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CHAPITRE 3 : DEPLOIEMENT D’ERP, DIFFUSION D’UNE INNOVATION

3.6 Ecueils potentiels lors de ces phases de déploiement

En appliquant le modèle des 6I, les écueils potentiels durant la mise en place de l’outil sont nombreux. Nous listons ci-dessous les différentes problématiques rencontrées aux différents niveaux de l’organisation

La première relation problématique est associée au processus d’intégration qui est représenté par une boucle itérative entre le corporate office and the SBUs. La coalition de transfert sert de pont entre l’unité et le siège de l’entreprise et est un élément clé permettant d’interpréter

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les valeurs et les pratiques de l’unité. Cette équipe de coalition, issu du siège de l’entreprise a pour vocation de vendre le projet aux employés mais aussi de déterminer ce qu’il doit leur être communiqué, comment le communiquer et comment cela doit-il être perçu. Ils ont le recours de s’appuyer sur la force, un mécanisme de pouvoir politique formel. [Pfeffer and Salancik, 1978] La dépendance des unités et leur proximité hiérarchique avec le siège peut conduire les unités à souhaiter devenir intérieurement légitimées [Meyer et Rowan, 1977] ; [Powell et Dimaggio, 1991] et vont tenter d’obtenir les faveurs de siège social. [Kostova, 1999]. Dans cette démarche, l’implémentation de l’ERP est susceptible d’être menée de manière très formelle et ne pas nécessairement coïncider avec l’internalisation des pratiques des employés de l’unité.181

Toute brèche dans l’équipe de coalition, par exemple liée à des intentions cachées, entrainera potentiellement un accroissement de l’incertitude concernant la valeur réelle de l’innovation, ainsi que le bien fondé des motivations de son adoption. De fait, pour que la diffusion soit réussie, la société mère se doit de (1) d’être de bonne-foi, de se comporter conformément avec ses engagement explicites ou implicites, (2) être honnête, quel que soit les discussions qui ont précédé les engagements, (3) ne pas tirer profit excessivement de l’unité, même lorsque la possibilité leur en est offerte [Bromily et Cummings, 1992]. Plus simplement, il y a davantage de chances que l’ERP soit adopté si les membres de l’équipe projet au sein de l’unité conservent une attitude positive

La seconde problématique est décrite lors de la phase d’interprétation. L’équipe projet doit accéder à la connaissance et modifier la réalité organisationnelle existante. Il existe de nombreux challenges afin de changer la réalité existante, partagée par les employés. Premièrement, la traduction de la connaissance majoritairement tacite, puis sa communication dans un second temps nécessite un processus de « surfacing » et d’articulation des idées et des concepts. [Crossan et al. 1999]. Deuxièmement, l’interprétation collective des concepts, ne signifie pas nécessairement que leur compréhension est partagée. Pour les idées nouvelles, la compréhension partagée peut ne pas se produire si aucune action commune et/ou expérimentation est mise en place. L’action fournit l’opportunité de partager une expérience commune mais le chemin menant à la compréhension partagée est lui aussi confronté à un ensemble d’obstacles. Par exemple, l’échec du développement d’une compréhension commune parmi les membres de la coalition peut entraver la génération de nouvelles

181Néanmoins, l’usage de la légitimité seule pour l’incorporation de structure institutionnalisée, des formulaires

et des procédures conduit généralement à leur adoption formelle. Les employés de l’unité développeront une attitude positive à l’égard de la pratique. La dépendance aura ainsi uniquement des effets sur son implémentation mais pas sur son internalisation.

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connaissances intégrées, limitant les avantages réels de l’adoption de l’ERP. Comme souligné par [Robey et al. 2002] les coalitions qui sont petites, faibles, ou trop étroitement ciblées entraînent par la suite des difficultés pour surmonter les barrières liées à la connaissance lors de la configuration. Un écueil à éviter est la mise en place d’une démarche de type mécanique [Newell et al. 2000], qui consiste à intégrer les processus fonctionnels contenant dans les précédents systèmes legacy. Ainsi le processus d’interprétation sera largement facilité si le chef de projet a la volonté et la connaissance pour se livrer à des tactiques liées à l’influence. Le but est de gagner l’acceptation des autres employés pour que ces derniers lui livrent toutes les connaissances nécessaires. Durant la phase d’interprétation, le rôle du leader de la coalition et des membres est triple :(1) développer une connaissance commune et des rapports de proximité avec les autres membres afin de générer de nouvelles connaissances, (2) d’accéder à la connaissance concernant les processus actuels de l’unité fonctionnelle et en développant de la confiance avec les éléments clés afin de dessiner et d’implémenter les nouveaux processus, (3) assurer le lien entre l’unité et le siège social au travers des réunions d’avancement afin d’obtenir les ressources et le soutien nécessaire.

La troisième relation problématique est associée avec le processus d’implémentation qui constitue la boucle itérative entre l’unité et les utilisateurs finaux. Une erreur à éviter provient de la tension qui existe entre les prérequis du siège social et les attentes des employés. Le siège social préfèrera une absence totale de customisation de l’outil, lorsque les employés souhaiteront retrouver leurs habitudes induites des anciens systèmes. Les employés pourront résister aux désapprentissages de ces anciennes pratiques et à l’apprentissage de nouvelles façons de travailler. Ainsi, le processus d’implémentation est critique dans le processus d’adoption car il fait l’interface entre la direction et les utilisateurs finaux. L’équipe projet doit faire le lien entre les impératifs de l’unité et considérer les pratiques idiosyncratiques des utilisateurs finaux. Si les employés perçoivent l’implémentation de l’outil comme une démarche imposée par le siège social, sans n’avoir pas été consulté durant les phases précédentes, il se peut que les employés résistent et mettent en avant certaines problématiques inhérentes à l’outil tel que sa relative complexité. D’un autre côté, si l’ERP est customisé l’information contenue dans l’outil perdra de sa pertinence pour le contrôle de la performance de l’unité. En plus de son rôle médiateur entre le management de l’unité et les utilisateurs finaux, l’équipe projet doit aussi faire le lien entre les responsables des fonctions de l’entité pour permettre la mise en place de l’intégration horizontale. L’échec de favoriser la communication horizontale peut induire par la mise en œuvre d’une implémentation de type

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fonctionnelle, de type mécanique, [Newell et al. 2006] dans laquelle une implication « minimaliste des parties prenantes restreindra l’accès aux différents points de vue, dans lequel chaque membre de l’équipe travaille de façon indépendante pour concevoir la partie du système, en se fondant sur la connaissance et l’expertise existante ». Un tel procédé limitera considérablement les bénéfices de l’ERP. Les conséquences d’une customisation de l’outil, et de l’orientation fonctionnelle de l’implémentation s’avèrent problématiques lors de la phase de test. Résultat de l’application de modules customisé ou de bespoke, les employés devront débugger le système car les modifications auront été élaborées isolément les unes des autres. Enfin, la personnalisation intensive pourra entraver l’évolution de l’ERP lorsqu’une nouvelle mise à jour sera disponible et nécessiteront de lourdes adaptations.

La quatrième relation problématique est associée au processus d’internalisation qui réside dans la boucle itérative entre les zones fonctionnels et les employés. L’implémentation de l’outil n’induit pas nécessairement son internalisation. Alors qu’une pratique peut être formellement implémentée et les règles suivies de façon stricte, il est envisageable que les employés n’infusent pas ces valeurs en ne développant pas une attitude positive à leurs égards. Certains employés pourront partiellement ou totalement désapprouver la nouvelle pratique, ne pas assimiler les nouveaux processus induits par le déploiement de l’ERP. Les employés tenteront de conserver les anciens systèmes ou de reproduire leurs uses et coutumes dans le nouveau système rendant le processus d’intégration impossible. L’incertitude suscitée lors du changement radical peut conduire les employés à sa rallier autour de leurs propres intérêts, empêchant le décloisonnement fonctionnel ainsi que la mise en place de comportements coopératifs nécessaires pour que l’adoption de l’ERP soit une réussite [Krackhardt, 2001]; [Tenkasi and Chesmore, 2003]. Pour dépasser les barrières liées à l’assimilation de nouveaux processus de travail, les entreprises ont recourt à des formations formelles et de l’apprentissage en condition [Lave et Wenger, 1991]. Les formations formelles doivent transmettre des connaissances conceptuelles liées à l’ERP et procédurales, c’est-à-dire la façon dont l’outil doit être renseigné, ainsi que les changements conceptuels induits par la mise en place d’une logique par processus. [Robey et al. 2002] ; [Sahay et Robey, 1996]. Contrastant avec les formations formelles, l’apprentissage en condition les nouveaux utilisateurs apprennent en observant et en écoutant des utilisateurs avec davantage d’expériences. Ces derniers pourront être issus de l’équipe projet, et se verront attribuer le rôle de « super-user » ayant acquis de la connaissance en travaillant sur l’outil [Robey et al 2002] ; [Boudreau et Robey, 2001]. Ainsi la boucle qui lie les niveaux fonctionnels et

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individuels permet de s’assurer que l’internalisation a bien lieux. Les employés ayant constitué l’équipe projet peuvent jouer un rôle important dans l’implémentation d’un système ERP, grâce aux formations formelles et informelles, en suivant le progrès des individus, et des équipes, et leur apprentissage lors du processus d’internalisation.

Enfin, pour que l’institutionnalisation soit effective, et garantir la pérennité de la technologie une structure centralisé doit être mise en place et régit par des règles formelles, des routines et des systèmes qui limitent les comportements vindicatifs.

- Intuition Intégration:

-Divisions équipe de coalition -Intentions cachées du directoire

- Interprétation:

-Non traduction des connaissances -Absence de compréhension commune

- Implémentation:

-Tension entre adaptation et standardisation -Démarche mécanistique - Internalisation: -Formations inadaptées - Institutionnalisation:

-Absence de structure centralisée

Figure : récapitulatifs des écueils potentiels lors des phases de déploiement