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2.3 Cas de la molécule Cs 2

2.3.6 Durée de vie

Moments dipolaires électroniques

Une autre source d’incertitude, la principale, vient de l’amplitude des moments dipolaires de transition qui interviennent au carré dans la formule de la polarisabilité. Il n’y a actuellement pas de mesures expérimentales concernant les moments dipolaires de transition de la molécule de Cs2. Toutefois la méthode de chimie quantique utilisée pour les obtenir (voir chapitre 1.2.4) a également été employée sur d’autres molécules similaires, les hétéronucléaires d’alcalins. Les calculs des moments dipolaires permanents obtenus par cette méthode sont très proches des valeurs expérimentales [72, 131, 132]. Cela suggère une bonne description de la fonction d’onde de l’état électronique fonda-mental. Par contre les calculs sur le moment dipolaire permanent de l’état excité B1Π de NaK donnent une valeur 10 % plus grande que celle obtenue expérimentalement. La description des états excités est donc moins précise que celle de l’état fondamental.

Diminuer tous les moments dipolaires de 10 % (voir la courbe en pointillée noire de la fig. 2.8) ramènerait la valeur de la polarisabilité de la molécule de Cs2 à la longueur d’onde de 1 064.5 nm à 2.02 αCs. On notera que la valeur de la fréquence magique que l’on obtient est très sensible à la valeur des moments dipolaires que l’on prend. Pour la borne supérieure de la figure2.8 correspondant à une augmentation de tous les moments dipolaires de 10 % il n’existe aucune fréquence magique. Toutefois, la plage de fréquences proche infra-rouge reste favorable au piégeage dans tous les cas.

2000 4000 6000 8000 10000 Energy (cm-1) 500 1000 1500 2000 2500 3000 3500 Re( α ) (a.u.) 9394.08

Figure 2.8 – Partie réelle de la polarisabilité du niveau v = 0, X1Σ+

g (courbe noire) et

deux fois la polarisabilité atomique (courbe rouge) en fonction de la fréquence du laser. La polarisabilité a également été calculé en augmentant (courbes vertes en pointillés) ou diminuant (courbes violettes en pointillés) artificiellement les moments dipolaires de transition de 10 %. Le trait bleu rappelle la longueur d’onde expérimentale.

2.3.6 Durée de vie

Nos calculs sont effectués en prenant une durée de vie des niveaux rovibrationnels des états électroniques excités fixée arbitrairement à 10 ns, ce qui constitue l’ordre de

64 Cas de la molécule Cs2

grandeur de la durée de vie des niveaux liés des états électroniques excités A1Σ+

u ou B1Πu. Si cette valeur n’a à priori que peu d’impact sur l’étude d’effet hors résonance il convient tout de même de s’attarder un peu dessus et de détailler son influence.

La figure 2.9 montre le résultat de plusieurs calculs de polarisabilité où l’on a fait varier la valeur arbitraire des durées de vie. La zone d’énergie étudiée est centrée sur une résonance, on voit que l’amplitude à résonance est directement proportionnelle à la durée de vie utilisée. Par contre la différence entre les courbes s’atténue rapidement en ce qui concerne la partie réelle de la polarisabilité. Au delà de 0.1 cm−1 l’influence de la durée de vie est négligeable ce qui justifie notre choix d’étudier les régions hors résonance en prenant une valeur arbitraire de la durée de vie.

La partie imaginaire de la polarisabilité est, hors résonance, inversement propor-tionnelle à la durée de vie des niveaux excités. Ainsi nos travaux, se basant sur une valeur arbitraire, ne doivent pas être compris comme une détermination précise du taux d’absorption. Nos figures présentant des parties imaginaires n’ont pour but que de mon-trer les variations globales de ce taux : zone hors résonances de faible absorption, zone proche de résonances d’absorption moyenne, résonances correspondant à l’excitation de la molécule. 106 107 108 109 |Re( α )| (a.u.) -0,2 -0,15 -0,1 -0,05 0 0,05 0,1 0,15 0,2 Energy (cm-1) 102 103 104 105 106 107 Im( α ) (a.u.) 100 ns 10 ns 1 ns 0.1 ns

Figure 2.9 – Valeur absolue de la partie réelle (cadre du haut) et imaginaire (cadre du bas)

de la polarisabilité du niveau X1Σ+g, v = 0 en fonction de la différence entre la

fréquence laser et l’énergie d’une transition vers un état excité. Les calculs ont été faits avec une durée de vie des niveaux excités arbitraire de 100 ns (courbe noire), 10 ns (courbe rouge), 1 ns (courbe verte) et 0.1 ns (courbe bleue).

2.3.7 Polarisabilité du niveau X

1

Σ

+

g

, v = 73 , J = 0

Nous avons jusqu’à présent étudié les molécules de Feshbach qui se comportent du point de vue de la polarisabilité de manière similaire à une paire d’atomes indépendants ainsi que les molécules se trouvant dans le niveau v = 0 de l’état fondamental X1Σ+

g. Comme mentionné dans l’introduction de ce chapitre le schéma STIRAP à 5 niveaux utilisé au cours de l’expérience s’appuie sur un autre niveau de l’état fondamental, le

2.3.7 - Polarisabilité du niveau X1Σ+

g, v = 73 , J = 0 65

niveau v = 73. La polarisabilité d’une molécule se trouvant dans ce niveau peut être obtenue en utilisant la même méthode que pour le v = 0, dans la formule 2.9 seule la fonction d’onde vibrationnelle initiale et l’énergie du niveau initial seront différents.

La figure 2.10 montre le résultat de ces calculs centrés autour de la longueur d’onde de 1 064.5 nm du laser de piégeage. Dans cette région d’énergie de nombreuses résonances sont visibles, en effet des transitions favorables entre le niveau X1Σ+

g, v = 73, J = 0 et des niveaux de l’état 0+

u sont présentes. En modifiant de quelques cm−1 la longueur d’onde du laser on pourrait ainsi exciter la molécule.

Entre deux pics de résonance la partie réelle de la polarisabilité varie de manière continue d’une valeur négative à une valeur positive. Pour l’objectif de piégeage qui nous intéresse on peut donc toujours trouver une zone d’énergie qui se trouve dans une région de fréquence légèrement décalée vers le rouge par rapport à une transition, où la partie réelle de la polarisabilité est positive.

Toutefois dans ce cas l’écart entre l’énergie du photon de piègeage et l’énergie de la transition favorable la plus proche est de l’ordre de quelques cm−1. Pour comparaison cet écart était de l’ordre de quelques centaines de cm−1 lorsque nous discutions de la fréquence magique dans les sections précédentes. La proximité en énergie d’une transition favorable se traduit par une partie imaginaire de la polarisabilité, reliée à l’absorption et donc à la durée de piégeage, environ 3 ordres de grandeur plus importante que pour la situation éloignée étudiée précédemment. Le taux d’absorption pour une énergie proche (quelques cm−1) d’une résonance reste toutefois faible comparé au taux d’absorption à résonance. Ces ordres de grandeur sont compatibles avec les mesures expérimentales de durée de piègeage des molécules. Dans le niveau v = 0 celle-ci est de quelques secondes, en comparaison la durée de piégeage des molécules dans le niveau v = 73 est seulement de 19 ms, entre deux et trois ordres de grandeur de moins, à cause de la probabilité d’absorber un photon de piégeage ce qui conduit à l’excitation et donc la perte de la molécule.

Si nos calculs montrent l’existence d’une zone d’énergie permettant le piégeage ils ne donnent pas une valeur précise de la polarisabilité. En effet les résonances visibles portent sur des niveaux de l’état 0+

u dont la spectroscopie n’était, au moment de nos cal-culs, pas encore disponible. Leur position est donc limitée par la précision de nos calculs de chimie quantique. On peut reconnaître sur la figure2.10 l’écart vibrationnel entre les niveaux (on a en fait ici deux séries vibrationnelles différentes qui s’entrecroisent, l’une de l’état A1Σ+

u et l’autre de l’état b3Πu, ces deux séries étant fortement perturbées par le couplage spin-orbite) mais l’incertitude sur la position exacte est de l’ordre de l’écart vibrationnel de ≈ 20 cm−1. La polarisabilité passant d’une valeur négative à une valeur positive sur cette plage elle ne peut pas être déterminée.

La possibilité de piégeage en utilisant une longueur d’onde située entre deux ré-sonances proches l’une de l’autre est un résultat général. La polarisabilité variant de manière continue, même lorsqu’il n’existe pas de fréquence magique dans des zones hors résonance on peut toujours ajuster la valeur de la polarisabilité en se plaçant près d’une résonance et en jouant sur la longueur d’onde du laser. La contrepartie étant que la du-rée de vie des molécules est limitée, de l’ordre de la ms lorsqu’on se décale de quelques cm−1 par rapport à la résonance. Le système que nous étudions dans la section suivante, une molécule de Cs2 se trouvant dans l’état a3Σ+

66 Cas de la molécule Cs2 9360 9380 9400 9420 9440 Energy (cm-1) 10-2 100 102 104 106 Im( α ) (a.u.) -106 -103 0 103 106 Re( α ) (a.u.)

Figure 2.10 – Partie réelle (en haut) et imaginaire (en bas) de la polarisabilité dynamique

d’une molécule de Cs2 se trouvant dans le niveau v = 73, J = 0 de l’état

électronique fondamental X1Σ+g en fonction de la fréquence du laser.