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Notations du Chapitre 2

HMX M3C HMX E HMX 100-200 Moyenne (μm) 4,6 24 163,5

5. Etude de la structure après tir

5.3 Observation microscopique

5.3.1 Etat de surface et aspect structurel des jupes

Pour chaque lot d’explosif, les jupes récupérées sont observées afin de déterminer le mode de cisaillement (Figure 2-46).

Figure 2-46 : Allure globale de la jupe après tir.

Le Tableau 2-16 résume les cotes et les masses pour chacune des jupes étudiées. Les cotes sont mesurées à l’aide d’un palpeur numérique de précision micrométrique. Les masses sont pesées à l’aide d’une balance électronique. A titre indicatif, ces données sont comparées à celles d’une jupe « idéale », c’est-à-dire d’un cylindre de diamètre intérieur 3,5 mm (voir Figure 2-41). Diamètre moyen interne (mm) Diamètre moyen externe5 (mm) Hauteur moyenne (mm) Masse (g) Jupe idéale 3,5 10 0,5 0,2736 Tir 2566 3,57 8 0,52 0,1579 Tir 2567 3,56 8 0,51 0,1446 Tir 2568 3,56 8 0,52 0,1454

Tableau 2-16 : Cotes et masses des jupes.

La Figure 2-47 désigne les dimensions idéales et les dénominations utilisées pour cette partie. La jupe présente deux côtés distincts. Le côté du canon, ou le « bord libre », est le côté vers lequel est propulsé le projectile. Il n’est pas exposé à la combustion et ses bords

sont étirés vers l’extérieur suite à la rupture. Le côté de la chambre de combustion subit quant à lui une compression due à la pression des gaz brûlés.

Figure 2-47 : Profil de la jupe après tir et dénominations des différentes parties.

L’état de surface observé au Microscope Optique (MO) fournit un premier diagnostic du mode de cisaillement. La microstructure peut être révélée à l’aide d’une attaque acide. Pour cela, une jupe est coupée transversalement en son milieu. La moitié à étudier est enrobée dans une résine puis polie de manière à effacer toute trace de l’opération de découpe. L’échantillon est plongé ensuite dans un mélange d’eau régale dont la composition est donnée par :

-4 volumes d'acide chlorhydrique (HCl) - 3 volumes d'acide nitrique (HNO3) - 4 volumes d'eau (H2O)

La durée de base du traitement à l’acide est de 1 minute 30 secondes, mais celle-ci peut être prolongée si l’attaque ne permet pas de révéler suffisamment la structure. Une exposition trop longue à l’acide peut toutefois conduire à la détérioration de l’échantillon.

La section est ensuite observée au MO. Des fissures rectilignes et parallèles apparaissent, orientées à 15° par rapport à la direction de la poussée (Figure 2-48).

3,5 mm 4 mm Zone encastrée Zone de cisaillement puis de rupture Zone intermédiaire Côté chambre de combustion Côté canon ou « bord libre »

Figure 2-48 : Observation au MO de jupe, après 2 minutes d’attaque acide.

Une exposition prolongée de 2 minutes supplémentaires dans la solution acide permet de révéler certaines traces qui correspondent à un début de cisaillement en bandes. Le cisaillement en bandes qui apparaît à la Figure 2-49 est parallèle au bord de la fracture. Il s’agit d’une bande de cisaillement adiabatique (ou ASB, voir Chapitre 1 – 4.2) qui n’a pas abouti à une rupture du matériau, en raison de la rupture antérieure d’une autre bande. La taille de la bande ainsi que sa forme concordent avec des observations microscopiques de la littérature ([2.8]).

Figure 2-49 : Visualisation au MO d’une structure en bandes (à gauche) et comparaison avec une ASB observée dans un acier similaire ([2.8]) (à droite).

Une autre trace caractéristique d’une bande de cisaillement adiabatique marque la zone intermédiaire de la jupe (Figure 2-50). Cette zone est en effet soumise à un différentiel de contraintes élevé entre la partie encastrée, quasiment immobile, et la partie cisaillée qui subit d’importantes déformations. Un début de fissuration est visible sur la Figure 2-50.

Fissures rectilignes

Figure 2-50 : Visualisation au MO d’une structure en bandes, après 2 minutes (à gauche) puis 4 minutes d’attaque acide (à droite).

Ces bandes de cisaillement, dont certaines conduisent à la séparation du projectile, caractérisent une montée brutale en pression dans la chambre de combustion.

L’utilisation d’un Microscope Electronique à Balayage (MEB) a permis d’approfondir les observations précédentes.

L’analyse de la jupe du côté chambre de combustion montre des signes apparents de la combustion, quel que soit le lot d’explosif étudié. La Figure 2-51 présente des zones avec des traces particulières. Il pourrait s’agir de résidus de produits de combustion, ou encore d’acier partiellement fondu, témoin d’une température supérieure à 1700 K (voir Tableau

1-13).

Figure 2-51 : Observation au MEB d’une jupe, côté chambre de combustion.

Le côté « canon » montre les effets du cisaillement qui a conduit à la perforation de l’opercule (Figure 52). Le bord intérieur (appelé « contour de cisaillement » sur la Figure

2-47) fait apparaître deux faciès de rupture distincts : (i) des bandes de cisaillement

adiabatique, lisses et nettes, déjà observées au MO, et (ii) des cupules, qui résultent de la

Début de fissuration

nucléation, la croissance et la coalescence de vides sphériques caractéristiques d’une rupture ductile en traction dynamique.

Ces observations suggèrent une rupture en deux phases successives (Figure 2-53) : 1/ Dans un premier temps, la pression dans la chambre augmente très rapidement jusqu’à des niveaux élevés. La déformation à la périphérie de la partie encastrée de l’opercule est accommodée par des bandes de cisaillement adiabatique. Compte-tenu des résultats de la VH (voir partie 3.3), il apparaît que les efforts maximaux dus à la pression s’appliquent pendant environ 10 μs et entrainent un déplacement du projectile de l’ordre du millimètre. Ces échelles de temps correspondent bien au domaine des bandes de cisaillement adiabatique (voir Chapitre 1 - 4.2).

2/ La répartition de la pression sur la surface de l’opercule n’étant pas symétrique, et la résistance n’étant pas parfaitement homogène à l’échelle microscopique, certaines zones se rompent avant les autres. L’étanchéité de la chambre de combustion n’est plus vérifiée, et les fuites de gaz entraînent une

1

1 2

2

Figure 2-52 : Superposition de zones de tractions (1) et de zones de bandes de cisaillement adiabatique (2) sur la jupe. Grossissement sur chacune de ces zones

diminution de la pression dans la chambre de combustion. Le cœur de la partie étirée est alors soumis à une traction qui entraîne une rupture ductile.

Figure 2-53 : Description schématique d’une rupture combinant bandes de cisaillement adiabatique (ASB) et traction dynamique.

Cette combinaison des deux modes de rupture dépend du lot d’explosif utilisé (Figure

2-54 à Figure 2-56).

Pour le lot 100-200 par exemple (Figure 2-54), plusieurs zones présentent des cupules situées de manière irrégulière sur le pourtour de la zone perforée.

Figure 2-54 : Observation au MEB de la jupe 100-200, côté canon.

Pour le lot E (Figure 2-55) des traces identiques peuvent être observées, mais elles sont toutefois moins marquées et moins nombreuses.

Enfin, pour le lot M3C (Figure 2-56), ces cupules sont pratiquement inexistantes. La rupture est très nette et très régulière.

Figure 2-55 : Observation au MEB de la jupe E, côté canon.

Figure 2-56 : Observation au MEB de la jupe M3C, côté canon.

Le fait que les cupules soient davantage présentes et visibles pour l’explosif avec la granulométrie la plus grossière (lot 100-200), puis s’avèrent de moins en moins notables avec les lots E et surtout M3C, peut s’expliquer par la réactivité du lot d’explosif.

Plus la granulométrie est fine, plus l’explosif est réactif. La montée en pression est alors normalement plus rapide et les conditions pour les bandes de cisaillement adiabatique sont vérifiées. Ainsi, pour le lot M3C, la pièce métallique subit un chargement en contraintes rapide et brutal, et présente une rupture très nette, typique des bandes de cisaillement. Pour le lot de HMX 100-200, le chargement en contraintes est moins intense, ce qui s’éloigne davantage des conditions de formation des bandes de cisaillement adiabatique. La pièce présente ainsi plus de traces caractéristiques d’une rupture ductile.

L’observation des deux modes d’endommagement montre à nouveau que la granulométrie d’explosif tient un rôle important dans le comportement du cisaillement.