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Effet de la distribution de taille des particules

2.4 Modélisation des propriétés optiques des aérosols

2.4.2 Effet de la distribution de taille des particules

Espèce δ4vis δ8vis δ10vis δ12vis

MITR 0.93 0.22 0.90 0.57

SUSO70 0.06 0.06 0.04 0.05

WASO70 0.013 0.016 0.016 0.03

SOOT 0.10 0.04 0.04 0.03

L’habitude voulant que l’on modélise les distributions de taille des aérosols par des fonctions lognormales, principalement pour des commodités de calcul, nous nous li-miterons au cas de distributions lognormales, monomodales ou bimodales. On peut aussi évoquer le résultats de [Hansen and Travis (1974)] : des distributions de rayon effectif (cf équation 2.4) et de largeur effective (cf équation 2.5) identiques conduiront aux mêmes propriétés optiques. Ceci n’est pas un résultat exact mais est relative-ment bien vérifié pour des distributions monomodales (par exemple, une distribution lognormale et uneΓ-distribution).

On a vu que les distributions de tailles des aérosols, par exemple les poussières désertiques, sont souvent bimodales, comme le montre la figure 2.2. Cependant, l’in-teraction entre le rayonnement et les particules étant maximales quand longueur d’onde et taille sont du même ordre de grandeur, nous allons montrer que seul le mode grossier est réellement actif dans l’infrarouge thermique. Considérons une dis-tribution de taille volumique, lognormale bimodale, (voir partie 2.1.1), caractérisée par ses rayons modaux volumiquesrvf etrvg :

rvf = 0.138µm ln(σvf) = 0.508

rvg = 2.00µm ln(σvg) = 0.608

Vg/Vf = 2.71

oùVg etVf désignent respectivement le volume de poussières dans le mode grossier et dans le mode fin. Ces paramètres correspondent à une distribution de taille retrouvée à partir des observations AERONET au-dessus du Cap Vert pour le mois d’avril 2003.

On a, d’après l’équation 2.18, les relations

δf = NfCf (2.21)

δg = NgCg (2.22)

δt= NtCt= NfCf + NgCg (2.23) où les indices f , g et t désignent respectivement le mode fin, le mode grossier, et le total (contribution des modes fin et grossier). Un calcul de Mie permet d’obtenir Cf calculé pour la distribution lognormale monomodale (rvf, σvf) et Cg calculé pour la distribution lognormale monomodale(rvg, σvg).

TAB. 2.2 – Contribution des modes fins et grossiers à l’épaisseur optique totale, pour deux longueurs d’onde

longueur d’onde (µm) Cf Cg R

0.55 4.60 10−4 3.22 1.21

10 8.74 10−3 4.88 0.09

Le rapportR entre l’épaisseur optique du mode fin et l’épaisseur optique du mode grossier est donné par la relation :

R = NfCf NgCg (2.24) Or, Vf = 4 3π[rvfexp(ln(σvf) 2/2)]3Nf (2.25)

(on a introduit ici le rayon moyen du mode fin :rvfexp(ln(σvf)2/2) [Zender (2004)]) et Vg = 4 3π[rvgexp(ln(σvg) 2/2)]3Ng (2.26) d’où R = Vf[rvgexp(ln(σvg) 2/2)]3Cf Vg[rvfexp(ln(σvf)2/2)]3Cg (2.27) La table 2.2 donne les valeurs des coefficients d’extinction correspondant aux modes fins et grossier, et le rapport R pour une longueur d’onde visible (0.55 µm) et une longueur d’onde infrarouge (10 µm). Alors qu’aux longueurs d’onde visibles, les modes fins et grossiers contribuent chacun pour moitié environ à l’épaisseur op-tique totale (R = 1.21), dans l’infrarouge thermique la contribution du mode fin est inférieure à 10% (R = 0.09), ceci nous permet de considérer seulement des distribu-tions monomodales dont les rayons et largeurs correspondent au mode grossier des distributions bimodales. Remarquons que ce résultat a été obtenu avec une distribu-tion en taille pour des aérosols loin des sources, mais reste vrai près des sources, car le mode grossier y est encore plus important (les très grosses particules ne sont pas transportées très loin des sources à cause de la sédimentation).

Rayon maximal

Considérons une distribution lognormale monomodale. Dans la théorie, cette dis-tribution s’étend de 0 à l’infini. Dans la pratique, le recours à un ordinateur ne permet pas de calculer des intégrales avec une borne infinie ; l’utilisateur d’un code de Mie est donc amené à choisir la valeur maximale du rayon qu’il souhaite considérer. Ce choix est d’autant moins anodin qu’une valeur trop élevée risque de rendre le calcul beaucoup trop long, voire de l’empêcher de converger. Mais une valeur trop faible tronquera la distribution à un point où, peut-être, elle ne sera plus représentative de

0 0.5 1 1.5 2 2.5 2 4 6 8 10 12 14 16 efficacite d’extinction

longueur d’onde (microns)

rmax=3 rmax=5 rmax=10 rmax=30 rmax=100 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 2 4 6 8 10 12 14 16

albedo de diffusion simple

longueur d’onde (microns)

rmax=3 rmax=5 rmax=10 rmax=30 rmax=100 0 0.2 0.4 0.6 0.8 1 2 4 6 8 10 12 14 16 parametre d’asymetrie

longueur d’onde (microns)

rmax=3

rmax=5

rmax=10 rmax=30

rmax=100

FIG. 2.5 – Effet du rayon maximal sur le calcul des propriétés optiques pour une distribution lognormale.

la distribution de taille "réelle". Nous avons étudié l’effet du rayon maximal sur les propriétés optiques des poussières désertiques (figure 2.5). Ceci nous a permis de dé-terminer qu’une valeur de 10µm pour la valeur maximale du rayon permet d’obtenir les mêmes résultats que pour une distribution infinie.

Cependant, certains modèles d’aérosols considèrent des valeurs plus faibles. C’est par exemple le cas du modèle MITR (Mineral transported) pour lequel la valeur maxi-male est de 5µm. Ce choix a pour but de prendre en compte l’absence de très grosses particules loin des sources, car on pense que leur durée de vie est trop courte pour leur permettre d’être transportées sur de longues distances. Le choix d’une telle va-leur n’est pas sans conséquence sur les propriétés optiques de l’aérosol. Cela soulève à nouveau la difficile question de la distribution de taille "réelle" des aérosols et de la possibilité, ou pas, d’utiliser des distributions analytiques pour les modéliser.

Une remarque sur la figure 2.5 : les variations spectrales très rapides des pro-priétés optiques s’expliquent par des raies d’absorption des différents matériaux com-posant l’aérosol (par exemple, le maximum de l’extinction à 9.5 µm est causé par la présence de quartz).

Largeur de la distribution

Nous allons maintenant montrer que la largeur de la distribution de taille est peu importante pour le calcul des propriétés optiques dans l’infrarouge. La figure 2.6 présente le coefficient d’extinction normalisé (ici à 3.8 µm), calculé pour 3 valeurs du paramètre s caractérisant la largeur de la distribution : s = log10(σ) varie de 0.2 à 0.4. Ce domaine correspond à σ compris entre 1.6 à 2.5, ce qui est la gamme maximale des variations observées (par exemple, dans la base OPAC,σ varie, selon le type d’aérosols, de 1.95 à 2.51 [Hess et al.(1998)]). On observe que l’effet de la largeur de la distribution est négligeable, ce qui nous permettra de garder la largeur constante par la suite, fixée à la valeur de 2.2. Cette valeur, qui correspond à la largeur de la distribution de taille du modèle "MITR" (mineral-transported) de la base OPAC, est en accord avec de nombreuses mesures in-situ [J.S. Reid et al.(2003)].

Rayon effectif : comparaison visible/infrarouge

Une seule valeur nous suffit maintenant pour décrire la distribution de taille : nous choisissons le rayon effectif, défini par l’équation 2.4, qui est la mesure de la distribution de taille la plus adaptée au calcul des propriétés optiques. L’effet du rayon effectif sur les propriétés optiques de l’aérosol, dans le cas d’un aérosol désertique, est présenté figure 2.7. Concernant les propriétés optiques ayant un impact sur les observations satellites infrarouges (i.e. Cext normalisé à 10 µm, ω et g) on remarque que l’effet de la taille est sensible mais modéré. Si l’on se restreint aux valeurs du rayon effectif les plus probables, entre 1 et 3µm, cet impact atteint 30% au plus.

Concernant le coefficient d’extinction non normalisé, on observe une différence de comportement marquée entre les courtes et grandes longueurs d’onde (figure 2.8) :

0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0.9 1 1.1 4 6 8 10 12 14

efficacite d extinction normalisee

longueur d’onde (microns) s=0.3 s=0.4

FIG. 2.6 – Effet de la distribution de taille des particules sur les propriétés optiques : effet de la largeurσ d’une distribution lognormale (s = log10(σ)) sur l’efficacité d’extinction normalisée (à

3.8µm).

superposables (on obtient des courbes très proches lorsque l’on normalise Cext). Cela signifie que les différentes longueurs d’onde sont affectées de façon semblable par un changement de taille des particules.

- en-dessous de 3 µm, les courbes correspondant aux différentes valeurs de re se croisent et ne sont pas superposables. Cela signifie que les sensibilités respectives des longueurs d’onde (ou des canaux en télédétection) dépendent fortement de la taille des particules.

En bref, l’impact de la taille des particules est très important pour la télédétection des aérosols aux longueurs d’onde solaire (basée sur plusieurs canaux), il l’est beau-coup moins dans l’infrarouge thermique. Une dernière remarque que l’on peut faire sur la figure 2.7 est que le rapport des extinctions (donc des épaisseurs optiques) in-frarouge/visible augmente quand le rayon effectif augmente. Ceci est en accord avec l’idée que l’interaction entre les particules et le rayonnement est d’autant plus forte que la taille des particules est de l’ordre de la longueur d’onde. Dans cet exemple, pour un rayon effectif de 1 µm, le rapport infrarouge sur visible vaut environ 0.2, tandis que pour un rayon effectif de 3 µm, il vaut environ 0.8 ! Cette grande variabi-lité explique pourquoi il n’est pas raisonnable de vouloir retrouver l’épaisseur optique visible à partir de mesures infrarouges si la distribution de taille n’est pas connue avec précision. Dans l’étape d’inversion, c’est l’épaisseur optique à 10 µm que nous essaierons de retrouver.