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PARTIE 1 : Synthèse bibliographique

2. La sporulation microbienne dans le cadre d’interactions plante-microorganisme

2.3. Conséquences de la sporulation sur l’interaction microorganismes - plantes

2.3.2. Effet sur la plante hôte

Si la sporulation représente un atout pour le microorganisme qui lui permet de résister à un milieu défavorable, de se disperser et de se multiplier, du point de vue de la plante, la sporulation des microorganismes pourrait représenter un coût (énergétique, métabolique…)

ayant des effets délétères pour sa propre fitness et même pour sa survie.

Par exemple, les spores asexuées des phytopathogènes sont produites en grand nombre, multipliant ainsi la probabilité d’infection et donc la pression pathogène sur la plante. Dans le cas des symbioses, la sporulation pourrait quant à elle moduler les effets bénéfiques du symbiote sur la plante-hôte.

Les conséquences de la sporulation des phytopathogènes peuvent être diverses, tant pour les plantes parasitées que pour les pratiques agricoles. En effet, la dispersion par le vent à longue distance des spores fongiques peut entraîner la propagation de maladies de plantes à travers et/ou entre les continents, provoquant l’établissement et/ou le rétablissement de maladies et la création de nouveaux foyers d’infection (Brown et Hovmoller, 2002).

Les plantes parasitées auront leur développement et leur reproduction fortement diminués. Certains champignons entraîneront même la mort de l’organe végétal et/ou de la plante entière (Lepoivre, 2003).

Des études ont cependant montrées qu’en réponse à l’attaque des spores du

phytopathogène F. oxysporum, certaines plantes, comme l’orge, la tomate ou le concombre,

ont mises en place la production de protéines intercellulaires, les chitinases et les chitosanases. Ces protéines, produites au niveau des feuilles, ont la capacité de lyser les spores fongiques (Grenier et Asselin, 1990). Les plantes ont donc l’aptitude de réagir face aux spores, en modifiant leur activité et en produisant de nouvelles protéines.

De la même façon la sporulation sur les plantes en symbiose avec des endomycorhizes, affecteraient les performances des plantes qu’elles colonisent en fonction de leur capacité à sporuler : plus la souche sporulera, plus elle consacrera de l’énergie à ce phénomène, au détriment de son interaction avec la plante (Beilby et Kidby, 1980).

De façon similaire, l’influence de la sporulation des souches de Frankia sur les plantes actinorhiziennes est peu référencée. Le principal point soulevé est de connaître la capacité de la souche à soutenir la croissance de sa plante-hôte par fixation d’azote, alors qu’en parallèle elle produit de grande quantité de spores très coûteuses en énergie.

Bien que les différences de fixation d’azote entre souches Sp- et Sp+ ne soient généralement pas statistiquement supportées, les souches Sp+ seraient moins efficientes

que les souches Sp- (Van Dijk, 1978 ; VandenBosch et Torrey, 1984 ; Sellstedt et al., 1986 ;

Wheeler et al., 1986 ; Schwintzer, 1990). Ces tendances sont confirmées par l’aspect des

plantes au laboratoire et une biomasse supérieure pour les plantes inoculées par les souches Sp-. Cependant, ces différences sont plus importantes aux stades précoces de la symbiose (6 semaines) qu’aux stades plus avancés (10 semaines) (Sellstedt, 1988 ; Monz et Schwintzer, 1989). On pourrait ainsi émettre l’hypothèse que les souches Sp+ seraient des organismes « tricheurs » qui détourneraient une partie de l’énergie allouée à la symbiose pour améliorer leur fitness. Cette hypothèse a d’ailleurs été vérifiée chez le modèle

Rhizobium/légumineuses où la plante est capable de détecter les bactéries tricheuses et de

les sanctionner en limitant, dans les premières étapes de la rencontre, le développement d’une symbiose (Niehaus et al., 1993 ; Kiers et al., 2003 ; Heath et Tiffin, 2009 ; Sachs et al.,

2010 ; Oono et al., 2011).

La sporulation, en plus de ralentir la croissance de son hôte, pourrait avoir d’autres effets, comme l’induction chez les plantes actinorhiziennes d’une capacité de résistance face aux

souches Sp+ (Markham en 2008). Dans cette étude, A. rubra et A. rugosa, connues pour

être associées à des souches Sp+, et A. crispa à des souches Sp-, sont inoculées par un

nodosités au contact des inocula Sp+ par rapport à A. rubraet A. rugosa. Il en conclut alors

que les espèces d’Alnus régulièrement associées aux souches Sp+ développent une

résistance, limitant la formation de nombreuses nodosités, délétères pour la plante. Conclusion générale

Au cours de cette synthèse bibliographique, il a été montré que la sporulation tient un rôle central dans le cycle de vie des microorganismes sporulant, mais aussi dans l’interaction de ces derniers avec les végétaux. Le processus de sporulation est bien décrit génétiquement et physiologiquement chez les bactéries Firmicutes et chez les champignons. En revanche,

malgré un rôle très important de la sporulation chez Frankia, trop peu d’études se sont

consacrées à élucider ce phénomène unique de sporulation in-planta. L’étude des gènes

impliqués dans la sporulation chez Frankia semble présager des voies communes avec les

bactéries Firmicutes et les autres Actinobactéries. Ces études génomiques permettront à l’avenir d’identifier les gènes impliqués dans la sporulation et ainsi mieux comprendre le

processus et le rôle de la sporulation chez Frankia. Le séquençage du génome d’une souche

Sp+ serait alors une très grande avancée afin de comparer génétiquement les souches Sp+ et Sp-.

Le phénomène de sporulation permet aux microorganismes de résister et/ou se disséminer et leurs assure ainsi une meilleure fitness. Cependant, la sporulation a des conséquences pour la plante avec laquelle le microorganisme s’associe, c’est en particulier le principal

moyen par lequel les phytopathogènes envahissent les plantes. Chez Frankia, lors de la

symbiose, les souches Sp+ semblent être moins bénéfiques pour la plante-hôte que les souches Sp-. En effet, elles détourneraient une partie de l’énergie allouée à la fixation d’azote pour leur propre multiplication par production de centaines de spores. Se pose alors la question de savoir si ces souches Sp+ ne seraient pas alors des organismes tricheurs et si la plante serait capable de les reconnaître et de les sanctionner par production de métabolites délétères.

Au cours de cette synthèse, divers aspects ont été mis en évidence et seront repris tout au

long des travaux illustrés dans l’ensemble de ce travail. L’un des premiers points qui sera

abordé est l’influence de la sporulation sur l’infectivité et la compétitivité des souches Sp+ par rapport aux souches Sp-. Dans un second temps, l’hypothèse selon laquelle la plante modifierait son métabolisme face à la présence d’une souche Sp+ au sein de la nodosité sera abordée par une étude métabolomique. Le but principal a été la recherche de « molécules signatures » d’un fonctionnement différent au sein des nodosités Sp+.

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