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Chapitre 1 : Synthèse bibliographique

2. L’écosystème mangrove

2.2. Composition de l’écosystème mangrove

2.2.1. Compartiment végétation

2.2.1.1. Diversité des espèces végétales de mangrove

2.2. Composition de l’écosystème mangrove

2.2.1. Compartiment végétation

2.2.1.1. Diversité des espèces végétales de mangrove

La distribution des espèces végétales de mangroves se répartit en deux aires biogéographiques, de composition et de richesse différente : l’aire Indo-Pacifique-Ouest ou l’aire orientale et l’aire Atlantique-Pacifique-Est ou l’aire occidentale (Figure 8). L’aire orientale, avec une soixantaine d’espèces différentes (50 espèces dites « vraies », qui ne sont présentes que dans les écosystèmes mangrove) s’étend de l’Afrique de l’Est, en passant par l’Asie, jusqu’aux îles du Pacifique Ouest et l’aire occidentale avec seulement une dizaine d’espèces différentes (8 espèces vraies) comprend les Amériques, l’Afrique centrale et de l’Ouest (Hoekstra et al., 2010; Tomlinson, 2016).

Figure 8. Répartition mondiale des espèces végétales de mangrove appartenant aux deux aires biogéographiques : l’aire orientale (Indo-Pacifique-Ouest) et l’aire occidentale (Atlantique-Pacifique-Est). Le gradient de couleur indique la richesse des espèces végétales dans le monde (Fromard et al., 2018).

D’après la carte, le centre global de biodiversité se situe clairement en Asie du Sud et du Sud-Est, quelques zones minoritaires fortement diversifiées se distinguent également dans l’Ouest de l’Océan Indien (près de Madagascar) et dans le sud de l’Amérique centrale (près du Costa Rica). Globalement la diversité en mangrove diminue en s’éloignant des tropiques. Il n’existe pas de chevauchement entre les deux aires biogéographiques, la dispersion des espèces entre les deux zones de mangroves est limitée par des barrières terrestres (continent africain) et de

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grandes étendues d’eaux (Océan Pacifique). Seuls les trois genres Avicennia, Rhizophora et

Acrostichum sont partagés entre les deux aires biogéographiques et une seule espèce végétale est commune aux deux régions, il s’agit d’une fougère de mangrove nommée Acrostichum aureum (Duke, 2006).

Les espèces végétales trouvées en mangrove n’ont aucun lien phylogénétique entre elles ; elles forment seulement un groupe écologique constitué de 20 familles taxonomiques différentes (Tableau 2).

Tableau 2. Répartition mondiale des 73 espèces végétales de mangrove et hybrides séparés par famille entre l’aire biogéographique Indo-Pacifique-Ouest et l’aire biogéographique Atlantique-Pacifique-Est (Spalding et al., 1997, 2010; Duke, 2006). Les espèces majoritaires en mangrove sont représentées en gras.

Espèces de l'aire Indo-Pacifique Ouest

Famille Espèce Famille Espèce

Acanthaceae Acanthus ebracteatus Rhizophoraceae Bruguiera cylindrica

Acanthus ilicifolius

Bruguiera exaristata

Arecaceae Nypa fruticans

Bruguiera gymnorhiza

Avicenniaceae Avicennia alba

Bruguiera hainesii Avicennia integra Bruguiera parviflora Avicennia marina Bruguiera sexangula Avicennia officinalis Bruguiera x rhynchopetala Avicennia rumphiana Ceriops australis

Bignoniaceae Dolichandrone spathacea

Ceriops decandra

Bombacaceae Camptostemon philippinense

Ceriops tagal

Camptostemon schultzii

Kandelia candel

Caesalpiniaceae Cynometra iripa

Kandelia obovata

Combretaceae Lumnitzera littorea

Rhizophora apiculata Lumnitzera racemosa Rhizophora mucronata Lumnitzera x rosea Rhizophora samoensis

Ebenaceae Diospyros littorea

Rhizophora stylosa

Euphorbiaceae Excoecaria agallocha

Rhizophora x lamarckii

Excoecaria indica

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Lythraceae Pemphis acidula Rhizophora x selala

Meliaceae Aglaia cucullata Rubiaceae Scyphiphora hydrophylacea

Xylocarpus granatum Sonneratiaceaea Sonneratia alba

Xylocarpus moluccensis Sonneratia apetala

Myrsinaceae Aegiceras corniculatum Sonneratia caseolaris

Aegiceras floridum Sonneratia griffithii

Myrtaceae Osbornia octodonta Sonneratia lanceolata

Plumbaginaceae Aegialitis annulata Sonneratia ovata

Aegialitis rotundifolia

Sonneratia x gulngai

Pteridaceae Acrostichum aureum

Sonneratia x hainanensis Acrostichum danaeifolium Sonneratia x urama

Acrostichum speciosum Sterculiaceae Heritiera fomes

Heritiera globosa

Heritiera littoralis

Espèces de l'aire Atlantique-Pacifique-Est

Famille Espèce Famille Espèce

Avicenniaceae Avicennia bicolor Pellicieraceae Pelliciera rhizophorae

Avicennia germinans Preridaceae Acrostichum aureum

Avicennia schaueriana Rhizophoraceae Rhizophora mangle

Bignoniaceae Tabebuia palustris Rhizophora racemosa

Caesalpiniaceae Mora oleifera

Rhizophora x harrisonii

Combretaceae Conocarpus erectus

Laguncularia racemosa

Les mangroves sont composées d’espèces d’arbres, les palétuviers, d’arbustes, de buissons, de quelques fougères et d’une seule espèce de palmier. Les palétuviers les plus abondants et les plus représentatifs de l’écosystème mangroves appartiennent au genre Rhizophora, et sont fréquemment appelés les palétuviers rouges. Ils sont caractérisés par des racines échasses qui symbolisent les mangroves (Figure 9). Une dizaine d’espèces différentes sont recensées dans ce genre, dont certaines telles que Rhizophora apiculata, R. mucronata, R. stylosa et R. mangle

occupent les aires de répartition mondiale les plus étendues (Spalding et al., 2010). L’espèce R. mangle est particulièrement suivie pour ses capacités de développement dans des zones de reconstruction de mangrove où cette espèce est plantée dans le but de stabiliser les côtes

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sédimentaires. Peu d’espèces dites introduites peuvent se stabiliser et se propager aussi efficacement (Allen, 1998). Le genre Rhizophora est représenté sur l’ensemble des continents et dans la quasi-totalité des mangroves. Ces arbres atteignent généralement des hauteurs entre 4 et 10 m (Floride, Mexique, Kenya, Madagascar, Thaïlande, Sri-Lanka) mais dans des mangroves anciennes bien conservées, ils peuvent atteindre jusqu’à 29 m de hauteur (Malaisie, Indonésie, Guyane française) (Komiyama et al., 2008).

Figure 9. Exemples de structures racinaires de palétuviers : pneumatophores d’un spécimen d’Avicennia marina (A), racines échasses de Rhizophora mucronata (B), racines genouillées d’un Ceriops tagal (C).

Le genre Avicennia constitue le second genre de palétuvier le plus représenté dans la quasi-totalité des mangroves. Les Avicennia sont communément appelés « palétuviers gris » ou « palétuviers blancs » en raison de la couleur blanchâtre (cristaux de sel) de la face inférieure de leurs feuilles. Ces arbres sont caractérisés par des formations racinaires particulières appelées pneumatophores (Figure 9). Les espèces occupant le plus de surface sur le globe sont

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Avicennia officinalis, A. germinans et A. marina (Spalding et al., 2010). Ces palétuviers sont en moyenne légèrement plus petits en hauteur que les palétuviers du genre Rhizophora mais ils peuvent atteindre cependant des hauteurs entre 16 et 22 m dans des mangroves australiennes, mexicaines et guyanaises (Komiyama et al., 2008). Ces arbres sont présents à la fois dans la zone de mangrove la plus proche des terres et dans la zone du front de mer. Lorsque les conditions environnementales deviennent extrêmement arides comme sur les côtes de la Mer Rouge ou du Golfe Persique, seulement quelques espèces telles que A. marina survivent sous des formes buissonnantes.

Enfin les genres Bruguiera (dont l’espèce Bruguiera gymnorhyza est la plus répandue) et

Sonneratia (dont les espèces Sonneratia alba et S. apetala sont les plus répandues) rassemblent les autres genres majoritaires dans le monde. Ils ne sont présents que dans l’aire Indo-Pacifique-Ouest. Les Bruguiera peuvent atteindre une vingtaine de mètres dans les mangroves d’Indonésie et sont caractérisés par des racines « genouillées » (Figure 9). Quant aux

Sonneratia, comme les Avicennia, ils développent des pneumatophores mais à la différence avec les Avicennia, ils ne sont pas présents en arrière mangrove mais uniquement en bordure de mangrove du côté du front de mer (Spalding et al., 2010).

La dispersion des espèces végétales entre les différentes mangroves est possible grâce à la capacité de viviparité de certains palétuviers (Rhizophora, Bruguiera, Ceriops). Lors de la germination, le futur embryon est formé dans la graine pendant que le fruit est encore sur l’arbre. La graine, appelée propagule est une structure semi-autonome capable de photosynthèse qui se détache de la plante une fois fonctionnelle et formera une régénération puis un nouvel arbre (Rabinowitz, 1978). La dispersion des espèces de palétuviers dépend alors du type de propagules (graines, gousses, hypocotyles), de leur durée de survie dans la mer, de leur potentiel de flottabilité et de leur résistance à la dessiccation. Elles sont transportées par les courants marins et océaniques, parfois sur de longues distances (Nettel et Dodd, 2007). Les genres

Avicennia et Rhizophora doivent leur large dispersion dans le monde en raison d’une longévité élevée de leurs propagules dans la mer. En effet, la durée de survie est de 3-4 mois pour les

Rhizophora et de 3-4 semaines pour les Avicennia (Rabinowitz, 1978). La viabilité des propagules peut être altérée par les courants à la surface de l’eau, les températures froides et la disponibilité des habitats adaptés à leur implantation et leur germination (Duke, 2006).

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