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4. Résultats

4.2. Quels sont les enjeux associés à l’utilisation des jeux vidéo en tant qu’outil de participation

4.2.4. E-participation avec le média vidéoludique

Intéressons-nous à présent aux modalités de l’e-participation. Pour cela nous pouvons analyser les résultats de la question adressée aux participants : « Seriez-vous intéressé(e) à participer dans le futur à un autre projet d’aménagement d’espace public, seul(e) de chez vous grâce à votre ordinateur (et jeu) ou en communication avec d’autres gens ? ». Cette question visait à mieux comprendre les préférences des participants afin de développer dans un futur une méthodologie optimale

Tableau 7 – Modalités d’e-participation selon les participants de « LiègeCraft » (Speka, 2020)

L’accessibilité du média vidéoludique permet aux usagers de faire partie du processus de participation citoyenne à distance, à partir de leurs lieux de vie par exemple, car ils n’ont pas besoin d’outils spécifiques que l’on peut retrouver exclusivement dans certains projets en présentiel. Ainsi on peut comparer deux moyens de participation : participer grâce aux jeux vidéo ensemble en se réunissant ou seul chez soi comme dans le cas de « LiègeCraft Challenge », deuxième phase du projet

« LiègeCraft ».

Nous observons que la majorité des participants préfère se réunir. Cela est particulièrement important pour les participants P2, P6 et P7, car se réunir et discuter avec les autres permet de débattre sur les aspects les plus importants du projet tels que les fonctions des différents éléments.

P2 nous dit « : S’il faut juste envoyer une proposition de design, je le ferai peut-être simplement chez moi. Sinon pour les fonctions à mettre dedans j’irai plus discuter avec les gens ». Le processus de discussion avec les autres comprend également une dimension éducative. Les individus peuvent apprendre de nouvelles informations et compétences grâce aux autres participants.

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Les participants P2, P5 et P8 mettent en évidence des conditions supplémentaires. Une bonne organisation des réunions permet d’avoir des discussions efficaces ce qui stimule la motivation d’y participer. Sans une bonne organisation, les participants préfèreraient travailler seuls. Un autre facteur important est la connaissance commune du jeu vidéo, comme évoqué par le participant P8. Cela est nécessaire afin d’avoir des discussions compréhensibles par l’ensemble des participants.

Cependant, les participants P3 et P4 préfèrent travailler seul si cela est possible. La méthodologie qui rassemblerait la plupart des individus faisant partie de la démarche ne s’avère donc pas adaptée à l’ensemble des individus. Les différentes manières de manipuler les logiciels, pratiquées par les différents participants, peuvent décourager ces derniers à travailler en collaboration les uns avec les autres. « Moi j’aime bien construire tout seul des fois parce que j’ai mon propre style de construction et que les autres n’ont pas le même style et ça va me déranger » nous livre P4.

Afin d’analyser d’avantage cette notion dans le cadre du projet « LiègeCraft », la question suivante a été posée aux membres du Digital Lab. : « Est-ce que la qualité du travail des personnes travaillant uniquement chez eux était similaire/adéquate relativement à ceux qui sont venus régulièrement ?». L’idée étant de vérifier que le soutien des responsables de « LiègeCraft » a un impact positif sur le rendu.

Les cartes rendues n’étaient pas jugées par les membres du Digital Lab. Ils ont fait l’hypothèse que toutes les cartes étaient d’égale qualité, qu’elles aient été réalisées durant les ateliers, à distance exclusivement ou selon une approche hybride. Les cartes ne sont donc pas jugées selon leur avancement, leur qualité de construction ou leur échelle d’intervention urbaine.

Pour apporter une nuance supplémentaire quant à la notion d’e-participation, nous avons demandé aux participants s’ils participeraient à un processus d’e-participation qui n’emploierait pas le média vidéoludique comme outil de communication et d’information. Nous pouvons retrouver leurs réponses dans le Tableau 8 :

P1 P2 P3 P4 P5 P6 P7 P8

Tableau 8 – Réflexions sur l’e-participation sans la média vidéoludique (Speka, 2020)

Outre les conditions de participation citoyenne énoncées dans la partie «

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Réflexions sur le concept de la participation citoyenne », la grande préoccupation des participants concerne les compétences techniques requises pour la manipulation d’autres outils. Le participant P2 évoque la question du support visuel. Cela peut se traduire par la communication grâce à l’outil. Nous allons aborder cette question dans la partie suivante.

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Nous pouvons également étudier plus spécifiquement comment les projets de participation citoyenne qui emploient le média vidéoludique sont initiés.

Pour cela, commençons dans l’ordre chronologique : les responsables de « LiègeCraft » témoignent que l’intérêt pour l’application de Minecraft dans un cadre architectural et urbain a émergé en 2011. A ce moment une collaboration entre Mojang (les propriétaires de Minecraft) et l’entreprise suédoise « Swedish Building Services » était en cours, engageant de jeunes dans la réappropriation de leur espace urbain (Rosenberg, 2019). Cela a donc été le fondement de la réputation actuelle du jeu et de ses applications possibles à des projets relatifs à l’espace public.

Le projet « Rennescraft » a quant à lui vu le jour en 2013. D’après le représentant de Rennescraft, les porteurs du projet ont été séduits par un ensemble de trois éléments. D’abord la popularité de Minecraft et ses caractéristiques uniques ont motivé ce choix. L’équipe anticipait le fait que ce jeu allait marquer le monde vidéoludique. Minecraft a également séduit les porteurs du projet par son expérience et par toutes les possibilités qu’il offrait. Ainsi, ils se sont demandés comment ils pourraient détourner le jeu du but originel pour en faire un outil éducatif. A cet égard, ils ont observé que lors de la modélisation dans Minecraft, pour créer des éléments représentatifs et compréhensibles, il faut faire un effort de conceptualisation des détails architecturaux. Ce jeu apporte présente ainsi une dimension pédagogique. Pour finir, l’aspect unique esthétique du jeu a contribué au choix du jeu. La toute première itération de « Rennescraft » se rapprochait d’avantage d’une recherche exploratoire scientifique que d’un véritable processus de participation citoyenne. Ce projet a permis de mettre en évidence le fait que cette approche peut fonctionner dans une optique de participation citoyenne en collectant et communicant les idées des citoyennes à la ville.

Ce projet rennois est la source d’inspiration du projet « LiègeCraft ». Cette méthodologie de participation citoyenne a permis de construire un projet autour du média vidéoludique et d’impliquer les citoyens dans leur réappropriation de l’espace public. Pour les membres de Digital Lab. Minecraft présente aussi un effet « wow ». Cet effet se traduit par le fait qu’au bout de quelques minutes, le joueur peut construire un modèle impressionnant.

D’autres projets tels que le projet Block by Block d’UN habitat emploient également cette méthodologie. L’expérience accumulée lors de ces projets permet donc d’organiser le projet

« LiègeCraft » de la manière la plus efficace possible. Nous remarquons donc que le jeu employé a un grand impact sur le du processus d’e-participation.

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