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5.4 2 Contexte organisationnel

6.1 Quelle conclusion tirer des résultats ? Une contribution à la pratique

6.1.2 Des espaces pour favoriser le processus de conversion des connaissances

Les résultats l’ont démontré, la structure de gestion de projet et l’utilisation des connaissances ont favorisé davantage les processus d’échanges de savoirs explicites. Sans surprise car il s’agit du mode privilégié par les organisations de santé dans la transmission des connaissances. Mais, la conversion des connaissances demande des échanges de savoirs tacites. En effet, utiliser seulement les connaissances explicites ne permet pas de gérer le changement (Nonaka, 2011). Tel que démontré dans la recension des écrits, le processus est dépendant du contexte et en ce sens, il dépend aussi des valeurs, des objectifs, de la compréhension des individus ainsi que des relations de pouvoirs. Par conséquent, le défi demeure pour une organisation d’aussi favoriser l’échange de savoirs tacites. Il existe des occasions d’échanges informelles, mais dans une organisation caractérisée par le travail en

silos, elles sont limitées à l’univers immédiat de travail ou aux relations historiques entre d’anciens collègues de travail.

Notre recherche a démontré que le BST a fourni un nouvel espace d’échanges entre professionnels qui habituellement ne travaillent pas ensemble et qui a permis le développement de réseaux. En fait, une des caractéristiques du comité clinique a été la présence d’une mixité de professionnels qui se connaissaient, alors que d’autres non. Ainsi, on retrouvait un équilibre entre de nouvelles relations et des personnes qui avaient déjà des relations déjà établies. Cette situation a permis d’élargir les réseaux de chacun, mais surtout d’assurer une certaine base commune pour travailler. Cette mixité de réseaux nous a semblé un élément important pour le processus de création de connaissances en permettant de construire sur les réseaux existants pour en créer de nouveaux. Ainsi, on se retrouve avec des participants qui ont une connaissance et culture communes tout en assurant la diversité des perspectives. L’organisation a donc joué un rôle en mettant en place des stratégies pour la composition des équipes qui permettent d’atteindre un équilibre dans la représentation de différents microréseaux afin d’obtenir un amalgame entre réseau existant et nouveau réseau.

Cette question de microréseau a été traitée par Nonaka et Von Krogh (2000) dans un article sur les conditions favorisant le processus de création des connaissances. Les auteurs mentionnent justement l’importance de la présence des microcommunautés dans l’échange des savoirs tacites. Tels que définis par les auteurs, les microcommunautés ou microréseaux permettent de créer un contexte propice aux échanges sur les valeurs, croyances, etc. nécessaires au processus de création de connaissances. Ainsi, une composition stratégique des équipes remplit deux rôles : celui de permettre un échange tacite à petite échelle et celui d’assurer la présence de différentes perspectives et expertises au sein des équipes. Par la suite, les membres des équipes deviennent des agents de propagation auprès d’autres réseaux assurant une amplification des nouvelles connaissances au sein de l’organisation.

L’organisation a comme rôle de favoriser le développement de contextes qui permettent la mise en place du processus de création de connaissances et le BST a réussi à le faire. Si la plupart des organisations admettent l’importance d’instaurer une culture qui valorise l’apprentissage, dans les faits les organisations ont souvent traduit leur intérêt par un contrôle accru des procédures en mettant l’emphase sur des technologies des communications et les outils d’évaluation (Nonaka et Von Krogh, 2000). Or, les processus sociaux sont

difficiles à quantifier et à contrôler. Le rôle de l’organisation est plutôt de soutenir le processus en mettant en place des stratégies pour favoriser la communication et les interactions. Ainsi, l’organisation doit créer des espaces d’échanges, assurer une composition des groupes qui permettent un bon amalgame entre réseaux existants et nouveaux réseaux. Finalement, l’organisation doit avoir des stratégies pour soutenir l’amplification des connaissances au-delà du processus réalisé au sein d’un groupe en particulier.

6.1.3 Le leadership

Le leadership est un facteur important dans le processus de création de connaissances. Dans l’exemple étudié, le leadership a influencé le processus de création de connaissance. Le leadership s’est manifesté sous plusieurs formes, à différents échelons de l’organisation et dans différentes situations. Reprenant la catégorisation de VonKrogh et Nonaka (2011), les activités de leadership ont été centralisées (contrôlées par une autorité centrale) ou distribuées au sein des membres des équipes. Ainsi, au niveau du groupe les activités de leadership ont été réalisées en partie par la gestionnaire pour, par exemple, encadrer les interactions, favoriser un climat sain et soutenir la mise en place d’une vision et d’objectifs communs. Le leadership a aussi facilité l’échange et la production de connaissances. Mais au sein du groupe même, certaines personnes ont réalisé des activités de leadership en prenant des responsabilités. En fait, on peut affirmer que le leadership (centralisé ou distribué) constitue plus qu’un facteur influençant le processus, il est une composante essentielle du processus de création des connaissances. Si on reconnaît habituellement les qualités du leadership centralisé, on en connaît beaucoup moins sur l’importance du leadership distribué dans le processus de conversion. Or, on pose comme hypothèse que les activités de leadership distribué constituent en quelque sorte ce qui assure une cohérence au groupe, ce qui lui permet de lier les différents membres dans un processus commun. Ils sont le reflet d’un engagement de la part de certains membres du groupe et ces activités permettent aussi d’avoir une direction commune pour agir sur les problématiques. Ainsi, il semble important de développer des stratégies précises pour permettre l’expression de cette forme de leadership qui s’apparente à un engagement et une implication accrue de la part de certains participants.