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5 Dispositifs expérimentaux

5.2 Essais d’érosion interne

Ce type d’essais est développé pour reproduire, de façon simplifiée, l’érosion interne. Comme précédemment évoqué, le terme « érosion interne » regroupe différents phénomènes qui se produisent à l’intérieur d’un ouvrage en terre et concerne l’arrachement et le transport de la matière solide. Cela explique les différentes approches pour reproduire le phénomène au laboratoire. Ces essais peuvent se regrouper selon trois catégories.

• Des essais qui reproduisent l’érosion déclenchée par un écoulement préférentiel au sein de l’ouvrage par exemple une fissure ou une discontinuité crée par la présence d’un matériau de nature différent (câble, tuyau etc.) :

o Essais d’érosion de trou ou « Hole Erosion Test, HET »,

• Des essais reproduisant l’érosion sans interface distincte avec le fluide et dans un volume élémentaire représentatif.

o « Flow Pump Test »,

o « Triaxial Erosion Test ».

• Des essais qui reproduisent l’érosion à l’interface de deux matériaux différents comme l’interface du noyau d’un barrage en terre avec un matériau filtre ou un ouvrage de protection avec sa fondation :

o Dispositif expérimental de l’érosion de contact.

5.2.1 Essai d’érosion de trou « Hole Erosion Test » (HET)

Ce type d’essai consiste à faire circuler un écoulement dans un trou préformé de l’échantillon à l’instar du « pinhole test » (cf. 5.4.2.1) avec cependant un suivi instrumenté de l’essai. Grâce aux paramètres mesurés et estimés tels que le débit, le gradient hydraulique et l’évolution du diamètre du trou, la contrainte de cisaillement et le taux d’érosion peuvent être estimés. La Figure I.12 montre un schéma d’appareillage de Hole Erosion Test (HET) développé par Wan et Fell (2002).

Wan et Fell (2004) ont travaillé sur les matériaux du noyau des barrages. Leur étude portait sur la résistance à l’érosion de 14 types de matériaux constitutifs du noyau des barrages. Un « indice du taux d’érosion » a été introduit pour classifier la résistance à l’érosion. Une méthode simple a été proposée pour estimer la vraisemblance de l’érosion interne et du renard dans les barrages en terre. Cependant le choix fait pour estimer la contrainte de cisaillement critique est discutable. Ce point est discuté plus en détails à la section 3.1.

5.2.2 « Flow Pump Test »

Ce terme est employé par Reddi et al. (2000) pour des essais de comparaison de l’érosion interne et l’érosion de surface. Le principe d’essai consiste à faire passer de l’eau soit à l’intérieur du réseau des pores d’une éprouvette placée dans un perméamètre de laboratoire soit à l’intérieur d’un trou percé au milieu d’un éprouvette de sol comme dans l’essai d’érosion de trou. En revanche, le gradient hydraulique est généré par une pompe d’où le nom d’essai. La pompe est programmée pour augmenter linéairement le débit de 0 à 200ml/min durant 15 minutes. La masse du sol érodé est quantifiée à l’aide d’un turbidimètre et la contrainte de cisaillement comme décrit dans la section 1.2.2.

Figure I.13 – Schéma du dispositif expérimental de « Flow Pump Test » a) cellule d’essai d’érosion interne b) cellule d’essai pour l’érosion de surface (conduite) c) schéma du montage expérimental (source Reddi et al. 2000).

Les essais effectués sur une texture de sol reconstitué (mélange de 70% de sable d’Ottawa et 30% de kaolinite) ont révélé une différence d’environ 1000 fois entre la contrainte de cisaillement critique interne et externe du sol. La différence est similaire entre les coefficients d’érosion. Les auteurs interprètent cet écart par le rebouchage et la redéposition possibles des particules de sol érodées dans le réseau des pores.

5.2.3 « Triaxial Erosion Test »

Ce dispositif est un montage modifié de l’appareil triaxial classique. Il permet de solliciter hydrauliquement et mécaniquement des éprouvettes de sol afin d’étudier la suffusion dans un volume généralement homogène. Il offre ainsi la possibilité de maîtriser le confinement pendant un essai tout en évitant l’apparition d’écoulements parasites autour des éprouvettes.

Sanchez et al. (1983) ont mené des essais sur les matériaux de cinq barrages en terre grâce à l’appareil triaxial d’érosion afin de calculer la contrainte de cisaillement et le taux d’érosion. Ils ont trouvé que la teneur en eau a une influence plus importante sur l’érosion d’un sol limoneux que sur un sol de type argileux. L’augmentation de la concentration en ions dans le fluide diminue le taux d’érosion d’un sol limoneux plus significativement que dans le cas d’un sol argileux.

Bendahmane et al. (2008) ont développé une nouvelle version de l’essai pour optimiser l’injection du fluide interstitiel et la récolte de l’effluent. Pour éviter toute perturbation non contrôlée des éprouvettes reconstituées, ils ont proposé d’effectuer la saturation, la consolidation et la réalisation d’essais dans la même cellule à température et hygrométrie contrôlées. Le schéma du dispositif expérimental est illustré à la Figure I.14. Il est possible d’y exercer des sollicitations hydrauliques statiques et dynamiques avec un suivi automatisé. Comme précédemment évoqué, il existe un gradient hydraulique critique d’initiation de l’érosion par suffusion. Ces études ont mis en évidence l’existence d’un second gradient critique correspondant à une érosion interne par renard. La diminution du pourcentage d’argile et de la pression de confinement amplifie la suffusion. En revanche contrairement à la suffusion, cette deuxième phase d’érosion régressive s’intensifie si la pression de confinement est augmentée.

5.2.4 Dispositif expérimental de l’érosion de contact

Ce dispositif a pour objectif d’étudier l’érosion à l’interface séparant deux matériaux différents soumis à un écoulement tangent (Guidoux et al. 2010 ; Béguin 2012). Il a été développé originellement par Ho (2007) pour étudier le comportement des dispositifs en géotextile face à l’érosion. La représentation schématique est donnée à la Figure I.15. Le sol fin et le sol grossier à étudier sont placés en deux couches horizontales de respectivement 8 et 5cm d’épaisseur dans une cellule en acier de 70×30×26,5 cm. Les limites de l’écoulement à l’entrée et à la sortie de la cellule coïncident avec la face supérieure de la couche de sol fin. Deux filtres sont disposés aux extrémités pour éviter les effets de bord. Une des faces de la cellule est munie d’une vitre permettant d’observer les phénomènes se déroulant à l’interface. Cet essai peut être influencé par un effet de bord dû à cette géométrie, notamment à cause de l’augmentation de la porosité au contact de la vitre. Une surcharge est appliquée sur la face supérieure de l’échantillon par une vessie en latex remplie d’eau ou air mis sous pression. Un système hydraulique permet de faire circuler un écoulement d’eau dans la couche de sol grossier. Le débit sortant de la cellule et la turbidité sont mesurés. Un capteur de pression différentielle mesure la perte de charge dans l’échantillon.

Ce dispositif permet de tester des conditions propices au détachement et au transport des particules. Les sols grossiers utilisés sont des filtres géométriquement ouverts pour le sol fin, ou proches du critère limite. L’écoulement généré est considéré comme majoritairement localisé dans le sol grossier. La vitesse nominale d’écoulement est simplement estimée en supposant un écoulement uniforme dans toute la section. Le débit solide en sortie de cellule est évalué par le turbidimètre. En effet, un calage préliminaire a donné une relation linéaire entre concentration de sol et turbidité. L’écoulement tangent à l’interface de deux couches de sol de granulométries différentes est généré par une différence de pression qui est mesurée par un capteur de pression différentielle. Une surcharge est appliquée sur la face supérieure de l’échantillon par une vessie en latex à air comprimé. Au cours du test, le débit sortant de la cellule et la turbidité sont mesurés avec un gradient de pression et une contrainte normale imposés.

Le protocole d’essai choisi consiste à augmenter la vitesse d’écoulement par paliers constants de 30 minutes. Plusieurs types de sols reconstitués ont été testés à l’aide de ce dispositif dans deux configurations : sol grossier au dessus du sol fin et l’inverse. Les résultats obtenus ont mis en évidence l’existence d’une vitesse critique d’initiation de l’érosion. Une relation empirique a été proposée pour exprimer cette vitesse critique de l’écoulement pour les différents mélanges. Il a été constaté que la granulométrie du sol grossier augmente la vitesse seuil quand on tend vers des diamètres plus grands. La granulométrie du sol fin semble montrer une influence du même type avec un minimum, encadré par une augmentation de la vitesse critique dans le domaine des argiles et dans celui des sables. L’évolution de l’érosion a

aussi été observée avec l’apparition de structures instationnaires au niveau de l’interface, et l’augmentation continue du taux d’érosion en fonction de la vitesse.

Figure I.15 – Schéma du dispositif expérimental de l’érosion de contact (source Béguin 2012)