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Une double analyse des entretiens auprès des consommateurs pour faciliter l’interprétation des résultats

Conclusion du septième chapitre

Chapitre 8. Étude exploratoire déterminante quant au choix du mode d’investigation

2. Une double analyse des entretiens auprès des consommateurs pour faciliter l’interprétation des résultats

Afi d a lio er la découverte de notre objet de recherche, la location auprès des particuliers, et à la suite d un recueil auprès de dix personnes nous choisissons de pratiquer une double analyse des ressources. Elle concourt à pr pa e l i te p étation des discours.

2.1. Analyse de contenu des entretiens exploratoires et interprétation : identification de biais déclaratifs et de désirabilité sociale

Voici les principaux thèmes abordés lors des entretiens semi-directifs auprès des consommateurs : - La location en général : motivations et freins.

- Intérêt de louer ses biens à des particuliers : motivations et freins - Louer entre particuliers : motivations et freins

- Location selon les secteurs : bricolage, logement, loisirs, habillement, mobilité (voiture, vélo) : motivations et freins

- Louer pour tester un produit, intérêts et limites - Le don

- Le troc

- Le prêt entre amis

- La fidélité au point de vente dans le cadre d'une offre de service - L'achat de biens ou de services en utilisant Internet.

A la suite de la al se de o te u, ous a o s alis u apitulatif des po ses o te ues. E annexe 1, nous retrouvons les principaux résultats chiffrés. Les motivations essentielles pour la lo atio so t la f ue e d utilisatio d u ie et le oût d usage oi s o eu ue l a hat. La lo atio est p i il gi e lo s ue l off e est a essi le et situ e à p o i it du do i ile des i di idus. Les contraintes organisationnelles (réservation, contrat à signer) et monétaires, une caution à verser par exemple, limitent la s au se i e. La possessio est ajo itai e e t pl is it e pa les a ateu s a elle off e u e dispo i ilit e lusi e et u e e ta ilit si l usage se p olo ge da s le temps. Les freins pour la possession sont peu nombreux, ils sont principalement liés à la valeur du bien acheté, que les répondants trouvent parfois élevée, et le manque de conseil pour une meilleure utilisation des biens.

Dans une dimension plus prospective, lorsque nous avons posé la question : « Quels sont les produits que vous aimeriez trouver en location dans un futur plus ou moins proche ? », les consommateurs ont peu d'idées. Toutefois, ils avancent des propositions comme des produits high-tech tels la tondeuse robot, l'aspirateur robot et les jouets.

Nous avons abordé la sensibilité écoresponsable en posant la question suivante : « Comment vivez-vous votre écoresponsabilité ? ». Au préalable, la définition des termes éco comme écologique et responsabilité envers soi et envers les autres a été précisée. Les réponses et les idées sont nombreuses et riches. Toutefois, nous doutons de la sincérité des propos pour certains répondants. Nous o stato s u iais de d si a ilit so iale, les i di idus he he t à pa aît e au eu d aut ui comme très engagés et respectueux de leur environnement. Le covoiturage, le recyclage sont prioritairement évoqués comme pratiques écoresponsables. Les discours médiatiques développés

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par les institutions et les entreprises facilitent ces réponses spontanées. De même, nous retrouvons ce biais lorsque nous abordons la notion du don. Il s'agissait ici de mieux comprendre pourquoi les consommateurs donnent et à qui sont destinés leurs bienfaits. Les motivations sont nombreuses. Il est intéressant de voir que l'allongement de la durée de vie du produit et la limitation du gaspillage sont cités fréquemment.

Le prêt entre amis est plus coutumier et révélateur de la personnalité de chacun dans les discours. Les consommateurs acceptent de prêter à des amis si ce sont des connaissances, pour des objets de moindre valeur, pour freiner les dépenses et éviter de jeter les objets. Néanmoins, ils conditionnent leurs actes à une relation basée sur la confiance.

Cette a al se et l i te p tatio des th es o u s par nos répondants nous instruisent sur leurs difficultés à privilégier la location à la possession. Posséder est la ge e t pl is it , ils o t pas ou peu d id e su les p oduits u ils souhaite t oi e lo atio . Un biais de désirabilité demeure p g a t su l e se le des e t etie s. Et, il est difficile pour le chercheur de vérifier le bien-fondé de ces déclarations car il est souvent confronté à des biais déclaratifs. Les recherches sur sujets sensibles demandent que le consommateur se dévoile de manière intime (Belk, Devinney et Eckhardt, 2005). Le questionnement en face à face fausse certainement le discours et encourage ce biais. Il se ait plus pe ti e t d a oi e ou s à des tudes p oje ti es, ou le isio age d un film, pour e suite do e so a is pa it à l a i des eu du he heu , u il o sidère parfois comme un juge, à l o atio de es th es. Des e t etie s plus app ofo dis, o st uits su l e pathie et u e confiance entre chercheur et répondant, sont un mode de collecte qui limite les biais précédemment évoqués.

Par conséquent, une analyse plus objective est nécessaire pour découvrir les champs lexicaux les plus communs à nos répondants ; elle nous instruit, grâce à la quantification des mots, su l i po ta e do e à ha ue th e o u lo s des e t etie s. L a al se th ati ue e plo ée pour répertorier les a is est d auta t plus du t i e ue ous o pta iliso s les po ses les plus f ue tes. Elle laisse peu ou pas de place à des avis plus personnels nourris par une logique de consommation réellement vécue. Il est possible de répondre favorablement à des propositions thématiques, sans a oi à justifie sa po se pa l e pli atio de l e p ie e de o so atio ue. Les entretiens semi-di e tifs li ite t l e p essio des i di idus su e tai s thèmes et les cantonnent aux thèmes évoqués par le chercheur.

. . Un examen des données grâce à l’utilisation d’un logiciel d’ADT

La retranscription intégrale des dix entretiens semi-directifs fait l o jet d u t aite e t a e le logiciel Alceste. L a al se le i ale, après un traitement des données, montre 84 % des UCE (Unité de contexte Elémentaire) classés, en classification double. Elle présente trois classes correspondant à trois champs lexicaux différents. Le premier est le plus représentatif (75.8 %), il correspond aux motivations et f ei s a a s pa les po da ts o e a t la lo atio de l usage. Puis, le se o d (15 %) correspond aux valeurs matérialistes et aux représentations sociales allouées à la consommation ; enfin, un axe sémantique moins prégnant dans notre corpus se distingue (9.2 %), nous le nommerons la sensibilité écoresponsable. Afin de faciliter la compréhension, nous détaillons le vocabulaire le plus significatif de chaque classe identifiée par le logiciel.

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Tableau 15 A : T ois ha ps le i au d ou e ts lo s de l étude exploratoire Classe 1 :Représentations sociales et valeurs matérialistes (15 % du corpus analysé)

Extrait du vocabulaire lemmatisé, présences significatives

Khi2 Par ordre Décroissant

Extrait du vocabulaire lemmatisé, absences significatives Khi2 Par ordre Décroissant  Vêtement  Objet  Prêter  Donner  Personne  Porte  Famille  94  46  41  33  33  29  29  Louer  Locatif  Matériel  Fait  Temps  Choisir - 11 - 8 - 8 - 4 - 4 -

Cette classe (15 %) est représentée par le détail des mots « vêtement » et « objet » car ils sont sig ifi atifs et ep se tatifs de l atta he e t des i di idus à l o jet, du at ialis e et de ses représentations sociales. Les vêtements, objets usuels, sont révélateurs de la difficulté à envisager de loue l usage a e tai es pe so es o t o u u e ti e e à po te des ie s tou h s pa aut ui (Argo, Dahl et Morales, 2006). O , la otio de p t, de do et d aide aup s d a is et des associations sont des éléments qui laissent à penser que la notion de matérialisme prend parfois des directions différentes. Nous retrouvons, dans ces discours, le même biais de désirabilité sociale, il s a o pag e uel uefois d u iais d la atif puis ue ot e a al se le i ale utilise le e e ueil de don es ue l a al se de o te u th ati ue. Ces iais, ta t d la atif ue de d si a ilit so iale, so t li s à la thode de olle te des do es, i i l e t etie se i-directif.

Tableau 15 B : T ois ha ps le i au d ou e ts lo s de l tude e plo atoi e Classe 2 : Moti atio et f ei s pou la lo atio de l usage (75,8 % du corpus analysé)

Extrait du vocabulaire lemmatisé, présences significatives

Khi2 Par ordre Décroissant

Extrait du vocabulaire lemmatisé, absences significatives Khi2 Par ordre Décroissant  Louer  Matériel  Temps  Locatif  Magasin  Aller  Cher  25  15  9  9  8  7  6  Vêtement  Objet  Enfant  Responsable  Famille  Éco - 77 - 31 - 30 - 30 - 29 - 22

Dans cette classe, nous découvrons une forte représentativité de dimension rationnelle de la prise de décision de louer. Nous trouvons des sacrifices supérieurs aux bénéfices, les freins, les difficultés liées aux moyens d a s au se i e ep se t es pa les mots « temps », « aller », « cher ». C est la di e sio i st u e tale do e à l e p ie e de o so atio du se i e. Le o so ateu compare les bénéfices attendus aux efforts à fournir pour a de à l off e. Les freins

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organisationnels identifiés sont la variable temps, la nécessité de posséder Internet pour réserver, un prix plus conséquent comparé à l a hat ou l i estisse e t à lo g te e. Il est possible de s i te oge su la apa ité des consommateurs à concéder les efforts nécessaires pour changer de mode de consommation en référence avec un script de service mémorisé (Orsingher, 2006). Ici, nous sommes face au comportement où le consommateur he he à a i ise les fi es de l usageen o pa aiso a e les sa ifi es u il est e esu e d a epte . Pourtant, louer présente un intérêt économique non négligeable pour le budget des clients. Les habitudes, prises au sein de la sphère familiale, de privilégier la location à l a uisitio du ie , se transmettent. Elles sont un antécédent à l adoptio de l usage. Aujou d hui, la possession de biens ne se limite pas à ce postulat, mais elle conserve encore une valeur de signe pour des individus en phase de construction identitaire comme les jeunes. Certains de nos répondants les moins âgés ont évoqué ces représentations sociales attachées à leur consommation.

Tableau 15 C : T ois ha ps le i au d ou e ts lo s de l tude e plo atoi e Classe 3 : La sensibilité écoresponsable (9,2 % du corpus analysé)

Extrait du vocabulaire lemmatisé, présences significatives

Khi2 Par ordre Décroissant

Extrait du vocabulaire lemmatisé, absences significatives Khi2 Par ordre Décroissant  Éco  Recycler  Sens  Sensibilité  Responsable  Partager  Écologie  Tri  École  Enfant  71  50  40  40  40  30  24  21  21  21  Louer  Matériel  Temps  Cher  Aller  Magasin - 12 - 5 - 4 - 3 - 3 - 3

L a al se de la catégorie la plus faiblement représentée laisse apparaître une recherche de sens et de responsabilité dans la consommation. Les modes de consommation alternatifs et la consommation engagée forment une classe peu représentée. Toutefois, la sensibilité écoresponsable y est prégnante. L ologie fi ie d u e p se e sig ifi ati e et l o s ape çoit ue la di e sio incitative à trier, à recycler, se rapproche du mot école. Les campagnes de sensibilisation à des éco gestes, comme le tri des déchets, font désormais partie des programmes pédagogiques de l Éducation nationale. Les enfants sont éveillés à cette problématique dans le cadre de la socialisation secondaire.

En revanche, le secteur associatif est une alternative au marché, et le don à des associations est un moyen de donner un sens plus responsable à certains parcours de consommation plus frugaux. Economie rime avec écologie pour un certain nombrede répondants. Ils voient dans les injonctions institutionnelles un recours à du bon sens pour gérer au mieux ses dépenses tout en respectant les ressources naturelles. Néanmoins, un biais de désirabilité sociale au sein des entretiens semi-directifs

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modère ces résultats. Globalement, les trois classes représentées nous montrent une certaine opposition entre les champs lexicaux de la location et du matérialisme, ce qui semble une évidence. 2.3. Interprétation et premières découvertes des particularités des comportements de consommation de la location

L a al se glo ale des t ois lasses p se te u e surreprésentation des individus ruraux, ce qui peut, en partie, expliquer les difficultés émises pour accéder à la location et une sensibilité plus marquée pou l e i o e e t et so aintien en état de propreté (recyclage). En fait, la présence de la dimension attachement à la nature est un point que nous tentons de vérifier ultérieurement comme

lateu d u e se si ilit o espo sa le lo s du e ueil aup s des o so ateu s.

Cette phase exploratoire nous encourage à émettre certaines hypothèses ou propositions au niveau du comportement des consommateurs ; ainsi, nous remarquons que :

- la possession reste prégnante pour les objets symboliques et intimes, et pour les biens immobiliers, - la sensibilité à l e i o e e t la nature) favorise des comportements plus responsables.

Voici les premières propositions de recherche émanant de cette étape exploratoire : P1 : le consommateur est attaché à ses biens,

- s ils o t u a a t e s oli ue, - ou s ils p se te t u a a t e intime,

- pour les biens immobiliers être propriétaire est essentiel, P2 : les rigidités organisationnelles f ei e t l a hat du se i e,

- la priorité est donnée à la proximité, - au conseil,

- à u e si pli it d a s à l off e de se i e,

P3 : la SER (sensibilité écoresponsable) trouve en partie ses sources, - dans la socialisation secondaire (école),

- et les discours institutionnels,

P4 : adopte la lo atio de l usage pou li ite la o so atio de essou es atu elles est pas une évidence pour le consommateur.

. Arguments en faveur de l’adoption d’une étude qualitative enracinée

dans les faits

La al se de o te u th ati ue o e l a al se le i ale puis l i te p tatio des sultats, nous offrent l oppo tu it de comprendre le sens donné aux thèmes abordés lors des entretiens. L e ploi d e t etie s se i-directifs fa o ise l e ge e de po ses p o çues. En effet, elles sont en partie construites par le guide thématique. Même si nous avons tenté d a ue e iais de o ta i atio thodologi ue, il e de eu e pas oi s u e fo te te da e pour le narrateur à répondre en donnant une image de soi la plus favorable possible au chercheur. Aborder des sujets

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ui el e t de l e p essio du “oi, de l i ti e a e e ode de e ueil est i op a t. Les th es e fe e t le a ateu da s u a a ui li ite d auta t la i hesse de la collecte. Si nous émettons des hypothèses pour ensuite les vérifier dans une logique hypothéticodéductive, cela suppose d t e apa le de âti u uestio ai e p is. O , à l issue de ette tape de e he he li i ai e, il ous est impossible de pratiquer de la sorte par manque de repères tant th o i ues u académiques conjugué à l insuffisance de connaissance des particularités du terrain exploré. Notre recherche nous encourage à démarrer du terrain, au œu de la ie uotidie e des o so ateu s, pour découvrir les comportements de consommation tout en respectant les principes de l e u te ualitati e approfondie et les préconisations de la Grounded Theory. Nous e pou o s pas ous o te te d u questionnement à un moment unique, en version statique. Seul un angle dynamique, nourri par l empathie du chercheur pour approcher les parcours de consommation relatés par les individus, permet de découvrir les évènements marquants. Ces derniers fa o ise t l e ge e de changements de comportements. Cette approche est ga a te d u e o p he sio app ofo die de l o jet so ial tudi . E plo e des its de ie pour recueillir des données primaires, en rencontrant plusieurs fois les narrateurs, est une forme de recueil plus adéquate. Les récits nous permettent de créer un modèle théorique et une typologie de logiques de consommation. Nous privilégierons l a du tion pour construire notre modèle en respect des préconisations de la Grounded Theory.

Synthèse du huitième chapitre

A epte de loue l usage au lieu de poss de le ie est u ha ge e t conséquent. Il suppose de comprendre les antécédents à la prise de d isio de la lo atio de l usage. C est ai si u au niveau méthodologique, les biais déclaratif et de désirabilité sociale nous engagent à privilégier une méthode de collecte sous la forme de récits de vie pour approfondir les investigations. Pour saisir l i po ta e de l i flue e de la se si ilit o espo sa le lo s de d isio de loue l usage, ous disti guo s deu at go ies de populatio , l u e plus e gag e da s sa o so atio et l aut e plus ordinaire, afin de mettre à jour des approches distinctes de leur consommation au quotidien. L a se e de pa it e t e p op i tai e et lo atai e lo s de l i estigatio e plo atoi e justifie u d s uili e da s les sultats. D s lo s, l ha tillo de l e u te ualitati e app ofo die fi ie a d u e fo te a ia e pou ite es ueils telle u e su ep se tatio d u e at go ie de répondants. Néanmoins, le monde des associations, largement évoqué par nos répondants au sein de cette étape liminaire, nous encourage à nous diriger vers ce secteur pour notre recrutement lo s de l e u te ualitati e app ofo die. D aut es he heu s su la o so atio e gag e (Dubuisson-Quellier, 2009) ont privilégié cette voie pour rencontrer des personnes ayant des caractéristiques de consommation plus responsables.