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II.3 Mise en pratique : le mod`ele O(n)

III.1.2 D´ependance dans la fonction de coupure

L’action effective moyenne Γk s’identifie par construction `a l’´energie libre de Gibbs

Γ dans la limite k→ 0. En effet, d’apr`es la contrainte (II.9), le r´egulateur Rk s’annule

`a k = 0 de sorte que le terme de masse ∆Sk disparaˆıt des expressions (II.6) et (II.8), et

Γk=0 devient la transform´ee de Legendre standard de l’´energie libre (dans les notations

du chapitre II). Ainsi, les quantit´es physiques, qui d´erivent de Γ0, ne d´ependent pas

du sch´ema de s´eparation des modes Rk. Plus pr´ecis´ement, partant d’une action mi-

croscopique initiale donn´ee, la trajectoire de renormalisation effectivement suivie dans l’espace des param`etres du mod`ele d´epend, elle, de la forme sp´ecifique du r´egulateur `a toute ´echelle k finie mais le point final du flot `a l’´echelle k = 0 est invariant, comme repr´esent´e sur le sch´ema de la figure 1. Cependant, cette propri´et´e, v´erifi´ee par le flot exact, est viol´ee lorsque l’action effective Γk est tronqu´ee [6, 59, 58]. Toute troncation

introduit alors une d´ependance artificielle des grandeurs physiques dans le choix de la coupure. Ceci sugg`ere de rechercher et d´eterminer — s’il existe — un r´egulateur

Γ

Λ

Γ

Λ

k = Λ

k = 0

Γ

0

Γ

0

[R ]k

Rk

flots exacts

flots tronques

Fig. 1 – Influence du r´egulateur Rk sur la trajectoire du flot de renormalisation entre les ´echelles k = Λ et k = 0 (sch´ema inspir´e de [58]). Chaque r´egulateur engendre sa propre trajectoire dans l’espace des param`etres du mod`ele. Toutes les trajectoires confluent, quel que soit Rk, au mˆeme point final Γ0 dans la th´eorie exacte (`a gauche).

En pr´esence d’approximations, elles subissent une dispersion et le point final Γ0[Rk]

d´epend alors du r´egulateur (`a droite).

optimal qui minimise la distance au point Γ0 exact. N´eanmoins ce probl`eme est plus

d´elicat qu’il n’y paraˆıt car le choix d’un crit`ere d’optimisation n’est pas unique. S’agit- il de se fier `a la rapidit´e de convergence du d´eveloppement en champ ? Qu’advient-il alors de celle du d´eveloppement d´erivatif ? Est-ce ´equivalent `a am´eliorer la pr´ecision des r´esultats, `a minimiser la d´ependance des r´esultats dans la fonction de coupure ?

Cette question rejoint une probl´ematique propre `a toute th´eorie d’approximation, qui rend les approximants d´ependant de param`etres non physiques. Elle a ´et´e originel- lement mise en lumi`ere dans le cadre de l’application des th´eories de perturbation `a la chromodynamique quantique [60, 61]. L’influence du sch´ema de renormalisation sur les grandeurs physiques semblait rendre caduque tout pouvoir pr´edictif de ces th´eories, dans la mesure o`u le choix du sch´ema rel`eve enti`erement de l’arbitraire. Un des premiers traitements a ´et´e propos´e par Halliday et Suranyi `a travers une analyse de la th´eorie perturbative de l’oscillateur anharmonique [60]. Ils sugg´eraient de recourir, pour fixer le choix d’un param`etre non physique, `a un crit`ere de rapidit´e apparente de la conver- gence des s´eries perturbatives, qui consiste `a minimiser, ordre par ordre, les corrections successives. Peu apr`es, Stevenson, soulignant que cette proc´edure ne garantissait en rien de converger vers la valeur exacte, a ´elabor´e une strat´egie alternative [61]. L’id´ee en est de parvenir `a exploiter la connaissance de la propri´et´e d’invariance par rapport au sch´ema — ou plus g´en´eralement aux param`etres non physiques — v´erifi´ee par la th´eorie exacte pour enrichir l’information fournie par les approximants successifs. Ceci sugg`ere de choisir les param`etres qui r´eduisent au maximum la sensibilit´e des r´esultats `a des petites variations de ces param`etres, ce que Stevenson a baptis´e le principe de sensibilit´e minimale (PSM). Ce principe va sous-tendre notre travail. Deux des ca- ract´eristiques de cette proc´edure, mises en exergue dans notre analyse (sections III.2 et III.3), sont d´ej`a ´evoqu´ees dans le travail original [61]. Premi`erement, ce principe n’est pas ´equivalent `a une optimisation de la rapidit´e de la convergence qui ne conduit pas

III.1. LES PROC ´EDURES D’APPROXIMATION 39

n´ecessairement `a la mˆeme valeur. Deuxi`emement, le PSM semble, comme escompt´e, poss´eder la propri´et´e fondamentale de minimiser l’erreur par rapport `a la valeur exacte — autrement dit d’optimiser la pr´ecision — et donc de s´electionner l’approximation la plus fiable.

Dans le cadre sp´ecifique du groupe de renormalisation non perturbatif, cette probl´e- matique se d´ecline en la d´ependance dans le choix de la fonction de coupure Rk. Sonder

l’influence du r´egulateur prend un sens concret en param´etrant une fonction de cou- pure donn´ee par un (ou un jeu de) param`etre(s) variable(s). La valeur optimale est alors d´etermin´ee `a travers un crit`ere d’optimisation et les performances des diff´erentes familles de coupure sont comparables en confrontant les r´esultats optimaux issus de chacune d’elles. Se basant sur l’´etude du mod`ele d’Ising en trois dimensions `a l’ordre ∂0,

deux crit`eres d’optimisation ont ´et´e ´elabor´es et ´etudi´es. Le premier, propos´e par Liao et al. [52], s’apparente `a celui de Halliday et Suranyi. Il repose sur l’argument que le profil du r´egulateur, en r´egissant la s´eparation entre les modes de fluctuation rapide et lent, conditionne le traitement des op´erateurs non pertinents. Il en d´ecoule l’hypoth`ese que, pour un profil optimal, les compensations mutuelles entre ces op´erateurs non per- tinents au point fixe sont maximales (et donc au plus proche de la th´eorie exacte pour laquelle leurs contributions s’annulent exactement), ce qui se transcrit par la conver- gence en champ la plus rapide. En pratique, ce crit`ere s’inspire de l’observation que des

Fig. 2 – Exposant ν du mod`ele d’Ising en trois dimensions `a l’ordre ∂0, en fonction de l’ordre M de la troncation en champ d’apr`es [52]. Le potentiel est d´evelopp´e autour de son minimum ρ0. Les courbes repr´esentent, de haut en bas, les r´esultats obtenus

pour des profils de r´egulateurs de plus en plus “doux”, les cas extrˆemes correspondant `a la coupure dure (en haut) et au r´egulateur optimal (en bas). La “douceur” du profil conditionne l’amplitude des oscillations.

r´egulateurs `a variations trop brutales (la non analycit´e de la coupure dure repr´esentant `a cet ´egard le cas extrˆeme, ce qui la discrimine) ou trop lentes, induisent de grandes

oscillations en variant l’ordre en champ, comme illustr´e sur la figure 2. Les auteurs ont r´ealis´e une ´etude syst´ematique pour trois familles de r´egulateurs (loi de puissance, ex- ponentielle et tangente hyperbolique) dont la “douceur” du profil est param´etr´ee. Pour chacune, un r´egulateur est s´electionn´e de mani`ere unique en d´eterminant la valeur du param`etre qui conduit `a la convergence en champ la plus rapide. La comparaison des r´egulateurs ainsi optimis´es pour chacune des trois familles r´ev`ele que leurs profils sont sensiblement identiques. Corrolairement, les exposants ν associ´es `a chacun sont tr`es proches, correspondant donc au mˆeme niveau de pr´ecision (les courbes pour les trois r´egulateurs optimaux se confondent avec la courbe “b=3” de la figure 2).

Dans une s´erie de travaux [57, 38, 62, 63, 53, 58], Litim a propos´e un second crit`ere d’optimisation, qui s’´enonce de la fa¸con suivante. L’inverse du propagateur effectif apparaissant dans l’´equation de flot de Γk (II.13) poss`ede, en pr´esence d’un r´egulateur,

un “seuil”, soit : min q2≥0 h Γ(2)k [φ(q)]|φ=φ0 + Rk(q) i = min q2≥0 h P2(q2)i= Ck2, (III.1)

o`u la constante C est strictement positive et finie. Les r´egulateurs optimaux sont d´efinis comme ceux qui maximisent le seuil C. L’id´ee est que la valeur de C r`egle la distance de P2(q2) `a z´ero et donc la distance du propagateur P2(q2)−1au pˆole. La maximisation de

C contribue alors `a stabiliser le flot en ´eloignant au plus le pˆole du propagateur `a tout k fini. Plus pr´ecis´ement, Litim a montr´e que l’´equation de flot admet un d´eveloppement en puissances de 1/P dont les coefficients s’´ecrivent de fa¸con g´en´erique [57] :

an =

Z

qF [Rk]P

−n(q2), (III.2)

o`u la forme de F d´epend de la th´eorie consid´er´ee. Dans la limite n→ ∞, ces int´egrales sont domin´ees par la contribution du minimum de P2, soit a

n ∼ C−n/2, de sorte que

maximiser C revient `a maximiser le rayon de convergence R = limn→∞an/an+1 de ce

d´eveloppement en amplitude. L’espoir est donc que le “bon comportement” du flot se r´epercute sur les propri´et´es de convergence des d´eveloppements en champ ou en d´eriv´ees. Litim sugg`ere que ce crit`ere est ´equivalent au PSM [62], du moins `a l’ordre ∂0. Une ´etude extensive des r´esultats ´emanant de l’application de ce crit`ere a ´et´e men´ee

pour plusieurs formes fonctionnelles de r´egulateurs. La figure 3, comparant l’exposant ν du mod`ele d’Ising en trois dimensions obtenu `a l’ordre ∂0 pour trois r´egulateurs

diff´erents, en fournit une illustration.

Il en ressort que les r´egulateurs optimis´es m`enent `a une convergence rapide du d´eveloppement en champ et au mˆeme niveau de pr´ecision (voir par exemple la figure 3, o`u les deux courbes du bas correspondent `a des r´egulateurs optimis´es et celle du haut non). En outre, ces ´etudes ont inspir´e la formulation d’une solution particuli`ere du crit`ere de maximisation du seuil [38] :

Rk(q2) = (k2− q2)θ(k2− q2). (III.3)

La caract´eristique de ce r´egulateur optimal est qu’alors le propagateur P2(q2) atteint

III.1. LES PROC ´EDURES D’APPROXIMATION 41

Fig. 3 – Exposant ν du mod`ele d’Ising en trois dimensions `a l’ordre ∂0, en fonction de l’ordre ntrunc de la troncation en champ d’apr`es [53]. Le potentiel est d´evelopp´e soit

autour du champ nul (`a gauche), soit autour de son minimum ρ0 (`a droite), ce dernier

point am´eliorant sensiblement la convergence en amortissant les oscillations. Les trois courbes repr´esentent, de haut en bas, les r´esultats obtenus avec : la coupure dure (non optimale), le r´egulateur en loi de puissance optimis´e, le r´egulateur optimal (III.3). Les deux r´egulateurs optimaux conduisent `a des r´esultats plus pr´ecis.

propagateur ne d´epend donc plus de l’impulsion interne sur tout l’intervalle [0; k2],

ce qui offre en outre l’avantage pratique que les int´egrales en impulsion peuvent ˆetre calcul´ees analytiquement (cette propri´et´e a d´ej`a ´et´e exploit´ee au paragraphe II.3.2, voir les ´equations (II.46) `a (II.49)).