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L’objectif d’un système d’information documentaire est d’assurer la gestion et la communication des informations utiles contenues dans des documents. « Cette gestion implique le repérage et la validation des sources et ressources d'information, la collecte, le traitement, le stockage, la diffusion, ainsi que les moyens de classement et de récupération des documents porteurs d'information en utilisant des outils classiques ou informatisés »1.

1.1.1 Le document : une articulation information/ support

Un document est un « ensemble formé par un support et une information » (ISO TC-46), un

« support porteur d’informations »2. Cette définition est large : elle recouvre une information de différente nature (texte mais aussi son, image fixe, image animée ou multimédia) accessible sous un ou différents supports (papier, numérique, multimédia). Le document traditionnel est inhérent à son aspect matériel, comme « lié» de manière permanente et unique à un support physique. [7]

Anne-Marie Chabin approfondit la définition du document en introduisant la notion d’activité et de cycle de vie. Au cours de son cycle de vie, le document passe par trois statuts qui correspondent à trois intervalles : [2] [3]

1- un statut de production : l’information est élaborée, mise en forme, validée puis diffusée ; 2- un statut de trace : l’information validée par son auteur (et figée) présente un intérêt de preuve, de gestion ou de mémoire ;

3- un statut de source de connaissance : on arrive au stade de l’information.

      

1 BOULOGNE Arlette [et al.], INTD- er. Vocabulaire de la documentation. Paris, ADBS éditions, 2004. 338 p.

Sciences et techniques de l’information. ISSN 1762-8288. ISBN 2-84365-071-2 

2 CACALY Serge, LE COADIC Yves- François, POMART Paul- Dominique, SUTTER Eric. Dictionnaire de l’information. 3e éd. Paris, Armand Colin, 2008. 295 p. ISBN 978-2-200-35132-8 

L’objet soumis à un traitement documentaire pour devenir source de connaissance peut être catégorisé en fonction de :

- la forme des données enregistrées : texte écrit, image, son, données…

- la nature des données : statistiques, références bibliographiques

- du support d’enregistrement : papier, audio-visuel (magnétique, argentique), numérique - la forme éditoriale, liée au mode de production des documents : livre, périodique, compte-rendu, rapport, thèse, brevet, carte, annuaire, répertoire…

- du contenu documentaire : document primaire (document originel/source), secondaire (références bibliographiques, métadonnées), tertiaire (synthèses, bilans…)

- du champ disciplinaire […]

- la source : document interne (compte-rendu, rapport d’activités, étude), administratif (courrier, mél), document externe (littérature éditée, périodiques)…

- du statut : confidentiel (accessible en lecture seule ou aussi en écriture) ou du moment de son cycle de vie (en relecture, validé…). [6]

Tout objet peut devenir un document s’il est considéré du point de vue des informations dont il est porteur : un ticket de métro, un vase, une bouteille identifiée par son étiquette.

Ainsi, les activités d’une institution, ensemble d’actions décomposables en tâches recouvrant différentes opérations, génèrent des documents. Ces documents d’activité sont les produits d’une chaîne de fabrication précédée d’une décision administrative. Ils sont modélisables à l’aide de processus, « ensemble d’activités corrélées ou interactives qui transforme des éléments d’entrée en éléments de sortie »3.

Avec le numérique, le document n’obéit plus à la définition classique imbriquant un support et une information : il évolue et se complexifie. [8]

1.1.2 Évolution et complexification du document

Le document numérique présente trois caractéristiques : [5]

- sa granularité c’est-à-dire sa capacité à être séquencé, coupé, égrainé en unités informationnelles porteuses de sens

- sa plasticité. Cela signifie la capacité du document à changer de forme, « à recomposer des unités informationnelles selon des usages, des besoins, des situations différentes » - sa traçabilité qui répond à l’exigence de la preuve, essentielle à la notion de document Quelles sont les conséquences pour l’objet documentaire ?

Les conséquences sont que l’objet documentaire:

1- se multiplie : le numérique génère de nouveaux objets documentaires qui sont des documents indépendants du support, des objets hybrides, des documents structurés à « la syntaxe utilisable».

Au titre de ces nouveaux objets documentaires, on pourrait d’ailleurs inclure l’internaute. En effet, il documente ses actions, laisse des traces 4 quand il est acteur, génère, met en ligne des contenus (photos, opinions, ou blogs) indexés par les moteurs de recherche. La donnée qu’il produit est comme un tatouage qu’il aura du mal à effacer. S’amorce là un autre débat : celui des enjeux de       

3 ISO 9000 : 2005, article 3.4.1. 

4 Nous faisons ici référence à la métaphore de l’antilope exprimée par Suzanne Briet – théoricienne des sciences de la documentation et une des créatrices de l’INTD- dès 1951. Capturée et enclose dans un zoo, l’antilope change de statut : elle devient un objet d’études, un objet documentaire. 

l’identité numérique. D’après Olivier Ertzscheid, «les réseaux sociaux posent aujourd'hui, au sens propre, la question documentaire appliquée au facteur humain» ; [4]

2- devient accessible à différents niveaux jusqu’à la granule documentaire dont on aura du mal à retrouver la structure d’origine et à rattacher à une unité informative d’ensemble (changement d’échelle) ;

3- se complexifie : le même document (même contenu, même destinataire, même forme) change de présentation et peut être retrouvé sur plusieurs supports.

A chaque intervention de l’auteur ou du lecteur, se met en place une « chaîne de composition décomposition recomposition de l’information» [4].

Quelles conséquences l’introduction des flux électroniques a-t-elle pour la gestion d’un fonds de bibliothèque?

1.1.2.1 Flux électroniques versus monographie ?

Les collections détenues par les institutions patrimoniales sont des ensembles d’objets manipulables et descriptifs. Dans les bibliothèques par exemple, c’est l’achevé d’imprimer qui clôture un état du savoir et permet sa description. Comment peut-elle passer de « l’ensemble stable et organisé d’objets finis » [1] au traitement de ces nouveaux objets de collection que sont les documents électroniques ? En fait, la bibliothèque gère depuis toujours des ressources continues. En effet, les périodiques - les "on going publications"- ont un caractère inachevé et évolutif qui les rapproche des caractéristiques des ressources électroniques.

D’après Bertrand Calenge, une autre distinction serait plus opportune, fondée sur la nature des supports (et non plus sur le support):

- le "support de type monographique" (daté et achevé) regroupant les livres mais aussi les images numériques de livres

- le "support de type périodique", en construction continue : périodiques imprimés mais aussi sites web et ressources en ligne. [1]

Cette différenciation support de type monographique / périodique nous a semblé pertinente à définir. En effet, cette réflexion sera utile lors l’application du modèle FRBR aux documents d’activité de l’IIPE.

Quels sont les enjeux de cette recomposition / complexification pour les métiers de l’information documentation ?

1.1.2.2 Les enjeux de la complexification du document pour les métiers de l’information documentation

Ils sont au moins doubles.

Le premier enjeu est la nécessité de mieux cerner le périmètre évolutif de l’objet documentaire pour pouvoir le décrire. Il nous faut donc d’autres termes pour mieux traduire ces frontières mouvantes.

Pour exprimer le primat du contenu sur le support, on préfèrera utiliser le terme d’unité documentaire.

L’unité documentaire ou entité documentaire -son intitulé dans le monde du records management-

est un « document, collection ou partie de document, quel qu’en soit le support, formant une unité indépendante d’un point de vue bibliographique.»5

L’entité documentaire s’attache à ce que l’on indexe et que l’on recherche par opposition aux unités de gestion (ce que l’on stocke, ce que l’on manipule).

Le second enjeu de l’évolution des techniques d’écriture (la dernière en date étant le numérique) est de pouvoir attacher un document à une trace, de stabiliser un contenu, d’identifier l’objet documentaire (ou plutôt son fragment, l’objet de données). En effet, les identifiants traditionnels (ISBN / ISSN/ …) se rapportaient à une entité physique. Mais comment pourra-t-on identifier une unité d’information qui devient indépendante d’un support, dématérialisée ?

Parallèlement aux évolutions technologiques, la terminologie a dû évoluer : on passe progressivement de l’appellation de « document » à celle de « document en ligne » puis à celle de

« ressource ».