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3.2 Universalité des facteurs g

4.1.1 EHQS dans les réseaux HgTe

Graphène artificiel

Comme nous l’avons expliqué à la sous-section 1.3.2, peu de temps après la prédiction de l’effet Hall quantique de spin dans le graphène par Kane et Mele [80], d’autres études ont donné des valeurs quantitatives concernant le gap énergétique topologique. Il s’est avéré que le couplage spin-orbite causant ces effets topologiques est faible dans le graphène.

Une possible solution à ce problème est donc d’avoir recours au graphène artificiel, par exemple sous forme de réseaux de nanocristaux. Ceci a été l’idée de départ du travail de la référence [226]. Dans ce travail, la structure électronique des super-réseaux en nid d’abeilles de nanocristaux HgTe a été étudiée. HgTe fut choisi à cause de son couplage spin-orbite conséquent. Dans la suite, nous considérons des super-réseaux dont l’axe perpendiculaire est orienté suivant la direction [111] et les connexions entre les nanocristaux sont suivant les facettes {110}. Les résultats obtenus montrent la présence de l’effet Hall quantique de spin dans ces systèmes. Dans le paragraphe suivant, nous résumons les principaux résultats de ce travail. Ces résultats ont une portée bien plus générale, pouvant s’appliquer à d’autres isolants topologiques en présence de désordre.

Afin de mesurer l’impact du fort couplage spin-orbite, il est judicieux de comparer avec un système ayant un couplage plus faible, comme par exemple CdSe. La figure 4.1a montre la structure de bandes du graphène artificiel constitué à partir de nanocristaux CdSe et calculée

par la méthode des liaisons fortes atomistique. Dans la région S, des mini-bandes π −πavec un

cône de Dirac au point K sont obtenues comme dans le graphène. Le caractère multi-orbitale des nanocristaux crée d’autres mini-bandes dans la région P . Ces mini-bandes contiennent des bandes plates, ainsi qu’un second cône de Dirac. Ces bandes sont issues du couplage entre

les orbitales Pxy sur le réseau en nid d’abeilles tel que montré dans la référence [132] et au

chapitre 1. Les bandes plates sont non-triviales et résultent d’interférences destructives.

La figure 4.1b montre la structure de bandes du graphène artificiel constitué à partir de nanocristaux HgTe. Dans la région S, le fort couplage spin-orbite ouvre des gaps énergétiques au niveau du cône de Dirac comme prédit par Kane et Mele. Dans la région P , en plus du

ainsi d’autres gaps [227]. Le calcul de l’invariant topologique Z2 de tous ces gaps énergétiques

dus au fort couplage spin-orbite indique qu’ils sont tous topologiquement non-triviaux [226]. Outre l’invariant topologique, l’apparition d’états dans ces gaps dans le cas de structures 1D permet de confirmer leur caractère topologique. La figure 4.1c montre la structure de bandes d’un ruban construit à partir du réseau en nid d’abeilles de nanocristaux HgTe. Des bandes (colorées en rouge et bleu) apparaissent dans les gaps topologiques. Ces états sont séparés en spin et localisés sur les bords du ruban [226].

Pour les tailles de nanocristaux étudiés (diamètre ≈ 5 nm) ainsi que celles des connexions (diamètre ≈ 2.5 nm), la largeur du gap de la région S est de 6 meV, ceux des régions P dépassent les 30 meV, ce qui est remarquable.

Modèle effectif

Afin d’étudier les effets de désordre dans ces systèmes, il est nécessaire de construire un

modèle effectif de type LEGO R (chapitre 2). Les effets topologiques ayant pour cause le couplage

spin-orbite, il est nécessaire de l’intégrer dans le modèle LEGO R présenté à la section 2.1. De

plus, ces effets sont plus importants dans la région P , il faut donc intégrer les orbitales P dans le modèle effectif. Chaque nanocristal est donc représenté par une orbitale de type S (fonction enveloppe) ainsi que trois orbitales de type P , pour chaque orientation de spin (8 orbitales par nanocristal).

Nous avons donc utilisé pour cette partie le modèle effectif développé dans la référence [226],

Figure 4.1 – Structures de bandes du super-réseau en nid d’abeilles. (a) Structure

de bandes du graphène artificiel de nanocristaux CdSe. (b) Structure de bandes du graphène artificiel (bidimensionnel) de nanocristaux HgTe. (c) Structure de bandes d’un ruban de gra- phène artificiel (unidimensionnel) de nanocristaux HgTe avec une largeur de 16 nanocristaux. Dans la figure (c), les bandes colorées apparaissant dans les gaps sont les états topologiques localisés sur les bords du ruban. Toutes ces structures de bandes sont obtenues avec la méthode des liaisons fortes atomistique pour des nanocubes tronqués. Les figures sont reproduites avec permission à partir de la référence [226].

dont l’Hamiltonien s’écrit comme suit : X i X α,b Ebci,b,αci,b,α+ X hi,ji X α b,b

ci,b,αVi,b;j,bcj,b+ λpISOL · σ~ (4.1)

+iλs ISO X hhi,jii X α ci,s,ασzαανijcj,s,α+ i X hi,ji X α,β b,bci,b,αγi,b;j,b[ˆz · (σ × ~rij)]αβcj,b

où i,j représentent les sites du réseau, hi, ji sont les paires de sites premiers voisins (connectés

par le vecteur ~rij), α,β correspondent aux orientations du spin (↑,↓), et b,b′ représentent les

orbitales. Le premier terme de l’équation 4.1 permet d’inclure les énergies des orbitales Eb et le

deuxième terme le couplage premiers voisins Vi,b;j,b. Le troisième terme (∝ λpISO) est le terme

de couplage spin-orbite intrinsèque dans la région P , ~L étant le moment cinétique orbital et

~

S = σ/2 celui de spin. Le quatrième terme (∝ λs

ISO) permet d’inclure le couplage spin-orbite

intrinsèque dans la région S comme un couplage aux seconds voisins. hhi, jii représentent les

sites seconds voisins et νij = ±1, le signe dépendant de produit tensoriel des deux vecteurs

premiers voisins connectant les sites i et j. C’est ce terme qui avait été introduit dans le papier

de Kane et Mele. Le dernier terme (∝ γi,b;j,b′) prenant la forme d’un couplage premiers voisins

permet d’inclure le couplage spin-orbite Rashba.

Les paramètres du modèle effectif ont été ajustés sur les calculs de liaisons fortes atomistique dans la référence [226] et sont présentés dans le tableau 4.1. Ce modèle a permis notamment de retrouver les états de bords dans les structures 1D, c’est-à-dire les rubans issus des réseaux de

nanocristaux de HgTe. Les valeurs de l’invariant topologique Z2 sont également correctement

prédits par le modèle effectif [226].