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LISTE D’ ABBRÉVIATIONS

I.1. Effets chimiques et biologiques des radiations ionisantes 1 Effets chimiques des radiations ionisantes

I.1.2.4. Les dommages multiples localisés

En plus des lésions simples comme les CSBs et les dommages aux bases isolées purines et pyrimidine, les RI sont capables d’induire aussi des dommages multiples localisés (LMDS= Locally multiply damaged site). En 1987, John Ward est le premier qui a introduit le concept de dommages multiples (Ward et al., 1987). Ward définit les LMDS comme deux ou plusieurs lésions formées sur un ou deux pas d’hélice de l’ADN le long de la trajectoire d’une seule particule ionisante (Ward, 1994, Goodhead, 1994b). Il y a différents types de LMDS: les dommages multiples incluant des CDBs (Schema 1) et d’autres n’incluant pas de CDBs (Schema 2) (Eccles et al., 2011). Pour ces deux types de dommages, il y a les dommages multiples simples ou complexes et on parle de lésions simples lorsqu’il y a seulement deux lésions situées sur les deux brins d’ADN et de lésions complexes lorsque plusieurs dommages (<2) sont situés sur les deux brins d’ADN (Nikjoo et al., 2001, Datta et al., 2005). On parle de lésion en tandem lorsque les deux bases oxydées par exemple sont adjacentes (Eccles et al., 2011). L’un des mécanismes réactionnels proposé pour ce dernier type de dommage est le suivant, un radical attaque une base, il peut induire un dommage simple et peut former aussi un radical intermédiaire (radical peroxyle) qui est capable d’attaquer une autre base adjacente (In et al., 2007).

INTRODUCTION

Schémas 1 et 2: les lésions multiples simples et complexes.

Il est difficile de caractériser les dommages multiples en irradiant des cellules à cause de la complexité des dommages induits à l’ADN par les RI et de la variété de protéines qui sont impliquées dans l’initiation de la réparation (Sage & Harrison, 2011).

Il est aussi difficile de déterminer comment chaque lésion est réparée et si la réparation d’une lésion est prévenue et de montrer comment elle a été inhibée (Sage &

Harrison, 2011). Pour surmonter toutes ces difficultés, les chercheurs ont utilisé des oligonucluéotides ou des plasmides sur lesquelles ont été synthétisées des lésions simples ou complexes en utilisant des enzymes de réparation d’origine mammifères ou bactériennes (Sutherland et al., 2003, Barnes & Lindahl, 2004). Différentes méthodes ont été utilisées pour la détection des dommages multiples localisés, comme par exemple la chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse pour détecter les guanines adjacentes oxydées et les dérivés formamide des pyrimidine dans l’ADN de thymus de veau irradié avec rayonnement X (Box et al., 1995, Douki et al., 2002), l’électrophorèse sur gel d’agarose combiné avec un traitement enzymatique (Georgakilas et al., 2004) et aussi le test des Comètes qui a été adapté pour mesurer les dommages multiples oxydatifs (Blaisdell & Wallace, 2001). En utilisant des bactéries E. coli, des études in vitro ont démontré que les lésions en tandem sont difficiles à réparer et une de ces deux lésions peut inhiber la réparation d’une autre (Imoto et al., 2008). En effet, la présence de thymine glycol 3 ou tetrahydrofurane en tandem avec un site abasique (AP) peut inhiber l'enzyme endonucléase IV- AP de couper au niveau de site AP et l’endonucléase III de couper au niveau de thymine glycol chez E. coli. Par contre, l’endonucléase AP de cellules des mammifères est capable de couper au niveau de site AP (Tableau 1) (Imoto et al., 2008).

Tableau 1: Réparation de dommages multiples localisés de l’ADN: lésion en Tandem.

Dommage Cellule de mammifère E.coli

-Thymine glycol 3-AP site -Tetrahydrofuran-AP site. AP endonucléase (APE1) + (clivage AP site) Endonucléase IV - (clivage AP site) Endonucléase III - (clivage thymine glycol) UvrABC (NER) + 8-oxo-purine >40% ADN N-glycosylases -

8-oxoG-formylamine formamidopyrimidine ADN N-glycosylase (Fpg) -8-oxoG + -Formylamine +/-

INTRODUCTION Une partie des 8-oxo-purines forment des lésions en tandem et plus que 40 % de ces dommages ne peuvent pas être réparés par la N-glycosylases. Par exemple, une 8-oxo-G qui se trouve en tandem avec une formylamine; la 8-oxo-G ne peut être réparée par la formamidopyrimidine N glycosylase (Fpg) et la formylamine est plus ou moins réparée par cette enzyme (Imoto et al., 2008).

Lorsque la 8-oxo-G se trouve en tandem avec la lésion formylamine, ≈ 70% de ces 8-oxo-G ne vont être pas réparées mais elles vont être présentes pendant la réplication de l’ADN (Box et al., 2000). Aussi, ≈ 45% de la formylamine vont être introduit pendant la réplication par insertion d’une adenine en face de cette lésion. Il est connu que la formylamine est très mutagène quand elle est formée à partir de l’oxydation d’une cytosine (Box et al., 2000). L’insertion de lésion en tandem pendant la réplication diminue de 17% lorsqu’une adenine est insérée en face d’une formylamine et une cytosine en face d’une 8- oxo-G (Box et al., 2000).

Chez les cellules déficientes en système de réparation par jonction des extrémités non- homologue (JENH), ≈ 10% de lésions multiples n’incluant pas de CDBs induites par l’irradiation γ sont transformées en CDBs après 30 min (Gulston et al., 2004). L’augmentation de létalité, mutagénicité et les CDBs au niveau de cellules irradiées peuvent être à l’origine de l’hyper-expression des enzymes de réparation comme hNTH1 (human endonuclease III) et hOGG1 (human 8-oxoguanine DNA N-glycosylase 1) (Yang et al., 2004). L’hyper-expression de hOGG1 est à l’origine de l’augmentation de mutation Hprt (Paul et al., 2006).

La létalité et la mutagénicité des dommages complexes peuvent aussi être expliquées par l’inhibition de la réparation d’une lésion par la présence d’une autre (lésion en tandem) (Lomax et al., 2004). Comme par exemple la réparation d’un site AP ou une CSB peut être difficile ou même inhibée par la présence d’une base endommagée qui se trouve à 5 pb de ces deux lésions. Encore, la nature de la lésion de base peut influer la réparation de ces deux lésions. Comme par exemple, la 8-oxo-G et le glycol de thymine sont responsables de la réduction 2 à 8 fois de l’efficacité de la réparation des CSBs qui se trouvent sur le brin opposé de l’ADN (Lomax et al., 2004). Aussi, le résidu glycol de thymine inhibe l’activité de polymérase. Quand les lésions complexes incluent une base oxydée et un site AP sur un brin et une CSB sur le brin opposé, elles se trouvent en orientation négative ; ces deux

lésions sont ainsi initiées davantage avec le système de réparation d’excision de base (BER) short patch, alors que si ces lésions complexes sont en orientation positive, la réparation de site AP/CSB est initiée par les deux voies «long» et «short» patch BER (Lomax et al., 2004).

I. 2. Les dommages à l’ADN induit par les électrons de basse énergie

L’interaction des RI avec un milieu biologique, comme les cellules, produit des électrons secondaires (ESs), dont les plus abondants sont des électrons de basse énergie (EBEs). La plupart des électrons secondaires qui sont créés le long de la trace (4 x 104/MeV) ont une énergie inférieure à 30 eV (Kaplan & Miterev, 1985, Pimblott & LaVerne, 2007, Scifoni et al., 2010). Plusieurs études ont pu démontrer que les EBEs sont capables d’induire des dommages à l’ADN, surtout des CSBs et CDBs (Figure 2) (Barrios et al., 2002, Huels et al., 2003, Pimblott & LaVerne, 2007, Ptasinska & Sanche, 2007, Sanche, 2009,). En plus de l’induction des cassures, les EBEs peuvent aussi générer des dommages aux bases de l’ADN (Abdoul-Carime et al., 2001, Pan et al., 2003, Abdoul-Carime & Sanche, 2004) et même la perte de base et donc la formation de site AP (Sanche, 2009). Les CSBs peuvent être induites par des EBEs ayant des énergies de 0-10 eV, tandis que les CDBs peuvent être induites par des EBEs ayant des énergies de 5-10 eV. Ces énergies sont plus basses que celle du seuil d'ionisation de l'ADN (Figure 2). Ces résultats sont expliqués par un attachement de l'électron incident sur les différents composants de l'ADN (phosphate, sucre, base ou H2O) qui conduit à la formation d'un état d'anion moléculaire transitoire de courte

durée de vie, ce qu’on appelle résonance (Schulz, 1973). Malgré les grands progrès dans la compréhension de l’effet de RI sur la matière biologique, le rôle des ESs dans la létalité cellulaire est encore mal connu. La question qui a été posée au début de ce projet est celle- ci, est-ce que ces ESs, et plus particulièrement les EBEs, sont capables d’induire la létalité cellulaire comme les radicaux hydroxyles générés par l’effet indirect de l’RI de la radiolyse de l’eau? Si elles sont capables d’induire la létalité cellulaire, quels sont les mécanismes responsables de cette létalité?

INTRODUCTION

Figure 2: Les symboles ouverts et solides sont les rendements quantiques mesurés (événements/ électron incident) pour l'induction respectivement des CSBs (a) et CDBs (b) de l’ADN (Huels et al., 2003). Figure reproduite avec la permission d’American Chemical

Society Publications.