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Effet de la morphologie du film sur ses propriétés électriques

CHAPITRE 2 SYNTHÈSE BIBLIOGRAPHIQUE : L’OXYDE D’ÉTAIN ET SES MÉTHODES DE

2. P ROPRIÉTÉS ET TECHNIQUES D ’ ÉLABORATION DE FILMS MINCES D ’ OXYDE D ’ ÉTAIN

2.1. Des propriétés particulières

2.1.4 Effet de la morphologie du film sur ses propriétés électriques

La microstructure des films minces joue un rôle important sur les propriétés électriques et optiques d’un oxyde semiconducteur polycristallin : taille des grains, épaisseur, porosité, état de la surface, etc. Les grains formant les films sont séparés par ce qu’on appelle des joints de grains. Plus la taille des grains diminue et plus le nombre de joints de grains dans le matériau augmente. Des barrières de potentiel s’établissent à l’interface entre les grains, et à la surface du film, entravant la circulation des électrons. Deux paramètres structuraux influençant la conductivité ont fait l’objet d’études : l’épaisseur du film et la taille des grains.

2.1.4.1. INFLUENCE DE L’ÉPAISSEUR

L’augmentation de la résistivité lorsque l’épaisseur du film diminue a été étudié théoriquement par Mayadas et Shatzkes [May70]. Un autre modèle décrit l’effet de la densité de porteurs de charges sur la résistivité [Mar06]. Ces études apportent un éclaircissement sur le lien entre épaisseur et résistivité d’un film. Deux phénomènes ressortent de ces travaux : le piégeage des porteurs libres dans des puits de potentiels engendrés par des joints de grains, et la diffusion de porteurs libres en surface. Le libre parcours moyen des porteurs de charges devient comparable à la taille des grains lorsque le film atteint une épaisseur de 10 à 20 nm. Matsui et al. ont étudié la conduction électrique de films de SnO2 d’épaisseur comprise entre 10 et 20 nm [Mat09]. Ils ont montré que la diffusion des porteurs de charge aux joints de grains était le principal facteur de diminution de la mobilité des électrons. En effet, la hauteur des barrières de potentiel qui se forment aux joints de grains est quatre fois plus importante dans les films très minces que dans les films plus épais. Dans ces films « épais » (>350 nm), la mobilité des électrons est plus largement influencée par une diffusion intra-grain.

Volintiru et al. publient une étude sur l’influence de l’épaisseur sur la résistivité effective, définie comme le produit de la résistance carré et de l’épaisseur, de films de ZnO :Al3

figure 1-4

polycristallins, déposés sur verre et silicium, à 200°C, par PECVD [Vol07]. La montre à différentes pressions de travail, que la résistivité ne varie pas linéairement avec l’épaisseur des films.

Figure 1-4: Influence de l'épaisseur de film de ZnO:Al sur la résistivité effective Rcarré*d, et la mobilité des électrons à différentes pression de travail [Vol07]

Des mesures par effet de Hall révèlent que la concentration des porteurs de charges reste à peu près constante, autour d’une valeur de 1,5.1020 cm-3, avec l’épaisseur quelle que soit la

3 La notation « Oxyde : Atome » signifie qu’une quantité de cet atome a été introduite dans la matrice de l’oxyde, constituant ainsi un dopage.

pression, tandis que la mobilité des électrons en fonction de l’épaisseur varie différemment selon la pression. Ces courbes montrent que la résistivité est essentiellement influencée par la mobilité des électrons, qui varie fortement avec l’épaisseur, si la pression est suffisamment élevée. En réalité, l’augmentation de la mobilité lorsque le film devient plus épais, est due à un accroissement de la taille des grains, dont la forme varie selon l’épaisseur, expliquant les différences observées (figure 1-5). En effet, lorsque la taille des grains augmente, la surface des joints de grain diminue.

Figure 1-5: Images MEB d'un film mince et d'un film épais de ZnO:Al déposés à 0,38 et 1,5 mbar

2.1.4.2. EFFET DE LA TAILLE DES GRAINS

Un grand nombre d’études porte sur le rôle de la taille des grains sur les propriétés électriques des films polycristallins. En ce qui concerne l’oxyde d’étain en particulier, Xu et al. notent une forte augmentation de la résistance du film lorsque la taille des grains est inférieure à 6 nm [XuC91]. Ce résultat reflète l’influence de la zone de déplétion4

figure 1-6

, ou zone de charge d’espace, sur la conductivité d’une couche mince de SnO2. Yamazoe propose un modèle basé sur la comparaison entre la largeur de la zone de déplétion L et le diamètre des grains D [Yam92]. Un film de SnO2 polycristallin peut être décrit comme une couche formée de grains de diamètre D, formant des agglomérats de quelques particules, liés entre eux par des ponts ( ). Lorsque la largeur de la zone de déplétion est négligeable devant le diamètre des grains, un tunnel de conduction se forme entre deux grains adjacents à l’intérieur de l’agglomérat, et entraîne une augmentation de la conductivité. En revanche, lorsque la taille

4 La zone de déplétion ou zone de charge d’espace, est une zone dépeuplée de ses porteurs libres. Les électrons sont capturés à la surface des grains par des espèces adsorbées comme O2. La charge est ainsi constante, définies par les impuretés ionisées.

des cristallites est de l’ordre de la zone de déplétion, la conductivité est contrôlée au niveau des cols, qui peuvent alors empêcher ou permettre le passage des électrons. Enfin, quand la taille des cristallites est très faible, on peut admettre qu’elles sont entièrement vides d’électrons libres, et la résistivité du film devient importante. Ce modèle est bien adapté pour des grains ayant des diamètres de l’ordre de la dizaine de nanomètres.

Figure 1-6: Schématisation des agglomérats de particules

La granulométrie des films d’oxyde d’étain affecte également la largeur de la bande interdite Eg, ainsi que la dispersion de l’indice de réfraction n, et du coefficient d’extinction k. Losurdo et al. ont étudié les propriétés optiques de films d’oxyde d’étain de granulométries différentes, déposés par CVD (Dépôt Chimique en phase Vapeur) sur silicium [Los02]. Ils montrent notamment que plus la taille des grains diminue, et plus le film est dense, et l’indice de réfraction élevé. En revanche, plus la taille des grains augmente, et plus l’énergie du gap diminue, passant de 4,7 à 4,1 eV lorsque la granulométrie passe de 100 à 250 nm. Les valeurs de gap direct rapportées sont très élevées pour des films non dopés. Cela peut-être dû à la méthode de calcul utilisée (à partir de la loi de Tauc et des données obtenues par ellipsométrie).

L’influence de la taille des grains et de la barrière de potentiel aux joints de grains sur la mobilité des porteurs de charge a fait l’objet de nombreuses études [Set75] [Van87] [Min00]. Dans les matériaux polycristallins, les joints de grains représentent autant de barrières de potentiel à franchir pour les électrons. Ainsi, plus il existe de joints de grains, et plus les électrons sont ralentis, et leur mobilité réduite.

Une étude portant sur les films d’oxyde de zinc montre que pour une taille de grain supérieure à 600 nm, la densité de joints de grains devient trop faible pour influencer la mobilité des électrons et la diffusion des porteurs a lieu principalement intra-grain [Ste07]. Néanmoins, la limite à partir de laquelle l’un ou l’autre de ces mécanismes devient prédominant dépend du matériau et du procédé. Steinhauser et al. ont proposé une méthode permettant d’établir quel mécanisme était prédominant en comparant la mobilité de Hall des

Largeur de la zone de déplétion : L Col Diamètre du grain : D Joint de grain

porteurs, à la mobilité « optique » calculée à partir de la théorie de Drude, et des données de spectrophotométrie.

Bien que la littérature soit principalement basée sur l’étude de l’oxyde d’étain polycristallin, cela montre que la nanostructure des couches déposées est un facteur déterminant pour la conduction électrique des films minces d’oxyde d’étain. C’est pourquoi il est primordial d’avancer dans la compréhension des mécanismes de formation des couches minces dans notre procédé, et de comprendre en particulier le rôle des poudres formées dans la phase plasma, que nous aborderons au paragraphe 4. Nous allons maintenant présenter un des moyens permettant d’améliorer la conductivité des films de SnO2 : l’introduction volontaire d’impuretés (dopage extrinsèque), dans le but d’introduire davantage de porteurs libres dans sa matrice.

2.2. AMÉLIORATION DES PERFORMANCES DES COUCHES MINCES DE SNO2 PAR LE