• Aucun résultat trouvé

Dans notre étude, la dose médiane de méthadone quotidienne est de 75 mg. Cependant, nous remarquons une différence significative de 20mg entre la dose de méthadone administrés aux patients qui adhèrent au programme (80 mg) et celles administrée au patients qui quittent le programme (60 mg). Les patients recevant des doses plus élevées de méthadone sont donc plus susceptibles de poursuivre le traitement. Ce résultat concorde avec l’ensemble des études publiées et souligne l’importance de maintenir les patients à des doses adéquates (78)(79)(76).

De nombreuses études ont démontré que des doses comprises entre 80 et 120 mg permettaient d’obtenir de meilleurs résultats thérapeutiques, notamment une meilleure rétention des patients sous traitement et une moindre consommation de drogues illicites (80) (81) (82).

L’étude israélienne de Peles et al. (76) et américaine de Maxwell et al. (83) constatent qu’une dose très élevée de méthadone (≥100 mg / jour) est un prédicteur de rétention à très long terme (jusqu'à 11 ans pour l’étude israélienne). Roux et al. ont étudié la perception du patient et trouve que l'impression d'une dose inadéquate (qu'elle soit «trop faible» ou «trop élevée») avait tendance à être associée à une mauvaise adhésion thérapeutique (64). Cela suggère qu'une réévaluation de l'adéquation de la dose devrait être effectuée fréquemment par le médecin, en prenant compte du ressenti du patient.

 Tolérance

Des effets secondaires ont été rapportés par 39,7 % des patients. Aucun effet secondaire grave ou nécessitant l’arrêt du traitement n’a été enregistré. Il s’agissait principalement de constipation et d’hypersudation. La constipation est prise en charge dans un premier temps par des mesures hygiéno-diététiques tel qu’une alimentation riche en fibres, une bonne hydratation et une activité physique régulière, et secondairement par un laxatif non irritant comme le lactulose. La prise en charge de l’hypersudation consiste en la réduction de substances qui favorisent la transpiration tels que le café et le piment, et en cas d’échec en la prescription d’atropine ou de desloratadine.

E. Indicateurs positifs de productivité

La rétention est un élément clé de la réussite des programmes de traitement par agonistes aux opioïdes et est considérée comme un indicateur important de l'efficacité du traitement (84). Plus un patient reste actif dans un programme de traitement d'entretien à la méthadone, plus il reste éloigné de l’usage et plus il reçoit de services de conseil et de soutien, ce qui signifie que le traitement a plus de chances d'être efficace (85). Dans notre étude, la durée de rétention médiane est de 11 mois. Le pourcentage de rétention à 6 mois est de 66,2%, le pourcentage de rétention à 1 an est de 46,3% et le pourcentage de rétention à 2 ans est de 22,4%. Des recherches antérieures indiquent un taux de rétention d'un an de 50% chez 851 patients à Washington (60), de 56,2% chez 1003 patients en Chine (86), de 32,5% chez 145 patients en France (64), de 74,4% chez 492 patients en Israël et 61,6% de 302 patients à Las Vegas (76). Les taux de rétention sur des périodes prolongées sont préoccupants, avec seulement 38,2% des 1206 patients de New York (59) et 20% des 2 728 patients en Chine

(56) qui étaient toujours en traitement à 36 mois. En ce qui concerne la corrélation entre un traitement à court terme et l'efficacité du traitement, les résultats des différentes études publiées varient beaucoup, voire se contredisent. Simpson et al. (87) rapportent qu'il n'y a pas de différence significative entre les patients traités pendant moins de 90 jours et les patients

Une remarque importante est à considérer dans notre calcul de rétention. Près de 37,6% des patients du programme ont été transférés vers un autre centre du royaume pour relais de traitement et 4,8% des patients ont été transférés vers un centre à l’étranger (France, Italie, Etats-Unis, Norvège). En quittant le programme du SA-HAS, ces patients n’arrêtent pas leur traitement par méthadone puisque la prise en charge est assurée en relais dans un autre centre. Par conséquent, la durée de rétention qui est calculée dans notre étude ne reflète pas la durée totale de traitement par méthadone des patients mais seulement la durée de traitement reçu de manière effective au sein du SA-HAS.

En ce qui concerne les patients perdus de vue, soit 27% de l’ensemble des patients, on peut emmètre l’hypothèse d’une incarcération. Mais ça ne peut plus constituer un motif de sortie du programme puisque le traitement par méthadone est actuellement disponible en milieu carcéral. En effet, 3 patients faisant partie de la file active reçoivent leur traitement au sein de l’établissement pénitencier qui les accueille.

F. Limites de l’étude

Les patients du programme méthadone de SA-HAS constituent un échantillon qui peut ne pas être représentatif de tous les patients traités par méthadone au Maroc. Il faut être prudent quant à la généralisation de nos résultats sur le plan national en raison des environnements réglementaires, des contextes sociaux et économiques des différents centres du pays.

Comme pour tout entretien, le biais du rapport anamnestique existe aussi. Certaines déclarations ont aussi pu être influencées par leur acceptabilité sociale, notamment en raison du caractère illicite des substances consommées et aussi par les difficultés cognitives des usagers. Toutefois, plusieurs publications ont mis en évidence la fiabilité des réponses des usagers de drogues, notamment lorsqu’elles ne s’inscrivaient pas dans un contexte de transaction avec l’enquêteur (89)(90).

On note que certaines données manquaient chez quelques patients. Il est possible que des données plus complètes altèrent les résultats de l’étude, bien que ceux-ci puissent également être renforcés. Les analyses rétrospectives telles que celles conduites par cette étude, sont utiles pour obtenir des informations sur un grand nombre de cas de manière relativement rapide et économique, mais devraient être suivies d'études longitudinales prospectives, comprenant des entretiens avec des patients et le personnel, pour examiner les résultats de manière plus détaillée.

PARTIE VII – Limites