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4   SOURCES ET EFFETS DE LA COHÉSION SOCIALE 19

4.2   EFFETS DE LA COHÉSION SOCIALE 31

En regard de la définition conservée à la section 3, la présente section tente de répondre aux questions suivantes, à savoir quels sont les effets causés par :

• Les liens sociaux entre des individus?

• Le sentiment d'appartenance envers le milieu?

Les éléments examinés ont été regroupés en trois catégories, soit les effets reliés à la santé, ainsi que les effets sociopolitiques et économiques.

4.2.1 Effets reliés à la santé

Le lien statistique entre la cohésion sociale et la santé est fréquemment observé, que ce soit pour le taux de suicide, le taux de mortalité, l'anxiété, le stress, les maladies mentales ou les crises cardiaques, bien que la raison précise à l'origine de cette association ne soit pas clairement démontrée (Field, 2003 et Lavis et Stoddart, 2003).

Field (2003) a conduit une revue de littérature au sujet de l'effet des liens sociaux sur la santé des individus. Selon l'auteur, les individus qui ont un développé un réseau social et qui ont accès à un

support social sont généralement en meilleure santé, plus heureux et plus riches, et leurs enfants réussissent mieux à l'école.

Selon Holt-Lunstad et autres (2010), l'ampleur de l'effet des liens sociaux sur la mortalité est comparable ou supérieure à plusieurs facteurs de risque de mortalité bien connus, tels que le tabagisme, l'obésité et l'inactivité physique.

Un cas fréquemment cité dans la littérature est celui de la ville de Roseto, en Pennsylvanie, ce qui a mené au surnom de « l'effet Roseto ». Dans les années 1960, la cohésion sociale de cette communauté, mesurée par l'implication civile, semblait apporter un effet protecteur contre les maladies cardiaques. En effet, les communautés voisines, dont le niveau de cohésion sociale était plus faible, souffraient davantage de maladies cardiaques, et ce, malgré une diète et un taux de tabagisme et d'obésité semblables. Qui plus est, alors qu'au fil des ans la cohésion sociale de Roseto s'est progressivement dégradée, le taux de maladies cardiaques s'est rapproché de celui des villes avoisinantes (Lavis et Stoddart, 2003).

Malgré cette relation observée, le lien entre les liens sociaux et le taux de mortalité n'est pas encore bien compris.

Une hypothèse est que les individus qui développent un réseau social sont plus enclins à être influencés par des relations de confiance, par exemple des amis proches ou de la parenté, afin d'adopter de saines habitudes de vie (Field, 2003).

Selon Putnam (2000), quatre facteurs expliquent la relation statistique entre cohésion et santé :

1. Les liens sociaux fournissent une assistance tangible, ce qui réduit le stress; 2. Les liens sociaux peuvent renforcir des normes de santé;

3. Les interactions sociales peuvent stimuler le système immunitaire; 4. Les réseaux sociaux favorisent un meilleur accès aux soins médicaux.

Selon Lavis et Stoddart (2003), plusieurs hypothèses expliquent pourquoi la cohésion sociale favorise une meilleure santé et diminue le risque de mortalité. Par exemple, une société cohésive prête davantage attention aux personnes âgées, lesquelles sont moins souvent laissées à elles- mêmes. De plus, la cohésion sociale influencerait des mécanismes comportementaux, tels que fumer ou consommer de l'alcool, et des processus biologiques, notamment le système immunitaire, nerveux ou endocrinien.

4.2.2 Effets sociopolitiques

Un sentiment d'appartenance fort et un nombre élevé de liens sociaux sont des facteurs positifs pour la préservation du dynamisme, de la vitalité et de la résilience des communautés.

Selon Rolfe (2006), les liens entre les individus d'une communauté offrent un réseau d'entraide et de support social, ce qui représente une dimension importante de la vitalité et de la résilience des collectivités. De façon similaire, l'indice canadien du mieux-être (ICMÊ), publié annuellement depuis 2011, considère le sentiment d'appartenance et le nombre d'amitiés fortes comme des indicateurs de la vitalité des communautés canadiennes (ICMÊ, 2012).

La résilience des communautés leur permet de s'adapter aux défis causés par des changements politiques, économiques, sociaux ou environnementaux; c'est surtout le cas des communautés rurales au Canada et ailleurs dans le monde (Rolfe, 2006).

La cohésion sociale favorise également une gouvernance démocratique efficiente, puisqu'une société cohésive, dont les membres sont liés entre eux et se font confiance, permet le déroulement de débats constructifs et respectueux, axés sur des objectifs collectifs. De plus, dans les communautés cohésives, les instances locales de gouvernance sont appelées à être davantage à l'écoute de leurs citoyens, puisque les individus sont impliqués dans la vie civile et politique de leur milieu.

4.2.3 Effets économiques

D'abord, la cohésion sociale a des effets positifs chez les chercheurs d'emploi, puisque les liens sociaux représentent un réseau de contacts très efficient pour entrer sur le marché du travail. Même les liens sociaux superficiels, comme les connaissances éloignées, permettent aux chercheurs d'emploi d'accéder à diverses informations sur les opportunités de travail (Field, 2003).

Du côté des employeurs, les réseaux sociaux permettent d'accéder à des opportunités d'affaires et d'améliorer la compétitivité des entreprises, en plus de faciliter l'embauche de personnel. De même, la présence de liens sociaux forts chez une communauté favorise les relations de confiance dans le milieu de travail, ce qui en retour diminue les risques d'affaires et favorise un climat d'innovation et de coopération (Field, 2003).

Selon Stanley et Smeltzer (2003), les sociétés cohésives créent un climat favorable aux investissements puisqu'elles présentent plusieurs avantages économiques :

• Réduction des coûts de production par l'augmentation de la productivité et de la stabilité de la main-d'oeuvre;

• Réduction des dépenses reliées à la défense légale et physique par la diminution de la criminalité et de la corruption.

Les auteurs sont également d'avis que l'économie du 21e siècle, basée sur le savoir, nécessite une main-d'oeuvre socialement cohésive. D'une part, les individus qui interagissent avec leurs pairs et qui participent au développement de leur communauté développent des compétences sociales et intellectuelles, par exemple le travail en équipe, très utiles dans une économie basée sur le savoir. D'autre part, la main-d'oeuvre d'une société cohésive est plus encline à investir temps et efforts afin de participer à l'atteinte d'objectifs collectifs; il s'agit d'un comportement dont les compagnies peuvent tirer profit chez leurs employés pour assurer une meilleure compétitivité (Stanley et Smeltzer, 2003).

Enfin, Friesen (2003) résume les différents effets économiques reliés au niveau de cohésion sociale, lesquels peuvent être regroupés en trois catégories :

1. La formation de normes et valeurs sociales, qui influencent le comportement des employés et qui favorisent un climat de confiance et de coopération;

2. La création de réseaux d'information, qui facilitent le transfert de connaissances et l'embauche de personnel;

3. Les retombées des investissements en capital humain, c'est-à-dire les investissements des employés en temps et en efforts pour l'atteinte d'objectifs collectifs.