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Le guide de la villa cité précédemment nous indique que « M. Rossigneux est parvenu, en suivant les indications du prince, à créer un mobilier complet d’un style neuf et sévère, parfaitement approprié à nos usages, tel enfin que les Romains l’auraient compris s’ils avaient vécu plus longtemps chez nous »105.

1. Mobilier d’intérieur

Les visions de l’Antiquité passent aussi par les réalisations de nouveaux mobiliers d’intérieur et, au sens plus large, par un renouvellement dans les arts décoratifs. Les banquettes en acajou et bronze doré pour s’assoir et s’allonger prennent la forme des klinai. Les sièges s’inspirent des klismos et les fauteuils curules sont repensés par l’entreprise Jacob Frères. Les luminaires prennent la forme des candélabres découverts à Pompéi avec des ornementations diverses et variées à l’instar d’acanthes, de pattes de lion, d’ovoli et autres palmettes.

Les exemples sont peu nombreux et on ne peut dire que ce goût est « caractéristique » du XIXe siècle. En 1856, à la demande du prince Jérôme Napoléon est

créé un service de type pompéien qui doit s’accorder au mieux avec la villa. Cette commande est exécutée à la manufacture impériale de Sèvres sous la direction de Jules Diéterle.106 « Constitué de plus de deux-cents pièces, il comportait vingt-quatre

assiettes à soupe et cent-vingt assiettes plates décorées d’une même frise en or ; le service à dessert, comportant soixante-douze assiettes , d’après Marie-Noëlle Pinot de

105 Ibid.

106 Jules Diéterle n’a pas été la seule personne à réaliser l’ensemble du service. Il s’est entouré de peintres ornemanistes à l’instar de Louis-Etienne-Frédéric Blanchard, François-David, Jean-Charles-Gérard Derichweiler, Joseph Ricard et Pierre Riton.

56 Villechenon qui a consacré une étude sur ce service dans un article intitulé « De l’archéologie des frères Niccolini à celle de l’architecte Alfred Normand : l’imaginaire de la villa pompéienne et du service de porcelaine de Sèvre du prince Jérôme Napoléon »107. Les décors peints sur la porcelaine reprennent des motifs des fresques

de Pompéi (ill. XXIX).

2. Une mode vestimentaire « à l’antique » ?

Se vêtir « à l’antique », en particulier pour les jeunes femmes, fait suite à une mode enclenchée dès la Révolution de 1789. L’influence du courant néoclassique y est certaine et plusieurs peintures sont les témoins de ce goût à la fois pour les vêtements, les parures et les coupes de cheveux : pensons à l’autoportrait de Madame Elisabeth Vigée-Lebrun et de sa fille (ill. XXX), mais aussi aux portraits de Juliette Récamier, réalisés par Jacques-Louis David en 1800 (ill. XXXI) et François Gérard quelques années plus tard (ill. XXXII). Toutes sont vêtues avec des robes vaporeuses et froncées en dessous de la poitrine. Prenant le nom de « robes empires , elles s’inspirent en partie des peplos de koraï. Les coiffures ne sont pas sophistiquées et sont conçues pour un effet visuel naturel et simple. Les légères boucles de cheveux peuvent être retenues par un bandeau ou relevés en chignon. La Répétition du « Joueur de flûte » et de la « femme de Diomède », chez S.A.I. le prince Napoléon, dans l’atrium de sa maison, avenue Montaigne de Boulanger est un des rares exemples où la mode vestimentaire à l’antique portée par des contemporains est représentée. En effet, le Second Empire se passionne et reprend des motifs antiques à l’instar de l’architecture ou du mobilier. Cependant, la mode vestimentaire antiquisante n’a plus de succès que pour des occasions telles que l’inauguration de la villa pompéienne où les convives s’étaient parés à la romaine. Nous devons donc imaginer le contraste fort qui s’opère entre les visions d’un intérieur de type pompéien habité par des femmes qui revêtent de grandes et imposantes crinolines, en accord avec la mode de leur époque.

107 Hélène Millet & Corinne Saminadayar-Perrin (sous la direction de), Rêver l’archéologie au XIXe siècle : de

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3. Parures et bijoux

Le début du XIXe est marqué par une absence, ou du moins une diminution des

productions des pièces d’orfèvrerie et de parures. Selon les propos d’Henri Vever :

« la femme s’efforçait [alors] de ressembler aux statues des divinités grecques et était amenée naturellement à préférer l’absence d’ornement dans sa parure, afin de laisser, en quelque sorte, le plus de place possible au nu. Avec de telles tendances, on comprend que les bijoux aient été négligés, au moins sous le rapport de l’invention et du dessin »108.

Toutefois, le « bijou empire » trouve un nouveau souffle sous le Second Empire et la troisième République. Fortunato Pio Castellani (1794-185) est un orfèvre italien. Passionné par les parures de l’Antiquité et notamment des étrusques, il s’est spécialisé dans la restauration des bijoux de cette civilisation, issue de la collection Campana109.

Ce travail l’a par la suite inspiré pour la production de nouvelles parures portant le nom de « bijoux archéologiques . Ses réalisations comme ses camées sertis d’or (ill. XXXIII) trouvent dès lors un très large succès. Alessandro Castellani, joaillier comme son père, est même amené à rencontrer Napoléon III. Ce dernier lui achète quelques- unes de ses pièces dont « deux paires de boucles d’oreilles ornées de victoires ailées »110. La manufacture Castellani influence le français Eugène Fontenay qui

confectionne ses parures dans un style « néo-antique ». Il apparaît ainsi comme un des plus grands orfèvres même si ses réalisations « archéologiques » sont plus interprétées que reproduites avec véracité (ill. XXXIV & XXXV).

108 Henri Vever, La Bijouterie française au XIXe siècle (1800-1900), Paris, Floury Editeurs, 1906, p. 16.

109 Giampietro Campana (1808-1880) a réuni ce qui s’avère être la plus grande collection du XIXe siècle d’œuvres d’art de toutes périodes avec une attention portée aux objets de l’Antiquité.

110 Catherine Granger, L’Empereur et les arts. La liste civile de Napoléon III, Paris, Ecole de Chartres Editions, 2005, p.132

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III. Approches esthétiques et débats