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Dispositifs de distribution et de recapitalisation

Dans le document LES FINANCES DES BANQUES CENTRALES (Page 41-44)

Un dernier facteur qui influe sur la dynamique de la solidité financière d’une banque centrale est le mécanisme utilisé pour déterminer la part de revenu (comptable) distribuable aux actionnaires ou au propriétaire effectif, et la part qui vient s’ajouter aux réserves de la banque centrale (graphique 1). En principe, de tels mécanismes de distribution peuvent autoriser les dividendes négatifs, ce qui veut dire que de l’argent frais peut être injecté par le propriétaire effectif. La présente section porte donc sur les dispositifs à la fois de distribution et de recapitalisation.

Les dispositifs de distribution peuvent être basés sur des règles établies ou reposer sur des décisions discrétionnaires à prendre par la banque centrale, par les actionnaires ou conjointement par la banque centrale et les actionnaires. Les dispositifs fondés sur des règles relèvent de quatre catégories, qui ne doivent pas nécessairement toutes être présentes en même temps : capacité de mobiliser des ressources externes si des dividendes négatifs sont requis ; objectifs de réserves (appelés aussi objectifs de fonds propres) ; mécanismes de rétention ; et dispositifs de lissage des dividendes.

La question importante pour la dynamique du dispositif de distribution est de savoir dans quelle mesure la rétention des excédents dépend de la position financière de la banque centrale. Les dispositifs qui exigent une distribution même lorsque les fonds propres sont peu élevés ou négatifs peuvent donner lieu à une asymétrie ; ceux qui prévoient des distributions fortement conditionnées par l’état des finances sont dotés d’un mécanisme intégré destiné à corriger une telle asymétrie.

Les deux premières catégories de dispositifs basés sur des règles (capacité de mobiliser de nouvelles ressources et utilisation d’objectifs) sont conditionnelles par nature mais, selon leurs caractéristiques, elles peuvent être lentes ou rapides à produire des effets. Il peut sembler étrange d’envisager le versement de dividendes comme s’il n’était pas fondamentalement conditionnel. Après tout, pour les entités commerciales, l’aspect essentiel qui distingue les dividendes des obligations au titre du service de la dette est le fait qu’ils dépendent de la santé financière de l’entité. Pourtant, dans nombre de cas, la loi ou l’usage ne ménage que peu ou pas de marge à la banque centrale pour conserver les excédents même lorsque les fonds propres sont déjà négatifs.

 La Banque d’Angleterre est tenue de distribuer au Trésor public 100 % de tout excédent du département d’émission et 50 % de tout excédent du département bancaire, quel que soit le niveau de ses réserves de fonds propres.

 La Banque centrale d’Irlande ne peut conserver qu’un maximum de 20 % de l’excédent, indépendamment du niveau de ses fonds propres47.

 Ayant calculé le revenu distribuable de façon à lisser le revenu comptable sur cinq ans (corrigé de certains revenus de réévaluation), la Banque de Suède doit en distribuer 80 % quelle que soit la situation de ses fonds propres.

 La Banque du Japon ne peut conserver de plein droit que 5 % de l’excédent. Elle peut toutefois en garder davantage avec l’autorisation du ministre des Finances.

Pour illustrer la gamme des dispositifs de distribution utilisés, la présente analyse recense ceux qui sont codifiés dans les lois et textes d’application pour 16 banques centrales, avec une attention spéciale pour la présence de caractéristiques qui renforcent la solidité financière de chaque banque centrale. L’influence de ces caractéristiques a en outre été appréciée de manière subjective. Ainsi, les dispositifs de distribution assortis d’objectifs substantiels en matière de fonds propres ont été placés en tête, suivis de ceux dotés d’objectifs mineurs (ou d’objectifs simplement non négatifs), puis de ceux qui sont dépourvus d’objectifs (surtout dans les cas où un certain niveau de distribution est obligatoire). Les dispositifs qui laissent la banque centrale décider des distributions ont été classés devant ceux qui privilégient la négociation concertée, eux-mêmes classés devant ceux qui rendent un certain niveau de distribution obligatoire ou le laissent à la discrétion des actionnaires. La faculté de conserver une grande partie, ou la totalité, de l’excédent s’est vu attribuer un rang de classement supérieur à celle de stipuler un plafonnement du montant non distribué. Enfin, l’aptitude à mobiliser de nouvelles ressources auprès des actionnaires pour absorber la perte de l’exercice a reçu un score très élevé. Aucun cas de recapitalisation automatique et intégrale n’a été répertorié ; s’il y en avait eu un, il aurait été classé encore plus haut, car il s’agit d’un mécanisme de protection de la solidité financière par apport d’argent frais48.

Le tableau A5 de l’annexe 2 présente les données de départ de cette évaluation. Le graphique 7, qui regroupe toutes ces caractéristiques, montre le résultat d’une manière délibérément floue. Plus les caractéristiques qui favorisent la rétention des ressources financières sont nombreuses, plus leur influence est grande, et plus la barre est longue. Une telle évaluation étant nécessairement subjective, des ombres et des lignes de démarcation diffuses ont été utilisées pour souligner que ces propriétés ne se prêtent pas à des mesures précises. Certaines caractéristiques de l’évaluation sont données ci­après :

 les dispositifs de distribution varient énormément eu égard à l’ampleur et à l’influence des caractéristiques qui confèrent la solidité financière – ou l’empêchent de se dégrader en présence de revenus volatils (pour une analyse des asymétries de distribution, voir la partie C.3).

47 Une telle situation est susceptible de rendre les dispositifs formels incompatibles avec le Rapport de 2012 sur la convergence qui stipule que « ...l’indépendance financière implique également que la BCN soit suffisamment capitalisée. En particulier, il convient d’éviter toute situation dans laquelle le capital de la BCN serait inférieur au niveau de son capital statutaire, voire négatif, pendant une période prolongée, y compris dans le cas où les pertes dépassant le niveau du capital et les réserves sont reportées » et que « Les bénéfices ne peuvent être versés au budget de l’État qu’une fois que toutes les pertes accumulées au cours des années précédentes ont été couvertes et que toutes les provisions financières jugées utiles afin de préserver la valeur réelle du capital et des actifs de la BCN ont été constituées ».

48 La possibilité, pour la Banque de Corée, de faire appel au budget de l’État pour couvrir les pertes d’un exercice si elles dépassent les réserves est un mécanisme très proche de ce cas, et a donc été placé très haut sur l’échelle.

 Les objectifs de fonds propres sont présents dans environ la moitié de l’échantillon, mais ils sont souvent implicites. Certains visent simplement à ce que les réserves générales ne soient pas négatives : quand elles le deviennent, une part d’excédent plus grande qu’à la normale peut être conservée (la Banque du Mexique en étant un exemple parmi plusieurs autres). D’autres ont trait aux fonds propres de base. Par exemple, une mesure de transition permet à la Banque centrale du Chili de conserver la totalité de ses excédents jusqu’à ce que les fonds propres reviennent au niveau initial obligatoire (indexé pour compenser les effets de l’inflation). La Fed a, quant à elle, un objectif de fonds propres, de faible dimension, qui est indexé sur les actifs des actionnaires (banques membres).

 Rares sont les banques centrales qui ont des objectifs substantiels pour le total ou les principales composantes des fonds propres. La Banque nationale suisse en fait partie. Un excédent sert en premier lieu à financer les réserves (« provision pour réserves monétaires ») selon une formule définie par le Conseil de la BNS. La dotation annuelle aux provisions est calculée en fonction du taux Composantes des règles de distribution

Évaluées à partir d’un indice notionnel de soutien à la solidité financière Graphique 7

Source : Évaluation des services de la BRI

Utilisation possible d’une part de l’excédent pour atteindre l’objectif Rétention : automatique ou sur décision de la BC

Décisions conjointes

Pouvoir discrétionnaire effectif Lissage de la distribution Autre

de croissance moyen du PIB nominal. Le niveau de l’objectif qui en résulte s’inscrivait dans la fourchette 15-30 % des actifs, jusqu’à la dernière hausse de la taille de l’actif49.

 Quand le seuil de déclenchement est atteint, l’excédent qui est disponible pour atteindre l’objectif est généralement d’un montant très élevé, et il est souvent utilisé intégralement. Mais ce n’est pas toujours le cas. Parfois, les fonds en réserve pour réaliser l’objectif sont limités à un certain pourcentage (20 %, par exemple) de l’excédent disponible.

 La faculté de mobiliser des ressources externes est rare – seules deux banques centrales (dont la BCE) ont cette possibilité en cas de pertes.

 Les pourcentages de rétention standard sont généralement faibles (par exemple, moins de 10 % de l’excédent distribuable). Il est courant que les décisions soient prises conjointement par la banque centrale et les actionnaires.

Dans le document LES FINANCES DES BANQUES CENTRALES (Page 41-44)