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Chapitre 2 Données, modèles et méthodes statistiques

1.1. Données de neige

omme nous l’avons vu au chapitre 1 (section 2.3), l'étude du manteau neigeux pose plusieurs questions: quelle est l'étendue de la couverture de neige, quelle est sa hauteur (et donc sa capacité isolante), et quelle est la masse de neige contenue à l'intérieur? La connaissance de ces différents paramètres est nécessaire pour avoir une idée précise des effets locaux de la neige sur le bilan d’énergie.

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Récemment, Ge et Gong (2008) ont étudié la relation entre couverture et hauteur de neige sur l'Amérique du Nord. Ils montrent que ces deux variables évoluent linéairement au niveau de la limite sud du manteau neigeux, en particulier en automne et au printemps quand les précipitations et l'ablation affectent les deux paramètres. Par contre, plus au nord de cette zone de transition, la corrélation entre couverture et quantité de neige est assez faible (cf figure 1).

Pour étudier l'effet de la neige sur le climat, il ne suffit donc pas de regarder la variabilité de l'étendue du manteau neigeux mais également la quantité de neige qu'il contient. La plupart des études actuelles sont basées sur des données satellites de couverture, et il existe une réelle nécessité de produits satisfaisants de quantité en eau de la neige. Dans le cadre de cette thèse, nous aurons besoin d'informations sur le manteau neigeux à grande échelle et sur des périodes de temps assez longues, à la fois pour valider notre modèle et pour réaliser des études statistiques robustes. Au vu des produits d'enneigement disponibles, nous allons voir que ces exigences constituent une des limites de notre étude.

Les données de neige se répartissent en deux catégories: les données in situ, c'est à dire les mesures au sol relevées au niveau des stations météorologiques et/ou nivologiques, et les données

Chapitre 2. Données, modèles et méthodes statistiques

satellites plus récentes. Nous décrirons dans cette section celles que nous avons utilisées durant cette thèse, et en présenterons brièvement d'autres. Pour plus d’informations, une liste assez exhaustive des jeux de données existant pour la neige, mais également pour les différents composantes de la cryosphère, est disponible sur le site du laboratoire américain NSIDC (National Sea et Ice Data Center, http://nsidc.org/).

1.1.1. Données in situ

La forte influence de la neige sur l'environnement et les écosystèmes a conduit depuis longtemps les hommes à effectuer des mesures de neige. Les premières traces de tels relevés nous viennent de Chine et datent du premier millénaire. Avant 1800, on ne trouve que quelques mesures systématiques, principalement concernant le nombre de jours par mois avec des chutes de neige, ainsi que les premiers et derniers jours avec de la neige au sol. Par la suite, des mesures régulières de hauteur du manteau ont été effectuées, notamment au niveau des stations météorologiques des pays soumis à une couverture de neige saisonnière. Les observations systématiques d'équivalent en eau de la neige sont plus rares et ne sont apparues que depuis quelques décennies. La distribution de ces mesures in situ a eu tendance à suivre la répartition de la population, et on trouve peu de données dans les régions montagneuses et isolées. Des jeux de données assez denses existent dans des pays tels que la Suisse (Beniston 1997), les États-Unis (Easterling et al. 1999), la Finlande (Kuusisto 1984) ou encore l'ex-URSS (Armstrong 2001). En général, le nombre de stations reportant l'information hauteur de neige a augmenté au cours du XXème siècle, mais a malheureusement diminué dans les années 80 et 90 du fait de restrictions

budgétaires. Le regain d'intérêt pour les problèmes climatiques augure de jours meilleurs concernant la disponibilité de jeux de données in situ d'enneigement, mais à l'heure actuelle ils restent limités spatialement et/ou temporellement.

Figure 1. Corrélations en point de grille entre les fractions de neige et les masses de neige au mois de février. D'après Ge et Gong (2008).

1. Observations et réanalyses

(USAF/ETAC), documentée par Foster et Davy (1988), est le seul produit fournissant des données de profondeur de neige à l'échelle globale. Ce jeu de données est basé sur des relevés stations couvrant les mois de septembre à juin. Il indique la climatologie de la neige pour un cycle annuel, et ne donne aucune information sur la variabilité interannuelle. Il est couramment utilisé pour valider les profondeurs de neige simulées par les modèles de climat. Récemment, ce produit a été critiqué (Brown et Frei 2007) car il sous-estime les profondeurs de neige au printemps et ne serait donc pas valable pour estimer le réalisme des modèles en cette saison. Un autre jeu de données de hauteur de neige sur l'Amérique du Nord a donc été proposé par Brown et al. (2003). Ce produit est construit en intégrant les données de 8000 stations dans un modèle du Canadian Meteorological Center (CMC) pour reconstruire une réanalyse couvrant toute l'Amérique du Nord. Malheureusement, l'équivalent d'un tel jeu de données n'existe pas sur l'Eurasie. Ces données seront donc seulement utilisées pour vérifier la cohérence des données USAF sur l'Amérique du Nord.

Historical Soviet Daily Snow Depth version II (HSDSD II)

Le produit HSDSD II regroupe les relevés quotidiens de 284 stations de neige de la World Meteorological Organization (WMO), réparties sur une bonne partie de l'ex-URSS (Armstrong 2001). En plus des hauteurs, la couverture ainsi que certaines caractéristiques de la neige et du site de mesure sont indiquées. Les données ont été soumises à un contrôle qualité par le NSIDC pour éviter les inconsistances. Elles sont disponibles de 1881 à 1995, avec cependant de fortes hétérogénéités dans le nombre de stations, leur nombre ayant augmenté au cours du temps et décru à la suite de la chute du régime soviétique (figure 2). Il faut donc utiliser ce jeu de données avec précaution en prenant garde à l'homogénéité des observations. La plupart des études ne prennent en compte que la partie 1936-1995 pour laquelle le nombre de stations est suffisant. Nous utiliserons principalement la période 1951-1995 pour laquelle le nombre de valeurs manquantes et l'homogénéité des stations nous paraissent réellement satisfaisants. Ces données ont été interpolées sur une grille 1°x1° en moyennant les stations contenues dans un pixel (au maximum deux stations, la plupart du temps une seule). Les moyennes mensuelles ont ensuite été calculées en ne considérant que les mois pour lesquels au moins 15 jours de données sont disponibles.

Chapitre 2. Données, modèles et méthodes statistiques

1.1.2. Données satellites

Depuis les années 60 et les progrès de la télédétection, plusieurs produits de paramètres neigeux sont disponibles à l'échelle globale et régionale.

Étendues de neige du NSIDC

Le principal produit de couverture de neige de l'hémisphère Nord est issu des données de radiomètres dans le visible fournies par la NOAA/NESDIS (National Oceanic et Atmospheric Administration/National Environmental Satellite Data et Information Service). La dernière version est téléchargeable sur le site du NSIDC (produit « Northern Hemisphere EASE-Grid Weekly Snow Cover et Sea Ice Extent Version 3 », Armstrong et Brodzik 2005). Les valeurs hebdomadaires de couverture de neige de la NOAA courent d'octobre 1966 à juin 2007. Avant 1972, la résolution des satellites météorologiques utilisés était d'environ 4 km. Le VHRR (Very High Resolution Radiometer) fournit depuis Octobre 1972 des images plus précises, avec une résolution spatiale de 1 km. Depuis novembre 1978 les données sont fournies par le AVHRR (Advanced Very High Resolution Radiometer) qui a une résolution légèrement inférieure de 1.1 km. Initialement, ses images étaient interprétées manuellement par des météorologues d'expérience pour tracer la limite de la couverture de neige. Depuis la fin des années 90, ce processus est automatisé (Helfrich et al. 2007). Ces cartes sont ensuite vérifiées par le Global Snow Lab de l'université de Rutgers avant d'être reportées sur une grille de résolution 25 km. Si au moins 50% d'un pixel est recouvert de neige, celui-ci est mis à 1, à 0 autrement.

Les limitations de ces données concernent les régions à forte nébulosité, à faible rayonnement solaire, ainsi que les forêts qui masquent la neige sur le sol. Elles sont notamment peu fiables sur le plateau tibétain. De plus, les années 1966-1971 sont sujettes à caution du fait de certaines données manquantes en automne, de la résolution plus faible des satellites et de la moindre expérience des spécialistes de la NOAA dans la cartographie de la neige. La version 3 que nous utilisons a toutefois été corrigée de certains défauts sur cette période (Armstrong et Brodzik 2005). Nous utiliserons donc la période 1972-2006 pour les analyses utilisant la neige d'automne, et la période 1967-2006 pour les autres saisons. Ces données ont été moyennées mensuellement et interpolées sur la grille du modèle. D'autres produits de couverture de neige existent mais couvrent des périodes trop courtes pour des études climatiques (Zhao et Fernandes 2009).

Données micro-ondes

Les données micro-ondes constituent un outil intéressant pour compléter les données d'étendue de neige. En effet, le rayonnement micro-onde n'est pas perturbé par la présence de nuages, fournit des données dans l'obscurité et permet d'estimer la quantité de neige au sol (Armstrong et Brun 2008). Cependant, des problèmes divers demeurent et limitent l'utilisation de ces données (Foster et al. 2005). De plus, elles ne sont disponibles globalement que depuis 1978, ce qui limite leur utilisation pour étudier la variabilité interannuelle du climat de façon robuste. Nous ne les utiliserons donc pas dans le cadre de cette thèse.

1. Observations et réanalyses

rappelée vers la climatologie USAF, avec seulement quelques données stations assimilées (Drusch et al. 2004). Si ce type de données globales d'équivalent en eau de la neige constitue indéniablement l'avenir, elles sont à l'heure actuelle trop limitées temporellement pour des études climatiques.