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Données pluviométriques

Dans le document Eléments d'analyse sur les crues éclair (Page 50-55)

2.4 Synthèse

3.1.1 Données pluviométriques

La densité du réseau pluviométrique français, essentiellement géré par Météo France, est d'environ 1 poste pour 100 km2, soit plus de 5000 appareils de mesure répartis sur le terri-

toire national. Comme l'illustre le tableau 3.1, une telle densité de postes permet d'obtenir des estimations acceptables de cumuls pluviométriques journaliers sur des surfaces de 100 km2 et plus. Pour mémoire, le tableau 3.1 présente des ordres de grandeur établis à par- tir des corrélations spatiales observées entre les mesures des postes pluviométriques. La distance de décorrélation pour les cumuls journaliers est de l'ordre de 15 à 20 kilomètres (Thauvin, 2001). Les corrélations spatiales apparaissent assez comparables en climats océa- nique et méditerranéen (Gaume et al., 2000b; Roux, 1996).

Toutefois, les postes pluviométriques automatiques permettant la mesure de cumuls de pluies sur des durées inférieures à la journée (heure voire quelques minutes) sont nettement

supercie (km2)

Durée (h) 5 50 500 24 1 1 2

6 2 2 3 1 2 3 5

Tab. 3.1  Nombre de postes d'un réseau pluviographique permettant une estimation de lame d'eau d'une précision moyenne de 20 à 50 % (Andrieu et al., 1992)

moins nombreux, alors même qu'une densité supérieure serait nécessaire pour pouvoir caractériser la répartition spatiale des pluies à ces échelles de temps. A titre d'exemple, seuls dix postes pluviographiques à augets basculants étaient disponibles dont 5 dans la zone touchée par les pluies intenses (2200 km2) lors des crues de l'Aude de 1999 : soit

1 poste pour 400 km2. Les seuls enregistrements pluviographiques existants dans le cas

de la crue de l'Herbasse (Drôme, 1999) ou de Nîmes (1988) se trouvaient en bordure du secteur touché par les fortes pluies. De même, aucun poste n'a enregistré le hyétogramme au niveau de l'épicentre des pluies dans le cas de la crue de l'Avène (Gard, 1997) ou de l'Ouvèze (1992).

La densication du réseau pluviographique n'est matériellement pas envisageable, et le RADAR météorologique s'est progressivement imposé comme un outil complémentaire indispensable pour l'observation des épisodes pluvieux, en particulier orageux (Andrieu et al., 1992). Le réseau actuel permet de couvrir une bonne partie du territoire national. Il s'agit cependant d'une mesure indirecte, basée sur la rétrodiusion par les gouttelettes de pluie des ondes électromagnétiques émises par le RADAR. La réectivité - proportion de l'énergie rétrodiusée notée Z (en mm6/m3) - est liée à l'intensité de la pluie R (en

mm/h) par des relations semi-empiriques du type Z = ARb, la relation de Marshall-Palmer

(Z = 200R1.6) étant la plus utilisée. La mesure RADAR est soumise à de nombreuses

sources d'erreurs : échos de sol, eet de bande brillante lorsque des cristaux de glace sont présents dans les nuages, variation verticale de la réectivité ... D'autre part, la relation Z- R varie d'un événement pluvieux à l'autre en fonction, en particulier, de la distribution des tailles de gouttes de pluies et de leurs vitesses de chute (Wilson & Brandes, 1979). Jusqu'à présent, les données RADAR ont essentiellement fait l'objet d'une utilisation qualitative en France : repérage et suivi du développement et du déplacement des cellules pluvieuses intenses par les prévisionnistes de Météo France.

Pour une exploitation quantitative, les images RADAR doivent être calées à partir des mesures pluviographiques disponibles. La pratique la plus courante consiste à appliquer un facteur de correction aux intensités calculées en utilisant la formule de Marshall-Palmer -

3.1 Collecte et critique des données 51 facteur de calibration - sur tout ou partie de l'image et de l'événement pluvieux. Les tech- niques de correction et de calage des images RADAR font encore l'objet de nombreuses recherches (Andrieu et al., 1997; Creutin et al., 1997). La qualité des estimations de lames d'eau à partir d'images calibrées apparaît extrêment variable en fonction du site étudié (dis- tance par rapport au RADAR, présence de reliefs), de l'événement pluvieux (atténuation, bande brillante) et du type de RADAR et de la technique de mesure (angle de tir, longueur d'onde utilisée). Ces valeurs estimées doivent faire l'objet d'une critique soigneuse. Dans l'ensemble des études de cas présentées dans le chapitre suivant, nous avons fait le choix de nous limiter au calcul d'un facteur de calibration moyen valable pour l'ensemble de l'événement pluvieux et de la zone étudiée. L'expérience montre en eet qu'un ajustement plus poussé entre image RADAR et mesures pluviographiques ne conduit généralement pas à une estimation plus précise des lames d'eau, voire peut dégrader l'information RADAR (Wilson & Brandes, 1979). Les données RADAR ainsi ajustées, ont ensuite été critiquées. Nous en donnons ici quelques exemples.

Dans le cas des crues de l'Aude de 1999, l'application de la formule Marshall-Palmer aux réectivités mesurées par le RADAR en bande C situé à Toulouse conduit à sous- estimer le cumul de pluie durant la période intense (1800 UTC à 0300 UTC) d'un facteur approximativement égal à 4. Ce facteur semble relativement constant sur l'ensemble de la région, excepté dans le secteur de la Montagne Noire (nord du département de l'Aude) où il est signicativement plus faible.

Comme l'illustre la gure 3.1, la comparaison des hyétogrammes mesurés et estimés à partir des données RADAR laisse apparaître quelques divergences. Les mesures RADAR calées à partir des cumuls pluviométriques de l'épisode intense du 12 novembre 1999 au soir sous-estiment les intensités pluvieuses de la première partie de la journée dans le sud du département de l'Aude. Ce pourrait être dû à la présence, durant cette période, de nuages entre le RADAR de Toulouse et le secteur étudié, conduisant à une forte atténuation des ondes émises et rétrodiusées.

Ce problème ne semble pas se poser dans le nord du département de l'Aude (cf. gure 3.2). Malgré la bonne adéquation entre les hyétogrammes mesurés et estimés à Caunes en Miner- vois, les lames d'eau estimées à partir des réectivités RADAR dans le nord du département de l'Aude apparaissent cependant douteuses. Le facteur de calibration est nettement plus faible que dans le reste du département et semble géographiquement très variable dans ce secteur. Les images RADAR ne rendent pas compte de la très grande hétérogénéité spatiale des pluies dont témoignent les estimations de débits de pointe de crue. Enn, les tentatives

Fig. 3.1  Comparaison des intensités de pluie mesurées au pas de temps de 5 minutes par le pluviographe de Tautavel (sud du département de l'Aude) et estimées à partir des images du RADAR de Toulouse : facteur de calibration de 4.

Fig. 3.2  Comparaison des intensités de pluie mesurées au pas de temps de 5 minutes par le pluviographe de Caunes (nord du département de l'Aude) et estimées à partir des images du RADAR de Toulouse : facteur de calibration de 3.

3.1 Collecte et critique des données 53 de simulations hydrologiques basées sur les lames d'eau RADAR calées ne permettent pas, avec des hypothèses réalistes, de reproduire les hydrogrammes mesurés disponibles sur ce secteur (cf. gure 3.3).

Fig. 3.3  Comparaison entre l'hydrogramme de la crue de novembre 1999 mesuré à Malves en Minervois sur la Clamoux et un hydrogramme simulé par un modèle pluie débit alimenté par les données RADAR calibrées

La comparaison des hydrogrammes mesurés et simulés sur la Clamoux suggère par exemple, soit que le coecient moyen d'écoulement sur le bassin versant était plus faible durant la seconde averse intense, ce qui semble irréaliste, soit qu'un coecient de calibration unique ne peut être retenu pour l'ensemble de l'événement pluvieux.

La mise en place d'un réseau de RADAR météorologiques représente indiscutablement un progrès majeur pour le suivi et la connaissance des épisodes orageux intenses et des crues qu'ils génèrent. Malgré les progrès réalisés, l'exploitation quantitative des données RADAR reste problématique. Compte tenu de la densité insusante des réseaux pluviographiques et des imperfections de la mesure de pluie par RADAR, les estimations de lames d'eau à petites échelles d'espace et de temps restent imprécises, et constituent, encore aujourd'hui, une source importante d'incertitude pour l'étude des crues éclair.

Dans le document Eléments d'analyse sur les crues éclair (Page 50-55)