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CHAPITRE II- Cadre biogéographique et phytochorique

II.6. Endémisme floristique sectoriel : Hotspot réginal Kabylo-Numidique

Le terme « endémique », fait référence à l’habitat de l’espèce, qui présente au moins une des deux spécificités suivantes :a) habitat très localisé, b) habitat caractérisé par des conditions environnementales particulières (spécifiques d’un type de milieu). On peut tout de suite s’apercevoir qu’une espèce endémique n’est pas nécessairement considérée comme rare : il suffit que son milieu de prédilection soit largement représenté sur terre, ou sa population est de grande

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taille. Autrement dit et pour éviter toutes ambiguïtés sémantiques, Anderson 1994, en précise les deux acceptions principales (bien souvent confondues):

"Confined to a special area": cette première définition se rapporte aux espèces que l'on ne trouve que sur un type d'habitat très spécifique (sommets des montagnes, prairies humides…) et jamais ailleurs, ce que les biogéographes désignent par "narrow endemism" ou endémisme strict (Thompson et al.,2005); ce type d'endémisme résulte principalement d'une restriction du spectre écologique (forte adaptation locale) d'une espèce en réponse à une intense compétition. Elle est cantonnée à cet habitat contraignant; car les conditions particulières de leur habitat naturel ne sont pas indispensables à leur survie mais c’est l’absence de compétiteurs dans cet habitat qui représente un fort avantage.

"Confined to a small area": Cette seconde définition touche les espèces que l'on ne trouve qu'en un seul endroit, d'aire géographique très restreinte (e.g. île perdue au milieu du Pacifique), cet endémisme qui a pour origine l'isolement géographique et génétique se désigne par l'endémisme

local.

Il faut aussi ajouter que l’origine de certains endémismes stricts et locaux serait expliquée par les interactions de compétition et d’exploitation entre les espèces, qui pousseraient une espèce peu compétitrice à se retrancher dans un milieu libre de tout compétiteur et exploiteur. Ainsi que les multiples discontinuités créées par les processus géologiques seraient peut être aussi la cause ultime de la rareté locale et de l’endémisme strict (Drury,1980 ; Kruckeberg & Rabinovitz,1985).

II.6.2. Endémisme des sous secteurs de l'Algérie du Nord (sensu Quézel & Santa 1962)

Si l’ensemble du Bassin méditerranéen renferme près de 50% d’endémisme spécifique ou subspécifique chez les plantes vasculaires (Médail & Quézel,1997 ; Médail & Diadema,2009), celui-ci n’est pas aussi uniformément réparti que la richesse spécifique. En effet, En Méditérranée occidentale, les secteurs à fort endémisme végétal coïncident avec les blocs issus de la fragmentation du Sud-Est de la plaque Ibérique depuis l’Eocène inférieur, à savoir les îles Baléares, la Corse, la Sardaigne et la Sicile ainsi que trois régions continentales mais restées longtemps isolées : la zone bético-rifaine, les massifs Kabyles et la Calabre (Verlaque et al., 1991 ; Verlaque et al.,1997). En effet, à la fin de l’Oligocène, la majeure partie de la Corse, la Sardaigne, l’Est des Baléares, une partie de la Catalogne et les Kabylies formaient le centre d’un bloc orogénique coincé au Sud et à l’Est du massif protoligurien comprenant à l’Ouest le complexe bético-rifain, à l’Est une partie de la Calabre et le Nord-Est de la Sicile et continuant vers le Nord par le sillon alpin (Alvarez,1976 ; Dercourt et al.,1993). La localisation des endémiques en Méditerranée souligne donc l’importance de l’insularité.

Les Kabylies(K1,K2), eu égard à leur caractère insulaire sont sans aucun doute une zone privilégiée sur le plan de la biodiversité, plus spécialement floristique et écosystémique, et en

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raison de leur appartenance au hotspot (Kabylie-Numidie-Kroumirie) du bassin méditerranéen (Médail & Quézel,1997; Véla & Benhouhou,2007). Le nombre de taxons endémiques pour l'Algérie du Nord est de 407, dont 338 au rang d'espèces et seulement 48 et 21 aux rangs de sous- espèce et de variété. L’analyse de la répartition de l’élément endémique sensu lato, au niveau des 15 sous secteurs phytogéographiques de l’Algérie du Nord (Véla & Benhouhou,2007), permet d’identifier les sous secteurs à valeur patrimoniale les plus intéressants (figure15).

Pour l'Algérie du Nord, l'endémisme se décompose de la manière suivante (Véla & Benhouhou,2007): endémisme algérien strict 224 taxons; ensuite on a l’endémisme algéro- marocain: 124; et l’endémisme algéro-tunisien: 58 taxons; et autres comme algéro-sicilien: représenté par un seul taxon.

Il faut noter que les résultats d’une étude menée par Yahi et al.,2012 ; sur la biodiversité méditerranéenne et parue dans le journal des taxons menacés viennent de renforcer le caractère exceptionnel de la biodiversité en Algérie. Ces auteurs précisent que le nombre d’espèces endémiques algériennes strictes, passe de 224 à 300 taxons.

58 37 41 38 32 44 56 36 4 0 38 19 4 18 12 29 36 30 46 17 22 18 19 9 16 37 14 4 36 18 19 1 1 1 1 9 7 7 18 16 23 25 31 26 7 14 4 1 1 12 0 20 40 60 80 100 120

O1 O2 O3 A1 A2 K1 K2 K3 C1 H1 H2 Hd AS1 AS2 AS3

Algérie Algérie+Maroc Algérie+Sicile Algérie+Tunisie

Figure15. Répartition des types d’endémiques au niveau des 15 sous secteurs phytogéographiques de l’Algérie du Nord (d'après Quézel & Santa 1962-63, modifié par Véla & Benhouhou, 2007).

Sur le graphique de répartition des types endémiques, il parait à l'évidence, les sous secteurs à endémisme le plus élevé sont O1 (103 taxons) et K2 (100 taxons). Ensuite, les sous secteurs à endémisme encore assez élevé sont O3 (94 taxons), K1 (86 taxons), C1 et H1 (82 taxons chacun). Puis viennent ceux qui ont un endémisme de plus en plus modéré, que sont K3, O2, A1, A2, AS3, AS1, H2, AS2. Enfin, le plus faible endémisme est enregistré en H3; et l'endémisme Algérie+ Sicile est encore très faible, il est représenté par un seul taxon aux K2, K1, C1, AS3.

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Le sous secteur K2 de la petite Kabylie (ou Kabylie baboréenne) apparaît donc aussi riche en endémiques que les secteurs O1 ou O3 (monts de Tlemcen), ces deux derniers appartiennent au point chaud de biodiversité (hotspot) du complexe "bético-rifain" (Médail & Quézel, 1997 ; 1999). Il est suivi de près par le sous secteur limitrophe K1 la grande Kabylie (ou Kabylie djurdjuréenne). Aussi, cela permet-il aux auteurs (Véla & Benhouhou,2007) d’attribuer aux trois sous secteurs (K1,K2,K3) sur les 15 secteurs de l’Algérie du Nord, l’indice de biodiversité le plus élevé, soit respectivement 588, 553 et 543, le secteur O1 chutant à 500 et O3 à 515. Cette richesse en endémiques et grande biodiversité du secteur Kabylo-Numidique ne sont point surprenantes, car ce territoire à haute valeur patrimoniale représente le onzième point chaud (hotspot) régional du bassin méditerranéen (Médail & Quézel,1997 ; 1999), proposé récemment par Véla & Benhouhou (2007) (figure14). Tous ces critères viennent argumenter l'intérêt et la pertinence du choix de la zone humide de Beni-Belaid, pour l’étude de sa végétation naturelle.

II.7. Répartition des niveaux de rareté par secteur phytogéographique