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1. La carie proximale

1.5. Epidémiologie

Les caries dentaires ont été énormément étudiées ces 50 dernières années en Europe et en Amérique du Nord. Ces études épidémiologiques ont été très utiles pour connaître les besoins et l’efficacité des traitements conservateurs. À l'origine, l'épidémiologie était axée sur l'étude des épidémies, mais aujourd’hui les études épidémiologiques ont été élargies pour couvrir tous les aspects des besoins de santé d'une population. Une population est constituée d’individus se trouvant dans une région précise. Le nombre d'individus dans une population ayant une maladie à un moment précis dans le temps est connu comme étant la prévalence de la maladie. Plusieurs études ont été réalisées à travers le monde pour étudier la prévalence des caries proximales.

En 1986, Eklund et al. ont présenté dans leur étude la prévalence des caries proximales de la population américaine de 1971 à 1974. Ces données sont issues du centre national des statistiques épidémiologiques des Etats-Unis. La figure 17 présente les résultats obtenus. Au cours de cette étude, Eklund et al. ont rapporté que la carie occlusale précédait toutes les autres et apparaissait rapidement sur les molaires. Les caries proximales, quant à elles, apparaissent plus tardivement. Toutefois, il est possible de voir que les lésions carieuses proximales ne sont pas sporadiques et nécessitent une grande surveillance.

Figure 17: Pourcentage de faces proximales cariées ou obturées en fonction de l’âge

En 1999, Forsling et al. ont étudié la prévalence des caries proximales en Suède. Les 511 patients observés étaient tous âgés de 19 ans. Lors de l’étude, 56% des patients étaient exempts de lésions carieuses. Toutefois, ils n’étaient seulement que de 27% lorsque le critère : « présence d’une lésion initiale » a été ajouté. Les caries initiales ont constitué 90% du total des lésions carieuses. Cette étude permet de voir que la prévalence des lésions précoces au niveau proximal est particulièrement importante. Les moyens de diagnostic alors utilisés doivent présenter l’avantage de détecter les caries au stade le plus précoce.

Les mesures cliniques et les données épidémiologiques indiquent que la majeure partie des lésions carieuses chez les enfants et adolescents Danois touchent la face occlusale des molaires. Cependant, chez les jeunes adultes, la majeure partie des lésions carieuses se situent au niveau des faces proximales. Mejàre et al. (1998) ont suivi pendant 10 ans des patients suédois initialement âgés de 12 ans. Chaque années des radiographies de type bitewing ont été réalisées. Cette étude a montré une augmentation de la prévalence des lésions carieuses proximales. En effet, à l’âge de 12 ans, la prévalence était de 39% contre 72% à l’âge de 21 ans ; et ceci malgré le fait que les patients soient suivis régulièrement par un dentiste. Il semble donc difficile de contrôler la progression des caries proximales chez les jeunes adultes, même avec des mesures préventives très strictes. Martignon et al. (2010) ont étudié

l’évolution des lésions carieuses proximales chez de jeunes adultes Danois après qu’une lésion ait été détectée par radiographie. Cette évolution a été suivie sur une période de 6 ans. Après 6 ans, les 73 patients suivis devaient répondre à un questionnaire. Le nombre moyen de surfaces obturées par des restaurations étaient de 7,5 dont 23% étaient des lésions proximales sur dents postérieures. Radiographiquement, le nombre moyen de lésions proximales visibles étaient de 5,5. Au cours des 6 années, la progression des lésions profondes ou des restaurations a augmenté dans 57% des cas. Le questionnaire a montré une faible compliance des patients pour l’usage du fil dentaire et des brossettes interdentaires. Les auteurs de cette étude en concluent que des mesures de prévention plus efficaces doivent être mises en place afin d’assurer un meilleur nettoyage proximale.

Sahba et al. (2004) ont évalué la prévalence des caries proximales chez les étudiants en chirurgie dentaire de l’université d’Azad (Iran). 89 étudiants composés de 41 hommes et 48 femmes ont été sélectionnés au hasard. Sur chaque étudiant, une radiographie de type bitewing a été réalisée au niveau du secteur postérieur droit et gauche. Les espaces interproximaux analysés sont situés entre : 7 et 6 ; 6 et 5 ; 5 et 4. Au total, 12 espaces interproximaux sont étudiés sur chaque individu. Les résultats ont montré que seuls 6 individus (6,7%) étaient complètement exempts de caries. Les 83 autres individus, soit 93,3%, présentaient au moins une lésion proximale. Sur les 1068 faces proximales étudiées, 794 (73,4%) étaient exemptes de caries, mais 274 faces (25,7%) étaient atteintes de lésions carieuses. Dans cette étude, la plupart des caries proximales ont été décelées entre la deuxième prémolaire et la première molaire, au niveau maxillaire. Le site le moins touché par les caries était entre la première et la seconde prémolaire, au niveau mandibulaire. Ainsi, sur une population pourtant sensibilisée aux problèmes dentaires, l’incidence des caries proximales est relativement élevée. Un dépistage précoce et sûr est, par conséquent, nécessaire au cabinet dentaire pour enrayer au plus tôt la lésion carieuse.

Les faces proximales des dents jouent un rôle important dans l’occlusion. Elles sont la clé de voute de toute l’arcade dentaire. Au niveau parodontal, l'anatomie de la papille gingivale dépend des contacts proximaux et de la longueur de l'espace interdentaire. Le point de contact (situé au 1/3 vestibulo-occlusal de la face proximale) protège la papille et maintient l'intégrité tissulaire du parodonte par une bonne déflection des aliments. En outre, les faces proximales sont primordiales pour la pérennité de la dent et leurs pertes fragilisent considérablement la structure dentaire.

Cependant, les faces proximales, comme toutes autres surfaces dentaires, peuvent être touchées par les lésions carieuses. Elles sont, par ailleurs, particulièrement exposées à la plaque dentaire du fait des carences d’utilisation du fil dentaire et des brossettes interdentaires. Le développement des caries proximales est particulièrement insidieux et les lésions au stade le plus précoce échappent bien souvent au praticien. Leur détection est, par conséquent, tardive, à un stade où tous les traitements de reminéralisation seront inefficaces. Les reconstitutions seront alors la seule thérapeutique envisageable. Au niveau proximal, les reconstitutions par méthodes directes sont particulièrement difficiles. En effet, le praticien doit gérer tous les liquides tels que les saignements gingivaux, le fluide gingival issu du sulcus, mais aussi la salive. La reconstitution du point de contact est aussi particulièrement délicate. Un point de contact insuffisant aura pour conséquence un bourrage alimentaire. Celui-ci engendrera une destruction progressive du parodonte, des reprises de caries et des douleurs. Un point de contact placé incorrectement peut engendrer une légère rotation de la dent. Celle-ci cherche, en effet, à retrouver une position physiologique au détriment d’une occlusion optimale.

Le diagnostic précoce et correct d’une lésion carieuse est important pour permettre l’introduction de mesures de prophylaxie et de traitement appropriées. Au fil du temps, l’émergence des nouvelles technologies n’a cessé d’améliorer et d’optimiser les diagnostics dans le domaine médical. Dans le cadre du diagnostic des caries proximales, plusieurs dispositifs sont à ce jour disponibles en cabinet dentaires. Des dispositifs, prometteurs, sont aussi en cours de développement afin de toujours plus faciliter le dépistage des lésions carieuses proximales. On peut, toutefois, se demander sur quels principes reposent ces dispositifs ; mais aussi quels sont leurs impacts réels pour le patient et le praticien.

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