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3 Démarche et méthode

4.1 Thèmes et mesures prioritaires spécifiques aux migrants

4.1.5 Domaine de la formation

Pour l’ensemble des domaines abordés, les mesures consensuelles proposent l’utilisation d’interprètes et de médiateurs interculturels. Pour réaliser ces mesures, les participants sont de l’opinion unanime qu’il faut commencer par développer une formation pour les interprètes et les médiateurs interculturels. De plus, il existe un

56 Moyenne des réponses au deuxième tour par rapport au classement des thèmes prioritaires est de 1,94 et 1,77 concernant les mesures.

consensus entre les participants pour que la formation vise aussi les soignants, comme de manière générale, les professions en contact avec des personnes issues d’une migration. Les explications relatives à ce consensus sont à chercher dans la nécessité de favoriser l’accès au système de santé pour les migrants. Dans cette conception, les besoins spécifiques de santé des migrants, comme des personnes de couches sociales défavorisées, relèvent avant tout des difficultés d’accès au système de prestations sanitaires et sociales. Dans ce contexte, la communication représente un élément clé. Concrètement, l’amélioration de la communication, notamment entre patients qui ne parlent pas (encore) la langue locale et soignants, permettrait à ces derniers de poser un meilleur diagnostic surtout durant l’anamnèse. Cela favoriserait également le sentiment de compliance57 et servirait à un meilleur échange d’informations. Les conséquences évoquées durant cette étude qui justifieraient une telle mesure sont une meilleure qualité des soins et par conséquent une diminution des coûts, pour l’ensemble du système sanitaire, dus à des erreurs de diagnostic, des investigations inutiles, etc. Une meilleure communication faciliterait donc l’accès au système de prestation et améliorerait la qualité et l’efficacité des soins, mais surtout elle représenterait un des élément capital pour la prévention et la promotion de la santé.

La formation d’interprètes et de médiateurs interculturels revêt de plus l’avantage d’être une solution rapidement opérationnelle et peu contraignante, car elle ne remet pas en question le système en place (par ex. en ce qui concerne la reconnaissance des diplômes étrangers). Cette dernière proposition a été suggérée par certains participants pour limiter les problèmes de communication, de même que l’encouragement à employer des personnes d’origine étrangère, mais n’a pas fait l’objet d’un consensus. On peut en déduire que ce type de mesures (reconnaître des diplômes étrangers, favoriser l’engagement de personnes étrangères) devra à l’avenir être promu de manière pragmatique, parallèlement à la formation et à l’utilisation d’interprètes et de médiateurs interculturels, mais, n’apparaît pas facilement réalisable dans l’immédiat en raison des divergences d’intérêts dans le domaine médical indépendant du champ « migration et santé ».

Les focus groups ont permis de mettre en évidence les catégories d’acteurs visés par une formation « migration et santé », les thèmes, le type de formation, les organisations sur lesquelles pourrait reposer une telle formation, et enfin les employeurs potentiels de ces personnes.

Les interprètes, les médiateurs interculturels et de manière générale, les personnes en contact avec les étrangers (les soignants mais aussi d’autres acteurs cf infra) devraient bénéficier d’une formation sur des thématiques spécifiques et communes dont quelques pistes seront présentées ici. Il s’agirait de fournir des connaissances de base qui pourraient ensuite faire l’objet d’une spécialisation. Les thèmes devraient se centrer sur la communication et les questions relatives à la migration. La structure de la formation devrait être pensée afin d’être accessible aux

57 Le sentiment d’avoir été bien compris par la personne traitante.

migrants (reconnaissance de leurs diplômes), d’être décentralisée pour toucher un maximum de personnes et d’être flexible (module, en cours d’emploi).

Les interprètes : le but visé par la formation de cette catégorie d’acteurs serait de parvenir à une reconnaissance de la formation suivie et de cette activité en tant que profession. Il faudrait généraliser l’utilisation des interprètes. Dans ce sens, il s’agirait d’établir une formation fondée sur des standards de qualité reconnus au niveau national. Précisons que sous l’impulsion de l’OFSP, depuis 1996, l’association Interpret’ réfléchit à cette question, et a reçu le mandat d’établir des standards de qualité pour cette formation ainsi que de coordonner les projets existants. Il faudrait par conséquent assurer une cohérence et une continuité à ce qui a déjà été mis sur pied.

x Thèmes de la formation : réflexion sur la migration ; système suisse (structure sanitaire, sociale, juridique et politique) ; communication/écoute dans différents contextes ; travail de groupe ; fonctions de l’interprète ; responsabilité et aspects éthiques ; notions et terminologie médicale. (liste non exhaustive).

x Forme : la formation devrait être flexible : un module de base devrait être créé. Il devrait offrir une formation initiale ou une spécialisation.

Les médiateurs interculturels : l’enjeu de cette formation résiderait dans l’incitation au recours à des médiateurs interculturels et dans la décentralisation de l’offre. Il faudrait clarifier leur rôle par rapport à celui des interprètes. Il s’agirait également de baser cette formation sur des standards de qualité reconnus sur le plan national.

x Thèmes de la formation : sur des thèmes et techniques de prévention et de promotion de la santé, sinon plusieurs thèmes ressembleraient à ceux évoqués pour les interprètes.

x Forme : la formation devrait être du même type que celle proposée pour les interprètes.

Les professions en contact avec des migrants : les soignants en premier lieu (médecins généralistes, médecins de famille, spécialistes, infirmières, sages-femmes, etc.) ; les travailleurs sociaux (assistants sociaux, éducateurs, etc.) ; les formateurs d’adultes, les enseignants ; les cadres et les employés d’administrations (du manager en passant par les personnes de l’accueil) ; les policiers ; les bénévoles suisses et étrangers. Il a été souligné qu’il fallait impliquer les décideurs dans la formation, sans quoi le processus risquait d’être bloqué. L’enjeu de cette formation serait de sensibiliser ces personnes à la question migratoire surtout lorsqu’il est question de troubles aussi spécifiques que les traumatismes de guerre et de torture.

Il s’agirait également de les inciter à recourir à des interprètes ou à des médiateurs interculturels.

S’il nous semble actuellement illusoire de proposer une formation sur cette question à toute la population citée, nous retenons de ces opinions la volonté d’une prise en

compte de la situation des migrants de manière transversale, ou du moins non confinée à certains milieux.

x Thème : sensibilisation à la question de la migration et à la diversité culturelle ; connaissances de base sur la politique migratoire et la politique d’intégration ; communication et travail de groupe (si un interprète fait partie de l’entretien) ; thèmes spécifiques pour les soignants : anamnèse en prenant compte du contexte migratoire et social ; représentation du corps ; diagnostic précoce, etc.

x Forme : cette formation devrait être flexible et peu contraignante dans un premier temps. Les ONG (p. ex : les œuvres d’entraide, les églises) et les écoles d’études sociales et pédagogiques peuvent être des structures susceptibles d’offrir une telle formation. Idéalement, il s’agirait de repenser à plus long terme le cursus scolaire des soignants et d’intégrer cette problématique dans leur formation de base. Dans ce cas, les universités et hautes écoles devraient être mobilisées.

Responsabilité financière et de la mise en œuvre : confédération, institutions de formation, fondation 19, à plus long terme une participation des caisses maladie a été fortement suggérée par les participants aux discussions.