joüer ton rolle, / Remarque sa couleur, son maintien, sa parolle, / Voy si dans la lecture un peu d’esmotion / Ne te monstrera rien de son intention.282

Le Cid 221*283 Don Diegue au Comte : Acheve, et prens ma vie apres un tel affront, / Le premier dont ma race ait veu rougir son front.

Horace 230* Camille : Soit que Rome y succombe, ou qu’Albe ait le dessous, / Cher amant, n’attends plus d’estre un iour mon espous, / Mon cœur (quelque grand feu qui pour toy le consomme) / Ne veut ny le vainqueur, ny l’esclave de Rome.

La Princesse d’Elide 66* (609) Moron à Tircis : Allons je vais faire honte à tous les Amans ; Tien ? je ne suis pas homme à faire tant de faire tant de façons, voy ce poignard ? prens bien garde comme je vais me percer le cœur ?284

Andromaque 95, Oreste à Pylade : Car enfin n’attens pas que mes feux redoublez / Des périls les plus grands, puissent estre troublez.

Suréna 238*, Eurydice : Amour, sur ma vertu prens un peu moins d’empire. Les Plaideurs II, XIII, Dandin à Léandre : Acheve, prens ce sac, prens viste.285

Quelques occurrences, relevant de cet inventaire, s’écartent malgré tout de l’usage ici consacré :

Le Cid 680* le Roi à Chimène : Pren courage, ma fille, et sçache qu’aujourd’huy / Ton Roy te veut servir de pere au lieu de luy.

Le Cid 749* le Roi à Chimène : Pren du repos, ma fille, et calme tes douleurs.

Les Plaideurs Acte I, scène IV, Dandin à Léandre : Compare, prix pour prix, / Les estrennes d’un Juge à celles d’un Marquis ; / Atten que nous soyons à la fin de Decembre.

Corneille corrigera toutefois en 1660 l’orthographe de la première version du Cid (1637) dans un sens tout à fait conforme aux exigences de Vaugelas :

Edition de 1660 (F.), 671 le Roi à Chimène : Prens courage, ma fille, et sçache qu’aujourd’huy / Ton Roy te veut servir de pere au lieu de luy.

Edition de 1660 (F.), 739 le Roi à Chimène : Prens du repos, ma fille, et calme tes douleurs.

282 Nous relevons le même verbe impératif, sous la même orthographe, au vers 331 de Mélite.

283Même orthographe dans l’édition de 1660.

284

Nous relevons également, dans le même texte, p. 52* (599) Philis à Moron : « Prens-y bien garde au moins ; car à la moindre parole je prends la fuitte. »

Les jugements de Vaugelas sont moins tranchés en ce qui concerne un dernier groupe de finales :

Et les uns croyent qu’il ne faut point d’s, à ceux qui terminent en i, ai, ain, ein, oy, en, et üy, et les autres, qu’il en faut. (...)

En i, comme beni, fini, di, li, ri, les uns disent ainsi, les autres benis, finis, dis, lis, ris.

En ai, ou ay, comme fay, tay. Les uns disent ainsi, et les autres, fais, tais, cette dernière façon est la plus suivie.

En ain, comme crain, ou crains, qui est le meilleur.

En ein, comme fein, pein, ou feins, peins, ce dernier est le plus suivy. En oy, comme voy, connoy, ou vois, connois, le premier est le plus suivy. En en, comme tien, vien, ou tiens, viens, le premier est le plus suivy. En uy, comme fuy, ou fuys, le premier est le plus suivy.286

Afin d’illustrer et d’évaluer ces remarques empiriques à partir de notre corpus, nous examinerons successivement l’orthographe des formes en -i, qui ne sont pas objet de jugement axiologique, puis celle de formes en -ais, pour lesquelles l’orthographe sigmatique serait « la plus suivie », enfin celle de formes plutôt asigmatiques selon Vaugelas.

En ce qui concerne les formes en -i, sur lesquelles Vaugelas ne semble pas se prononcer, nous enregistrons en effet, sur l’ensemble de la coupe synchronique, une hésitation bien réelle dans les codes orthographiques. Ainsi, tandis que Corneille, jusque très tardivement, ou encore Racine, n’utilisent pas d’autre forme que dy :

Mélite 607287, Eraste à Cliton : Cours viste chez Philandre, et dy luy que Melite / A dedans ce papier sa passion descrite, / Dy luy que sa pudeur ne sçauroit plus cacher / Un feu qui la consomme, et qu’elle tient si cher : / Mais prens garde sur tout à bien joüer ton rolle, / Remarque sa couleur, son maintien, sa parolle, / Voy si dans la lecture un peu d’esmotion / Ne te monstrera rien de son intention.

Le Cid 53*, l’Infante au page : Va-t’en trouver Chimene, et luy dy de ma part / Qu’aujourd’huy pour me voir elle attend un peu tard, / Et que mon amitié se plaint de sa paresse.

Horace 1687*288, le vieil Horace à Valère : Dy Valere, dy nous, puisqu’il faut qu’il perisse, / Où tu penses choisir un lieu pour son supplice ?

Le Cid, édition de 1660 (F.) 7, Chimène à Elvire : Dy-moy donc, je te prie, une seconde fois / Ce qui te fait juger qu’il approuve mon choix, / Apprens moy de nouveau quel espoir j’en dois prendre.

Andromaque 1039289, Andromaque à Céphise : Dy-luy que de mon Fils l’amour est assez fort...

l’orthographe de Molière se caractérise sur ce point par une certaine préférence - non exclusive - pour la forme sigmatisée :

La Princesse d’Elide 33* (614) Euryale à Moron : Dy-nous donc ce que c’est ?

285

Même orthographe aux vers 168, 470 et 579 de la pièce.

286

Vaugelas, 1647, p. 191-192.

287

Les vers 341 et 356, y compris dans les éditions de 1660 et 1663, présentent la même orthographe.

288L’orthographe est la même aux vers 418 et 1326.

La Princesse d’Elide 64* (607) Philis à Tircis : Dis, Tircis, ce que tu voudras.

La Princesse d’Elide 64* (608) Philis à Moron : Oüy, dis ? je veux bien t’écouter pour la rareté du fait. La Princesse d’Elide 74* (614)Clymène à Philis : CHere Philis, dis-moy, que crois-tu de l’Amour ? Le Misanthrope 745* Alceste à Basque : Dy-luy, que ie n’ay point d’Affaires si pressées.

Le Misanthrope 835* Clitandre à Acaste : Laissons la raillerie, / Et me dis quel espoir on peut t’auoir donné ?

Le Misanthrope 1463* Alceste à Du Bois : Laisse-là, son Nom, Traistre, et dis ce qu’il t’a dit.