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Dynamique du POE à temps longs et à grande échelle

Matrice de confinement : les alumines poreuses

4. Comportement dynamique du POE confiné

4.2 POE confiné dans des systèmes 1D : une dynamique anisotrope ?

4.2.2.3. Dynamique du POE à temps longs et à grande échelle

Nous nous attendons à un effet d’orientation d’autant plus marqué que la chaîne se situe dans son régime de reptation locale i.e. à temps longs et à grande échelle. Or le caractère poreux de la matrice de confinement induit une diffusion intense aux petits angles. La matrice étant solide, cette diffusion est purement élastique.

Ainsi dans la pratique toute mesure sur un échantillon AAO+hPOE pour des Q < 1 Å-1 est irréalisable, le signal dynamique étant négligeable face au signal purement statique de la matrice. C’est ce signal élastique cohérent qui est d’ailleurs à l’origine de la forte diffusion à petits Q mesurée par analyse de l’intensité diffusée (FIG. 2.4.2.6).

Pour mesures les systèmes AAO+POE à temps longs et à grande échelle, une solution possible serait donc d’utiliser une autre stratégie pour « matcher » la contribution statique de la matrice qui diffuse à petits Q pour ne sonder que la dynamique d’une chaîne de polymère. La technique proposée est celle du contraste moyen nul. Cette technique, décrite en Annexe 2.5.3, consiste à confiner, dans la structure poreuse des AAO, un mélange de hPOE et de

dPOE qui permet de n’avoir accès qu’à la contribution du polymère. La fraction de x D de dPOE d’un tel mélange est :

D H

AAO H D x        (2.4.2.1)

La fraction de dPOE xD  56 % est estimée en appliquant la relation (2.4.2.1) à partir des

densités de longueurs de diffusion cohérentes du hPOE hPOE 6.4 109 cm-2 et du dPOE dPOE  7.17 1010cm-2. Cette dernière valeur a été mesurée en réflectivité de neutrons par Dr. Fabrice Cousin (LLB).

Nos premiers essais de matching ont soulevé plusieurs questions dans la mesure où le mélange de POE H/D ci-dessus ne permet pas d’atteindre un matching même imparfait (comparable à la chute d’intensité du signal de la membrane matchée par un mélange H2O/D2O (FIG 1.5.3.3)), malgré un abaissement notable de l’intensité diffusée (FIG. 2.4.2.11).

La première étant de savoir si la matrice est parfaitement pleine de polymère où si des bulles d’air sont piégées au sein de la matrice poreuse.

0.001 0.01 0.1 1 10 100 1000 104 105 0.001 0.01 0.1 1

AAO + POE (56 %v dPOE) AAO vide I ( c m -1 ) Q (Å-1) PAXY - LLB

FIG. 2.4.2.11 : Spectres de DNPA pour une membrane 20V-10C_H2SO4 vide (rouge) et une membrane 20V-

10C_H2SO4+ un mélange hPOE+ dPOE xD 56 % Mw = 35 kg.mol-1 (bleu Les intensités de l’AAO vide et de

l’AAO + POE à Q* = 1.4 10-2 Å-1 sont respectivement 7196 cm-2 et 1296 cm-2 aboutissant à K

exp 0.18. Malgré

l’abaissement significatif de l’intensité du signal du polymère confiné, l’intensité des pics de l’alumine ne s’annule pas. En principe, le signal attendu aurait dû révéler la conformation de la chaîne confinée mais la contribution statique de la matrice reste prépondérante.

La technique que nous avons utilisé dans ce travail et qui consiste à faire pénétrer le polymère à l’état fondu dans la matrice est également mise en œuvre par d’autres groupes pour imprégner les AAO. En effet, Xu et al utilise les canaux cylindriques de l’alumine comme des nano-capillaires pour fabriquer des nanotubes de polystyrène [191]. Lorsque le polymère est chauffé au dessus de sa température de transition vitreuse, l’alumine se remplit progressivement du polystyrène par capillarité aboutissant à des tubes de polystyrène piégés dans la matrice. Cette technique est également utilisée dans le cas du polyéthylène par Shin et al. [156]. Ces auteurs n’ont pas publié de courbe de matching, il est donc difficile d’évaluer la qualité de remplissage de leurs échantillons.

Nous notons que ces problèmes d’imprégnation sont relativement complexes puisqu’ils couplent des phénomènes de mouillage et de confinement. Nous pouvons proposer deux mécanismes menant à l’imprégnation de la structure poreuse par le polymère : l’infiltration à l’aide d’un film précurseur (FIG. 2.4.2.12) et l’infiltration par capillarité (FIG. 2.4.2.13). Ces

deux mécanismes se distinguent par leur coefficient de mouillage S :       SG SL S (2.4.2.2)

où SG, SL et  représente les tensions superficielles solide-gaz, solide-liquide et liquide-gaz. S

mesure la différence d’énergie d’interface entre un substrat nu et le substrat recouvert d’un film de polymère. Si S > 0, le mouillage est complet alors que S < 0 le mouillage est partiel.

FIG. 2.4.2.12 : Représentation schématique des différentes étapes du remplissage d’une membrane d’AAO : mouillage complet. (a) Initialement, le polymère est placé en contact de la structure poreuse. (b) Lorsque le polymère est à l’état fondu, un film mince appelé film précurseur mouille rapidement les parois des pores. (c) Le film grossit avec la formation d’instabilités au fur et à mesure que la membrane s’imprègne du polymère. (d) Eventuellement, après un temps important, la structure poreuse est parfaitement pleine de polymère [192].

Le mécanisme d’infiltration des alumines poreuses décrit par Steinhart et al. [193,194] est essentiellement contrôlé par le « film précurseur » (cas où S > 0) et est représenté FIG.

2.4.2.12. Il s’agit du cas le plus rencontré dan la pratique puisque la plupart des polymères sont des matériaux présentant une faible tension superficielle et que les matériaux inorganiques tels que les alumines sont des matériaux présentant une haute tension superficielle. Lorsqu’une d’alumines est mise en contact avec un liquide ou d’un polymère fondu tel que le poly(dimethlsiloxane) PDMS (FIG. 2.4.2.12 (a)), les parois des pores se

recouvrent rapidement d’un film mince (FIG. 2.4.2.12 (b)). Lorsque l’intégralité des parois

des pores est recouverte par le film précurseur la force attractive est neutralisée. Steinhart et al. suggèrent que dans cet état (FIG. 2.4.2.12 (c)), la cinétique est stable mais la

thermodynamique du système ne l’est pas. Les forces coercitives conduisant au remplissage complet de la matrice (FIG. 2.4.2.12 (d)) sont relativement faibles pour contrecarrer les forces

de viscosité du polymère qui peuvent être importante en particulier dans le cas de polymère enchevêtrés. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que le mouillage de la matrice et sont remplissage complet se produisent à des échelles de temps distinctes.

FIG. 2.4.2.13 : Représentation schématique des différentes étapes du remplissage d’une membrane d’AAO : mouillage partiel (a) Initialement, le polymère est placé en contact de la structure poreuse. (b) lorsque l’ensemble est chauffé au dessus de la température de fusion du polymère, le polymère pénètre au sein de la structure poreuse précédé d’un ménisque. (c) Après un certain temps, le polymère peut parfaitement remplir la matrice d’alumine [192].

[192] Max Planck Institut : http://www.mpi-halle.mpg.de/

[193] M. Steinhart, J. H. Wendorff and R. B. Wehrspohn, ChemPhysChem, 2003, 4, 1171-1176.

[194] M. Steinhart, R. B. Wehrspohn, U. Gösele and J. H. Wendorff, Angew. Chem. Int. Ed, 2004, 43, 1334.

(a) (b) (c) (d)

S > 0

S < 0

(a)

Toutefois, si la membrane est mise en contact avec un polymère fondu à une température proche de sa température de fusion [195], ou si l’énergie des parois des pores est abaissée (après silanisation de la surface par exemple) [192], le mécanisme d’infiltration est de type capillaire avec un mouillage partiel S < 0 (FIG. 2.4.2.13). Dans ce mécanisme, il n’y a pas de

film précurseur à la surface des pores, les pores se remplissent progressivement de polymère. La signature de ce type de remplissage est la présence d’un ménisque qui progresse au cours de l’infiltration.

Xhang et al. ont également montré que la température du polymère joue un rôle essentiel dans la mesure où en fonction de la température choisie, le mécanisme peut soit être de type mouillage partiel pour T ~ TF ou de type mouillage complet pour T >> TF [195].

Compte tenu de ces résultats, il est indispensable de contrôler la température lors de l’étape d’imprégnation de la membrane d’alumine. Nous pouvons également envisager modifier l’énergie de surface des alumines en silanisant la surface.

La seconde question soulevée par cette première expérience de matching serait de savoir si le mélange de polymère hydrogéné/deutéré ne démixe pas à l’intérieur des canaux de la membrane. La réponse à cette question ne pourra être abordée que lorsque la problématique du remplissage sera parfaitement résolue.