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PARTIE III LES APPORTS DE LA GÉNOMIQUE ET DE LA METAGÉNOMIQUE EN

III.3. L’entrée dans l’ère de la métagénomique ciblée

III.3.3 Apports de la métagénomique ciblée

III.3.3.3. Diversité et fonction

De nombreuses études de SCG ont permis le couplage entre information phylogénétique et certains marqueurs métaboliques. Swan et collaborateurs ont ainsi mis pu attribuer un métabolisme chimiolithoautotrophe à des protéobactéries incultivées constituant une faction importante de la biomasse de l'océan mésopélagique (Swan et al., 2011). La découverte de tels métabolismes dans ces écosystèmes suggèrent un rôle important de ces organismes dans les cycles biogéochimiques globaux, notamment celui du carbone (Swan et al., 2011). L’absence d’ADN plastidial ou de gènes plastidiaux nucléaires a démontré que les picobiliphytes étaient en réalité hétérotrophes, expliquant ainsi leur position phylogénétique singulière par rapport aux autres lignées eucaryotes phytoplanctoniques originellement décrites (Not et al., 2007; Yoon et al., 2011).

La présence de gènes de protéorhodopsine a été confirmée au sein des différentes lignées marines bactériennes comme les flavobactéries et les γ-protéobactéries du clade SAR86 (Stepanauskas et Sieracki, 2007; Woyke et al., 2009; Dupont et al., 2012; Rusch et al., 2013). Une autre forme de rhodopsine a quant à elle été révelée au sein des génomes d’Actinobactéries, bactéries dominant les communautés bactériennes d’eau douce (Martinez-Garcia et al., 2011b; Garcia et al., 2013). Les β-proteobactéries du genre Polynucleobacter possèdent quant à elles les gènes impliqués dans la biosynthèse de bactériochlorophylle a (Martinez-Garcia et al., 2011b).

Les écotypes HLIII et HLIV de Prochlorococccus ne possèdent aucun représentant en culture et les connaissances sur les capacités métaboliques de ces cellules restent à ce jour limitées. Récemment, des gènes codant pour des sidérophores du fer ont été mis en evidence au sein de génomes très partiels de Prochlorococcus du clade HLIV, et pourraient expliquer le succès écologique de ces derniers dans les régions riches en nutriments mais pauvres en Chl car limitées en fer (zones HNLC; Rusch et al., 2010; Malmstrom et al., 2013). Notons par ailleurs qu’une région hypervariable contenant des gènes impliqués dans la modification de la paroi cellulaire, similaire à celles retrouvées chez les deux Synechococcus marins WH8102 et CC9605, ont été identifiés au sein du génome d'un représentant du sous-groupe III de SAR86 (Rusch et al., 2013). Ces gènes sont probablement impliqués dans les interactions avec les phages ou les brouteurs (Palenik et al., 2003; Palenik et al., 2006).

OBJECTIFS

La compétition pour la lumière a conduit au développement d'une grande variété de pigments et protéines chromophorylées au sein de la radiation des Synechococcus marins. A ce jour, les études génomiques et physiologiques, notamment celles menées sur des souches en culture au sein de mon équipe d'accueil, ont permis de définir six types pigmentaires (Fig. 30). Cette diversité phénotypique, qui semble assez unique pour un groupe phylogénétiquement aussi restreint, pourrait expliquer la capacité des membres de ce genre à coloniser un grand nombre de niches lumineuses distinctes. Synechococcus est en effet retrouvé dans des environnements marins très divers, depuis les milieux eutrophes estuariens jusqu'à l'océan ouvert oligotrophe, où les conditions lumineuses varient largement, aussi bien d'un point de vue qualitatif que quantitatif. De plus, des études préliminaires menées in situ, utilisant des techniques basées sur l'étude des propriétés de fluorescence des cellules de Synechococcus, ont en effet suggéré que la pigmentation pourrait avoir un rôle sur la structure de ces communautés picoplanctoniques (Olson et al., 1988, 1990b; Wood et al., 1998). Néanmoins, contrairement à Prochlorococcus, les facteurs environnementaux affectant la structure des communautés de Synechococcus reste largement méconnus.

Les principaux objectifs de cette thèse ont été d'accroître les connaissances sur la diversité pigmentaire de Synechococcus afin de répondre aux questions suivantes :

Quelle est l'étendue de la diversité pigmentaire présente dans le milieu naturel et quels sont

les patrons de distribution de ces types pigmentaires ?

 Existe-t'il une diversité génétique et phénotypique au sein des souches en culture capables d'AC4 ?

 Quels sont les processus évolutifs associés à ce processus physiologique ?

Pour répondre à ces questions, différentes approches (génomique, métagénomique, physiologique) ont été utilisées au cours de cette thèse afin de d'étendre les travaux précédemment réalisés par l'équipe (Everroad et al., 2006; Six et al., 2007), à un nombre beaucoup plus grand de souches en culture ainsi qu'au milieu naturel.

Afin d'étudier la diversité et la distribution des différents types pigmentaires dans l'environnement marin, le premier objectif de cette thèse a été de développer une approche de métagénomique originale, combinant la cytométrie en flux, l'amplification de génomes complets ainsi que la fabrication de banques fosmidiques (voir Chapitre II). Elle nous a permis de cibler spécifiquement la région génomique PBS, où se situe la majorité des gènes impliqués dans la biosynthèse et la régulation des bras des PBS (voir §II.2.5). L'étude des gènes de cette région, dont la taille varie de 8.5 Kpb à 28.5 Kpb, permet en effet de déterminer le type pigmentaire des cellules sans aucune connaissance préalable de leurs propriétés spectrales et en s'affranchissant des méthodes culturales qui fournissent bien souvent une vision biaisée de la diversité existant dans le milieu naturel. Notre approche a été appliquée à différents échantillons provenant de divers environnements océaniques, dans le but (à terme) de séquencer environ 200 régions PBS.

Parmi les différents types pigmentaires de Synechococcus, certaines cellules sont capables de s'acclimater aux conditions fluctuantes de la qualité de lumière dans l'environnement marin par un processus appelé AC4. Ce phénomène a été beaucoup moins étudié que les processus d'AC de type II et III retrouvés chez les cyanobactéries d'eau douce et qui impliquent des mécanismes très différents (voir Chapitre I §II.3.2 et II.3.3). Au cours de cette thèse, j'ai participé à la purification et au séquençage complet de 25 nouvelles souches de Synechococcus, incluant notamment un certain nombre de souches capables d'AC4, dans le cadre des projets Génoscope METASYN et ANR PELICAN. Les régions PBS de ces différents génomes ont été annotées et des comparaisons génomiques, décrites dans le chapitre III, ont été menées afin d'identifier (1) les gènes impliqués dans ce processus physiologique et (2) de proposer des hypothèses quant aux processus évolutifs associés et (3) d'appréhender les conséquences d'un tel mécanisme sur la distribution des différentes lignées de

Synechococcus. Enfin des caractérisations physiologiques de souches en cultures représentatives des

différents génotypes ont été menées afin (4) d'évaluer la diversité phénotypique associée au processus d'AC4.

Les différents résultats obtenus au cours de cette thèse ainsi que les perspectives de recherche seront discutés dans le chapitre IV.

CHAPITRE II

ROLE DE LA DIVERSITÉ

PIGMENTAIRE DANS

L’ADAPTATION A LA NICHE

Article I : DIVERSITÉ, ABONDANCE ET DISTRIBUTION