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CHAPITRE 2: MÉTHODOLOGIE

2.1 Enquête auprès des intervenants en soins palliatifs

L’objectif de cette enquête consistait d’abord à déterminer la fréquence, la pertinence et la faisabilité des discussions relatives aux antécédents familiaux de cancer en soins palliatifs. Cette enquête visait aussi à identifier les besoins les plus importants des intervenants en soins palliatifs, leurs principales préoccupations éthiques et les rôles les plus importants qu’ils pourraient remplir dans le cadre de discussions portant sur le caractère héréditaire des cancers.

2.1.1 Identification et sélection des participants et collecte de données

Les participants potentiels ont été identifiés à partir de la liste des personnes ayant assisté aux congrès annuels de l’Association québécoise de soins palliatifs (AQSP) en 2015 et 2017. Pour être admissibles à cette étude, les participants potentiels devaient être impliqués directement dans la prestation de soins palliatifs aux patients en fin de vie. Ainsi, les bénévoles, les intervenants spirituels, les musicothérapeutes, les zoothérapeutes, les techniciens en loisir, les gestionnaires ainsi que les chercheurs n’ayant pas de tâches cliniques n’étaient pas admissibles.

Un premier courriel d’invitation a été envoyé en novembre 2016 à toutes les personnes inscrites au congrès annuel de 2015 de l’AQSP. Ce courriel contenait un lien vers un questionnaire rendu disponible en ligne par une firme privée d’enquêtes et de sondages (SOM

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inc.). Deux rappels ont ensuite été envoyés en décembre 2016 et janvier 2017, respectivement. Au 10 avril 2017, 50 intervenants avaient répondu au questionnaire. Afin de rejoindre un plus grand nombre d’intervenants, la procédure a été répétée auprès des personnes inscrites au congrès de l’AQSP de 2017. Ainsi, un courriel d’invitation a été envoyé le 31 mai 2017 suivi également de deux rappels les 8 et 20 juin 2017, respectivement. Au total, le courriel d’invitation a été envoyé à 1191 personnes. Parmi celles-ci, 730 ont été jugés potentiellement admissibles à l’étude sur la base de leur catégorie professionnelle et de la fonction occupée telles que rapportées lors de leur inscription aux congrès. Quatre-vingt- dix-huit intervenants ont répondu au questionnaire. Quatre ont, par la suite, été exclus de l’étude, car ils ne faisaient pas partie des catégories professionnelles visées par l’enquête. Quatre-vingt-quatorze ont été retenus pour les analyses, ce qui représente un taux de réponse de 13%. La collecte de données a pris fin le 3 juillet 2017, date à laquelle il n’était plus possible d’accéder au questionnaire.

2.1.2 Outil de collecte des données

Afin de recueillir les informations nécessaires à l’élaboration du questionnaire d’enquête, une étude pilote a été conduite auprès de 12 intervenants expérimentés du milieu des soins palliatifs. Au cours des mois de décembre 2015 et de janvier 2016, des entrevues semi- structurées, téléphoniques ou en face à face, ont été réalisées auprès de quatre médecins, quatre infirmières, trois travailleurs sociaux et un nutritionniste. Un guide contenant trois cas fictifs et des questions ouvertes a été utilisé lors de ces entrevues (Annexe A). Le premier cas fictif concerne un patient atteint de cancer colorectal en fin de vie partageant, avec les intervenants en soins palliatifs, ses inquiétudes par rapport au risque de cancer des membres de sa famille. Dans le deuxième cas, il est question d’une patiente atteinte d’un cancer de l’ovaire récidivant et porteuse d’une mutation génétique pathogène. Cette patiente confie aux intervenants en soins palliatifs que ses frères et sa sœur, potentiellement à risque de cancer, n’ont pas été mis au courant de son statut de porteuse. Le troisième cas parle d’une patiente atteinte d’un cancer fulgurant du pancréas. Quoiqu’en fin de vie, cette patiente désire se soumettre au test génétique afin de pouvoir détecter, au bénéfice des membres de sa famille, la présence d’une mutation génétique délétère. Les questions ouvertes sont conçues de façon

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à porter les intervenants à opiner sur les barrières et les facteurs susceptibles de favoriser la tenue, en fin de vie, des discussions relatives aux antécédents familiaux de cancer. Elles visent aussi à explorer leur perception concernant le rôle de l’intervenant en soins palliatifs dans le cadre de telles discussions, les enjeux éthiques et juridiques associés à la communication d’informations génétiques aux membres de la famille ainsi que la faisabilité du test génétique et la conservation d’échantillons d’ADN prélevés chez les patients en fin de vie.

Les entrevues ont duré une heure en moyenne et ont été enregistrées sur bandes audio. Les extraits pertinents des réponses des intervenants ont été transcrits et regroupés sous des sous- thèmes répartis dans les quatre sections thématiques suivantes: 1) les enjeux organisationnels soulevés par les discussions relatives au caractère héréditaire des cancers; 2) les enjeux d’ordre professionnel s’y rapportant ;3) les enjeux éthico-légaux et culturels associés; 4) les rôles de l’équipe des soins palliatifs par rapport à de telles discussions. Les items du questionnaire d’enquête ont été inspirés d’extraits marquants des entrevues, des thèmes et sous-thèmes ainsi constitués.

Le questionnaire d’enquête (Annexe B) ainsi développé permet de documenter la perception des intervenants quant à la fréquence, la pertinence et la faisabilité des discussions relatives aux antécédents familiaux de cancer en soins palliatifs. Ce questionnaire permet aussi de recueillir le point de vue des intervenants sur la pertinence ou l’importance d’enjeux liés à la considération des antécédents familiaux de cancer en soins palliatifs. Des questions spécifiques visent à évaluer la perception des intervenants de leur niveau de connaissance de la génétique des cancers ainsi que leurs besoins de formation concernant les cancers héréditaires.

Dans son préambule, le questionnaire inclut une mise en contexte sur l’association entre les antécédents familiaux et la survenue de certains cancers. Dans ce préambule, sont aussi présentés aux répondants deux cas fictifs dans lesquels un patient et des apparentés de patient expriment leurs préoccupations concernant les risques associés à leur histoire personnelle ou

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familiale de cancer. Un troisième cas place le répondant dans la situation fictive où un patient lui confierait qu’il est porteur d’une mutation génétique pathogène.

Le questionnaire comporte sept questions portant sur les caractéristiques sociodémographiques des participants à l’étude (sexe, âge, profession), leur milieu de pratique, le nombre d’années d’expérience, le nombre d’heures travaillées par semaine et le nombre d’heures consacrées par semaine aux soins palliatifs. Il est également composé de 47 autres questions réparties en sept sections thématiques portant sur : 1) la fréquence, la pertinence et la faisabilité des discussions relatives aux antécédents familiaux de cancer en soins palliatifs; 2) les facteurs pouvant faciliter de telles discussions; 3) les connaissances et compétences nécessaires aux intervenants pour tenir ce genre de discussions; 4) les rôles des intervenants en soins palliatifs lors de ces discussions; 5) leurs besoins d’informations sur les enjeux éthiques et légaux associés; 6) les risques et les balises éthiques pouvant être associés à ces discussions; 7) leur connaissance de la génétique des cancers, leurs besoins de formation sur les cancers héréditaires et les modalités de dispensation d’une telle formation.

La fréquence à laquelle les intervenants ont eu à discuter d’antécédents familiaux de cancer au cours de l’année précédant la réalisation de l’enquête a été rapportée selon les cinq catégories suivantes: jamais, 1 à 2 fois, 3 à 5 fois, 6 à 10 fois, plus de 10 fois. Une échelle de Likert à 7 points a été utilisée pour permettre aux intervenants d’indiquer leur perception de la pertinence et de la faisabilité des discussions relatives aux antécédents familiaux de cancer en soins palliatifs. Pour les sections 2 à 6 du questionnaire, les intervenants participant à l’enquête ont aussi eu à utiliser une échelle de Likert à 7 points pour indiquer leur degré d’accord avec les énoncés constituant ces sections, ou encore pour leur assigner un score d’importance ou de pertinence. Pour les sections 2 à 5, les intervenants devaient, en plus, indiquer lequel, parmi les énoncés respectifs à chaque section, leur paraissait le plus important ou le plus pertinent, selon le cas. Le questionnaire ainsi conçu a été prétesté auprès de 6 intervenants en soins palliatifs dont les suggestions ont permis de clarifier les énoncés et d’améliorer la validité apparente du questionnaire. Le temps nécessaire pour répondre au questionnaire a été de 20 minutes en moyenne.

62 2.1.3 Analyses statistiques

Des statistiques descriptives usuelles ont été utilisées pour rapporter les variables continues (moyenne, écart-type) et catégorielles (proportion). La fréquence de survenue des discussions relatives aux antécédents familiaux de cancer entre intervenants, patients et apparentés au cours de l’année précédant la réalisation de l’enquête a été calculée pour les trois catégories suivantes: jamais, 1 à 5 fois, plus de cinq fois. Les scores sur l’échelle de Likert à 7 points ont été dichotomisés en regroupant, d’une part, les choix de 1 à 4 et, d’autre part, les choix de 5 à 7. L’utilité de la formation continue pour la pratique des répondants et leurs préférences concernant les sujets qu’une telle formation devrait couvrir ont été évaluées au moyen d’une échelle ordinale en quatre points. Les analyses ont été conduites avec le logiciel SAS (version 9.4; SAS Institute Inc, Cary, NC, États-Unis).

2.1.4 Considérations éthiques

Cette étude a été approuvée par le Comité d’éthique de la recherche du CHU de Québec- Université Laval le 19 novembre 2015 (Numéro du projet : 2016-2662, SIRUL 110791). La lettre d’invitation envoyée par courriel aux participants potentiels contenait toutes les informations nécessaires leur permettant de faire un choix éclairé. Il y était indiqué que le fait de répondre au questionnaire constituait un consentement implicite à participer à l’étude. Le questionnaire était anonyme et les participants ont été informés que leur adresse courriel ne serait pas liée aux résultats de l’enquête.

2.2 Groupes de discussion auprès des apparentés de patients décédés de cancer en