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IV. ENVIRONNEMENT

1. LES ENJEUX POUR L’ENTREPRISE

Le risque économique est souvent difficile à appréhender, ce qui d’ailleurs le rend difficilement assurable. Comment en effet estimer a priori et sur le seul plan technique les dégâts que l’on peut causer à l’environnement ? Ceux-ci dépendent de trop nombreux facteurs, en particulier les conditions météorologiques ou hydrauliques, la nature des sols, etc., qui déterminent le transfert entre les différents milieux (air, eau, sol). La pollution des sols et de l’eau peut se manifester avec un décalage de plusieurs années, surtout aujourd’hui sur ces « bombes à retardement » que sont les pollutions anciennes ? Paradoxalement, le coût de pollution dépend aussi de la réglementation : le renforcement des normes conduit à des surcoûts importants en matière d’équipements de lutte contre la pollution. Dans des cas extrêmes, la réglementation peut obliger l’industrie à des changements radicaux : l’interdiction des CFC en est un exemple.

Le coût de la pollution des sols et des eaux dépend en outre de l’objectif de dépollution que l’on imposera au pollueur : un retour à un niveau idyllique de pollution nulle peut poser d’énormes difficultés techniques et se révéler économiquement irréaliste !

Par ailleurs, au-delà des conséquences matérielles immédiates, les atteintes à l’image de l’entreprise peuvent avoir un impact dramatique sur son chiffre d’affaires. Les enjeux sont tels que l’on a d’ailleurs déjà observé des campagnes de dénigrement visant à défideliser la clientèle, en l’absence même de tout accident environnemental.

Le risque juridique est lui aussi de plus en plus important, pour les raisons exposées au chapitre traitant des risques de responsabilité. La responsabilité du fait des choses et la responsabilité sans faute son particulièrement applicable en droit environnemental. A contrario, à l’exception du non-respect de la réglementation, la responsabilité pour faute s’applique peut souvent, la victime ayant rarement la possibilité de prouver la faute. Plus spécialement, sur le plan pénal, l’entreprise

1.1 Principaux risques dans l’industrie pétrolière extra côtière sur

l’environnement

Nous donnons dans le tableau ci-dessous la liste des principaux risques de l’industrie extra côtière sur l’environnement. Cette liste n’est pas exhaustive, mais elle permet d’avoir une vision sur les risques les plus courants.

Période Action ou événements Effets: Vie humaine ou blessure Gravite Effets : Environnement Gravite

Levés sismiques Improbable s.o. Dommage possible aux poissons, aux mammifères, aux œufs, aux larves et aux

invertébrés

Habituellement localisée : préoccupations pour

les mammifères, les zones de frai

Opérations transitoires

Forage Possible Probablement

importante déversements de Possible : pétrole

Variable, probablement

importante Débris de forage Aucun s.o. Effets toxiques

localises sur la faune de fond

Localisée, chronique

Eau produite Aucun s.o. Effets localises sur les poissons et les

mammifères

Localisée, chronique

Opérations : continues

Fatigue structurale Possible en cas de défaillance

structurale

Probablement importante Vent Possible en cas

de défaillance structurale

Possible

Vagues Possible en cas de défaillance

structurale

Probablement importante Tremblements de

terre Possible en cas de défaillance ou de dommage structural Probablement importante Déversements de pétrole possibles : biote et oiseaux côtiers Probablement grave Opérations : extrêmes dans le temps pouvant mener a une défaillance structurale probable

Tsunami Possible en cas de défaillance

structurale

Effet près de cotes Possible Effets côtiers

Incendies, explosions, objets en chute libre Possible Probablement importante Possible Point dans le temps : accidents Déversements de

pétrole Improbable s.o. Biote et oiseaux côtiers

Probablement grave

Tableau 13 : Liste des risques extra côtiers sur l’environnement Source : Rapport canadien sur l’énergie

1.2 Les principaux déversements accidentels de pétrole en mer

Un tableau en annexe rassemble les cinquante-deux accidents de navires en mer ayant donné lieu aux plus importants déversements pétroliers en mer. On peut tirer quelques informations de cette mini banque de données :

- Les accidents majeurs ont surtout eu lieu au cours des années 1970 avec vingt-sept cas contre six pour les années 1960, neuf pour les années 1980, dix pour les années 1990 et avec un maximum de six cas pour l’année 1979 ;

- Les causes les plus fréquentes sont les échouements (dix cas), les ruptures de coque (dix cas), les explosions (dix cas) et les collisions entre tanker (six cas) ;

- L’age moyen des pétroliers victimes de rupture de coque est de 17 ans contre 11,7 ans pour celui des autres types d’accidents. On retrouve l’effet du vieillissement sur les structures ;

- Les pavillons les plus représentés sont le Liberia (vingt cas sur cinquante-deux), la Grèce (huit cas sur cinquante-deux) et Chypre (trois cas sur cinquante-deux), ce qui pour ce dernier pays ne semble pas en conformité avec l’importance de sa flotte pétrolière ;

- Les pétroliers construits en 1973 et 1974 ont donné lieu à cinq des six plus importants déversements.

1.3 Sources de pollution des mers par hydrocarbures

On distingue différentes sources de pollution selon qu’elles sont liées :

- Au transport maritime,

- A l’exploitation de gisements marins, - Aux rejets telluriques,

- Aux fuites naturelles,

- Aux retombées atmosphériques.

ƒ Le transport maritime comporte plusieurs causes de pollution :

o Le déballastage des eaux remplissant les citernes lors du trajet des pétroliers vers le port de chargement,

o Le déchargement aux terminaux,

o Le soutage et l’élimination des eaux de cale, o Le nettoyage en cale sèche,

o Les accidents.

ƒ L’exploitation de gisements marins peut provoquer des déversements lors de ses trois principales opérations : forage, production et transport par oléoduc sous-marin, mais compte peu dans le bilan global. Toutefois, nous définissons plus loin le traitement des eaux de rejet dans l’environnement issues des opérations de production/exploitation. ƒ Les rejets telluriques proviennent de différentes sources :

o Rejets municipaux, o Raffineries côtières,

o Pétrochimie et autres industries, o Egouts urbains,

o Fleuves,

o Déversement délibéré.

ƒ Les fuites naturelles sont connues depuis longtemps par l’humanité. La Bible se fait l’écho de l’utilisation de son résidu naturel, le bitume dont l’emploi a continué : revêtement extérieur des maisons de Carthage qui a si magnifiquement brûlé lorsque les Romains y ont mis le feu, calfatage des bateaux par les Phéniciens. Il est difficile d’estimer le débit de ces fuites. On a parlé de 6Mt/an puis en 1973 de 0,6 Mt/an. Ce

dernier chiffre pose problème car, pendant les trente millions d’années ayant suivi la genèse du pétrole, il aurait provoqué un déversement de 18000 milliards de tonnes soit 40 à 50 fois les réserves mondiales connues ou à découvrir. On a préféré parler de 0,2 Mt/an en 1985 et de 0,025 Mt/an en 1998.

ƒ Les retombées atmosphériques concernent les imbrûlés produits lors de combustion (échappement des automobiles, incendie de navires et déversement pétrolier, etc.) ou les hydrocarbures gazeux vaporisés lors des fuites ou de manipulation. Ces composés sont, pour la plupart, rapidement oxydés. Seule une faible fraction retombe sur le sol ou en mer, le plus souvent à proximité du lieu d’émission. Une meilleure connaissance de la photochimie atmosphérique a fait passer, au cours de la période 1970-1985, l’estimation de ces retombées de 9 à 0,3 Mt/an [Bertrand, 2000].

Dans les enquêtes fournis par la National Academy of Science en 1973 et 1985 et par celle de l’US Coast Guard en 1989 aux Etats-Unis, on voit apparaître des diminutions spectaculaires pour les déchets fluviaux et le déballastage des eaux sales par les pétroliers. Le premier cas pouvant s’expliquer par une surestimation antérieure excessive, et le second par la mise en œuvre de différentes techniques :

o Chargement sur résidus,

o Lavage des citernes au pétrole brut, o Construction de navires à ballast séparé,

o Emploi de boite noire empêchant le rejet d’eau trop polluée, o Meilleurs séparateurs eau/huile,

o Nouvelle conception de terminaux,

La diminution des accidents de pétroliers est la conséquence de différentes mesures : o Etablissement de couloirs à sens obligatoire dans les passages dangereux, o Surveillance aérienne du trafic maritime et des déversements délibérés, o Inertage des citernes vides en les remplissant de gaz inerte (Azote pour la

plupart du temps)

NAS10 1973 NAS 1985 US C.G11. 1989

Fuites naturelles 600 200 250

Erosion des sédiments 50

Production pétrolière marine 80 50 50 Déballastage des eaux sales 1080 700 158

Nettoyage en cale sèche 250 30 4

Déchargement aux terminaux 3 22 30 Soutage et eaux de cale 500 300 252

10

NAS : National Academy of Science

11

Accidents de tanker 200 400 121 Accidents d’autres navires 100 20 20 Retombées atmosphériques 600 300 300

Déchets municipaux 300 700 700

Raffinerie 200 100 100

Autres déchets industriels 300 200 200

Egouts urbains 300 120 120

Rejets fluviaux 1600 40 40

Rejets volontaires a la mer 20 20

Total 6113 3252 2365

Tableau 14 : Bilans annuels des déversements pétroliers en mer (en milliers de tonnes) Source : Banque de données Tanker (IFP)

1.4 Lutte contre la pollution pétrolière des mers et des côtes

Tous les déversements de pétrole en mer ne vont pas heureusement polluer les côtes. La banque de données Tanker en a dénombré 275 sur 1467 accidents, entre 1951 et 1999 ; ce qui correspond à 18,9% des cas. En tenant compte de plusieurs facteurs : quantité de pétrole à terre, nature du produit (les lourds étant plus difficiles à éliminer), type de rivages (les escarpés étant plus durs à nettoyer), les conditions météorologiques (une mer agitée dispersant naturellement les nappes), etc., on a distingué les impacts côtiers petits (222 cas), moyens (45) et géants (7 cas).

Les méthodes de nettoyage utilisées sont : ƒ En mer :

La prédominance des dispersants, des barrages flottants côtiers et des écrémeuses, assez loin devant les absorbants, le pompage et les barrages flottants autour des points de pollution. La combustion de la nappe de pétrole et la mise en place de filet très fin venant loin derrière. ƒ A terre :

Le nettoyage manuel (seaux, pelles, etc.) l’emporte sur le nettoyage au jet d’eau pure, au nettoyage au jet d’eau chimique, à l’emploi d’absorbant et au nettoyage biologique.

Le nettoyage des mers a précédé celui des terres. C’est avec l’accident du Torrey Canyon en mars 1967 que ce genre de travail a vraiment commencé, mais déjà en mars 1962, des chercheurs français avaient utilisé un produit coulant, le PAM 6, pour neutraliser le mazout répandu à l’intérieur de la coque du paquebot Venezuela lors de son renflouement dans le port de Cannes.

2. POLLUTION : TRAITEMENT DES EAUX DE REJET EN PRODUCTION