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B. Réduction du bruit du capteur

3. Domaines de prédominance de bruit

La Figure II-2 présente les domaines de prédominance de bruit pour les deux types de matériaux, d’après le modèle de boucle circulaire placée à la surface d’un échantillon conducteur semi-infini de résistivité égale à la résistivité moyenne des tissus (ρ ≈ 0.66-1 m/S).

Figure II-2 : Domaines de bruit, figure tirée de [36]

Le modèle de boucle circulaire placée à la surface d’un échantillon conducteur semi-infini permet de tracer le lieu d’égalité des bruits de l’antenne (RATA) et de l’échantillon (RETE), localisant ainsi la frontière des domaines de prédominance de bruit en coordonnées de fréquence et de taille d’antenne, pour le cuivre et l’YBaCuO. Chaque courbe sépare ainsi deux domaines de bruit qui correspondent au cas particulier considéré : température donnée, avec ou sans effet de B0. Un désalignement d’angle de 5° a été supposé pour le tracé de l’antenne HTS placée dans le champ B0.

Dans le domaine de prédominance du bruit de l’antenne (partie inférieure gauche), le RSB peut être amélioré en utilisant un meilleur conducteur ou en refroidissant l’antenne. A l’inverse, lorsque le bruit de l’échantillon est dominant (partie supérieure droite) la limite du RSB intrinsèque est atteinte ; c'est-à-dire que l’antenne est optimisée.

Ce graphe illustre de façon particulièrement synthétique les avantages potentiels de l’utilisation d’une antenne supraconductrice pour des applications biomédicales. Pour chaque matériau, le bon domaine de bruit (i.e. le domaine où le RSB intrinsèque est atteint) est matérialisé par la partie supérieure droite de la courbe correspondante. Lorsqu’on diminue la fréquence et/ou la taille de l’antenne, les pertes de l’antenne augmentent de façon relative jusqu’à égaler les pertes de l’échantillon. Il devient alors intéressant d’améliorer la qualité de l’antenne. En particulier, les deux courbes Cuivre @293 K et Supra @77 K avec B0 permettent

de visualiser en coordonnées de fréquence et de taille d’échantillon, l’étendue du domaine où l’utilisation d’une antenne supraconductrice refroidie est avantageuse. En effet, dans la région située entre ces deux courbes, les pertes du cuivre dépassent les pertes induites par l’échantillon

alors que celles de l’YBaCuO leur sont inférieures. Pour un champ magnétique donné (en abscisse), on compare l’intensité des pertes pour les deux matériaux, en fonction de la taille de l’antenne (en ordonnée). Il apparaît ainsi de façon claire s’il y a un intérêt, pour une application particulière, à refroidir le cuivre ou à utiliser une antenne HTS en YBaCuO. En particulier, à 1,5 T (64 MHz) l’utilisation une antenne HTS est particulièrement intéressante tant que son rayon reste inférieur à environ 1 cm.

En général, les antennes HTS sont donc plus intéressantes à bas champ, lorsque les pertes de l’échantillon sont faibles (et donc les pertes de l’antenne d’autant plus critiques !). A l’inverse vers les hauts champs, les pertes des tissus augmentent avec B0, et selon l’application, une antenne conventionnelle en cuivre peut alors devenir suffisante pour assurer une bonne détection. Par ailleurs, les pertes supraconductrices augmentent plus vite que les pertes du cuivre ce qui tend également à limiter l’intérêt des antennes supraconductrice plus on monte en champ.

On remarque cependant que le modèle utilisé maximise les pertes magnétiques couplées à l’échantillon. En pratique, l’échantillon n’est pas semi-infini et ses pertes sont donc réduites, ce qui accroît de façon relative les pertes de l’antenne qu’il faut diminuer d’autant plus pour atteindre le RSB intrinsèque. Par ailleurs, dans le cas d’une antenne de surface idéale (sans perte) de taille fixe, le RSB intrinsèque n’est pas maximal à toutes les profondeurs d’observation lorsque l’antenne est placée contre l’échantillon. Pour les profondeurs supérieures à a× 5, un meilleur RSB peut être obtenu en diminuant le couplage magnétique entre l’antenne et l’échantillon, afin de limiter le bruit induit [78,79]. Pour autant les pertes de l’échantillon diminuant vite lorsqu’on éloigne l’antenne, elles ne restent pas longtemps dominantes lorsqu’une antenne réelle est utilisée. Pour une antenne donnée, les meilleures conditions de couplage magnétique sont donc en général les plus fortes, sauf dans le cas particulier d’antennes en cuivre refroidi ou en matériau supraconducteur. Cet aspect tend également à favoriser le cuivre par rapport au matériau supraconducteur dans la configuration étudiée ici. Le gain attendu par l’utilisation d’un matériau supraconducteur par rapport au cuivre sera donc en général plus grand que ce que suggère le graphe.

En pratique, à taille et géométrie d’antenne constante, on peut comparer l’intensité des pertes par de simples mesures de facteurs de qualité. Ainsi, à partir d’une réplique en cuivre d’une antenne HTS, on peut quantifier précisément le gain apporté par l’utilisation du matériau supraconducteur. Enfin, la mesure du facteur de qualité en charge permet d’extraire les pertes qui proviennent de l’échantillon. A titre d’exemple, si le facteur de qualité d’une antenne est

divisé par deux lorsqu’elle est couplée à l’échantillon, les pertes sont doublées. C'est-à-dire que la résistance de pertes liée à l’échantillon est égale à celle des pertes propres de l’antenne (RA =

RE, cf. Figure II-1). Dans le cas d’une antenne refroidie à 77 K et d’un échantillon à 310 K, la puissance de bruit ajouté par l’antenne est limitée à 25 % de celle issue de l’échantillon, ce qui se traduit en définitive par une dégradation de RSB de seulement 12 % par rapport à la limite intrinsèque.

En conclusion, il est montré clairement que pour des applications d’imagerie périphérique sur le petit animal à 1,5 T, l’utilisation d’une antenne supraconductrice est préconisée. Pour une antenne HTS de 12 mm de diamètre, un gain d’un facteur 10 environ est obtenu sur plusieurs régions anatomiques de la souris [80] par rapport à une antenne de même géométrie en cuivre. En revanche, pour la plupart des applications cliniques standard qui mettent en jeux de relativement grands volumes d’intérêt (imagerie du genou, cérébrale, angiographie…) et pour lesquelles le champ magnétique le plus courant est 1,5 T, il n’y a qu’un intérêt marginal à améliorer l’antenne de détection. L’intérêt sera d’autant plus limité que l’on accroît le champ magnétique.

Pour autant, une des principales motivations historiques pour les applications à haut champ a précisément été d’accroître la sensibilité de détection en rendant le RSB intrinsèque accessible à des détecteurs RF conventionnels [31] alors que les technologies supraconductrices appliquées à l’IRM n’en étaient qu’à leur débuts. Tant que le bruit de l’antenne est dominant on attend une amélioration de RSB en fonction du champ suivant une loi d’échelle en B07/4 ; mais dès que le bruit des tissus devient dominant l’accroissement est simplement linéaire avec B0 (simplement en B01/ 2 si l’on cherche à limiter les artefacts de susceptibilité, voir Chapitre III)

ce qui limite le gain attendu. A la lumière des avancées technologiques contemporaines et dans la mesure où la course au haut champ se heurte par ailleurs à des contraintes limitantes (SAR8, propagation des ondes RF, inhomogénéités, modification du contraste…), il n’est pas certain que les applications actuelles et futures de l’IRM soient développées préférentiellement sur des appareils à haut champ (≥ 3 T). Il convient d’étudier chaque application au cas par cas en intégrant le fait qu’il soit aujourd’hui possible de repousser les limites de la détection RF en utilisant des matériaux supraconducteurs.

8 Le SAR (pour Specific Absorption Rate) représente la quantité d’énergie dissipée dans l’échantillon. Par soucis de sécurité, il est bien évidemment limité pour les applications de l’IRM in vivo. L’augmentation du champ magnétique nécessite un SAR plus élevé en raison de la fréquence plus grande des ondes RF utilisées.

C. Conception et mise en œuvre des antennes HTS