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Effet des mélanges multi-espèces de cultures de couverture sur le rendement des cultures

Chapitre 1 : Revue de la littérature

1.6 Effet des mélanges multi-espèces de cultures de couverture sur le rendement des cultures

L’utilisation de légumineuses comme CC est l’une des approches favorisées par les producteurs biologiques pour ajouter de l’N dans l’agroécosystème (Dabney et al., 2010). L’effet des CC sur le rendement des cultures commerciales subséquentes est le principal facteur influençant l’adoption de cette pratique par les producteurs agricoles (Seidel et al., 2017; Daryanto et al., 2018). En effet, dans une méta-analyse, Peoples et al. (2017) ont déterminé que des CC de légumineuses contribuaient en moyenne pour 30 % de l’N prélevé par une culture subséquente de blé de

printemps. Selon Daryanto et al. (2018), l’effet des CC sur le rendement des cultures commerciales subséquentes est lié au contenu élevé en N de ces dernières qui bonifierait la réserve en N du sol. Ainsi, dans une méta-analyse, Daryanto et al. (2018) ont déterminé que les CC de légumineuses résistantes au gel permettent une plus grande augmentation du rendement de la culture commerciale (27 %; n = 1005) que les CC non-légumineuses (6 %; n = 1282) en comparaison à une culture commerciale n’étant pas précédée par une CC. Tel que discuté à la section 1.5.2.1, les précédents de légumineuses ont des effets bénéfiques sur le rendement des cultures principales en raison de leur faible rapport C/N, la minéralisation rapide de l’N de leurs résidus ainsi que la diminution de la compétition pour l’N du sol au printemps (Finney et al., 2016; White et al., 2016, 2017; Hunter et al., 2019). Les légumineuses détruites par le gel peuvent aussi avoir un effet sur le rendement, mais dans une moindre mesure que celles résistantes au gel (White et al., 2016). L’effet des CC dépend de leur biomasse aérienne et du contenu en N de cette dernière (Appelgate et al., 2017). Vann et al. (2017) estiment qu’un couvert de CC doit apporter au moins 72 kg N ha-1 au maïs-

grain pour permettre une augmentation du rendement en comparaison à un sol laissé à nu.

L’utilisation de mélanges de CC peut également avoir un effet positif sur le rendement de la culture commerciale subséquente lorsqu’ils incluent des légumineuses. Dans une méta-analyse d’études menées dans le nord de l’Europe, Valkama et al. (2015) ont observé que les précédents de CC de légumineuses et les mélanges de CC permettent d’augmenter le rendement des céréales de printemps de 6 % en comparaison à un sol laissé à nu. L’effet des mélanges est souvent inférieur ou égal à celui des cultures pures de légumineuses et supérieur aux cultures pures de non- légumineuses résistantes au gel (Finney et al., 2016; White et al., 2017; Kaye et al., 2019; Vogeler et al., 2019). Leur effet dépend principalement de la proportion des légumineuses exprimées dans le mélange (White et al., 2016). Smith et al. (2014) ainsi qu’Hunter et al. (2019) ont observé que seule la culture pure de pois permettait une augmentation du rendement d’avoine et de maïs- ensilage supérieur au témoin sol-nu. Le rendement du maïs-ensilage n’était pas significativement différent suivant une CC de pois en comparaison à des mélanges de 3 et de 4 espèces (Hunter et al., 2019).

Il est ainsi possible de combler les besoins en N d’une culture commerciale d’un apport provenant exclusivement des précédents de CC. Tonitto et al. (2006), dans une méta-analyse sur l’effet des CC de légumineuses sur les rendements des cultures commerciales subséquentes,

indiquent que l’apport des CC doit être d’au moins 110 kg N ha-1 pour produire un rendement similaire

à un système de maïs-grain fertilisé avec la dose recommandée d’N minéral. De plus, dans une étude de long terme (12 ans) menée au Danemark, Doltra et Olesen (2013) ont constaté que le précédent de CC cultivées en intercalaire permet d’obtenir un rendement de blé de printemps et d’avoine comparable à celui de céréales fertilisées avec un effluent d’élevage. Dans une autre étude de long terme en grandes cultures biologiques menées aux États-Unis, Seidel et al. (2017) ont observé des rendements du blé de printemps et du maïs-grain comparables entre les systèmes où la fertilisation est basée uniquement sur les CC de légumineuses et ceux où la fertilisation est basée sur les effluents d’élevage. Les auteurs mentionnent que les retours sur investissement du système basé sur la fertilisation avec les CC de légumineuses sont supérieurs dans une rotation maïs-soya- blé comparativement au système basé sur les effluents d’élevage, les retours sur investissement pour la culture de maïs-grain étant similaires dans les deux systèmes.

1.6.1 Interaction des mélanges de cultures de couverture avec la fertilisation organique

Dans les systèmes en grandes cultures biologiques, l’utilisation de CC combinée aux fumiers et aux lisiers est une stratégie permettant de maintenir la fertilité du sol et le rendement des culture commerciale (Carr et al., 2019). Or, l’effet des CC tend à être masqué lorsque combinée à l’utilisation d’effluent d’élevage (Doltra et Olesen, 2013). Dans une étude de long terme (12 ans), Doltra et Olesen (2013) ont constaté que l’effet du fumier sur le rendement d’une céréale de printemps est moindre suivant une CC en intercalaire à forte proportion de légumineuses en comparaison à celle à faible proportion de légumineuses. Mirsky et al. (2012) ont également observé que bien que la proportion de vesce velue dans un mélange de vesce et de triticale influence positivement le rendement du maïs-grain, cet effet était masqué par l’ajout de fumier de poulet à une dose de 2,2 Mg ha-1. Dans une méta-analyse, Daryanto et al. (2018) ont observé une augmentation

moyenne de 29 % (n = 694) du rendement de la culture commerciale subséquente la saison suivant un précédent de CC lorsqu’aucune fertilisation supplémentaire n’est apportée, alors que l’augmentation du rendement de la culture commerciale subséquente n’est que de 9 % (n = 1435) lorsque l’utilisation des CC est combinée à une fertilisation azotée minérale ou organique. Valkama et al. (2015) ont aussi observé une interaction entre l’utilisation de CC et la fertilisation azotée. Le rendement du maïs-grain suivant une CC était 8 % supérieur à celui suivant un sol nu lorsque la fertilisation azotée était de moins de 60 kg N ha-1, alors qu’il était 6 % inférieur pour une fertilisation

de 120 kg N ha-1. Marcillo et Miguez (2017) ont également observé que le taux de fertilisation azotée

influençait l’effet des CC sur le rendement du maïs-grain biologique, alors que l’effet des CC sur le rendement varie entre 4 et 13 % pour des apports d’N organique variant de 100 à 199 kg N ha-1.

L’étude de Marcillo et Miguez (2017) est une mise à jour de la méta-analyse de Miguez et Bollero (2005) où les auteurs n’ont pas observé une augmentation significative du rendement suivant un précédent de CC pour tous les niveaux de fertilisations azotées en Ontario. Au Québec, Vaillancourt et al. (2018) ont également constaté que l’effet des précédents de CC sur le rendement de canola conventionnel était masqué par la fertilisation en N organique (lisier de porc). Encore au Québec, Langelier (2018) a aussi démontré qu’un précédent CC de légumineuses contribuait au rendement du blé de printemps l’année suivante, mais qu’une fertilisation additionnelle pouvait nuire à la production de biomasse de la CC et réduire l’effet sur le rendement subséquent du blé. Dans le cas de précédents de CC de non-légumineuses, l’apport ou non d’une fertilisation additionnelle n’avait pas d’effet et ces précédents avaient peu d’effet sur le rendement de blé l’année suivante. Les CC de non-légumineuses semblaient transférer une bonne partie de leur N incluant celui dérivé de la fertilisation à la réserve du sol l’année suivante, suggérant qu’après quelques années de l’utilisation de CC combinée à l’utilisation d’effluents, un arrière-effet azoté pourrait être escompté (Langelier et al., 2018)